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  • François Bayrou et l'heure de vérité de l'Europe

    « Nous sommes parvenus à l’heure de vérité, où nous devons dire non seulement ce que nous allons faire, mais aussi ce que nous sommes. J’ai souvent affirmé que la question qui se posait à l’Europe était celle du dramaturge : To be or not to be, être ou ne pas être. » (François Bayrou, le 4 mars 2025 au Sénat).



     


    Le Premier Ministre François Bayrou a fait une déclaration au Sénat le mardi 4 mars 2025 sur la situation en Ukraine et la souveraineté militaire de l'Europe. Il l'a faite dans le cadre très institutionnel de l'article 50-1 de la Constitution à la suite de sa déclaration à l'Assemblée Nationale la veille.

    On aurait pu imaginer, comme pour les déclarations de politique générale, que le chef du gouvernement répétât à peu près son discours de la veille. Mais une différence majeure est survenue entre-temps : Donald Trump a brutalement suspendu l'aide militaire américaine à la résistance de l'Ukraine, si bien que l'Europe commence à comprendre l'importance stratégique et l'urgence de ne plus dépendre des États-Unis pour sa défense : « Cette situation, vous le savez, évolue d’heure en heure et nous place devant des responsabilités et face à des rendez-vous que nous ne pouvons pas éluder. ».

    Sur la forme, François Bayrou était encore plus à l'aise que la veille à l'Assemblée. Il n'a pratiquement pas lu ses notes et a fait sa déclaration directement en regardant les sénateurs dans les yeux. Ce sujet de l'Europe et de sa souveraineté de défense est l'un des points forts des convictions démocrates chrétiennes de François Bayrou. En tant qu'acteur majeur de l'exécutif d'un des plus grands pays européens, il est donc en posture d'influer sur le sens des événements.

    Ses premiers mots étaient pour le peuple ukrainien qui souffre sous les bombes poutiennes : « Cela a été très douloureux et, pour beaucoup de nos concitoyens, voir ainsi abandonnée, y compris dans le langage et le raisonnement, la solidarité avec l’Ukraine, a été une prise de conscience, l’Ukraine qui se bat pour sa survie et pour nos principes de droit. Ces combats, ce sont déjà 100 000 morts, des centaines de milliers de blessés, et, on a peine à l’évoquer dans un discours officiel, 20 000 enfants qui ont été déplacés pour que soit changée, par l’influence, leur identité ukrainienne, pour qu’elle soit abandonnée. Cette déportation est, pour nous, un crime contre l’humanité. Enfin, des centaines de milliers d’Ukrainiens, de femmes et d’hommes, ont été déracinés. Au fond, ils sont le visage de tout un peuple qui souffre. (…) Je l’ai dit devant l’Assemblée Nationale hier, et je veux dire devant le Sénat aujourd’hui à quel point nous avons été admiratifs et nous nous sommes sentis solidaires du Président Zelensky au regard de l’attitude qu’il a eue, refusant de plier devant l’intimidation. À cet instant, il a été le visage de l’Ukraine, le défenseur de l’honneur de la démocratie, et il portait en même temps une partie de notre honneur européen. Le Président Zelensky a honoré la mission qui est la sienne. Nous nous sommes sentis profondément solidaires de son refus de se plier à ces injonctions. ».


     


    Puis, il a développé les errements de la diplomatie de Donald Trump : « Au début, nous avons donc cru que ce n’étaient que des rodomontades. Ensuite, nous nous sommes aperçus qu’il arrive très souvent, avec ce type de responsabilités politiques, avec ce type d’outrances et avec ce type de transgressions, que les rodomontades se transforment en actes. Et nous avons vu, très vite, un changement incroyablement inquiétant et extrêmement profond de la diplomatie américaine, puisque la semaine dernière, aux Nations unies, les États-Unis ont voté avec la Russie et la Corée du Nord pour repousser une résolution dans laquelle était mentionnée la responsabilité de la Fédération de Russie dans la tentative d’annexion de l’Ukraine. Que les États-Unis refusent de nommer l’agression dont l’Ukraine est victime a été, pour beaucoup d’entre nous, une prise de conscience. Il y a eu ensuite l’agression dans le Bureau ovale et les mots que le Président Trump a utilisés. Je vous rappelle la phrase la plus significative : "Trouvez un accord avec Poutine ; autrement, nous vous laisserons tomber". Une nation indépendante, souveraine, soumise à la pire des menaces, une menace sur son existence même, et qui est abandonnée par le pays qui fut le leader de l’alliance des libertés : cela est, pour beaucoup d’entre nous, extrêmement violent. ».


     


    Et de reprendre la belle formule de Gabriel Attal dite la veille à l'Assemblée : « Au fond, la question se résume assez simplement : si la Russie arrête les combats, c’est la guerre qui s’arrête ; si l’Ukraine arrête les combats, c’est l’Ukraine qui disparaît. Cette réalité si lourde et si choquante, il est très important qu’elle soit rappelée aujourd’hui, devant le Sénat de la République. Enfin, cette nuit, a été annoncée une décision que beaucoup redoutaient, mais dont chacun voit les implications : l’annonce selon laquelle les États-Unis stoppaient désormais les livraisons d’aide à l’Ukraine. Car le mot "suspension" ne trompe personne : la suspension, dans la guerre, de l’aide à un pays agressé, cela signifie qu’on abandonne celui-ci et qu’on accepte, ou qu’on souhaite, que son agresseur l’emporte. Pour la France, pour nous tous, pour les Européens et pour tous ceux qui sont attachés aux libertés et aux droits, pour ceux qui sont attachés à la Charte des Nations unies, par exemple, c’est évidemment tout à fait insupportable. ».


     


    La fin de l'ordre international est une catastrophe collective : « Je cite presque exactement la Charte des Nations unies : c’était le refus de la violence pour régler les conflits, c’était le droit du plus juste contre le droit du plus fort. C’est ce monde-là que nous avons abandonné pour entrer dans un autre monde où, au fond, les principes sont abandonnés. Et cet abandon des principes menace l’existence même des relations internationales telles que nous les avons voulues et construites. ».

     


    Selon François Bayrou, c'est à l'Europe de reprendre le flambeau du droit international et des valeurs : « Devant cette incroyable agression, cet abandon des principes et ce changement de l’ordre du monde, beaucoup d’entre nous, beaucoup de nos concitoyens, se trouvent désespérés. Mais le message et la vision du gouvernement, c’est que nous ne pouvons pas désespérer ! D’abord parce que nous sommes la France et que nous sommes l’Europe. Nous sommes l’Europe : cela signifie que, contrairement à ce que nous croyons ou à ce que nous laissons croire, nous sommes non pas faibles, mais forts, si nous comparons les capacités de l’Union Européenne et les capacités de la Russie, et même des États-Unis. L’Union Européenne compte 450 millions d’habitants, et même 520 millions en ajoutant la population du Royaume-Uni. La population russe, c’est 145 millions d’habitants. Comparons les PIB des deux ensembles : l’Union Européenne, c’est 17 000 milliards d’euros, contre quelque 2 000 milliards d’euros pour la Russie. Comparons les arsenaux : on découvrira alors que les armées européennes, c’est 2,6 millions de soldats, plus du double de ce que peut aligner la Fédération de Russie ; que nous disposons de 15 000 aéronefs, je parle sous le regard du ministre des armées, qui peut confirmer ces chiffres, contre 5 000 pour la Russie, et de 15 000 pièces d’artillerie, contre moins de 10 000 pour la Russie. Il n’y a donc pas de déséquilibre ! Simplement, cette force-là, nous ne la mobilisons pas, et nous ne savons pas qu’elle existe. Nos concitoyens pensent que nous sommes désarmés, mais je crois le contraire. ».

     


    Et le démocrate chrétien a cité De Gaulle : « J’ai en mémoire un événement de cet ordre qui exprime à peu près la même chose. Lorsqu’on avait proposé au Général De Gaulle, nouvellement élu Président de la République, de signer le Traité de Rome, une partie des siens qui ne voyaient pas d’un bon œil ce traité lui avait demandé d’y renoncer. Néanmoins, le Général De Gaulle a pris son stylo pour le signer et, en marge de cette proposition de renonciation au traité, a écrit de sa main : "Non. Les Français sont forts, mais ils ne le savent pas". Ce que le Général De Gaulle avait comme vision pour son peuple, ce peuple dont il avait la charge, nous devons l’avoir aussi pour l’Union Européenne. Nous avons une force que nous ignorons et c’est à l’influence de cette force que nous renonçons. Nous devons entreprendre un travail considérable afin que l’Union Européenne fasse sentir ce qu’elle est et fasse entendre ce que sont sa volonté et ses principes. ».

    D'abord, l'urgence : « L’arrêt des livraisons américaines a plusieurs conséquences (…) sur les forces armées ukrainiennes. (…) La responsabilité de l’Union Européenne et des pays amis de l’Ukraine, c’est d’être capables de se substituer le plus rapidement et le plus efficacement possible aux livraisons américaines, de manière que l’Ukraine ne soit pas contrainte de craquer. C’est un devoir de civilisation que nous avons à remplir. Cela implique de mobiliser nos moyens et nos stocks, nous devons donc trouver de l’argent, mais aussi tous ceux qui peuvent apporter leur aide à un pays qui se trouve devant une si grave menace militaire. ».


    Ensuite, la souveraineté européenne : « Nous sommes appelés à faire un choix fondamental à moyen terme : les Européens sont-ils prêts à assurer eux-mêmes la sécurité et la défense de l’Europe ? Je le disais, cette question pose celle de notre existence, purement et simplement. Même si cela peut sembler paradoxal, c’est le sujet sur lequel je suis tout à fait prêt à accepter que la vision du Président américain soit respectée. Aussi, nous devons nous préparer à cette éventualité. Je pense qu’une union aussi riche et capable en armement que la nôtre a le devoir d’assurer elle-même sa sécurité ; elle n’a pas à s’en remettre perpétuellement à d’autres. Les propos que je formule ici ne sont pas différents du message que la France a envoyé au fil des générations. Depuis le Général De Gaulle, et notamment depuis le début du mandat de l’actuel Président de la République, notre message a toujours été le même : l’avenir de la défense européenne, c’est en Europe qu’il se joue. Il nous appartient de dire et de savoir si nous voulons être fidèles à cette tradition française. ». En ce sens, François Bayrou a raison. Il y a une réelle convergence de vue entre Emmanuel Macron et Donald Trump : désengagement européen des États-Unis, réengagement des pays européens pour leur propre défense.


     


    Vouloir mettre en pratique la tradition française de l'indépendance militaire, c'est anticiper certaines conséquences : « La première d’entre elles est industrielle et technologique. Nous avons à construire la base industrielle et technologique de défenses (BITD) qui permettra d’équiper les forces de défense des pays de l’Union Européenne. Il ne s’agit pas de construire une armée européenne ; on sait que cette idée, qui a été à l’ordre du jour autrefois, est abandonnée depuis longtemps. Ce qu’il faut, c’est organiser, coordonner et rapprocher les armées européennes. Toutefois, la vérité oblige à dire que, aujourd’hui, les deux tiers des équipements des armées des pays de l’Union Européenne sont acquis auprès des États-Unis. Cela signifie, je le dis à voix basse, que ces équipements sont soumis, d’une manière technologiquement certaine, à l’approbation des États-Unis avant qu’ils ne soient utilisés. C’est aussi vrai pour les pays alliés en matière d’arme nucléaire et de vecteurs nucléaires. Le paysage ainsi dépeint ne peut que nous inviter à faire preuve de détermination. Au bout de ce chemin, si notre volonté s’affirme, nous serons en mesure de mutualiser nos armements, de renforcer l’interopérabilité et d’assurer nos stocks, sans lesquels il n’est pas possible de conduire une politique sérieuse de défense. Nous pourrons également profiter d’entraînements communs. Cette coalition des armées européennes, notamment grâce au partage de leurs avancées, constitue la clef de l’avenir. En ce qui concerne les avions, les blindés, les drones, les capacités de transport, la projection dans l’espace et le renseignement, nous sommes devant des responsabilités qui, de toute évidence, vont transformer notre manière d’être. C’est aussi vrai pour ce qui touche à l’espace : le système Galileo et le programme IRIS2 sont des éléments essentiels de notre indépendance. Cette transformation suppose de très grands investissements. Hier, la Présidente de la Commission Européenne, madame von der Leyen, a annoncé qu’elle envisageait d’autoriser les États s’engageant à investir dans l’équipement des armées à dépasser la limite de leur endettement public, soit 3% de leur PIB aux termes du pacte de stabilité et de croissance. Des instruments de prêts sont préparés et un appel à l’épargne a été lancé, notamment en direction de la Banque européenne d’investissement (BEI). ».

    Construire l'Europe selon la vision française : « Le rendez-vous que l’Europe a avec elle-même, au regard de l’idée qu’elle se fait de son avenir, est aussi le rendez-vous de la France avec elle-même. Cela fait plusieurs décennies que notre pays défend une certaine idée de l’Europe : une Europe libre, solidaire, indépendante. La France a sans cesse déployé le drapeau de cet idéal dans les rangs de l’Union Européenne. L’expression de cet idéal et de cette volonté politique est étroitement liée à la santé et au rayonnement de notre pays. Les questions qui se posent à nous, rétablir l’équilibre de nos finances, dégager de nouveaux moyens, définir des stratégies de développement sur le long terme en matière agricole, industrielle et intellectuelle, retrouver la capacité créatrice de notre pays et la confiance que nous devons avoir en nous-mêmes, sont directement liées à la capacité d’influence que la France peut avoir sur l’Europe en portant un projet à la fois national et européen. ».


    Au-delà de cet horizon européen à construire, François Bayrou compte aussi sur l'unité des Français autour de leur modèle social : « La France n’est pas qu’un projet économique, c’est aussi un pacte social. Tout cela pose la question fondamentale, principielle, de l’unité du pays. Si nous sommes unis, rien ne nous résistera, mais si nous continuons à cultiver les divisions auxquelles nous sommes tellement attachés, les obstacles qui se dressent devant nous finiront par se révéler insurmontables. (…) L’idée que nous nous faisons de la liberté, du droit et d’un monde équilibré, [repose] en partie sur la capacité de la France à se ressaisir elle-même de son destin. ».

     


    À la fin du débat au Sénat, le Premier Ministre a repris brièvement la parole, notamment pour donner un satisfecit aux sénateurs plus assidus que les députés : « J’observe d’ailleurs que nombre d’entre vous sont restés jusqu’au terme du débat pour participer à la réflexion. Ce n’est pas le cas dans toutes les assemblées… Je suis frappé de l’intérêt que vous avez accordé à cette déclaration du gouvernement et je mesure l’investissement de tous les groupes politiques, quels qu’ils soient. ».

    Et d'ajouter, très conscient de la responsabilité historique de tous les parlementaires d'aujourd'hui : « Chacun voit bien que nous vivons un moment historique. Pas un seul des orateurs qui se sont succédé n’a nié le fait que nous sommes en train de changer d’ère. Voilà quatre-vingts ans que nous vivions sur la base d’un certain nombre de principes, dans un cadre de réflexion aujourd’hui profondément dégradé. Nous tous, en tant que responsables politiques, avons pour mission de préparer l’avenir. Nous allons devoir remettre en cause notre manière de voir les choses et notre hiérarchie des priorités, tout simplement pour agir. Nos concitoyens, que vous représentez vous aussi, sont personnellement concernés par ce qui est en train de se passer. Nous ne pourrons, en aucun cas, nous dérober à cette réflexion et aux remises en cause qu’elle implique. Et, comme toujours, c’est devant l’opinion publique, dans la conscience des citoyens, que tout va se jouer. ».

    Parmi les sénateurs qui ont participé au débat (« qui se sont succédé »), le docteur Claude Malhuret, président du groupe Les Indépendants, République et Territoires, membre de Horizons, dont l'intervention a été transmise en vidéo dans les réseaux sociaux américains et est en train d'être vues par des millions voire des dizaines de millions d'Américains, surpris par le ton très piquant (« empereur incendiaire », « bouffon sous kétamine ») pour décrire la nouvelle administration Trump qui jouit actuellement d'une absence totale d'opposition politique (ah, au fait, voici la définition sur Wikipédia : « La kétamine est un psychotrope utilisé comme anesthésique injectable. Elle est aussi employée comme analgésique, sédatif, et en médecine vétérinaire. » ; Claude Malhuret reste avant tout un médecin).


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (04 mars 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    François Bayrou et l'heure de vérité de l'Europe.
    Gabriel Attal attaque Marine Le Pen sur l'Ukraine.
    Manuel Valls pour la paix, mais pas au prix de la fin de l'Ukraine !
    Claude Malhuret s'en prend à Néron et à son bouffon !
    Emmanuel Macron : la patrie a besoin de vous !
    Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron le 5 mars 2025 (texte intégral et vidéo).
    François Bayrou : la France avait raison !
    Ukraine : Trump, porte-parole de Poutine !
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    Conférence de presse du Président Emmanuel Macron lors de la Conférence de soutien à l'Ukraine le 26 février 2024 à l'Élysée (vidéos).
    2 ans de guerre en Ukraine : Poutine zéro en histoire !
    Amitié franco-ukrainienne : fake news et accord de coopération.
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    Sergueï Kirienko.
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    Poutine paiera pour les morts et la destruction de l’Ukraine.
    Ukraine en guerre : coming out de la Grande Russie.
    Robert Ménard, l’immigration et l’émotion humanitaire.
    Ukraine en guerre : Emmanuel Macron sur tous les fronts.
    Nous Européens, nous sommes tous des Ukrainiens !




     





    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250304-bayrou.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/europe/article/francois-bayrou-et-l-heure-de-259680

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/03/04/article-sr-20250304-bayrou.html


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  • Le candidat par intention Xavier Bertrand

    « Oui, j'en ai bien l'intention. Je n'ai pas changé d'ambition. » (3 février 2024 dans "Ouest-France").


     

     
     


    Remarquez, on pourrait intervertir les mots : "Oui, j'en ai bien l'ambition. Je n'ai pas changé d'intention". Son ambition est-elle intentionnelle ? Toujours est-il qu'il y a déjà beaucoup d'eau qui a coulé sous les ponts depuis cette interview de Xavier Bertrand, précisément un an et un mois et demi, des élections européennes, une dissolution, des élections législatives et pas moins de trois gouvernements, dont un censuré ! Xavier Bertrand fête son 60e anniversaire ce vendredi 21 mars 2025.

    C'est trop jeune pour la retraite, mais c'est déjà un âge canonique : il aura 62 ans en 2027, soit l'âge de Jacques Chirac à sa première élection à la Présidence de la République. Avec une petite différence : en 1995, Jacques Chirac avait déjà dans ses bagages deux candidatures à l'élection présidentielle, plus de quatre ans à Matignon, plus de vingt ans de chef d'un grand parti de gouvernement, sans compter dix-huit ans de maire de Paris, l'ENA, etc.

    Xavier Bertrand est sans doute moins "capé" : assureur picard, il a été élu conseiller général de l'Aisne de 1998 à 2002, député de l'Aisne de 2002 à 2016, maire de Saint-Quentin de 2010 à 2016, secrétaire général de l'UMP de janvier 2009 à novembre 2010, membre de cinq gouvernements sous Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy : Secrétaire d'État chargé de l'Assurance maladie du 31 mars 2004 au 31 mai 2005, Ministre de la Santé et des Solidarités du 2 juin 2005 au 26 mars 2007, Ministre du Travail, des Relations sociales et de la Solidarité du 18 mai 2007 au 15 janvier 2009 (avec la Famille à partir du 18 mars 2008), enfin, Ministre du Travail, de l'Emploi et de la Santé du 14 novembre 2010 au 10 mai 2012.
     

     
     


    Mais, ce qui le rend le plus fier, c'est d'avoir été élu en décembre 2015 et réélu en juin 2021 président du conseil régional des Hauts-de-France, réunion des régions Nord-Pas-de-Calais et Picardie, et à ce titre, adversaire direct de Marine Le Pen en 2015 sur le terrain régional autant que national.

    Celui qui s'amusait à faire à ses collègues des blagues de potaches à l'Assemblée est devenu un personnage grave du paysage politique français. Avec lui, tout est grave. Il se croit Président de la République mais il ne l'est pas. Il le voudrait bien mais s'en donne-t-il les moyens.
     

     
     


    En tout cas, il a raté de nombreux trains. Déjà pour être chef de l'UMP : en novembre 2012, la bataille a fait rage entre François Fillon et Jean-François Copé, et lui a préféré rester confortablement en arrière, pour compter les points. Il aurait pourtant pu être le troisième homme qui aurait surpris son monde. La présidence de l'UMP puis de LR a toujours été négligée, alors que contrôler un grand parti de gouvernement apporterait un avantage majeur dans une campagne présidentielle, son financement, ses réseaux, ses soutiens. Ainsi, il n'a pas voulu affronter Laurent Wauquiez en décembre 2017, il a même démissionné de LR, il n'a pas cherché à reprendre ce parti après sa déconfiture de 2019, ni en décembre 2022, et pas plus en mai 2025 ; il ne s'est pas présenté à la présidence de LR face à Laurent Wauquiez et Bruno Retailleau (le congrès aura lieu les 17 et 18 mai 2025).

     

     
     


    Pourtant, ce n'est pas les envies qui lui ont manqué. Tiens, Matignon, c'est un peu l'Arlésienne de Xavier Bertrand. Dès 2010, il était le premier-ministrable privilégié des post-gaullistes. En novembre 2010, François Fillon s'est accroché à Matignon, si bien que la place n'était pas libre. Après la victoire du Président Emmanuel Macron en mai 2017, ce dernier lui aurait proposé Matignon avant de le proposer à Édouard Philippe. L'opposition de Xavier Bertrand à Emmanuel Macron est une sorte de jeu de rôle peu convaincant. Il se dit de droite, mais la droite sociale, du gaullisme social. Cela ne veut pas dire grand-chose, mais ces mots sont attendus.

     

     
     


    Régulièrement, il était attendu chez les macronistes. Son poulain avait franchi le Rubicon dès 2017, Gérald Darmanin, devenu pour l'occasion un sérieux rival dont l'ambition est plus qu'une intention. En été 2024, l'absence totale de majorité a placé Xavier Bertrand parmi les favoris pour Matignon, à égalité avec Bernard Cazeneuve, avec un avantage, il ne remettrait pas en cause la réforme des retraites. Soutenu par Gérald Darmanin, Xavier Bertrand a même commencé à imaginer l'ossature de son futur gouvernement. Mais en vain.
     

     
     


    Alors, pourquoi n'a-t-il pas été nommé ? À cause d'un veto. Parce que la durée de vie de son gouvernement n'aurait pas dépassé quelques semaines. Le RN était prêt à voter la censure dès sa nomination en raison du contentieux personnel qui l'oppose à sa présidente. Michel Barnier a été nommé avec un préjugé moins négatif, mais il n'a finalement duré que trois mois. S'est alors reposée la question du Premier Ministre. François Bayrou voulait nommer Xavier Bertrand à la Justice, mais, là encore, le RN a annoncé que dans une telle configuration, il tirerait à vue avec une censure préventive. Finalement, c'est Gérald Darmanin qui est revenu aux affaires pour la Justice.

     

     
     


    Quant à Xavier Bertrand, son honneur en a pris un coup et malgré d'autres propositions de ministère de la part de François Bayrou, ce serait sans lui. Sur Twitter le 23 décembre 2024, il a lâché son amertume : « Le Premier Ministre m'a informé ce matin, contrairement à ce qu'il m'avait proposé hier, qu'il n'était plus en mesure de me confier la responsabilité du ministère de la justice en raison de l'opposition du Rassemblement national. (…) En dépit de ses nouvelles propositions, je refuse de participer à un gouvernement de la France formé avec l'aval de Marine Le Pen. ».

    Alors, en attendant de revenir aux affaires, Xavier Bertrand attend. Il ne sait qu'attendre. Déjà, il avait laissé sa chance passer en 2017, il n'a pas tenté de concurrencer les trois grands (Nicolas Sarkozy, Alain Juppé et François Fillon) à la primaire LR de novembre 2016. Et sa détermination à se présenter à l'élection présidentielle de 2022 quoi qu'il en coûtât était extrêmement forte. Après avoir refusé dans un premier temps, il a toutefois accepté d'affronter ses collègues de LR dans une primaire fermée en décembre 2021. Résultat, alors qu'il était le favori des sondages, il s'est fait surpasser par ses trois principaux concurrents, Michel Barnier, Éric Ciotti et Valérie Pécresse.

    Alors, on imagine aisément qu'on ne lui reprendra plus de participer à une primaire. Mais son train est parti depuis longtemps. À LR, le combat est désormais entre Bruno Retailleau et Laurent Wauquiez. Xavier Bertrand croit à ses chances pour 2027 parce qu'il se considère comme le meilleur rempart contre le RN et contre Marine Le Pen. Il peut au moins le dire par expérience, il a déjà battu concrètement Marine Le Pen, ce qui peu de ses rivaux peuvent dire.

     

     
     


    Dans l'interview publiée le 3 février 2024 dans "Ouest-France", Xavier Bertrand insistait : « Beaucoup aujourd'hui pensent déjà que 2027 sera le tour de Marine Le Pen. Pas moi ! Je suis convaincu qu'il n'y a pas une majorité de fachos dans notre pays, mais il y a une majorité de Français en colère. J'entends y répondre le moment venu. Donc non, en 2027, ça ne sera pas le tour de l'extrême droite. ». Il n'a pas osé poursuivre : en 2027, ce serait son tour. Le croit-il vraiment ?

    Pour ce faire, le 1er octobre 2022 à Saint-Quentin, il a lancé son propre parti politique, "Nous France" (je me demande vraiment ce qu'il y a dans la tête des communicants pour pondre de telles inepties comme noms de parti). À ma connaissance, il n'a pas refait de nouvelle réunion depuis deux ans et demi. C'est toute la différence avec Horizons, qui est un véritable parti, avec beaucoup d'élus, des maires, des parlementaires, et même deux groupes parlementaires, au Sénat et à l'Assemblée, le parti de l'ancien Premier Ministre Édouard Philippe qui s'est encore réuni en congrès le 16 mars 2025 à Lille.

     

     
     


    Car la question se pose encore cette fois-ci. Depuis quinze ans, Xavier Bertrand clame après chaque élection présidentielle qu'il sera candidat à l'élection présidentielle suivante, mais dans la réalité, il n'a encore jamais été candidat ! Or, comme il le dit, 2027 sera une élection où le candidat ou la candidate du RN serait en mesure de gagner. Pour éviter un second tour opposant Marine Le Pen à Jean-Luc Mélenchon, il serait de nature salutaire qu'un seul candidat du socle commun puisse affronter ces deux redoutables candidats populistes. Pas sûr que le ton obséquieux, la mollesse des convictions qui en ferait un François Hollande de droite, soient ce qu'il y a de mieux dans le magasin du socle commun.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (19 mars 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Qui croit encore en son avenir présidentiel ?
    Candidat à rien.
    Élections régionales de décembre 2015.
    Élections régionales de juin 2021.
    Xavier Bertrand.
    Bruno Retailleau.
    Nicolas Sarkozy.

    Jean-Louis Debré.
    Claude Malhuret.
    Philippe De Gaulle.
    François-Xavier Ortoli.
    Alain Juppé.
    Jean Tiberi.
    Édouard Philippe.
    Laurent Wauquiez.
    Aurore Bergé.
    Alain Peyrefitte.
    La sagesse inattendue de Jean-François Copé.
    Yvon Bourges.
    Christian Poncelet.
    René Capitant.
    Patrick Devedjian.

     


     

     
     





    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250321-xavier-bertrand.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/le-candidat-par-intention-xavier-259397

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/03/19/article-sr-20250321-xavier-bertrand.html


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  • Gabriel Attal attaque Marine Le Pen sur l'Ukraine

    « Ne cessons jamais de rappeler une chose simple : si la Russie arrête de se battre, il n’y a plus de guerre ; si l’Ukraine arrête de se battre, il n’y a plus d’Ukraine. » (Gabriel Attal, le 3 mars 2025 dans l'hémicycle).



     

     
     


    À l'occasion du débat parlementaire initié par le gouvernement sur la situation en Ukraine et la défense en Europe qui s'est tenu le lundi 3 mars 2025 dans l'hémicycle de l'Assemblée Nationale, un ancien Premier Ministre a répondu à la déclaration du Premier Ministre François Bayrou. En effet, l'actuel secrétaire général de Renaissance, Gabriel Attal, également président du groupe Renaissance (EPR) à l'Assemblée, le plus grand groupe du socle commun gouvernemental, a pris la parole au nom de son groupe pour participer au débat public sur l'Ukraine.

    Le sort de l'Ukraine est une préoccupation récurrente du jeune ancien Premier Ministre. Il s'y est rendu à l'occasion du troisième anniversaire de la guerre d'agression menée par Vladimir Poutine. Il a visité notamment à Zaporijjia, ville martyre, une école souterraine qui venait de s'ouvrir pour permettre aux enfants d'étudier en sécurité : « Rarement je n’ai ressenti autant d’espoir qu’en observant le sourire de ces jeunes, heureux de retrouver l’école pour la première fois depuis trois ans. J’ai vu l’espoir de cette jeunesse ukrainienne qui refuse de céder face à la fureur des bombes et continue à aller à l’école, à étudier, à vivre ; l’espoir d’une nation tout entière, qui vit comme un acte de résistance le fait de former de nouvelles générations de citoyens et de leur transmettre l’esprit critique qui est au fondement de nos démocraties. ».

    Rejetant la méthode brutale de Donald Trump et J. D. Vance, Gabriel Attal a soutenu très vivement le Président ukrainien Volodymyr Zelensky : « L’Ukraine n’a d’excuses à présenter à personne. Le peuple ukrainien ne mérite qu’une chose : le respect. Je tiens à rendre hommage avec vous à ces femmes et ces hommes qui refusent la fatalité, la défaite, qui refusent tout simplement de disparaître. Plus encore en revenant d’Ukraine, plus encore après les événements de ces derniers jours, je crois qu’il n’y a pas de question plus forte, plus existentielle, plus révélatrice aussi, que la position de chacun de nous sur le conflit en Ukraine. Plus forte, parce qu’il est clair que nous sommes à un point de bascule. Ce qui se joue en Ukraine, ce n’est pas seulement l’avenir d’un pays souverain : ce sont aussi les intérêts de la France et des Français qui sont en danger. ».


     

     
     


    Reprenant l'idée que l'Ukraine n'est pas le seul objectif de Vladimir Poutine, il a considéré que l'Europe était donc menacée : « Qu’on le veuille ou non, cette guerre nous concerne aussi, et de son issue dépendra une part de notre avenir. Si, pour certains, le simple fait de défendre une démocratie agressée ne suffit pas à vaincre les réticences, alors qu’ils pensent aux conséquences matérielles et sociales pour la France et les Français. Car oui, une victoire de la Russie aurait des conséquences dévastatrices, y compris pour nous. Je pense à notre approvisionnement en énergie, à notre accès aux céréales, au pouvoir d’achat des Français, qui seraient confrontés à une inflation puissance 10 ; je pense à des mouvements de populations sans précédent, ainsi qu’à la sécurité de l’Europe. Le coût d’une victoire de la Russie serait donc infiniment plus fort que ne l’est celui d’un soutien à l’Ukraine. Ce n’est pas une guerre lointaine qui se joue, c’est la vie quotidienne des Français qui est en première ligne. Je crois, ensuite, qu’il n’y a pas de question plus existentielle que l’avenir de ce conflit. La diplomatie est en danger de mort et elle pourrait être supplantée par un ordre mondial brutal, fondé sur la loi du plus fort et les instincts de prédation ; un ordre mondial vidé de son sens et de ses valeurs, où les démocraties libérales seraient incapables de se défendre ; un ordre mondial où les intérêts purement transactionnels auraient remplacé une communauté de valeurs et de destin. Car derrière l’Ukraine, c’est l’Europe qui est en danger. Que personne ne soit dupe : Vladimir Poutine ne cherche qu’à gagner du temps pour reprendre son souffle, face à une résistance ukrainienne qu’il ne parvient pas à étouffer. Mais l’appétit du Kremlin est insatiable, et personne ne doit douter que derrière l’Ukraine, il y a la Moldavie, la Roumanie, les États baltes, la Pologne, la Finlande, l’Union Européenne et l’OTAN. Le régime russe ne tient désormais que par et pour la guerre. ».

    Et de craindre l'effet domino : « Ce n’est pas seulement une affaire européenne : le monde entier regarde l’Ukraine. Si la loi du plus fort et la brutalité l’emportent impunément, qui sait quelles conséquences d’autres puissances pourraient en tirer ? Avec les brutes et les prédateurs, la faiblesse n’a jamais eu d’autre effet que de leur désigner leur prochaine victime. ».

    Le rôle de la France est alors essentiel : « La France, qui connaît trop bien le prix de la lâcheté et des paix de dupes, a une responsabilité. Je suis fier, monsieur le Premier Ministre, que votre gouvernement, après les précédents, fasse bloc autour de l’Ukraine. Je suis fier d’avoir défendu et fait adopter à cette tribune, il y a quelques mois, à la place qui est aujourd’hui la vôtre, un accord de sécurité historique entre la France et l’Ukraine. (…) Car ce conflit est aussi un grand révélateur. Ces dernières années, la France n’a jamais failli dans son soutien à l’Ukraine. (…) Nous n’avons jamais hésité une seconde, jamais flanché face à la tentation de la reddition et d’une paix bâclée, dont les Français seraient aussi victimes. Nous n’avons jamais failli, et nous étions bien seuls. Bien seuls quand d’autres refusaient de voter le soutien à l’Ukraine, ici comme au Parlement Européen. Bien seuls quand d’autres revendiquaient leur loyauté envers la Russie ou relativisaient la portée du conflit. Bien seuls face à la légèreté de ceux qui se moquent du destin de la France et de l’Europe, n’ont pas de problème à voir un leader démocratiquement élu insulté en direct et ne s’opposent pas à une victoire russe qui barrerait lourdement la route à l’avenir des Français. ».

     
     


    Le cœur de l'intervention de Gabriel Attal s'est alors porté sur la condamnation des extrémismes en France qui ont refusé, par leurs votes, de soutenir l'effort de résistance de l'Ukraine. Ce sujet a aussi un rôle de révélation des liens de certains Français avec des puissances étrangères : « Nous sommes dans un moment où le voile se déchire, où l’on s’aperçoit que l’instinct capitulard est en fait bien souvent un esprit de complicité. Nous avons déjà vécu tout cela. ».

    Et de s'en prendre clairement à Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon : « Madame Le Pen nous donne des conseils de géostratégie, alors même qu’elle proposait, pendant la campagne présidentielle de 2022, une alliance en matière de défense avec la Russie ; alors même qu’elle disait encore, quelques jours avant l’invasion russe, que ce pays n’envahirait jamais l’Ukraine ; alors même qu’elle estimait, comme Jean-Luc Mélenchon, que les Ukrainiens ne tiendraient ni trois jours ni trois semaines, et voilà trois ans qu’ils résistent héroïquement ! Tout à l’heure, madame Le Pen, quand l’ensemble de l’hémicycle s’est levé pour applaudir et saluer le courage du peuple ukrainien, le seul groupe qui est resté assis et n’a pas applaudi, c’est le vôtre. Votre intervention l’a confirmé : l’Ukraine brûle et vous regardez ailleurs, encore une fois. ». Cette dernière formule, parodiant celle de Jacques Chirac sur l'écologie, a ciblé juste.

    D'où la nécessité de l'unité des Français dans ces moments troubles : « Je reste convaincu que, face à la puissance des enjeux, l’esprit de responsabilité peut l’emporter. Le moment appelle l’unité ; il n’est pas trop tard pour se rallier à la seule ligne juste, celle qui assure la protection de la France et la sécurité des Français. (…) Nous vivons une période d’accélération extraordinaire, où les vérités et les certitudes de la veille ne sont pas celles du lendemain, où le Président des États-Unis peut être prêt à signer un traité avec l’Ukraine le matin et à malmener le Président ukrainien l’après-midi, où le Vice-Président d’un pays allié peut venir insulter les Européens sur leur propre sol, et où chaque jour apporte son lot d’incertitudes et de contradictions. ».


    Le chef des députés macronistes a ensuite énuméré ses trois convictions sur ce sujet brûlant.

    Sa première conviction, c'est le besoin d'un nouveau leader pour le "monde libre", c'est-à-dire qui ne soit plus les États-Unis qui font désormais faux bond : « Les déclarations du Président Trump sont claires : plutôt que les valeurs de démocratie et de liberté, seuls compteront désormais les intérêts économiques américains, et tous ceux qui tenteront d’émettre des réserves seront marginalisés. Il revient donc à la France, aux nations européennes, de prendre enfin la relève, de montrer au monde que tout n’est pas permis, que tout ne se vaut pas, que tout n’est pas deals et transactions. On ne monnaye pas la défense de la liberté, du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. On ne monnaye pas le soutien à la démocratie. L’Europe doit devenir la nouvelle place forte de la liberté et de la démocratie. Cela ne signifie pas tourner le dos aux États-Unis (…), mais prendre notre avenir en main, ne plus avoir peur de notre propre puissance, penser, peser, exister par nous-mêmes. Au-delà d’un nouveau leader, le monde libre a besoin d’une nouvelle grammaire, d’une nouvelle manière de fonctionner, d’une nouvelle organisation. Ces dernières décennies ont été marquées par la lente agonie de certaines de nos organisations multilatérales. Former une communauté nécessite de partager des principes, des lois et des valeurs : le concept de communauté internationale n’existe plus. Nous devons en prendre acte et bâtir une alliance qui ne se borne pas aux frontières de l’Europe, mais rallie tous ceux qui refusent l’avènement de la loi du plus fort, l’effacement de nos valeurs. ».

    Sa deuxième conviction, c'est la nécessité de la souveraineté militaire de l'Europe : « Puisque certaines grandes puissances ne comprennent plus que le rapport de force, assumons-le ! (…) Une place à la table des négociations ne se quémande pas, elle s’impose. Il y a urgence à ce que l’Europe accroisse son soutien militaire à l’Ukraine : c’est ainsi que nous pourrons pallier un éventuel désengagement américain, que l’Ukraine, si l’on veut lui imposer une paix factice, pourra continuer de résister. Afin de financer ce soutien supplémentaire, la France doit reconsidérer sa position concernant les avoirs russes gelés. Je comprends les préventions de certains à ce propos : je les ai partagées. Seulement, la situation a changé. La menace a franchi un nouveau palier. Avant d’envisager de faire payer les Français, les Européens, consacrons à l’Ukraine les près de 300 milliards d’euros que représentent ces avoirs ! ».

    Il en a profité pour rappeler son soutien à l'adhésion de l'Ukraine à l'Union Européenne, et a même souhaité « accélérer le processus d'adhésion » : « Cette adhésion rapide constituerait un moyen de faire front lors des échanges à venir, ainsi que d’offrir à l’Ukraine, par la suite, des garanties de sécurité. Cela peut se faire de manière adaptée, avec des clauses de sauvegarde pour notre agriculture, par exemple. ».
     

     
     


    Enfin, la troisième conviction de Gabriel Attal, c'est que l'Europe n'est pas faible : « La période actuelle ne doit pas susciter la tétanie, mais le sursaut. Dans leur aveuglement, les nouveaux empires qui nous mettent au défi ont commis une erreur d’appréciation : ils croient notre vieux continent fatigué de sa propre histoire et n’y voient pas couver une toute jeune communauté, si jeune que, dans sa naïveté, elle a longtemps pris pour argent comptant les discours sur sa faiblesse prodigués à dessein, mais qui vient peut-être de s’éveiller à elle-même, de prendre conscience de sa force, d’assumer son aspiration à l’indépendance, à la souveraineté. Ces dernières semaines, le temps des illusions a enfin cessé. (…) Je veux croire que les nations européennes ont ouvert les yeux. L’Europe n’étant la vassale de personne, notre objectif doit tenir en deux mots : zéro dépendance. Les résultats des récentes élections en Allemagne nous fournissent une occasion historique de progrès en ce sens. Accélérons ce qui a été entamé depuis 2017, notamment à l’initiative de la France, atteignons l’autonomie stratégique ! Instaurons pour l’Union une garantie de sécurité collective qui ne doive rien à qui que ce soit. Accroissons nos dépenses militaires, notre pays le fait depuis huit ans, et excluons-les du calcul des 3% de déficit : c’est la condition d’un réarmement européen. Créons une base d’industrie et de défense européenne bien plus ambitieuse, en travaillant à des programmes industriels communs et en imposant la préférence européenne. N’ayons pas peur, en vue de financer nos programmes de défense, d’émettre de la dette en commun. Face au covid-19, nous avons su le faire ; faisons de même pour préparer l’avenir. (…) Cessons de craindre l’indépendance, construisons-la (…). N’ayons pas peur : l’Europe doit cesser de s’excuser d’exister. Pour réussir, pour s’imposer, elle a toutes les cartes en main. L’Europe a d’abord été une culture, puis une raison ; elle doit devenir une force, une force de paix, de prospérité, une force tranquille. ».

     

     
     


    En conclusion de son intervention au débat, Gabriel Attal a rappelé le grand courage du peuple ukrainien : « L’heure d’une grande accélération a sonné. Rien n’est écrit : il y a trois ans, beaucoup ne donnaient pas deux semaines à l’Ukraine avant qu’elle ne s’effondre ; elle est toujours debout. Depuis trois ans, malgré la souffrance du deuil, le drame de la destruction et la brutalité de l’invasion, malgré les horreurs des bombardements, l’utilisation du viol comme arme de guerre, les déportations d’enfants vers la Russie, les Ukrainiens résistent héroïquement, nous montrant l’exemple d’un peuple qui se bat pour son pays, bien sûr, mais aussi pour la démocratie, pour la liberté, pour l’Europe. Puissions-nous, nous autres Européens, puiser dans son impressionnant courage la force de réagir, de nous affirmer, ne plus fuir le rapport de force, assumer enfin notre puissance ! L’histoire jugera durement ceux qui ont tourné le dos à l’Ukraine ; elle sera intraitable à l’égard de ceux qui ont cru pouvoir pactiser avec la Russie ; mais être du bon côté de l’histoire ne suffit pas, encore faut-il l’écrire. Nos valeurs ne sont rien si nous ne nous tenons pas prêts à les défendre. Nous ferons bloc : l’avenir de la France, l’avenir de l’Europe en dépend. L’Ukraine vaincra. L’Europe sera. ».

    Le lendemain, dans la séance des questions au gouvernement du mardi 4 mars 2025, Gabriel Attal a reparlé de l'Ukraine. La petite différence avec le lundi, c'est que Donald Trump a décidé, entre-temps, d'arrêter brutalement et immédiatement l'aide militaire américaine à l'Ukraine, malgré la promesse des États-Unis et les budgets votés en 2024 au Congrès. Cet événement est peut-être encore plus important que cette discussion médiatisée dans le bureau ovale de la Maison-Blanche le 28 février 2025, car la Russie en a profité pour bombarder les villes ukrainiennes et Donald Trump est pour le coup responsable personnellement de la morts des civils pilonnés.
     

     
     


    En introduction à sa question, le président du groupe EPR (Ensemble pour la République) à l'Assemblée a évoqué sa récente visite en Ukraine : « Il y a une semaine, à Zaporijjia, un soldat ukrainien me confiait : quand nous sommes au front, nous pensons à notre famille et à la famille européenne. Telle est la réalité de cette guerre : des Ukrainiens qui donnent leurs vies pour défendre leur pays, mais aussi la sécurité d’une Union dont ils ne sont pourtant pas membres ; des Ukrainiens qui remercient la France et le Président de la République pour le soutien constant apporté depuis trois ans, ce qui est un motif de fierté ; mais des Ukrainiens qui redoutent l’avenir, au moment de la suspension de l’aide américaine. ».

    Une double question de Gabriel Attal sur les conséquences à court terme du désengagement américain immédiat : « Quels besoins concrets de l’armée ukrainienne identifions-nous ? Quels équipements supplémentaires la France est-elle en mesure de mobiliser immédiatement pour répondre à ces besoins ? ».

    Et avant d'attendre la réponse, il a voulu rétablir des affirmations faussées par une inversion complètement scandaleuse : « Je veux revenir sur la complète inversion des valeurs à laquelle nous assistons : du Kremlin au bureau ovale, en passant par madame Le Pen, on cherche à présenter les Ukrainiens comme des va-t-en-guerre. Je veux leur rappeler des choses simples : l’Ukraine veut la paix, la Russie veut l’Ukraine ; l’Ukraine veut la liberté, la Russie veut un empire ; l’Ukraine veut l’Europe, la Russie veut la disloquer. Tourner le dos à l’Ukraine reviendrait à tourner le dos à notre passé comme à notre avenir. Ne nous contentons pas d’être du bon côté de l’histoire, écrivons-la jusqu’au bout ! ». Cette dernière phrase, Gabriel Attal l'avait déjà dite dans son discours du 3 mars 2025 (voir plus haut).
     

     
     


    Gabriel Attal a aussi affiché un réel désaccord avec le gouvernement mais aussi avec le Président de la République Emmanuel Macron, qui ne veulent pas confisquer les avoirs russes en Europe (on parle de 300 milliards d'euros). Pour l'instant, ces avoirs sont gelés et leurs intérêts sont versés à l'Ukraine. L'ancien jeune Premier Ministre préférerait utiliser ces avoirs à faire payer une aide militaire supplémentaire par les Français. L'exécutif, lui, serait réticent car cela reviendrait à remettre en cause la parole de la France lorsqu'on lui prête de l'argent, ce qui réduirait sa fiabilité et la confiance économique du pays, tout en violant le droit international (toutefois déjà largement violé par Vladimir Poutine en agressant et massacrant le peuple ukrainien).

    Dans sa réponse, François Bayrou a approuvé le constat du changement de situation entre le débat de la veille et cette question du jour : « Comme vous l’avez justement indiqué, hier est déjà dépassé : hier nous en étions restés à la manière brutale dont avait été traité Volodymyr Zelensky, Président de l’Ukraine ; nous y avions vu un renversement qui faisait passer notre univers, singulièrement en Europe, d’un monde régi par la loi du plus juste au monde brutal de la loi du plus fort. Vous avez, à juste titre, ajouté que ce qui rend plus insupportable encore la situation, c’est l’inversion de valeurs, au terme de laquelle les États-Unis, qui ont défendu la liberté et les principes démocratiques à nos côtés, en viennent à reprendre les arguments, les mots, les raisonnements de l’envahisseur, de celui qui veut détruire. ».


    François Bayrou a aussi applaudi la formule choc de son prédécesseur : « Vous avez eu une formule, que j’ai trouvée excellente : si la Russie arrête de combattre, la guerre est finie ; si l’Ukraine arrête de se battre, l’Ukraine est finie. Cette éloquente mise en perspective résume la situation devant laquelle nous sommes. ».
     

     
     


    La réponse du gouvernement français à la question des besoins ukrainiens, c'est que l'Europe puisse remplacer les États-Unis dans leur aide militaire : « Vous me demandez ce qui manquera aux forces armées ukrainiennes, si les livraisons d’aide américaines cessent brutalement, elles sont en train de cesser : des trains entiers, chargés de matériels pour l’Ukraine sont arrêtés et interdits de se rendre à destination. Ce qui peut manquer, ce sont les munitions, certains systèmes de renseignement, l’accès à des réseaux et la connectivité, divers soutiens logistiques et de formation. J’ajoute le soutien diplomatique et, peut-être plus important encore, le soutien de peuple à peuple : les Ukrainiens se sentent abandonnés et terriblement seuls. Vous en avez fait l’expérience quand vous vous êtes rendu en Ukraine ces derniers jours. Quel est l’enjeu pour la France ? Il s’agit de réunir tous les moyens possibles pour nous substituer, autant que faire se peut, à une aide internationale venant à s’arrêter. C’est un effort considérable que les Européens, du moins ceux qui sont décidés à aider l’Ukraine, doivent fournir. ».

    Et le Premier Ministre de réaffirmer la nécessité d'une véritable défense européennes, indépendante et souveraine : « Au-delà, et tout en souhaitant que notre soutien permette à l’Ukraine de résister, il nous faut bâtir une défense européenne. Nous devons le faire avec nos moyens, dont je me suis efforcé de montrer, hier, qu’ils ne sont pas négligeables, ils sont même, si on les additionne, nettement supérieurs aux capacités russes. La France demande depuis des années, huit années sous la Présidence d’Emmanuel Macron, et même depuis des décennies, si l’on remonte à la Présidence du Général De Gaulle, la création d’une capacité de sécurité et de défense indépendante, qui ne soit pas soumise aux décisions de ses alliés, notamment pour ce qui est des livraisons d’armements et de systèmes de sécurité. C’est donc un immense effort que nous devons fournir. Si je puis vous dire ce que je pense vraiment, cela va nous obliger à réfléchir à notre modèle, à nos priorités, et à voir différemment le monde que nous pensions connaître et dont nous avons découvert, par l’action de ceux que nous croyions être nos alliés, qu’il était plus dangereux que nous ne l’imaginions. ».

    Ces jours-là, en tout cas, Gabriel Attal a pu se poser comme celui qui, à l'Assemblée, soutient le plus fermement les forces de résistance ukrainiennes contre l'envahisseur poutinien. Cet affirmation géopolitique aura sans doute des répercussions dans le débat politique intérieure dans les prochaines années. Cela contribuera certainement à raconter une histoire cohérente dans l'objectif ultérieur d'une grande ambition personnelle, voire d'un destin national.



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (04 mars 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Gabriel Attal attaque Marine Le Pen sur l'Ukraine.
    Manuel Valls pour la paix, mais pas au prix de la fin de l'Ukraine !
    Claude Malhuret s'en prend à Néron et à son bouffon !
    Emmanuel Macron : la patrie a besoin de vous !
    Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron le 5 mars 2025 (texte intégral et vidéo).
    François Bayrou : la France avait raison !
    Ukraine : Trump, porte-parole de Poutine !
    3 ans de guerre en Ukraine.
    Zelensky : Poutine, c'est l'anti-Europe !
    L'aide de la France à l'Ukraine le 6 juin 2024.
    Emmanuel Macron très gaullien à la télévision pour expliquer la gravité de la situation en Ukraine.
    Débat parlementaire sur l'Ukraine : les masques tombent en France !
    Ukraine : Sophia Aram traite à la sulfateuse les néopacifistes à la notoriété déclinante !
    L'Europe face à Poutine.
    Ukraine : Emmanuel Macron est-il un va-t-en-guerre ?
    Rapport de la commission d'enquête n°1311 de l'Assemblée Nationale relative aux ingérences politiques, économiques et financières de puissances étrangères (enregistré le 1er juin 2023).
    Jean-Pierre Chevènement et ses relations avec la Russie.
    François Fillon et ses relations avec la Russie.
    Ukraine : Gabriel Attal attaque durement le RN et Marine Le Pen !
    Soutien à l'Ukraine : la conférence de l'Élysée pour une défense européenne.
    Conférence de presse du Président Emmanuel Macron lors de la Conférence de soutien à l'Ukraine le 26 février 2024 à l'Élysée (vidéos).
    2 ans de guerre en Ukraine : Poutine zéro en histoire !
    Amitié franco-ukrainienne : fake news et accord de coopération.
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    La France Unie soutient l'Ukraine !
    Condoléances cyniques.
    Mort d'Evgueni Prigojine.

    Sergueï Kirienko.
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    L'effondrement du pouvoir de Poutine.
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    Poutine en état d'arrestation !
    Ukraine, un an après : "Chaque jour de guerre est le choix de Poutine".
    L'Ukraine à l'Europe : donnez-nous des ailes !
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    Le naufrage du croiseur russe Moskva.
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    Kiev le 16 juin 2022 : une journée d’unité européenne historique !
    L'avis de François Hollande.
    Les valeurs valent mieux que les bénéfices !
    Poutine paiera pour les morts et la destruction de l’Ukraine.
    Ukraine en guerre : coming out de la Grande Russie.
    Robert Ménard, l’immigration et l’émotion humanitaire.
    Ukraine en guerre : Emmanuel Macron sur tous les fronts.
    Nous Européens, nous sommes tous des Ukrainiens !



     

     
     





    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250303-gabriel-attal.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/europe/article/gabriel-attal-attaque-marine-le-259656

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/03/04/article-sr-20250303-gabriel-attal.html


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  • Congrès du PS à Rennes : l'explosion de la Mitterrandie

    « Des querelles de personnes, depuis vingt, j'en ai connu. Mais ce que m'ont appris les dernières semaines, c'est qu'aujourd'hui, au PS, on est au-delà de l'irrationnel. Peu importent les rabibochages : entre Fabius et Jospin, il s'agit d'une lutte à mort. » (Julien Dray, le 16 mars 1990 dans "L'Express").



     

     
     


    Le témoignage en live du "jeune" député de l'Essonne Julien Dray, et pourtant très expérimenté militant propagandiste trotskiste, a montré son étonnement mais aussi son noviciat dans la cuisine interne au parti socialiste. Il y a trente-cinq ans a eu lieu le fameux congrès de Rennes, le 67e congrès du PS qui s'est tenu du 15 au 18 mars 1990 à Rennes, ville dont le maire a été, entre 1977 et 2008, l'ancien ministre socialiste Edmond Hervé.

    Pour beaucoup d'observateurs politiques, le congrès de Rennes a été le pire congrès de toute l'histoire des socialistes, le pire pour les socialistes, peut-être pas pour leurs adversaires, celui de la division, celui des magouilles, de la désinformation, de l'intimidation, de la manipulation, des coups tordus, etc. Julien Dray, qui était pourtant un agitateur politique aguerri dans les luttes d'appareil, au sein de l'UNEF puis de SOS Racisme(« Le PS, c'est bien pire que l'UNEF ! »), était forcément un nain face aux éléphants ambitieux et encombrants du parti socialiste, dont les ambitions personnelles l'emportaient bien largement sur des considérations plus collectives : « On est des jeunes. On a beaucoup appris. Ce congrès aura été une école de formation. Nous sommes vaccinés ! », a-t-il commenté à chaud auprès de Dominique de Montvalon et Bernard Mazières pour leur article d'ambiance publié le 16 mars 1990 dans "L'Express".

    Le reportage de "L'Express" décrit le champ de bataille : « La brutalité des méthodes. Sur le terrain, le clientélisme, désormais, triomphe. Chacun a "ses" hommes, et il ferait beau voir qu'un intrus se pointe ! (…) On s'y bagarre sec, tous les coups (ou presque), sont permis et l'idéologie a bon dos. (…) L'essentiel se passait chaque fois avant et après, par téléphone : quand le patron local "déconseillait" aux siens de se rendre à une réunion tenue pour "inopportune" ou leur rappelait, si nécessaire, qu'ils étaient... ses obligés. (…) Palmarès, selon Juju [Julien Dray], des sections les plus "bétonnées" : les gros bastions fabiusiens et, notamment dans certains arrondissements parisiens, les places fortes chevènementistes. "Jospinistes et mauroyistes n'ont rien à apprendre, mais eux savent y mettre les formes. Ce qui n'a pas empêché le maire de Massy de virer du jour au lendemain deux de ses directeurs pour la simple raison qu'ils avaient choisi notre motion !" (…) Oui, constate, fataliste et un peu amer, Julien Dray, "l'après-Mitterrand a commencé". Rude choc pour ceux qui constatent l'état de la "vieille maison" et se veulent pourtant, plus que jamais, les neveux de "Tonton". ».

    Factuellement, il n'est plus certain que ce congrès fût le pire, car il y en a eu d'autres, plus tard, qui étaient aussi pas mal en pleines divisions, comme celui de Reims en novembre 2008 et le dernier, celui de Marseille en janvier 2023. Le prochain s'avère aussi "passionnant" (mot pris au second degré, je précise), en juin 2025, avec une lutte déjà actée entre Olivier Faure et Boris Vallaud, et sans doute d'autres éléphanteaux. Les congrès du PS, et avant, de la SFIO, n'ont jamais été qu'une longue succession de chocs d'ambitieux et de chefs de meute.

    À Rennes, Julien Dray, à 35 ans, venait de découvrir ce Far West impitoyable. Avec son "ami" de l'époque, parlementaire de l'Essonne comme lui, un certain Jean-Luc Mélenchon, et Isabelle Thomas, l'ancienne égérie des lycéens en colère contre le projet Devaquet de 1986, ils avaient dû déposer leur propre motion au congrès (une motion, c'est l'acte politique qui vise à exister politiquement au sein du PS dans l'un de ses mille et un courants), car personne ne voulait d'eux, de ces p'tits jeunes gauchistes un peu dérangeants (et à l'époque, qui avaient des convictions), alors qu'ils auraient préféré faire une motion commune, pour rassembler l'aile gauche avec Jean-Pierre Chevènement, Jean Poperen, etc.


     

     
     


    Mais reprenons un peu le contexte historique. En mai 1988, François Mitterrand, le leader historique du PS moderne (premier secrétaire de 1971 à 1981), a été réélu Président de la République pour un second mandat de sept ans. Malade et âgé, il était certain que ce mandat serait le dernier. De quoi soulever l'appétit de potentiels héritiers. Mais dès 1988, François Mitterrand a perdu la main sur "son" PS : son successeur à la tête du PS, de 1981 à 1988, Lionel Jospin, son loyal et fidèle lieutenant lors de son premier septennat, a été nommé Ministre de l'Éducation nationale dans le gouvernement de Michel Rocard. Il fallait donc qu'il partît de la direction du PS.

    Son successeur était tout trouvé pour François Mitterrand, il avait décidé d'y placer son jeune dauphin, "le plus jeune Premier Ministre qu'il a donné à la France" (maintenant, c'est Gabriel Attal), à savoir Laurent Fabius, qui, par chance (!), était justement disponible. Le comité directeur du 14 mai 1988 s'est toutefois très mal déroulé : dans une conjuration de Michel Rocard (Premier Ministre) et Lionel Jospin (premier secrétaire sortant), Pierre Mauroy a été choisi au détriment de Laurent Fabius. La conclusion a été que Laurent Fabius a eu le perchoir comme lot de consolation. Il y a des lots de consolation moins prestigieux.


    La rivalité entre Lionel Jospin et Laurent Fabius était donc officialisée en 1988. Elle n'était pas nouvelle, car ils s'étaient déjà chamaillé en 1986 pour savoir qui conduirait la campagne législative des socialistes (leur chef d'appareil ou le chef du gouvernement socialiste ?). Ce genre de rivalité politique se retrouve aussi à droite, notamment dans la composante gaulliste, RPR puis UMP et maintenant LR (à droite, on appelle cela "guerre des chefs" et pas "congrès du parti socialiste"). Le congrès de Rennes, comme s'en est aperçu Julien Dray (voir en début d'article), était d'abord l'éclatement public du courant mitterrandiste en deux factions, les jospinistes et les fabiusiens. Y voir des différences idéologiques ou politiques serait un exploit. Juste un vaste champ des ambitions déçues. Ou pas.

    Le congrès du PS qui suivait cette désignation infamante pour le Président de la République en exercice était donc celui de Rennes en mars 1990. Michel Rocard était toujours à Matignon, Lionel Jospin à l'Éducation nationale, et Pierre Mauroy, en bon militant socialiste, qui avait cru être le dauphin de Guy Mollet en 1969, s'est épanoui dans cette fonction de chef du parti, un poste qui comptait beaucoup pour lui, qui l'honorait beaucoup, au regard de l'histoire. Ce congrès était évidemment l'occasion de remettre les choses à plat, et François Mitterrand n'hésitait pas à donner sa préférence pour la désignation de Laurent Fabius à la tête du parti, pour réparer l'affront de 1988.

    Il faut aussi expliquer le mode de fonctionnement d'un congrès socialiste. Il faut dire que c'est très compliqué, ce qui nécessite beaucoup de socialistologues patentés.

    Petite diversion par ce petit témoignage amusant de la journaliste politique Valérie Trierweiler, qui fut par la suite la compagne de François Hollande. Elle a débuté pendant cette période. Son employeur "Paris Match" l'a affectée au congrès de Rennes, c'était son premier reportage politique. Au micro de Guy Birenbaum, le 9 août 2017 sur France Info, Valérie Trierweiler a raconté "son" congrès de Rennes : « C’est à la fois un souvenir très marquant et en même temps je pataugeais totalement. J’étais toute jeune journaliste, c’était mon premier papier pour "Match" et je ne comprenais rien à ce qu’il se passait. (…) Ça a été une guerre fratricide entre les enfants de Mitterrand. C’était très compliqué, il y avait six ou sept motions différentes. Pour comprendre ce qu’il se passait, j’allais dans ma voiture de location et j’écoutais France Info. ». Elle est retournée à Paris dans la voiture de Bernard Roman, à l'époque le dauphin de Pierre Mauroy à la mairie de Lille : « Tout le monde pleurait ! ». Et d'ajouter : « Peut-être que, finalement, ce qu’il se passe aujourd’hui, l’origine est là. On a déjà des déchirures, non pas au sein du parti socialiste mais au sein de la même famille du PS, entre les enfants chéris de Mitterrand. Ça n’a fait que se déchirer par la suite. ».

    Le fonctionnement d'un congrès, c'est d'abord de déposer des contributions, qui n'impactent pas la vie interne du parti, c'est du contenu politique, programmatique, et un moyen de se montrer entre "camarades" du même courant. Puis, il y a le dépôt des "motions", qui sont ultrapolitiques, après d'éventuelles "synthèses" de contributions. Des rapports de force internes au sein du PS dépend la répartition des postes au sein de la direction du PS. Tous les courants ont donc intérêt à déposer leur propre motion pour peser au sein de l'appareil (et pour se compter auprès des militants). Et la phase finale, celle pour laquelle François Hollande était le maître par la suite, la synthèse : les motions tentent de trouver un accord entre elles pour se réunir derrière le dirigeant désigné selon les rapports de force (vote des fédérations, j'y reviendrai plus loin) et une direction diversifiée (ceux qui ne souhaitent pas s'intégrer dans la synthèse sont alors dans l'opposition interne). Exceptionnellement, aucune synthèse n'a été trouvée ni voulue à Rennes en 1990.

     

     
     


    Pour son émission "La fabrique de l'histoire" diffusée le 6 novembre 2008 sur France Culture, le journaliste Emmanuel Laurantin a expliqué : « L'affrontement entre Lionel Jospin et Laurent Fabius n'a rien d'idéologique. Le duel par seconds couteaux interposés gagne également les fédérations à l'intérieur desquelles des scissions s'opèrent. (…) [François Mitterrand] entame alors son second et dernier mandat. La question de sa succession devient donc d'actualité. Lionel Jospin est ouvertement entré en conflit avec Laurent Fabius en 1985. Lors du comité directeur de juillet 1989, le combat des deux héritiers est lancé par listes de soutien interposées et comptage des voix sur lesquelles l'un ou l'autre peut s'appuyer. L'enterrement du courant mitterrandiste bat son plein. Le débat idéologique reste au second plan et le restera tout au long du congrès (…). Sept textes sont soumis à la discussion et au vote des militants mais personne n'écoute les discours. Ni Fabius, ni Jospin ne veulent de synthèse. On négocie en coulisse et on échange des propos aigre-doux avec ses adversaires de courants. Des émissaires sont chargés de calmer le jeu. En vain, ce congrès du PS se termine sans que les courants ne se soient mis d'accord sur la composition de la direction et sur un texte commun d'orientation. Le rôle de François Mitterrand est ambigu. Son dauphin est Laurent Fabius mais il ne le soutient pas ouvertement. Il lui a d'ailleurs sans doute suggéré d'abandonner la partie pour laisser finalement la direction du parti à son ancien Premier Ministre, Pierre Mauroy, qui aura vainement tenté d'apaiser cette lutte de succession. ».

    Concrètement, neuf contributions générales ont été déposées pour le congrès de Rennes, et ensuite, sept motions soumises au vote des militants, supposées provenir d'une synthèse (ici impossible) des contributions.

    L'intérêt de présenter les contributions n'a rien de programmatique, mais est de savoir qui était avec qui. Je n'indiquerai donc pas le nom de chacune des contributions (sans intérêt car générique) mais seulement de leurs principaux signataires.

    Contribution 1 (chevènementistes) : Jean-Pierre Chevènement, Edwige Avice, Jean-Marie Bockel, Nicole Bricq, Pierre Carassus, Marie-Arlette Carlotti, Michel Charzat, Didier Motchane et Georges Sarre.

    Contribution 2 (mitterrandistes "directs") : Louis Mermaz, Pierre Joxe, Jacques Delors, Véronique Neiertz, Claude Estier, Louis Mexandeau, André Delehedde, Claude Fuzier, Charles Hernu, Frédéric Jalton, Didier Migaud, Ségolène Royal et André Vallini.

    Contribution 3 (fabiusiens) : Laurent Fabius, Jean Auroux, Claude Bartolone, Pierre Bérégovoy, Michel Charasse, Roger Hanin, Jack Lang, Daniel Percheron, Paul Quilès, François Rebsamen, Yvette Roudy et Henri Weber.

    Contribution 4 (stirnistes) : Olivier Stirn et Bernard Bioulac.

    Contribution 5 (jospinistes) : Lionel Jospin, Claude Allègre, Christian Bataille, Jean-Christophe Cambadélis, Gérard Collomb, Bertrand Delanoë, Michel Delebarre, Henri Emmanuelli, François Hollande, Jean-Yves Le Drian, Jean Le Garrec, Dominique Strauss-Khan et Daniel Vaillant.

    Contribution 6 (mélenchonistes) : Jean-Luc Mélenchon et Julien Dray.


    Contribution 7 (rocardiens) : Catherine Trautman, Alain Bergounioux, Robert Chapuis, Michel Destot, Claude Évin, Olivier Faure, Gérard Fuchs, Louis Le Pensec, François Patriat, Alain Richard, Michel Sapin, Jean-Pierre Sueur et Manuel Valls.

    Contribution 8 (lienemannistes) : Marie-Noëlle Lienemann et Patrice Finel.

    Contribution 9 (poperénistes) : Jean Poperen, Colette Audry, Jean-Marc Ayrault, Philippe Bassinet, Michel Bérégovoy, Gérard Caudron, Didier Chouat, Jean-Louis Cottigny, Michel Debout, Christiane Mora, Marie-Thérèse Mutin et Alain Vidalies.

    Petits commentaires personnels. On remarque l'absence, parmi les signataires, de Martine Aubry (fille de Jacques Delors et future jospiniste) car elle n'était pas encore une femme politique. François Hollande (qui était à l'époque "transcourant" tout en étant proche de Jacques Delors) a signé avec Lionel Jospin comme Dominique Strauss-Kahn pourtant plutôt rocardien. Au-delà des deux contributions "gauchistes" (Mélenchon et Lienemann), celles de Jean-Pierre Chevènement et de Jean Poperen étaient les plus à gauche (avec une tradition historique), et c'est intéressant d'y lire les noms de Jean-Marc Ayrault, Jean-Marie Bockel et Nicole Bricq. Parmi les rocardiens, il y avait bien sûr Manuel Valls, mais aussi Olivier Faure (et Benoît Hamon allait les rejoindre). Si Michel Rocard n'était pas un signataire (parce qu'il était le Premier Ministre), il y avait une contribution estampillée rocardienne très clairement. Quant à Pierre Mauroy (premier secrétaire sortant), lui non plus n'a pas déposé spécifiquement de contribution (afin de rester dans la capacité de rassembler et faire la synthèse), et ses partisans se sont répartis parmi les jospinistes (par exemple Michel Delebarre) et les mitterrandistes que j'appellerais "directs", c'est-à-dire fidèle à François Mitterrand sans choisir parmi ses héritiers (parmi lesquels s'est comptée Ségolène Royal).


     

     
     


    De ces neuf contributions n'est sortie aucune synthèse majoritaire, et donc, sept motions se sont disputé le vote des militants, ou, plus exactement, le vote des mandats (c'est une nuance importante, voir plus loin). Voici donc les résultats de ce congrès, sans qu'aucune motion puisse être majoritaire (dans l'ordre décroissant des votes).

    1. Motion 1 (Pierre Mauroy, soutenue par Lionel Jospin et Louis Mermaz) : 2 082 mandats (28,9%).
    2. Motion 5 (Laurent Fabius, soutenue par Olivier Stirn) : 2 075 mandats (28,8%).
    3. Motion 3 (Michel Rocard) : 1 745 mandats (24,3%).
    4. Motion 7 (Jean-Pierre Chevènement) : 613 mandats (8,5%).
    5. Motion 2 (Jean Poperen) : 518 mandats (7,2%).
    6. Motion 4 (Jean-Luc Mélenchon) : 97 mandats (1,4%).
    7. Motion 6 (Marie-Noëlle Linemann) : 47 mandats (0,7%).

    On constate que les jospinistes (avec les mauroyistes) et les fabiusiens étaient presque à égalité et que les rocardiens sont arrivés en troisième position. Les quatre autres motions étaient positionnées sur l'aile gauche et n'ont recueilli que peu de votes, moins de 20%, et de manière très dispersée (Jean-Luc Mélenchon, Julien Dray et Marie-Noëlle Lienemann ont fait cause commune dans les congrès suivants, à partir de celui de La Défense en décembre 1991).

    Malgré cette grande disparité, les jospinistes et les rocardiens avaient la majorité et se répartissaient ainsi les rôles : à Pierre Mauroy le parti, à Michel Rocard la candidature à l'élection présidentielle de 1995. Un accord implicite qui n'était pas forcément très franc (Lionel Jospin couvant déjà une ambition présidentielle) mais qui permettait de faire un barrage anti-Fabius.

    Lors du comité directeur du 21 mars 1990, une synthèse générale a été finalement adoptée, de manière très hypocrite, Pierre Mauroy a été reconduit comme premier secrétaire du PS et la direction du PS (comité directeur, bureau exécutif et secrétariat national) a été désignée proportionnellement aux votes du congrès.

    Le nouveau bureau exécutif était ainsi composé de 8 jospino-mauroyistes (Pierre Mauroy, Claude Allègre, Claire Dufour, Henri Emmanuelli, Louis Mermaz, Bernard Roman, Gisèle Stievenard et Daniel Vaillant.), 8 fabiusiens (Laurent Fabius, Claude Bartolone, André Billardon, Marcel Debarge, Daniel Percheron, Christian Pierret, Yvette Roudy et Françoise Seligmann), 7 rocardiens (Jean-Claude Boulard, Pierre Brana, Michel Deforeit, Daniel Frachon, Gérard Fuchs, Daniel Lindeperg et Alain Richard), 2 chevènementistes (Michel Charzat et Pierre Guidoni) et 2 poperénistes (Jean-Marc Ayrault et Michel Debout).
     

     
     


    Quant au secrétariat national, composé de 13 secrétaires nationaux et 13 secrétaires nationaux adjoints, on peut citer le numéro deux Marcel Debarge chargé de la coordination, Gérard Collomb (adjoint) chargé des organismes associés, Henri Emmanuelli trésorier, Gérard Lindeperg chargé de la formation, Thierry Mandon (adjoint) également chargé de la formation, Daniel Vaillant chargé des fédérations, Claude Bartolone chargé des relations extérieures, Jean-Claude Petitdemange chargé des élections, Gérard Le Gall (adjoint) chargé des sondages, Yvette Roudy chargée des droits de la femme, Bernard Roman chargé de l'information et communication, Frédérique Bredin (adjointe) chargée de l'audiovisuel, Christian Pierret chargé de l'urbanisme, écologie et collectivités territoriales, et enfin, Pierre Moscovici chargé des études et programme, qui faisait partie des fabiusiens et pas des jospinistes.

    Du 13 au 15 décembre 1991, le congrès suivant du PS s'est tenu à La Défense, sans changement des instances dirigeantes et sans motions, pour le vote d'une nouvelle "déclaration de principes" du PS. Quelques jours plus tard, le 9 janvier 1992, Pierre Mauroy a quitté la direction du PS et a proposé Laurent Fabius pour successeur, désignation adoptée par le comité directeur et qui allait être avalisée par le congrès suivant réuni du 10 au 12 juillet 1992 à Bordeaux (avec un nouveau secrétariat national le 15 juillet 1992 incluant, en numéro trois, Pierre Moscovici trésorier, et Alain Richard aux élections). Quand Laurent Fabius a pris ses fonctions, Michel Rocard n'était déjà plus Premier Ministre mais était devenu le candidat naturel des socialistes pour l'élection présidentielle de 1995.

     

     
     


    Paradoxalement, malgré les divisions, le congrès de Rennes a profondément modifié la règle du jeu et a permis d'accroître le caractère démocratique de son fonctionnement interne.

    En effet, j'ai évoqué le vote des militants, mais il s'agissait en fait de vote par mandats : chaque fédération avait un certain nombre de mandats pour le congrès proportionnellement à son nombre d'adhérents. L'insincérité du vote, c'est que celui qui dirigeait la fédération pouvait orienter le vote de tous les mandats de sa fédération (il suffisait de donner les mandats à des "camarades sûrs" de la fédération), un peu comme les élections américaines où les grands électeurs, dans la plupart des États, sont élus, tous ou aucun. Le changement, entre autres demandé par Julien Dray, c'était que c'étaient les militants eux-mêmes qui puissent voter, sans passer par des mandats, et pas les responsables de fédération, sans pouvoir de délégation, c'est-à-dire selon le principe un présent, une voix.

    De plus, il a été adopté le principe du vote secret dans les fédérations et aux congrès. Le vote à main levée permettait aux petits potentats d'appareil de faire de l'intimidation, du chantage ou du clientélisme auprès de ses adhérents, ce qui ne peut plus se faire avec le vote secret, seul vote démocratique possible car sincère.

    L'histoire du vote secret et du vote par mandats de fédération n'est pas spécifique au fonctionnement du parti socialiste et tous les partis nationaux ont, petit à petit, évolué d'un fonctionnement qui s'apparentait plus à de la cooptation par magouille qu'à un véritable vote démocratique, vers un fonctionnement plus référendaire, surtout avec l'apparition des nouvelles technologies (vote sur Internet, etc.). À ma connaissance, c'est le RPR qui a adopté le premier le principe d'un vote de son président par l'ensemble des militants (à l'instar d'une élection présidentielle), décidé par Philippe Séguin réélu ainsi président du RPR le 13 décembre 1998 (avec un score de république bananière, 95,1% des militants, en raison de l'absence d'adversaire), alors qu'avant, c'est un vote deux ou trois fois indirect.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (08 mars 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Congrès du PS à Rennes : l'explosion de la Mitterrandie.
    La préparation du congrès de Rennes (27 janvier 1990).
    Histoire du PS.
    Manuel Valls.
    Martine Aubry.
    Hubert Védrine.
    Julien Dray.
    Comment peut-on encore être socialiste au XXIsiècle ?
    François Bayrou et la motion de censure de congrès du PS.
    Lionel Jospin.
    Claude Allègre.
    François Mitterrand.
    Jacques Delors.
    Mazarine Pingeot.
    Richard Ferrand.
    Didier Guillaume.

    Pierre Joxe.
    André Chandernagor.
    Didier Migaud.
    Pierre Moscovici.

    La bataille de l'école libre en 1984.
    Bernard Kouchner.
    Hubert Curien.
    Alain Bombard.
    Danielle Mitterrand.
    Olivier Faure.
    Lucie Castets.

    Bernard Cazeneuve
    Gabriel Attal.
    Élisabeth Borne.
    Agnès Pannier-Runacher.
    Sacha Houlié.
    Louis Mermaz.
    L'élection du croque-mort.
    La mort du parti socialiste ?
    Le fiasco de la candidate socialiste.
    Le socialisme à Dunkerque.
    Le PS à la Cour des Comptes.

     

     

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250315-congres-ps-rennes.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/congres-du-ps-a-rennes-l-explosion-259371

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/03/13/article-sr-20250315-congres-ps-rennes.html


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  • L'amiral Philippe De Gaulle célébré par Emmanuel Macron

    « Vous nous avez rappelé, Amiral, qu'il est des chênes que rien n’abat, ni le fer, ni le feu, ni l'hiver, ni l'usure. Ces chênes qui passent de la vie à l'éternité. Leur feuillage ombragent les armes de la République. Et quand autour de nous, les abatteurs menacent, nous savons qu'ils ne peuvent rien contre ces chênes-là et que par eux, par l'idéal qu'ils nous transmettent et que nous reprenons, la France tiendra. Et face aux cognées de la haine, de l'esprit de défaite ou des consciences qui parfois vacillent, s'il ne reste qu’un pays, que la France soit celui-là, debout. » (Emmanuel Macron, le 20 mars 2024 aux Invalides).




     

     
     


    Il y a un an, le mercredi 13 mars 2024, l'amiral Philippe De Gaulle s'est éteint à Paris, à l'âge de 102 ans. Fils de son père, il a été un personnage historique de l'épopée gaullienne, son témoin direct, l'observateur des années De Gaulle, celles de la Résistance comme celles du début de la Cinquième République. Militaire de carrière, résistant de la première heure, mais jamais intégré dans l'ordre des Compagnons de la Libération car son père voulait éviter toute complaisance de népotisme, Philippe De Gaulle, paradoxalement, est devenu sénateur de Paris pendant dix-huit ans, de 1986 à 2004 alors que son père voulait supprimer le Sénat en 1969.

    À la fois grand militaire de la marine et témoin de la vie politique, et à ce titre, auteur de quelques ouvrages de référence pour mieux comprendre la vie et l'œuvre du Général De Gaulle, l'amiral Philippe De Gaulle a reçu un hommage national une semaine après sa disparition, le 20 mars 2024, dans la cour d'honneur des Invalides.

    Cette cérémonie était présidée par le Président de la République Emmanuel Macron en présence du gouvernement, dont le Premier Ministre en exercice Gabriel Attal, et de nombreuses personnalités politiques et militaires. Pas étonnant que ce fût aux Invalides puisqu'il séjournait pour ses vieux jours : « Le marin, le résistant, l'élu de la République avait retrouvé, ici, cette cohorte de blessés et de héros. La chaîne des temps. Il était là, debout, parmi eux. (…) Connaître toutes les mers du monde, mais choisir la Seine pour dernier rivage. Partir en homme de devoir, risquer sa vie sur quatre continents et aller reposer à Colombey. ».


     

     
     


    Emmanuel Macron est un passeur d'histoire et est fasciné par les vétérans de l'histoire récente : « Devoir à l'endroit de nos anciens, car chacun de nous est dépositaire et gardien de leur legs de courage, d'abnégation, d'héroïsme. ». Le Président de la République entretenait aussi de bonnes relations avec d'autres résistants comme Daniel Cordier, Hubert Germain, ou d'autres vieillards de la République, ce que j'appelle des vieillards de la République en ce sens que ce sont des dinosaures dans leur domaine et que la République leur est reconnaissante de leur existence, de leurs talents, de la richesse qu'ils ont apportée à la France et parfois au monde, comme le peintre Pierre Soulages, le chanteur Charles Aznavour, le comédien Michel Bouquet ou l'écrivain Jean d'Ormesson. Quant aux politiques, les hommages aux Invalides ont été également nombreux, de Jacques Chirac à Jacques Delors, en passant par Robert Badinter.

    À 18 ans, Philippe De Gaulle s'est engagé dans la Résistance dès le premier jour, répondant plus au devoir qu'il se faisait de la France qu'à son père. En août 1944, il participa à la Libération de Paris, et la famille fut rassemblée : « Le cœur symbolique de la République est délivré. Paris est libérée. La France est relevée. Philippe De Gaulle peut alors rejoindre les siens. Et il y eut chez les De Gaulle cette scène de retrouvailles si singulière, autour d'un repas de famille où l'on discutait comme si l'on s'était quitté le matin même, parlant de tout et de rien, des uns et des autres, des projets, de tout sauf de la guerre et des hauts faits. ».

    Après la guerre, le futur amiral a poursuivi une brillante carrière de pilote de l'aéronavale qui l'amena aux plus grandes responsabilités militaires : « Honneur, patrie, valeur, discipline. Ces quatre piliers de la Marine, gravés sur chacun de ses bâtiments, étaient les tables de sa loi. ».

     

     
     


    À sa retraite, à l'âge de 64 ans, sur demande de Jacques Chirac, Philippe De Gaulle fut élu sénateur : « apportant sa voix à la commission des Affaires étrangères et de la Défense. Comme il est dur, pourtant, d'être De Gaulle après De Gaulle, d'en avoir l'allure, la voix, les gestes et de ne pas être lui. L'Amiral répondait aux murmures par la rigueur de sa conscience, son indifférence à la mondanité, déclinant toute présidence parlementaire ou honorifique, quelle qu'elle fût. ».

    Philippe De Gaulle cultivait une grande humilité et s'effaçait derrière plus grand que lui. Son credo : « Il faut agir au-delà de soi et travailler pour plus grand que soi. ». Homme de devoirs, il en était un très important pour lui : « Devoir d'espérance. "La France en a vu d'autres, la France s'en sortira, tu verras", tels étaient ses mots répétés, toujours à travers les meurtrissures de l'histoire. C'était sa certitude, partagée avec tous ses compagnons d'armes, tous ses compagnons dont il eut la place s'il n'eut pas le titre, grandeur d'un sacrifice consenti en silence dépassant l'injustice ressentie. ». Pour son père, il était le premier compagnon de la Libération. Pour l'histoire, il fut le dernier aussi, le dernier survivant, après Hubert Germain (le dernier officiellement).
     

     
     


    Le Président Emmanuel Macron a raconté la disparition de celui qui ressemblait tant à l'homme du 18 juin : « Il a attendu d'avoir tout écrit, tout transmis, mis un point final à ses derniers souvenirs, rédigé ses dernières volontés avec une rigueur d'ordre d'opération, demandé les derniers sacrements, et puis, il a fermé les yeux dans la nuit qui ne connaît pas l'Histoire. Une mort à sa mesure. Une mort de paladin, de chevalier, remettant ses pensées à la France, son âme à son Seigneur et son cœur à sa dame. Car le dernier nom qu'il murmura fut celui d'Henriette, en chevalier, membre de cette confrérie de l'idéal, ceux qui ne vivent que debout, ceux qui ont redressé leur patrie à la face du monde. ».

    Cet hommage était le minimum que pouvait faire la République pour ce serviteur si singulier. Avec lui, c'est un peu rendre un hommage national au Général De Gaulle qui n'avait encore jamais eu lieu, en raison des dernières volontés de ce dernier. L'association Emmanuel Macron et De Gaulle n'est pas vaine : depuis 2017, le Président de la République revendique, à l'instar de son illustre et historique prédécesseur, la souveraineté européenne de défense, pour que la sécurité de la France et de l'Europe ne dépende pas du bon vouloir des États-Unis.

    On peut avoir raison trop tôt, mais aussi être entendu à temps. Car il n'est jamais trop tard pour la construire, cette défense souveraine qui doit répondre à la double menace de l'impérialisme russe et du terrorisme islamique. Emmanuel Macron l'a encore redit ce mardi 11 mars 2025 : « Une grande nation, elle n'a pas à choisir. Elle a à répondre. Et elle n'a pas à décider de lutter contre les menaces géopolitiques qui s'imposent à elle ou contre des menaces sur son sol projetées par les terroristes. Elle a à faire les deux en même temps. C'est ce que nous faisons. ». Un véritable homme d'État.



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (11 mars 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Philippe De Gaulle.
    Hommage du Président Emmanuel Macron à Philippe De Gaulle le 20 mars 2024 aux Invalides (texte intégral et vidéo).
    De Gaulle à l'ombre du Généra.
    L'impossible Compagnon de la Libération.
    Entre père et mer.
    L'autre De Gaulle.
    La mort du père.
    Le théorème de la locomotive.
    De Gaulle, l’Europe et le volapük intégré.
    18 juin 1940 : De Gaulle et l’esprit de Résistance.
    Daniel Cordier.
    Le songe de l’histoire.
    Vive la Cinquième République !
    De Gaulle et son discours de Bayeux.
    Napoléon, De Gaulle et Macron.
    Pourquoi De Gaulle a-t-il ménagé François Mitterrand ?
    Deux ou trois choses encore sur De Gaulle.
    La France, 50 ans après De Gaulle : 5 idées fausses.

     

     
     





    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250313-philippe-de-gaulle.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/l-amiral-philippe-de-gaulle-259366

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/03/12/article-sr-20250313-philippe-de-gaulle.html



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  • François Bayrou : la France avait raison !

    « L’effort de construction de cette armée a demandé des investissements considérables, que la nation a supportés avec courage et esprit de continuité. Cet effort, nous l’avons supporté solitairement. Mais la France avait raison ! Elle avait raison ! On le découvre aujourd’hui, au moment même où notre principal allié paraît se ranger aux éléments de langage du pays qui attaque l’Ukraine et menace le reste de l’Europe. Face à cette situation, il est un constat que nous ne faisons pas assez : nous, les Européens, sommes plus forts que nous le croyons ; nous sommes forts et nous ne le savons pas. Pire, nous nous comportons comme si nous étions faibles ! » (François Bayrou, le 3 mars 2025 dans l'hémicycle).



     

     
     


    Le Premier Ministre a répété deux fois "la France avait raison !", sous-entendu, le Président Emmanuel Macron avait raison, raison quand il a augmenté de manière notable le budget de la défense dès 2017, raison quand il a demandé aux Européens dès 2017 de s'occuper eux-mêmes de leur défense, raison quand il a considéré qu'il fallait que l'Europe devienne un géant politique.

    Depuis sa nomination à Matignon le 13 décembre 2024, je désespérais un peu de ne pas avoir encore entendu François Bayrou sur les sujets de politique étrangère. C'est vrai qu'il y a la répartition traditionnelle des rôles (à l'Élysée l'extérieur et à Matignon l'intérieur), et que le Premier Ministre, ces trois premiers mois, était particulièrement occupé par la politique intérieure : vote du budget, affaires de sécurité, attentats terroristes, catastrophe à Mayotte, etc. Mais la politique étrangère a toujours été, pour François Bayrou, un sujet d'intérêt et de prédilection au point qu'il avait souhaité être Ministre des Affaires étrangères en 1995, lors de l'élection de Jacques Chirac, et Valéry Giscard d'Estaing, amer que son ancien secrétaire général de l'UDF se soit éloigné de lui, lui a barré la route au profit d'un giscardien pur jus (Hervé de Charette). Il est, de plus, président du Parti démocrate européen (PDE) depuis le 9 décembre 2004, qui regroupe les centristes de l'Union Européenne.

    Avec cette volonté d'associer le Parlement à la réflexion de la France sur des sujets actuels, très prégnants, de politique étrangère, en l'occurrence la situation de l'Ukraine et la défense de l'Europe, dans le cadre très institutionnel de l'article 50-1 de la Constitution, à savoir un débat parlementaire dans les deux chambres et aucun vote à son issue, François Bayrou a rattrapé son silence médiatique sur ces sujets et a montré à quel point il était à l'aise, car il est d'abord focalisé sur les valeurs et s'il y a bien un sujet où les valeurs sont importantes, c'est dans les relations internationales, et on le voit bien depuis le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche.

    Avant le début de la déclaration du gouvernement, la Présidente de l'Assemblée Yaël Braun-Pivet a fait observer une minute de silence aux cinq victimes du cyclone Garance qui a frappé violemment l'île de La Réunion la semaine précédente, et ensuite a salué, à l'occasion de ce débat sur l'Ukraine et l'Europe, la présence dans les tribunes de l'hémicycle d'une délégation du Parlement d'Estonie, conduite par son Président Lauri Hussar, et de l'ambassadeur d'Ukraine en France.


     

     
     


    Le débat s'est établi deux jours après l'affligeante scène du bureau ovale de la Maison-Blanche où Donald Trump et J. D. Vance ont cherché à humilier Volodymyr Zelensky (parfois sur des critères stupides, comme les vêtements alors que Churchill lui-même se présentait devant le Président des États-Unis à Washington sans costume cravate pendant toute la durée de la guerre), une véritable honte quand on sait à quel point le Président Zelensky est un héros courageux qui a préféré continuer à combattre et à résister contre l'envahisseur poutinien tandis que l'un de ses interlocuteurs américains n'a même été capable de faire son service militaire. La réflexion que doit se poser l'Europe, et avec l'Europe, la France bien sûr, c'est : comment anticiper l'avenir de la défense nationale et européenne si les États-Unis se désengagent complètement de leur alliance militaire avec les Européens ?

     

     
     


    C'est sur cet événement que François Bayrou a démarré sa déclaration : « Vendredi soir, dans le Bureau ovale de la Maison-Blanche, s’est déroulée sous l’objectif des caméras du monde entier une scène sidérante, empreinte de brutalité et de volonté d’humiliation, dont le but était de faire plier par la menace le Président ukrainien Volodymyr Zelensky pour qu’il se rende aux exigences de ses agresseurs. Le tout résumé en une phrase devant les caméras de la planète : "Ou bien vous trouvez un accord avec Poutine, ou bien nous vous laissons tomber !". Pour l’honneur de la responsabilité démocratique, de l’Ukraine et, j’ose le dire, de l’Europe, le Président Zelensky n’a pas plié. Je crois que nous pouvons lui manifester notre reconnaissance. ».
     

     
     


    Puis, il est revenu sur le point de départ historique de la guerre : « Nous connaissons le détonateur de cette séquence dramatique. C’est un événement précisément daté : l’invasion, en vue d’annexion, de l’Ukraine par les forces armées de la Fédération de Russie, sur ordre de Vladimir Poutine, le 24 février 2022. Cette date a marqué un basculement entre deux mondes, aux conséquences planétaires, nous avons été plusieurs à le dire à l’époque. Depuis 1945, nous espérions que l’Europe, l’Occident tout entier, la communauté des nations, vivaient avec l’idée qu’une loi internationale, respectant les principes d’indépendance et de sécurité pour les nations, régissait chaque jour davantage, et régirait un jour, l’ensemble des relations internationales, diplomatiques, de défense, commerciales, financières. Bien sûr, nous le savions, ces règles ont toujours fait l’objet d’une application partielle, imparfaite et souvent partiale, nous n’idéalisons pas le passé. Mais il y avait malgré tout des garde-fous qu’on pouvait évoquer, des traités qu’on pouvait brandir, des résolutions qu’on pouvait invoquer, des engagements qu’on pouvait rappeler. Tout ceci est fini : nous avons basculé dans un autre monde. Beaucoup sont sans voix tant le choc est violent ; beaucoup se trouvent démunis tant tous les dispositifs que nous avions inventés sont démantelés. Nous voici mis en demeure d’accepter des mœurs que nous refusons, de revoir les chartes de nos libertés, de repenser les règles de la démocratie et de la liberté d’expression, d’abandonner notre souci de décence pour accepter l’indécence qu’on voudrait nous imposer. Au fond, nous vivions avec la certitude paisible que le monde serait, sinon de plus en plus démocratique comme l’affirmaient des esprits brillants, mais incurablement optimistes, du moins de plus en plus sûr. C’est dans ce cadre que la prospérité du continent européen, du monde libre et, par contagion, celle de ceux qui vivaient une relation de confiance avec l’Occident, se développaient. Certes, nous savions tous, de grands diplomates français, comme Hubert Védrine, le rappelaient, que les nations n’oublient jamais leurs intérêts, et que, par la force des choses, ces derniers passent souvent avant leurs principes. Mais nous avions, pour les uns, l’espoir, pour les autres, la certitude, qu’au bout du compte demain serait plus sûr qu’aujourd’hui et que les grands ensembles avec qui nous étions en relation en viendraient un jour à respecter plus ou moins les mêmes grands principes. Beaucoup le croyaient pour la Russie, en raison d’une proximité de civilisation et d’une communauté d’histoire. Nous le croyions pour l’Inde, dont la progression démographique, technique et scientifique et la situation de pays non-aligné sont pour la France des éléments de confiance, pour ce pays majeur, nous le croyons encore aujourd’hui. C’était vrai à certains égards pour la Chine : la France n’a jamais oublié qu’elle avait été le premier pays d’Occident à reconnaître et consacrer le statut international de cet immense peuple et acteur politique. Nous l’espérions même du Moyen-Orient tourmenté, dont nous imaginions favoriser l’apaisement avant de voir triompher une paix garantie par la reconnaissance des peuples, des communautés et des cultures. Cette symphonie d’espoirs raisonnables a volé en éclats le 24 février 2022. ».

    C'est la Russie de Vladimir Poutine, qu'on croyait se normaliser, qui est retombée dans l'impérialisme le plus bestial : « Qu’un pays, géographiquement le plus vaste de la planète, militairement parmi les mieux armés, en particulier par la détention d’innombrables têtes nucléaires, ayant construit une puissante armée mécanique de blindés aussi bien que d’aviation, une puissance spatiale, un pays riche d’infinies ressources naturelles, qu’un tel pays, membre du Conseil de Sécurité des Nations Unies et à ce titre garant de l’ordre international, décide de se jeter sur un pays voisin, une nation souveraine, de surcroît intimement mêlée à sa propre histoire, pour l’annexer, en prendre le contrôle par la force et en chasser les dirigeants élus, beaucoup d’entre nous, en fait, n’auraient même pas osé l’imaginer. Or cette date de basculement de l’histoire a libéré les démons endormis et a remis en cause, d’abord, le premier principe de sécurité sur lequel étaient fondées nos règles internationales : l’intangibilité des frontières issues de la seconde guerre mondiale. Cette agression a donné le signal qu’attendaient en réalité depuis longtemps des forces tapies dans l’ombre et qui ne rêvaient que de se donner carrière. ».

    La guerre en Ukraine a été le signal d'un retour à la loi du plus fort : « Ces forces, il faut les nommer : c’est l’esprit de domination ; c’est l’impérialisme militaire, idéologique, économique, religieux, fanatique, la volonté d’asservir l’autre ; c’est le culte de la force, nous le connaissons bien, car c’est la malédiction qui a coûté des dizaines de millions de morts au XXe siècle, particulièrement en Europe. Sur toute la surface de la planète, le signal donné par cet événement n’a échappé à personne. Qu’importeraient désormais la loi et les principes, les délibérations internationales ? La force seule, la violence et la brutalité suffiraient pour régler les conflits. Il s’agirait seulement de réunir les moyens suffisants, de déployer la violence suffisante, et n’importe quelle cause pourrait désormais l’emporter. C’est la fin de la loi du plus juste, c’est le règne de la loi du plus fort. Ainsi, par la décision d’un seul, devenu chef de meute, sont reniés les efforts consentis depuis plus de cent ans pour arracher l’humanité à sa naturelle inhumanité, en même temps que se trouve reniée la Charte des Nations Unies, dont voici un extrait du préambule : "Nous, peuples des Nations unies, résolus à préserver les générations futures du fléau de la guerre qui deux fois en l’espace d’une vie humaine a infligé à l’humanité d’indicibles souffrances, à proclamer à nouveau notre foi dans les droits fondamentaux de l’homme, dans la dignité et la valeur de la personne humaine, dans l’égalité de droits des hommes et des femmes, ainsi que des nations, grandes et petites, à créer les conditions nécessaires au maintien de la justice", prenons l’engagement solennel "qu’il ne sera pas fait usage de la force des armes, sauf dans l’intérêt commun". Cette charte a été signée le 26 juin 1945 pour préserver les générations au lendemain de la plus terrible des guerres que l’humanité ait connues, 80 millions de morts et une victime perdue pour toujours, une certaine idée de l’homme partie avec la Shoah, la tentative d’anéantissement programmé, et pour la première fois techno-industriel, de l’un des peuples de notre famille humaine. ».


     

     
     


    Après Vladimir Poutine, le retour de Donald Trump a renforcé ce sentiment de la fin d'une régulation internationale par le droit et la justice : « Ce qui se matérialisait sous nos yeux, vendredi soir, alors que nous assistions sidérés à cet affrontement, et chacun d’entre nous se souviendra où il se trouvait à ce moment, c’était la rupture de quelque chose d’infiniment précieux, dont nous étions au jour le jour peu conscients, mais qui servait de cadre à notre regard sur le monde, à savoir l’idée de l’identité et de l’unité de l’Occident. Ce que nous avons brutalement découvert depuis quelques semaines, et qui culminait en ce vendredi soir, c’est que nos alliés pouvaient nourrir sur nous et sur notre avenir, sur l’avenir de leurs partenaires et voisins, la même volonté de domination que nous prétendions combattre chez les puissances auxquelles nous voulions résister. Les déclarations du quarante-septième Président des États-Unis à propos du canal de Panama, de Gaza, du Groenland ou même du Canada nous ont, en temps réel, fait mesurer la stupéfiante réalité : il n’y a plus de loi qui s’impose à tous et nous, Français et Européens, ne sommes pas armés pour un temps où la loi est tenue pour négligeable. Comment entendre en 2025 que "personne n’a de droits sur le Groenland" ou que quiconque ayant des droits devrait y renoncer car "nous avons besoin du Groenland pour notre sécurité nationale", s’agissant d’un territoire certes peu peuplé, mais grand comme quatre fois la France, au sous-sol riche des matières premières les plus rares, d’une biodiversité préservée par le climat particulier de cette région, et relevant de surcroît de la souveraineté d’un pays membre de l’OTAN ? ».

     

     
     


    La France, avec Emmanuel Macron, a été la première nation à poser clairement la question de la souveraineté européenne : « Ces questions, la France les a posées, la première et longtemps la seule parmi les alliés. Tous ceux qui entendaient à chaque rencontre internationale l’appel français à une plus grande autonomie de la défense européenne et qui levaient les yeux au ciel en y voyant une lubie ou la défense d’intérêts égoïstes, tous ceux-là mesurent aujourd’hui combien notre idée d’indépendance était fondée. C’est dans cet esprit que nous avons bâti, nous Français, notre appareil de défense, nos armées, à commencer par la dissuasion nucléaire et par ses vecteurs, ce qui fait, il convient de le rappeler, que notre pays est le seul, à l’égal des très grandes puissances, à disposer d’une armée autonome capable d’affronter la plupart des situations de menace, sans avoir à demander l’autorisation ou la permission de quiconque. ».

    Face aux défaillances de notre allié américain, les Européens ne sont pas sans puissance, et François Bayrou a voulu le rappeler très vivement, tel qu'un patriote de cœur le ressent : « Il est un constat que nous ne faisons pas assez : nous, les Européens, sommes plus forts que nous le croyons ; nous sommes forts et nous ne le savons pas. (…) Rappelons les chiffres. L’Union Européenne compte à elle seule 450 millions d’habitants ; avec la Grande-Bretagne et la Norvège, nos alliés, nous sommes plus de 520 millions d’habitants, contre 340 millions aux États-Unis et 150 millions en Russie. Le PIB de l’Union, additionné à celui de la Norvège et de la Grande-Bretagne, c’est plus de dix fois le PIB de la Russie. Les dépenses militaires de la Russie sont certes impressionnantes, 40% de son budget et 9% de son PIB, chiffres qui donnent une idée du déséquilibre dans les investissements. Cependant, l’efficacité opérationnelle des armées russes est arrêtée depuis trois ans par l’armée ukrainienne, qu’elles devaient pourtant emporter, affirmaient les dirigeants russes, en trois jours. En comparant les arsenaux, on découvre un rapport de force qui n’est pas du tout celui qui est décrit habituellement. Nos forces armées continentales, additionnées à celles du Royaume-Uni, comptent plus de 2,5 millions de soldats professionnels, soit 25% de plus que les forces russes ; elles disposent de 2 991 avions de combat, deux fois plus que les aviations des États-Unis et de la Russie, et de quelque 15 000 pièces d’artillerie, contre moins de 10 000 pour la Russie et seulement 5 000 pour les États-Unis. Nous, pays européens, sommes une force même si nous ne le savons pas. Sur ce point, je le crois, la France se trouve en accord, pour une fois, avec M. Trump. Si nous sommes forts, nous ne pouvons pas demander à d’autres de nous défendre durablement à notre place. Si nous sommes forts, c’est à nous, Européens, de garantir la sécurité et la défense de l’Europe. ».

     

     
     


    Et l'urgence, c'est d'abord défendre le peuple ukrainien bombardé matin midi et soir par Vladimir Poutine : « Nous ne pouvons pas laisser le peuple ukrainien sans défense. Nous devons aider l’Ukraine, mobiliser des ressources, partager les matériels, aider à former, sécuriser autant que possible et ne pas accepter qu’un retrait américain condamne à la défaite ce pays défenseur de nos libertés. Si nous demeurions impuissants, si la digue ukrainienne en venait à céder du fait de notre impuissance ou de notre négligence, alors n’en doutez pas : un jour ou l’autre, plus tard ou très tôt, ce sont nos pays, notre Union, qui se trouveraient ciblés. En effet, il est une leçon que l’histoire nous a enseignée et qui n’est jamais démentie : la force brutale ne se borne jamais elle-même. La situation nous dicte donc les questions que nous devons nous poser. Si les alliances se renversent, les Européens ont-ils la volonté de résister ? Ont-ils la volonté de défendre, non pas ce qu’ils ont, mais ce qu’ils sont ? Au fond, la seule question est la plus ancienne question, non seulement du théâtre, mais de la philosophie : to be or not to be ? Cette question ne cesse de se poser depuis des décennies. Beaucoup, chez nous et chez nos partenaires, mettaient en doute la nécessité de l’Union. Avec beaucoup d’autres, je crois et je soutiens que dans les circonstances créées par une telle menace de déstabilisation du monde, l’Union Européenne est pour nous le seul chemin et la seule stratégie possible. ».

    L'Union Européenne comme seule réponse possible à l'abandon américain : « C’est la seule réponse possible du point de vue de l’aide à apporter à l’Ukraine, aide financière et logistique, aide à la formation, aide militaire, aide diplomatique. C’est la seule réponse possible en matière commerciale : si nous nous laissons diviser, morceler, jouer les uns contre les autres, nous subirons tous la loi de ceux qui veulent nous affaiblir pour nous soumettre. C’est la seule réponse possible en matière de réarmement scientifique et technologique : si nous ne conduisons pas une telle politique, nous resterons condamnés à former, de la maternelle jusqu’au Prix Nobel ou à la Médaille Fields, les grands découvreurs qui continueront à aller découvrir ailleurs. C’est la seule réponse possible en matière industrielle et agricole pour que nos pays retrouvent leur place de fournisseurs compétitifs sur leurs propres marchés qui, autrefois déstabilisés par l’obsédante question du prix de la main d’œuvre, peuvent dorénavant être rééquilibrés par l’automatisation, la numérisation, l’algorithmique et la robotique. ».

    Et François Bayrou d'en venir aux bases gaulliennes de notre France : « L’histoire a montré qu’il y avait au ressaisissement européen une condition impérative : la vitalité et la force de la France. En effet, cette idée d’une Europe indépendante, autonome dans ses décisions, défendant elle-même sa liberté et ses intérêts, c’est la vision française. La France l’a défendue seule, à partir de l’intuition du Général De Gaulle, contre tous ceux que les temps invitaient à la facilité. Voilà ce que le fondateur de la Ve République, avec une prescience qui mérite d’être soulignée, affirmait en 1962 : "On ne sait jamais d’où peut venir la menace, ni d’où peut venir la pression ou le chantage. (…) Il peut se produire des événements fabuleux, des retournements incroyables. Il s’en est produit tellement dans l’histoire !". Après avoir observé qu’on ne sait pas ce qui peut se passer aux États-Unis et énuméré tous les risques de déstabilisation de la société américaine, il conclut : "Voilà pourquoi, tout en demeurant les alliés des Américains, nous voulons cesser de nous en remettre à eux". C’était en 1962. Depuis, la France a défendu cette vision inlassablement, en particulier lors des huit dernières années, par la voix du Président de la République. Elle l’a défendue assez souvent dans la solitude, qui est le lot de ceux dont la pensée est ferme. Je crois que les événements prouvent désormais aux yeux de tous, notamment à ceux de nos partenaires, que cette vision est d’intérêt général. La France peut jouer un rôle central dans l’édification de ce nouveau monde, de ce nouvel équilibre, mais elle ne le fera que si elle recouvre sa confiance et son unité. Tout ce que nous, Français, avons à construire et à reconstruire est la clef de cet autre monde. ».

    Pour le chef du gouvernement, il faut surtout garder son sang-froid, chérir l'unité et afficher de la détermination : « Face à la réalité d’un monde inattendu, tellement inattendu que nous ne parvenons même pas à le qualifier proprement, il faut nous organiser avec sang-froid, unité et détermination. Avec sang-froid, car tout affolement serait perçu comme signe de peur et pousserait tous ceux qui ne nous veulent pas de bien à poursuivre leur offensive psychologique, morale et politique, et, qui sait, peut-être un jour militaire, contre nous. Avec unité, car il serait dangereux qu’au-delà des déclarations communes et des résolutions conjointes, chacun aille négocier ici ou là un avenant national avantageux au dépeçage du monde, un sursis à exécution avant vassalisation. Avec détermination, car les mots ne suffiront pas. ».

     

     
     


    Enfin, François Bayrou a conclu, en bon agrégé de lettres, par une citation de Jules Romains : « L’événement ne nous laisse pas le choix. Dans les premiers mois de la guerre de 1914, dans un recueil composé au temps du fer, du feu et de la mort qu’il a simplement intitulé "Europe", Jules Romains a écrit ces quelques vers : "L’événement est sur nous. Il a le pas et le poil d’une bête quaternaire". Il voulait simplement dire, lui si souvent accusé d’idéalisme, qu’il est des moments où, devant le risque du pire, devant le réveil de forces primitives et archaïques, on n’a pas le choix. Nous n’avons pas vraiment le choix ; mais ce choix, au moins, est entre nos mains, et c’est la première raison d’espérer. ».

    Cette déclaration du gouvernement suivie d'un débat parlementaire a marqué la singularité historique que nous sommes en train de vivre. Emmanuel Macron et François Bayrou sont aux commandes de la France et c'est sans aucun doute les meilleurs dirigeants possibles pour une telle transformation d'abord des mentalités plus que du pays qui, déjà, est en cours de transformation. Bien entendu, les extrémismes sont vérolés par les donneurs d'ordre poutiniens mais leur anti-américanisme est désormais en déshérence, puisque même Marine Le Pen a affirmé son très nouvel amour pour notre allié américain. Le retournement est complet, et la crédibilité nulle.

    Les deux têtes de l'exécutif ont longtemps analysé les perspectives historiques de ces changements internationaux, et pour François Bayrou, je peux l'attester, il y réfléchit depuis la chute du mur de Berlin : il a toujours fait ses analyses selon la perspective des valeurs que nous voulons défendre, et celle de la paix ne peut se confondre avec une capitulation devant des "chefs de meute", comme il les a décrits si bien ce lundi 3 mars 2025 devant les députés pour certains émus d'entendre de telles paroles. Merci François Bayrou d'avoir mis des mots à ces profonds changements de paradigme, et merci de l'avoir fait dans l'enceinte de la représentation nationale, au cœur de la démocratie française. Et il faudra passer aux actes.



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (03 mars 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Manuel Valls pour la paix, mais pas au prix de la fin de l'Ukraine !
    Claude Malhuret s'en prend à Néron et à son bouffon !
    Emmanuel Macron : la patrie a besoin de vous !
    Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron le 5 mars 2025 (texte intégral et vidéo).
    François Bayrou : la France avait raison !
    Ukraine : Trump, porte-parole de Poutine !
    3 ans de guerre en Ukraine.
    Zelensky : Poutine, c'est l'anti-Europe !
    L'aide de la France à l'Ukraine le 6 juin 2024.
    Emmanuel Macron très gaullien à la télévision pour expliquer la gravité de la situation en Ukraine.
    Débat parlementaire sur l'Ukraine : les masques tombent en France !
    Ukraine : Sophia Aram traite à la sulfateuse les néopacifistes à la notoriété déclinante !
    L'Europe face à Poutine.
    Ukraine : Emmanuel Macron est-il un va-t-en-guerre ?
    Rapport de la commission d'enquête n°1311 de l'Assemblée Nationale relative aux ingérences politiques, économiques et financières de puissances étrangères (enregistré le 1er juin 2023).
    Jean-Pierre Chevènement et ses relations avec la Russie.
    François Fillon et ses relations avec la Russie.
    Ukraine : Gabriel Attal attaque durement le RN et Marine Le Pen !
    Soutien à l'Ukraine : la conférence de l'Élysée pour une défense européenne.
    Conférence de presse du Président Emmanuel Macron lors de la Conférence de soutien à l'Ukraine le 26 février 2024 à l'Élysée (vidéos).
    2 ans de guerre en Ukraine : Poutine zéro en histoire !
    Amitié franco-ukrainienne : fake news et accord de coopération.
    Lee Marvin, les Douze Salopards et la Russie.
    La France Unie soutient l'Ukraine !
    Condoléances cyniques.
    Mort d'Evgueni Prigojine.

    Sergueï Kirienko.
    Victoria Amelina.

    L'effondrement du pouvoir de Poutine.
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    Poutine en état d'arrestation !
    Ukraine, un an après : "Chaque jour de guerre est le choix de Poutine".
    L'Ukraine à l'Europe : donnez-nous des ailes !
    Kherson libéré, mais menace nucléaire ?

    Volodymyr Zelensky demande l'adhésion accélérée de l'Ukraine à l'OTAN.
    6 mois de guerre en Ukraine en 7 dates.
    Les massacres de Boutcha.
    Le naufrage du croiseur russe Moskva.
    L’assassinat de Daria Douguina.
    Kiev le 16 juin 2022 : une journée d’unité européenne historique !
    L'avis de François Hollande.
    Les valeurs valent mieux que les bénéfices !
    Poutine paiera pour les morts et la destruction de l’Ukraine.
    Ukraine en guerre : coming out de la Grande Russie.
    Robert Ménard, l’immigration et l’émotion humanitaire.
    Ukraine en guerre : Emmanuel Macron sur tous les fronts.
    Nous Européens, nous sommes tous des Ukrainiens !

     

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250303-bayrou-ukraine.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/europe/article/francois-bayrou-la-france-avait-259655

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/03/03/article-sr-20250303-bayrou-ukraine.html


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  • Manuel Valls pour la paix, mais pas au prix de la fin de l'Ukraine !

    « Vous savez, dans le monde, aujourd'hui, au fond, je ne veux pas simplifier les choses car c'est évidemment beaucoup plus complexe, mais d'un côté, il y a la brutalité, le règne de l'argent, la remise en cause de l'État de droit, et de l'autre côté, cette vieille Europe, nos valeurs universelles, mais que nous partageons aussi avec le Canada menacé par les États-Unis, avec l'Australie qui travaille aussi avec nous sur ces questions-là, la vieille Europe, la France, l'Allemagne, la Grande-Bretagne (…). Eh bien, il faut un réveil, et ce réveil, il est autour (…) des valeurs de la démocratie, de l'État de droit, de la liberté. Pour moi et pour nous, cela doit compter. » (Manuel Valls, le 10 mars 2025 sur BFMTV).


     

     
     


    À 62 ans, l'ancien Premier Ministre Manuel Valls revient de loin. Certes, il revient d'un déplacement lointain à l'île de La Réunion où il a constaté les énormes dégâts du cyclone Garance d'il y a quelques jours, qui a fait cinq morts et beaucoup de destructions matérielles. Mais je voulais dire plus généralement sur le plan politique. Après son échec à la primaire du PS en janvier 2017, il a végété pendant sept ans (sept ans de malheurs !).

    Refusant de soutenir la candidature de son concurrent Benoît Hamon pour apporter son vote à Emmanuel Macron, qui, malgré tout, ne l'a pas aidé à intégrer vraiment sa nouvelle majorité parlementaire (il a été réélu député à Évry face à une candidate insoumise), l'ancien chargé de communication de Lionel Jospin a émigré à Barcelone pour tenter de se refaire une virginité politique, sans succès (il envisageait sérieusement d'être maire de Barcelone mais il a lamentablement échoué). Puis, il est retourné en France (pas seulement, semble-t-il, en raison de ses déboires politiques) et n'a jamais cessé d'offrir ses services au Président de la République qui n'a jamais cessé de le snober.

    Et puis, François Bayrou est arrivé. Au printemps 2012, l'actuel Premier Ministre, alors candidat à l'élection présidentielle, voyait quelques convergences de vision politique avec celui qui était alors le porte-parole d'un de ses adversaires dans la compétition, François Hollande. Le repêchage de Manuel Valls par François Bayrou convenait aux deux : pour le nouveau gouvernement, il apportait la caution d'un ancien socialiste très engagé au sein du PS (Premier Ministre, candidat à la candidature deux fois), et pour le nouveau Ministre d'État, Ministre des Outre-mer, cela lui redonnait bien sûr une mission et un but politique, qu'il a acceptés plutôt humblement alors qu'on confie généralement aux anciens Premiers Ministres des portefeuilles beaucoup plus régaliens ou politiques (Défense, Affaires étrangères, Économie et Finances).

    Ce lundi 10 mars 2025, Manuel Valls a été l'invité d'Apolline de Malherbe sur BFMTV pour l'interview du matin. Il a évoqué bien sûr le cyclone Garance mais aussi les sujets internationaux sur lesquels je m'arrêterai. Il ne faut pas négliger l'expertise de Manuel Valls dans le domaine des relations internationales. Européen, ancien Ministre de l'Intérieur de grande fermeté, puis ancien Premier Ministre qui a eu à gérer les attentats de "Charlie Hebdo" et de Paris en 2015, il connaît bien la sécurité intérieure et la coopération internationale en matière de terrorisme islamique.

    On l'a d'abord interrogé sur la future désignation de Friedrich Merz comme Chancelier allemand, au lendemain d'un premier accord de principe pour la grande coalition CDU/SPD. Bien que membre de la CDU, Friedrich Merz a pris des positions diamétralement opposées à Angela Merkel quand elle était Chancelière, en particulier sur l'énergie (Friedrich Merz est favorable au nucléaire), sur la défense européenne (bien que très atlantiste, Friedrich Merz rejoint à 100% la position du Président français Emmanuel Macron de bâtir une réelle défense européenne avec des armes européennes pour établir une souveraineté européenne de défense), et aussi, surtout même, sur l'immigration.

    À l'époque, il y a dix ans, il avait fortement critiqué l'ouverture des frontières allemandes d'Angela Merkel aux réfugiés syriens. Et à cette époque, c'était Manuel Valls qui dirigeait le gouvernement français et qui s'était, lui aussi, opposé à cette ouverture des frontières, la France n'avait pas suivi l'Allemagne dans cette politique à la fois humanitaire et économique (à l'époque, je l'avais regretté) : « Nous n'avions pas ouvert les frontières parce que nous craignions les conséquences sur nos sociétés. ». Rappelant entre autres « les agressions sexuelles d'un certain nombre de migrants le 31 décembre à Cologne ».

    Sur la défense européenne, Manuel Valls a estimé que Friedrich Merz « va être, je crois, un allié très structurant, très important pour la France et pour l'Europe face aux nouvelles menaces (…) et qui change aussi, d'une certaine manière, les équilibres financiers (…). C'est des changements importants. ». On peut imaginer un tandem Macron-Merz très efficace pour déployer la défense européenne sur le plan autant industriel que militaire.


    Même si la France, grâce à De Gaulle et à tous ses successeurs, a choisi la voie de l'indépendance par sa propre dissuasion nucléaire, Manuel Valls a admis le changement qui s'opère en ce moment dans les relations internationales : « C'est vrai, l'ensemble de l'Europe est en train de sortir d'une forme de naïveté. ». Beaucoup d'États européens se reposaient simplement sur la protection américaine pour assurer leur sécurité.

    Et le ministre d'État a présenté la situation de manière assez simple : « La question fondamentale (…), c'est : est-ce que nous sommes capables, nous Européens, de construire une puissance pour sauvegarder la liberté et la démocratie face, au fond, à la vassalité, au renoncement, à la lâcheté, qu'on retrouve, y compris dans la classe politique français. ».


    La menace de Vladimir Poutine, elle n'est pas seulement territoriale : « Ce n'est pas seulement une guerre militaire qui est menée, c'est une guerre idéologique, c'est une guerre hybride, voyez ce qui s'est passé en Roumanie il y a quelques semaines au moment de l'élection présidentielle. La déstabilisation, cela nous concerne, à chaque élection en Europe et dans le monde, parlez avec les Polonais, avec les Baltes, avec les Moldaves, avec les Roumains, de ce que cela peut représenter comme menace. Donc, cette menace, elle est là, et face à cela, eh bien, il y a toujours ceux qui, d'une certaine manière, s'accommodent de la puissance, de la violence, de la remise en cause de l'État de droit. ». Manuel Valls pensait notamment à François Fillon, à des responsables du RN et de FI.

    S'inquiétant de la politique de Donald Trump, il a ajouté : « Ce qui est en train de changer, au fond, ce n'est pas la menace russe, elle est déjà là depuis un certain nombre d'années, c'est le comportement erratique, l'imprévisibilité de l'administration Trump. C'est ce qui nous oblige à réagir. (…) Tout cela nous oblige, d'une manière ou d'une autre, à une réaction, et c'est vrai, en termes d'investissements pour la défense, et donc, à revisiter, d'une manière ou d'une autre, nos modèles. ».

    Manuel Valls n'a pas voulu qualifier la position de François Fillon d'une forme de traîtrise, « mais il y a une forme de renoncement, ça, c'est clair. Il y a du reniement. Ce n'est pas nouveau. Il y a toujours eu, au fond, une fascination de la Russie, qui est évidemment un grand peuple, une grande culture, avec qui nous avons toujours eu des liens, il y a une fascination par rapport à la puissance, à la brutalité. Les mêmes qui sont fascinés par Poutine le sont aujourd'hui par Donald Trump. ».


    Le changement est réel et grave : « Je pense que la remise en cause de l'ordre international tel qu'il a été conçu depuis la dernière guerre mondiale, d'un certain nombre de valeurs de la démocratie, enfin, menacer le Canada, menacer le Groenland, menacer le Panama, on voit bien qu'il y a quelque chose qui est en train de changer. (…) Cela nous oblige surtout, nous, à réagir, et c'est ce qu'impulse le Président de la République et je m'en félicite. ».

     

     
     


    À un sondage du journal "Ouest-France" indiquant qu'une majorité des sondés (61%) serait favorable au rétablissement du service militaire, Manuel Valls a réagi ainsi : « Nos compatriotes sont très intelligents, ils ont le sens de l'histoire, ils savent ce que peuvent représenter deux guerres mondiales, ils connaissent le prix de la liberté et de la démocratie. Donc, il faut expliquer, c'est ce que fait le Président de la République, c'est ce que fait le Premier Ministre, c'est ce que font les ministres de la défense et des affaires étrangères, c'est ce que nous devons tous faire. Quelle sont les enjeux ? Pourquoi il faut investir demain, sans doute, 100 milliards dans la défense ? ».

    La situation de l'Ukraine est alarmante et il y a encore beaucoup de questions sans réponse : « L'Europe prend ses responsabilités. Il y a une course contre la montre parce que l'Ukraine et son Président Volodymyr Zelensky représentent précisément cette liberté et cette démocratie. On cherche aussi évidemment un cessez-le-feu, la possibilité pour éventuellement des armées européennes de préserver ce cessez-le-feu demain face à d'éventuelles nouvelles agressions de la Russie. Donc, il y a un débat aussi qui implique les diplomates. Est-ce qu'on veut que cette guerre s'arrête ? Mais pas à n'importe quel prix, pas au prix de la vassalité, pas au prix du renoncement, pas au prix de la fin de l'Ukraine. ».

    Le retournement des États-Unis doit nous servir de leçon, et d'abord, d'unité nationale sur le plan intérieur : « Ce qui évidemment est redoutable, c'est que la grande puissance américaine (…) semble préférer d'autres types d'alliance. Et cela nous oblige à un réveil, à une très grande responsabilité. Ceux qui partagent d'ailleurs les mêmes visions du monde, de l'Europe et de la démocratie, dans la vie politique française, doivent être capables de se rassembler sur l'essentiel. Nous sommes sur l'essentiel. Nous sommes l'un de ses moments majeurs (…). Il faut relire Churchill et De Gaulle pour nous rappeler à nos obligations et à notre responsabilité. ».

    Après avoir évoqué la Nouvelle-Calédonie, Manuel Valls a aussi été interrogé sur les massacres commis en Syrie par des milices soutenant le pouvoir actuel et qu'on a découverts, au moins 1 311 personnes massacrées depuis le 6 mars 2025 en Syrie : « Vous avez, le concept d'islamiste modéré est à réétudier, non ? Ça n'existe pas ! Mais de l'autre côté, ce pays a subi une telle violence. Il y a sans doute des pulsions de vengeance terribles. Le pouvoir actuel est sur un réduit. La guerre est passée par là, les massacres des civils. Ce qui s'est passé est évidemment inacceptable, et moi aussi, je m'inquiète sur le sort des Alaouites, des chrétiens d'Orient bien évidemment, qui ont tellement subi, au cours de ces dernières années, un peu partout, en Irak et en Syrie. Donc, la communauté internationale doit être présente, doit rappeler le nouveau pouvoir à ses obligations, il y a une commission d'enquête en place, et faisons attention. Nous sommes sur une poudrière, là-bas. Là aussi, n'oublions pas quels sont nos véritables alliés. Nos alliés, là-bas, ce sont les Israéliens et les Kurdes, ne l'oublions jamais ! ».



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (10 mars 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Manuel Valls pour la paix, mais pas au prix de la fin de l'Ukraine !
    Claude Malhuret s'en prend à Néron et à son bouffon !
    Emmanuel Macron : la patrie a besoin de vous !
    Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron le 5 mars 2025 (texte intégral et vidéo).
    François Bayrou : la France avait raison !
    Ukraine : Trump, porte-parole de Poutine !
    3 ans de guerre en Ukraine.
    Zelensky : Poutine, c'est l'anti-Europe !
    L'aide de la France à l'Ukraine le 6 juin 2024.
    Emmanuel Macron très gaullien à la télévision pour expliquer la gravité de la situation en Ukraine.
    Débat parlementaire sur l'Ukraine : les masques tombent en France !
    Ukraine : Sophia Aram traite à la sulfateuse les néopacifistes à la notoriété déclinante !
    L'Europe face à Poutine.
    Ukraine : Emmanuel Macron est-il un va-t-en-guerre ?
    Rapport de la commission d'enquête n°1311 de l'Assemblée Nationale relative aux ingérences politiques, économiques et financières de puissances étrangères (enregistré le 1er juin 2023).
    Jean-Pierre Chevènement et ses relations avec la Russie.
    François Fillon et ses relations avec la Russie.
    Ukraine : Gabriel Attal attaque durement le RN et Marine Le Pen !
    Soutien à l'Ukraine : la conférence de l'Élysée pour une défense européenne.
    Conférence de presse du Président Emmanuel Macron lors de la Conférence de soutien à l'Ukraine le 26 février 2024 à l'Élysée (vidéos).
    2 ans de guerre en Ukraine : Poutine zéro en histoire !
    Amitié franco-ukrainienne : fake news et accord de coopération.
    Lee Marvin, les Douze Salopards et la Russie.
    La France Unie soutient l'Ukraine !
    Condoléances cyniques.
    Mort d'Evgueni Prigojine.

    Sergueï Kirienko.
    Victoria Amelina.

    L'effondrement du pouvoir de Poutine.
    Putsch en Russie : faut-il sauver le soldat Poutine ?
    Poutine en état d'arrestation !
    Ukraine, un an après : "Chaque jour de guerre est le choix de Poutine".
    L'Ukraine à l'Europe : donnez-nous des ailes !
    Kherson libéré, mais menace nucléaire ?

    Volodymyr Zelensky demande l'adhésion accélérée de l'Ukraine à l'OTAN.
    6 mois de guerre en Ukraine en 7 dates.
    Les massacres de Boutcha.
    Le naufrage du croiseur russe Moskva.
    L’assassinat de Daria Douguina.
    Kiev le 16 juin 2022 : une journée d’unité européenne historique !
    L'avis de François Hollande.
    Les valeurs valent mieux que les bénéfices !
    Poutine paiera pour les morts et la destruction de l’Ukraine.
    Ukraine en guerre : coming out de la Grande Russie.
    Robert Ménard, l’immigration et l’émotion humanitaire.
    Ukraine en guerre : Emmanuel Macron sur tous les fronts.
    Nous Européens, nous sommes tous des Ukrainiens !







    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250310-valls.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/international/article/manuel-valls-pour-la-paix-mais-pas-259804

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/03/10/article-sr-20250310-valls.html


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  • Claude Malhuret s'en prend à Néron et à son bouffon !

    « Le bouclier américain se dérobe, l’Ukraine risque d’être abandonnée et la Russie renforcée. Washington est devenue la cour de Néron : un empereur incendiaire, des courtisans soumis et un bouffon sous kétamine chargé de l’épuration de la fonction publique. » (Claude Malhuret, le 4 mars 2025 au Sénat).



     

     
     


    Incontestablement, Claude Malhuret y est allé assez fort dès la première phrase de son discours. Président du groupe Les Indépendants, République et Territoires au Sénat, le docteur Claude Malhuret, qui a derrière lui une très longue carrière politique (il était ministre en 1986), et qui vient d'avoir 75 ans ce samedi 8 mars 2025, est un habitué du sens de la formule. Certains aiment faire leur show pour dire n'importe quoi, et plus c'est n'importe quoi, plus c'est un show (autrement dit, plus ça buzze, pour traduire dans la langue d'aujourd'hui).

    Alors, évidemment, cela marche mieux avec les populistes, les extrémistes, avec tous ceux qui exagèrent, qui caricaturent, qui extrapolent, qui simplifient, qui falsifient la réalité et les faits, qu'avec des gens raisonnables qui veulent faire entendre le langage de la raison et de la logique. C'est pour cela que l'exercice du sénateur Claude Malhuret est précieux, car des orateurs aussi talentueux que lui sont rares, il faut le saluer.

    Il participait au débat parlementaire voulu par le gouvernement sur la situation en Ukraine, qui s'est tenu au Sénat lors de sa séance du mardi 4 mars 2025. Et évidemment, il a évoqué la position de Donald Trump, le Président des États-Unis, qui consiste en un lâchage pur et simple du peuple ukrainien sous les bombes de Vladimir Poutine : « C’est un drame pour le monde libre, mais c’est d’abord un drame pour les États-Unis. Le message de Trump est que rien ne sert d’être son allié puisqu’il ne vous défendra pas, puisqu’il vous imposera plus de droits de douane qu’à ses ennemis et vous menacera de s’emparer de vos territoires tout en soutenant les dictatures qui vous envahissent. Le roi du deal est en train de montrer ce qu’est l’art du deal à plat ventre. Il pense qu’il va intimider la Chine en se couchant devant Poutine, mais Xi Jinping, devant un tel naufrage, est sans doute en train d’accélérer les préparatifs de l’invasion de Taïwan. ». L'art du deal à plat ventre, je souligne.

    Et Claude Malhuret d'insister sur cette singularité historique : « Jamais dans l’Histoire un Président des États-Unis n’a capitulé devant l’ennemi. Jamais aucun d’entre eux n’a soutenu un agresseur contre un allié, jamais aucun n’a piétiné la Constitution américaine, pris autant de décrets illégaux, révoqué les juges qui pourraient l’en empêcher, limogé d’un coup l’état-major militaire, affaibli tous les contre-pouvoirs, ou pris le contrôle des réseaux sociaux. Ce n’est pas une dérive illibérale ; c’est un début de confiscation de la démocratie. Rappelons-nous qu’il n’a fallu qu’un mois, trois semaines et deux jours pour mettre à bas la République de Weimar et sa Constitution. J’ai confiance dans la solidité de la démocratie américaine ; d’ailleurs, le pays proteste déjà. Mais, en un mois, Trump a fait plus de mal à l’Amérique qu’il n’en a fait en quatre ans lors de sa précédente Présidence. ».
     

     
     


    La réalité est là. Donald Trump s'est couché devant Vladimir Poutine : « Nous étions en guerre contre un dictateur ; nous nous battons désormais contre un dictateur soutenu par un traître. Il y a huit jours, au moment même où Trump passait la main dans le dos de Macron à la Maison-Blanche, les États-Unis votaient avec la Russie et la Corée du Nord à l’ONU contre les Européens réclamant le départ des troupes russes. Deux jours plus tard, dans le Bureau ovale, le planqué du service militaire donnait des leçons de morale et de stratégie au héros de guerre Zelensky, avant de le congédier comme un palefrenier en lui ordonnant de se soumettre ou de se démettre. Cette nuit, il a franchi un pas supplémentaire dans l’infamie en stoppant la livraison d’armes pourtant promise. ».

    L'enjeu de la résistance de l'Ukraine, c'est l'existence des nations européennes : « La défaite de l’Ukraine serait la défaite de l’Europe. Les pays baltes, la Géorgie, la Moldavie figurent déjà sur la liste. Le but de Poutine est le retour à Yalta, où fut cédée la moitié du continent à Staline. Les pays du Sud attendent l’issue du conflit pour décider s’ils doivent continuer à respecter l’Europe ou s’ils sont désormais libres de la piétiner. Ce que veut Poutine, c’est la fin de l’ordre mis en place par les États-Unis et leurs alliés il y a quatre-vingts ans, lequel avait pour premier principe l’interdiction d’acquérir des territoires par la force. Cette idée est à la source même de l’ONU, au sein de laquelle les Américains votent aujourd’hui en faveur de l’agresseur, et contre l’agressé. En effet, la vision trumpienne coïncide avec celle de Poutine : elle défend un retour aux sphères d’influence, les grandes puissances dictant le sort des petits pays. À moi, le Groenland, le Panama et le Canada ; à toi, l’Ukraine, les Pays baltes et l’Europe de l’Est ; à lui, Taïwan et la mer de Chine… On appelle cela, dans les soirées des oligarques du golf de Mar-a-Lago, le "réalisme diplomatique"… ».

    À cet égard, Claude Malhuret a rejoint la position de l'ancien président de la commission des affaires étrangères de l'Assemblée Jean-Louis Bourlanges, interrogé le 3 mars 2025 sur France 5, qui remarquait quatre points communs entre Donald Trump, Vladimir Poutine et Xi Jinping : d'abord, leur autocratisme, la volonté d'avoir un chef qui contrôle tout, comme un parrain clanique ; ensuite, la pratique d'un nationalisme impérial, à savoir l'idée que le monde se réduit à quelques blocs qui se laisseraient faire ce qu'ils veulent dans leur voisinage proche ; troisième tendance, le rejet de tout État de droit, tout contre-pouvoir, musellement de la presse, des réseaux sociaux, de toute opposition ; enfin, quatrième point commun, l'asservissement technologique (en particulier numérique) des peuples, leur surveillance, leur contrôle, leur neutralisation irréversible.

    Le sénateur Malhuret a alors abordé la réaction de l'Europe : « Nous sommes donc seuls. Mais le discours selon lequel on ne peut résister à Poutine est faux. Contrairement à ce qu’affirme la propagande du Kremlin, la Russie va mal. En trois ans, la soi-disant deuxième armée du monde n’a réussi à grappiller que des miettes d’un pays trois fois moins peuplé. Les taux d’intérêt à 25%, l’effondrement des réserves de devises et d’or, l’écroulement démographique montrent que ce pays est au bord du gouffre. Le coup de pouce américain à Poutine est la plus grande erreur stratégique jamais commise lors d’une guerre. Le choc est violent, mais il a une vertu : les Européens sortent du déni. Ils ont compris en un jour, à Munich, que la survie de l’Ukraine et l’avenir de l’Europe sont entre leurs mains, et que trois impératifs s’imposent à eux. Tout d’abord, ils devront accélérer la livraison de l’aide militaire à l’Ukraine pour compenser le lâchage américain, faire en sorte que celle-ci tienne et, bien sûr, imposer sa présence et celle de l’Europe dans toute négociation. Cela coûtera cher. Il faudra donc en finir avec le tabou de l’utilisation des avoirs russes gelés. Il faudra aussi contourner les complices de Moscou à l’intérieur même de l’Europe, en formant une coalition des seuls pays volontaires, avec bien sûr le Royaume-Uni. Ensuite, il faudra exiger de tout accord qu’il prévoie le retour des enfants kidnappés et des prisonniers, et qu’il comporte la garantie d’une sécurité absolue. Après Budapest, la Géorgie et Minsk, nous savons ce que valent les accords avec Poutine. Cette garantie passe par une force militaire suffisante pour empêcher toute nouvelle invasion. Enfin, et c’est le plus urgent, parce c’est ce qui prendra le plus de temps, il faudra rebâtir la défense européenne, négligée au profit du parapluie américain depuis 1945 et sabordée depuis la chute du mur de Berlin. C’est une tâche herculéenne, mais c’est sur le fondement de la réussite ou de l’échec de cette construction que seront jugés dans les livres d’histoire les dirigeants de l’Europe démocratique d’aujourd’hui. ».


     

     
     


    En outre, il a constaté avec joie que même l'Allemagne commence à dire que la France avait raison : « Friedrich Merz vient de déclarer que l’Europe avait besoin de sa propre alliance militaire. C’est reconnaître que la France avait raison depuis des décennies en plaidant pour une autonomie stratégique. Il reste à la construire. Il faudra investir massivement et renforcer le Fonds européen de défense, hors critères de Maastricht, harmoniser les systèmes d’armes et de munitions, accélérer l’entrée dans l’Union de l’Ukraine, laquelle possède aujourd’hui la première armée européenne, repenser la place et les conditions de la dissuasion nucléaire à partir des capacités française et britannique, et relancer les projets de bouclier antimissile et de satellite européens. Le plan annoncé hier par Ursula von der Leyen est un très bon point de départ. Et il faudra beaucoup plus. L’Europe ne redeviendra une puissance militaire qu’en redevenant une puissance industrielle. En un mot, il faudra appliquer le rapport Draghi, et pour de bon. ».

    Au-delà de la stratégie, des investissements, de la réindustrialisation, il y a l'aspect moral : « Le vrai réarmement de l’Europe, c’est son réarmement moral. Nous devons convaincre l’opinion face à la lassitude et à la peur de la guerre, et, surtout, face aux comparses de Poutine, l’extrême droite et l’extrême gauche. Ces derniers ont encore plaidé hier, à l’Assemblée Nationale, devant vous, monsieur le Premier Ministre, contre l’unité européenne et la défense européenne. Ils disent vouloir la paix. Ce que ni eux ni Trump ne disent, c’est que leur paix, c’est la capitulation, la paix de la défaite, le remplacement de "De Gaulle-Zelensky" par un "Pétain ukrainien" à la botte de Poutine, la paix des collabos qui ont refusé depuis trois ans toute aide aux Ukrainiens ! Le risque est grand, mais l’humiliation publique de Zelensky et toutes les décisions folles prises depuis un mois ont fini par faire réagir les Américains. Les sondages sont en chute libre, les élus républicains sont accueillis par des foules hostiles dans leurs circonscriptions. Même Fox News devient critique ! Les trumpistes ne sont plus en majesté. Ils contrôlent certes l’exécutif, le Parlement, la Cour suprême et les réseaux sociaux, mais, dans l’histoire américaine, les partisans de la liberté l’ont toujours emporté. Ils commencent à relever la tête… ».

     

     
     


    Enfin, la conclusion, sans ambiguïté, de cet éloquent exercice de géopolitique et d'histoire des relations internationales : « Le sort de l’Ukraine se joue dans les tranchées, mais il dépend aussi de ceux qui, aux États-Unis, veulent défendre la démocratie et, ici, de notre capacité à unir les Européens, à trouver les moyens de leur défense commune et à refaire de l’Europe la puissance qu’elle fut un jour et qu’elle hésite à redevenir. Nos parents ont vaincu le fascisme et le communisme au prix de tous les sacrifices. La tâche de notre génération est de vaincre les totalitarismes du XXIe siècle. Vive l’Ukraine libre, vive l’Europe démocratique ! ».

    Faut-il alors s'étonner que cet excellent exposé ait été rediffusé aux États-Unis, sur des chaînes comme CNN, et que les vidéos de cette intervention orale aient parfois obtenu plus de 3 millions de vues ? Claude Malhuret, qui a présidé Médecin sans frontières il y a quelque temps, va devenir la coqueluche des citoyens américains sidérés par les premières semaines du mandat de Donald Trump. Il est temps que l'opposition démocrate se réveille et défende, un peu plus vaillamment qu'aujourd'hui, les valeurs fondamentales de la démocratie et de l'État de droit.

    À court terme, la vie des Ukrainiens en dépend. Le journaliste Jean Quatremer disait à juste titre ce vendredi 7 mars 2025 sur LCI que chaque mort de civil ukrainien depuis le début de la semaine était de la responsabilité de Donald Trump qui a retiré brutalement l'aide des renseignements américains pour les antimissiles : « Chaque mort supplémentaire est imputable à Donald Trump ! (…) Il faut dire les choses clairement. L'Ukraine se fait pilonner aujourd'hui avec l'aide des Américains, puisqu'ils ont coupé le robinet des renseignements qui permettaient d'intercepter les missiles. ».

    À plus long terme, c'est la défense et la protection de l'Europe qui sont en jeu. Merci Claude Malhuret d'avoir exprimé aussi clairement et synthétiquement ce qu'il fallait analyser dans cette situation internationale devenue de plus en plus compliquée. Au fait, vous savez qui est le bouffon de Néron ? Selon certains, il aurait bloqué le compte Twitter du sénateur Malhuret, mais ce dernier aurait lui-même démenti l'information.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (08 mars 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Claude Malhuret s'en prend à Néron et à son bouffon !
    Claude Malhuret : du vol des élections aux chefs d'escadrille...
    Claude Malhuret au Sénat : le spectacle continue !
    Ukraine : Claude Malhuret se gausse de Jordan Selfie !
    Claude Malhuret sur l'inscription de l'IVG dans la Constitution le 4 mars 2024 à Versailles.
    Claude Malhuret s'en prend à "la pression permanente et déprimante des extrêmes" !
    Claude Malhuret dénonce la "mauvaise république" du guide suprême !
    L'Iran et les femmes : Claude Malhuret contre la mollarchie.
    Passe vaccinal : Claude Malhuret charge lourdement les antivax.
    Covid-19 : les trois inepties du docteur Claude Malhuret.



     

     
     



    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250304-malhuret.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/claude-malhuret-s-en-prend-a-neron-259682

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/03/04/article-sr-20250304-malhuret.html


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  • Florence Arthaud, chacun prend feu comme il peut

    « À Pointe-à-Pitre, Florence Arthaud, à bout de forces et après avoir été privée d’électronique et de communication depuis les Açores, entrera dans la légende du Rhum en étant la première femme à s’imposer sur une course au large en solitaire. » (Site officiel de la Route du Rhum).




     

     
     


    Le 8 mars, c'est la fête des femmes. Cela devrait être tous les jours, tant les femmes éclairent de leur beauté, de leur sagacité et de leur intelligence la vie des hommes. Mais n'en faisons pas trop, et cette année, s'il y a une femme à fêter (c'est très arbitraire), je voudrais le faire pour Florence Arthaud, qui est morte accidentellement il y a dix ans, le 9 mars 2015 à l'âge de 57 ans. On pourrait aussi fêter Violette Dorange, mais j'y reviendrai.

    Effectivement, il y a dix ans, c'était le choc. Dix personnes ont péri lors de l'accident aérien du 9 mars 2015 près de Villa Castelli, dans la Quebrada del Yeso, dans la province de La Rioja, en Argentine. Ce fut la collision de deux hélicoptères qui transportaient les participants au tournage d'une émission de téléréalité appelée "Dropped" produite pour le compte de TF1. La conséquence probablement d'une erreur de pilotage (angle mort, soleil éblouissant, caméra qui gêne, etc.). L'un des hélicoptères était parti en premier pour les prises de vue et le second transportait trois concurrents du jeu et ils se sont trop rapproché l'un de l'autre. Les deux appareils se sont écrasés et se sont enflammés.

    Comme chaque vie se vaut, bien sûr, citons le nom des dix victimes dont huit françaises : la navigatrice Florence Arthaud, la jeune nageuse niçoise Camille Muffat (25 ans), championne olympique de natation (le 29 juillet 2012 à Londres en 400 mètres nage libre), le jeune boxeur Alexis Vastine (28 ans), champion du monde militaire de boxe en 2008, 2010, 2011 et 2014 (et sa sœur était morte dans un accident en janvier 2015, triste hiver pour la famille), c'étaient les trois concurrents du jeu, avec aussi des employés de la société de production, le réalisateur Laurent Sbasnik (40 ans), la journaliste Lucie Mei-Dalby, le chef de projet Volodia Guinard (36 ans), le cameraman Brice Guilbert (32 ans), l'ingénieur du son Édouard Gilles, et, enfin, les deux pilotes argentins Juan Carlos Castillo et César Roberto Abate.
     

     
     


    D'autres concurrents, présents au sol à quelques centaines de mètres, attendaient leur tour, pour prendre aussi l'hélicoptère, notamment le patineur artistique Philippe Candeloro, la cycliste Jeannie Longo, et quelques autres (en tout, huit sportifs de haut niveau participaient à l'émission de téléréalité, dont un avait déjà été "éliminé" du jeu et était rentré en France). On peut imaginer leur traumatisme.

    Parmi les dix victimes, une m'a particulièrement beaucoup ému, c'était Florence Arthaud qui fait partie de ces héroïnes dont la France peut être fière. Elle a été la première femme à gagner la Route du Rhum (entre Saint-Malo et Pointe-à-Pitre) le 18 novembre 1990 en 14 jours et 10 heures avec son trimaran Pierre 1er, après un parcours en solidaire de près de 6 500 kilomètres (le record actuel a été battu le 16 novembre 2022 par Charles Caudrelier en 9 jours et 20 heures, mais avec un type de bateau différent). Une seule autre femme a remporté la Route du Rhum, en 2002, dans une autre catégorie de bateau (monocoque), la navigatrice britannique Ellen MacArthur.
     

     
     


    Et cette victoire de 1990, Florence Arthaud l'a due à sa très forte ténacité. Elle a participé à la première édition en 1978 alors qu'elle n'avait que 21 ans, puis aux deux autres éditions de 1982 et 1986 avant de gagner la quatrième édition. En novembre 1986, elle a fait un détour pour tenter de secourir, hélas en vain, Loïc Cadarec qui avait chaviré. Elle est arrivée à la onzième position et ne s'avouait pas vaincue : « Ce qui m'intéresse, ce n'est pas d'arriver. Si je fais de la compétition, ce n'est pas pour participer, c'est pour gagner ! Ben, c'est raté, encore une fois ! Il faudra que je recommence dans quatre ans ! ». Et pourtant, malade, elle n'en menait pas très large en 1990 : « J’ai failli abandonner et puis je me suis dit, non je n’abandonnerai pas. Je n'ai jamais abandonné, ce n'est pas aujourd'hui que je vais commencer ! ».
     

     
     


    Cette victoire a troublé jusqu'aux académiciens puisque, le 10 décembre 1992, dans sa réponse au discours de réception du nouveau membre de l'Académie française Jean-François Deniau, lui aussi infatigable navigateur (en même temps qu'ancien ministre), Alain Peyrefitte a déclaré : « Au détour d’une page, j’ai découvert un trait qui n’est pas sans rapport avec notre cérémonie. Vous estimez que la navigation de plaisance est une affaire d’hommes (comme nous l’estimions, jusqu’à une date récente, de l’Académie). C’était avant que Florence Arthaud ne confirmât la règle par son exception. Cependant, vous admettez qu’ "une femme à bord qui aime la mer est une vraie bénédiction !". Vous le voyez, il y a, sur la participation du beau sexe, une analogie frappante entre la plaisance et l’Académie. Votre livre suggère d’autres rapprochements. Ainsi, quand vous affirmez que "la meilleure façon de survivre est quand même de rester à bord", votre maxime s’appliquerait parfaitement à la vie politique. Vous avez toujours su éviter d’être jeté par-dessus bord. ».

    Elle a chanté la célèbre chanson qui lui a été consacrée "Flo" en raison de ses exploits, en duo avec Pierre Bachelet en 1989. Beaucoup plus tard, le Président Nicolas Sarkozy lui a même proposé le poste de Ministre des Sports, qu'elle a refusé dans sa grande sagesse (elle avait d'autres trucs à faire), même si naviguer dans un gouvernement suppose toujours quelques exploits.


    Incontestablement, Florence Arthaud était une passionnée enragée. Son père, patron de la plus grande librairie de Grenoble (j'y ai passé des heures entières certains jours anciens), avait édité des récits d’Éric Tabarly, ce qui l’avait mise dans le bain de la navigation assez vite. Libraire et éditeur, Jacques Arthaud a sorti une nouvelle collection avec des livres sur la mer qui ont eu beaucoup de succès, avec aussi Loïck Peyron, Alain Colas, Philippe Jeantot, Yvan Bourgnon, Bernard Moitessier, Isabelle Autissier, etc.

     

     
     


    Adolescente, elle a commencé à faire de la navigation avec ses deux frères Jean-Marie et Hubert dans la Méditerranée (dont l'un allait se suicider sur le bateau familial). Elle voulait faire des études de médecine, mais un premier coup dur l'en a empêchée : un accident grave l'a plongée dans le coma avec des séquelles supposées irréversibles de paralysie partielle... qu'elle a réussi à contredire au bout de deux ans en se rétablissant complètement par la force de l'esprit et du corps. Elle a passé sa convalescence à traverser l'Atlantique, cette première traversée s'est faite à l'âge de 18 ans. Trois ans plus tard, elle a pris part à la première édition de la Route du Rhum qu'elle a mis un peu moins de 28 jours à parcourir (classée onzième)s. Elle était lancée. La mer resterait son obsession.

    Elle a participé à au moins une vingtaine de courses maritimes, en particulier la Route du Rhum, mais aussi la Twostar, la Transat AG2R, la Transat Jacques-Vabre, la Route de l'Équateur (arrivée 2e), la Transpacifique, la Solitaire du Figaro, etc. L'un de ses objectifs était de battre le record du tour du monde en solitaire.

    Mourir dans le ciel alors qu'elle a failli perdre la vie plusieurs fois dans la mer, c'était ce drôle de destin de Florence Arthaud qui avait la baraka. Car ses exploits sportifs étaient une chose (elle était aussi une bonne skieuse, entre autres), mais se sortir de situations impossibles, c'en était une autre.

     

     
     


    L'une des dernières tuiles aurait pu lui être fatale. Le 29 octobre 2011, elle est tombée de son bateau en pleine nuit. Elle naviguait alors au large du Cap Corse. Heureusement, elle avait sur elle une torche frontale et un téléphone mobile étanche. Elle a pu appeler sa mère et les secours sont arrivés à elle trois heures et vingt minutes plus tard, elle était en état d'hypothermie et a été hospitalisée à Bastia. Sans ce téléphone, elle serait morte.

    Florence Arthaud a publié sa première autobiographie en 2009, "Un Vent de liberté" (préfacé par son mentor Olivier de Kersauson) aux éditions Arthaud. Elle en a sorti une seconde terminée juste avant sa mort et qui est parue le 19 mars 2015, "Cette nuit, la mer est noire" aux éditions Arthaud. Mais il ne s'agissait plus de mer. Le ciel était beau, elle aurait pu titrer : Ce jour, le ciel était noir. Noir de tristesse pour sa disparition. Dix ans plus tard, son souvenir est toujours présent, dans de nombreuses villes qui ont baptisé une voie ou un bâtiment de son nom.

    Aux premières pages de ce dernier livre, elle livrait : « La beauté de cette solitude ne peut être décrite que par ceux qui la vivent. Beauté de ce décor sauvage, beauté de la liberté goûtée ici sans entraves, beauté de cet univers mystique et fascinant, beauté de ces moments magiques où le temps n'existe plus et où les rêves peuvent devenir réalité. (…) Les solitudes marines sont inaccessibles aux crispations humaines. ».


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (08 mars 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Florence Arthaud.
    Marie Marvingt.
    Usain Bolt.








    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250309-florence-arthaud.html

    https://www.agoravox.fr/culture-loisirs/sports/article/florence-arthaud-chacun-prend-feu-259098

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/03/07/article-sr-20250309-florence-arthaud.html



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  • Philippe Bas, nouveau membre du Conseil Constitutionnel

    « Je jure de bien et fidèlement remplir mes fonctions, de les exercer en toute impartialité dans le respect de la Constitution. » (Richard Ferrand, le 7 mars 2025 à l'Élysée).




     

     
     


    Petite phrase courte et claire prononcée à l'Élysée le vendredi 7 mars 2025. L'ancien Président de l'Assemblée Nationale Richard Ferrand a prêté serment devant le Président de la République Emmanuel Macron pour devenir le onzième Président du Conseil Constitutionnel depuis le début de la Cinquième République. Nommé pour un mandat de neuf ans, Richard Ferrand, à 62 ans, est le plus jeune membre de ce nouveau Conseil Constitutionnel (mais pas le plus jeune Président depuis 1959, car "battu" par Jean-Louis Debré de quelques mois, Robert Badinter et Roger Frey).

    La désignation de Richard Ferrand à la tête de cette instance juridictionnelle suprême n'était pas une surprise dès lors qu'il avait franchi l'étape de sa double audition parlementaire le 19 février, devant les commissions des lois des deux assemblées. Sa candidature n'avait pas été bloquée par les parlementaires, mais c'était très serré, à une voix près, ce qui en fait, depuis la réforme de 2008, le membre du Conseil Constitutionnel le moins bien accepté (bien que relevant de l'exclusive prérogative constitutionnelle du Président de la République).

     
     


    Certains considèrent que l'abstention des députés RN ont permis la nomination de Richard Ferrand. L'avis favorable, défavorable ou rien du tout, ne doit pas dépendre des options politiques mais d'un jugement sur la capacité de la personne proposée à la désignation, d'exercer la fonction pour laquelle on la désigne. Les accusations de contre-partie entre une bienveillante neutralité (abstention) du RN et la conclusion d'une décision future du Conseil Constitutionnel qui pourrait ensuite s'appliquer, par jurisprudence de QPC, à la présidente du RN, paraissent très minces et peu crédibles (tout en étant très graves) car le Président du Conseil Constitutionnel n'emporte pas forcément la décision d'une instance qui compte neuf membres (et sans doute aucun prêt à être bienveillant avec le RN). Sa voix prépondérante n'a de sens que lorsqu'ils sont réunis avec un nombre pair, ce qui est très rare. D'ailleurs, si ça devait influer, cela influerait probablement dans l'autre sens, c'est-à-dire dans le sens d'une mauvaise jurisprudence pour Marine Le Pen (il s'agit de la constitutionnalité de l'exécution provisoire d'une peine d'inéligibilité en première instance, donc avant d'autres recours, comme l'appel et la cassation), pour la simple raison que cela permettrait au nouveau Conseil Constitutionnel de bien marquer sa totale indépendance (et son devoir d'ingratitude, comme l'ont rappelé certains membres du Conseil Constitutionnel, en particulier Alain Juppé ; l'expression provient du doyen Georges Vedel).

     
     


    Le 20 février 2025, Emmanuel Macron a donc pris deux décisions, celle de confirmer la nomination de Richard Ferrand comme membre du Conseil Constitutionnel (puisqu'il l'avait déjà proposé aux assemblées) et aussi celle de le nommer pour succéder à Laurent Fabius à la Présidence du Conseil Constitutionnel.
     

     
     
     
     


    En fait, Richard Ferrand a prêté serment pour être avant tout (simple) membre du Conseil Constitutionnel. Les deux autres nouveaux membres nommés respectivement par la Présidente de l'Assemblée Nationale Yaël Braun-Pivet et le Président du Sénat Gérard Larcher, à savoir Laurence Vichnievsky et Philippe Bas, ont également prêté serment le 7 mars 2025 avant de prendre leur fonction pour un mandat de neuf ans. Je me propose de présenter ces deux nouveaux membres. Ces derniers avaient été également auditionnés le 19 février 2025, mais seulement par la commission des lois de l'assemblée dont a émané leur nomination (on peut écouter leur audition en fin d'article) et leur décret de nomination est daté du 19 février 2025.


    Laurence Vichnievsky (70 ans) nommée par Yaël Braun-Pivet


    Elle a eu 70 ans le 5 février 2025. Laurence Vichnievsky a eu deux activités principales : elle est juge de profession, et elle est femme politique. Pour ces deux activités, elle a eu des contestations.
     

     
     


    Elle a commencé sa carrière de magistrate en 1977. Juge d'instance en 1979, elle a été nommée juge d'instruction à Paris en 1991. Elle est connue et très critiquée pour avoir prétendument étudié le (très gros) dossier de l'affaire de la mort de Robert Boulin et prononcé seulement neuf jours plus tard, le 20 septembre 1991, un non-lieu (ce qui relève de l'exploit pour la lecture rapide). Juge d'instruction au pôle financier du tribunal de Paris, travaillant avec sa collègue Eva Joly, autre juge et femme politique, elle s'est retrouvée au cœur d'affaires politiques ou économiques très sensibles (ce qui l'a fait connaître du grand public), en particulier dans l'affaire Elf, l'affaire Roland Dumas, les emplois fictifs de la ville de Paris, l'affaire des frégates de Taïwan, le financement occulte du parti communiste français (elle a mis en examen Robert Hue, le secrétaire général du PCF), etc. En 2001, elle a ensuite présidé le tribunal de grande instance de Chartres avant de retourner en 2007 dans la capitale comme avocate générale près la cour d'appel de Paris, où elle devait siéger pour l'affaire de la marée noire de l'Erika.

    Mais elle n'a pas siégé dans cette affaire car elle s'est engagée dans la vie politique sous les couleurs des écologistes. Elle s'est présentée tête de liste EELV aux élections régionales de mars 2010 en Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA), recueillant 10,9% au premier tour, ce qui lui a permis de fusionner sa liste avec celle du PS et du front de gauche. Elle a été élue conseillère régionale de PACA de mars 2020 à décembre 2015.


    Pendant l'été 2011, Laurence Vichnievsky était porte-parole du parti écologiste mais ses prises de position furent critiquées tant par la secrétaire nationale Cécile Duflot que par la candidate à l'élection présidentielle Eva Joly, si bien qu'elle a quitté cette fonction pour reprendre sa liberté de parole (elle a notamment publié deux tribunes dans "Libération", une le 18 août 2011 où elle a soutenu Daniel Cohn-Bendit, et une le 26 octobre 2011 où elle a soutenu les propositions de François Hollande sur le nucléaire).

    En juin 2012, elle s'est présentée aux élections législatives à Marseille contre Valérie Boyer (UMP) et Christophe Masse (PS), sans succès puisqu'elle n'a obtenu que 2,6%. Elle a perdu aussi aux élections municipales à Marseille en mars 2014 où elle était la numéro deux du socialiste Patrick Mennucci (elle aurait été sa première adjointe), mais la liste a échoué face à Jean-Claude Gaudin. Aux élections départementales de mars 2015, elle s'est présentée contre le président PS du conseil général des Bouches-du-Rhône Jean-Noël Guérini et n'a obtenu que 7,4%.

    Proche de Chantal Jouanno (UDI), Laurence Vichnievsky a quitté EELV en 2015 et s'est présentée sous l'étiquette du MoDem, plus porteuse, aux élections régionales d'Auvergne-Rhône-Alpes en décembre 2015. Elle a été élue conseillère régionale de cette nouvelle région de décembre 2015 à juin 2021 sur les listes de Laurent Wauquiez.

    Candidate du MoDem soutenue par les macronistes en juin 2017, elle a été élue députée du Puy-de-Dôme contre Louis Giscard d'Estaing (UDI). Elle a siégé à la commission des lois dont elle a été vice-présidente, puis elle a été réélue en juin 2022, mais elle a échoué face au candidat écologiste en juillet 2024. C'est donc une ancienne députée expérimentée de sept ans, qui a échoué dernièrement, l'été dernier, à reprendre son siège, qui est entrée au Conseil Constitutionnel. Ses compétences et son expérience de droit sont sans contestation (juge puis députée).


    Lors de son audition le 19 février 2025, Laurence Vichnievsky a donné son point de vue sur la nomination des membres du Conseil Constitutionnel : « Certains considèrent que les membres devraient être désignés par un collège d’experts, issus des plus hautes juridictions ou encore des universités. J’estime pour ma part que les autorités de nomination doivent, de manière directe ou indirecte, être issues du suffrage universel, comme c’est le cas en France. Ce fonctionnement se justifie par l’office du Conseil qui, comme vous l’avez rappelé, est notamment de réguler l’activité des pouvoirs publics. Dans ces conditions, il m’apparaît absolument indispensable que les autorités de nomination ne soient pas exclusivement techniciennes. Par ailleurs, faut-il imposer des critères pour la désignation des candidats ? Je n’en suis pas certaine, à l’exception d’une absence de condamnation inscrite au casier judiciaire. La proposition de loi constitutionnelle de Stéphane Peu est intéressante et prévoit un critère de compétence juridique et qu’au moins trois membres aient exercé au moins dix ans dans les juridictions administratives ou judiciaires. Il me semble toutefois qu’un tel fonctionnement serait complexe, étant donné que trois autorités devraient se mettre d’accord. Et, surtout, la France a, d’une manière générale, tendance à multiplier les règles et les critères, au risque d’en omettre certains et de se priver des compétences issues d’autres secteurs. Peut-être intégrerons-nous un jour de tels critères, mais je crois que les auditions par les commissions des chambres parlementaires sont préférables. Rappelons qu’elles ont précisément pour objet de permettre à la représentation nationale d’apprécier le parcours, la compétence et la légitimité des candidats. (…) Vous m’avez demandé si je concevais [le Conseil Constitutionnel] comme un contre-pouvoir : lui-même se définit comme un régulateur de l’activité des pouvoirs publics et se juridictionnalise de plus en plus. ».
     

     
     


    Elle a voulu rassurer les députés sur son indépendance : « Au cours de mes dix années passées au pôle financier comme juge d’instruction, j’ai connu des situations extrêmement tendues. (…) J’ai fait l’expérience des pressions et des environnements hostiles ; j’ai même dû être protégée pendant plus de deux ans. Évidemment, les affaires soumises au Conseil Constitutionnel ne sont pas de cette nature, mais cette expérience me permet de prétendre à une certaine capacité de résistance aux pressions, y compris, et c’est peut-être le plus difficile, lorsqu’elles sont amicales. ».

    En particulier sur son impartialité : « M. le rapporteur m’a interrogée sur mon impartialité et ma légitimité (…). De nombreux mécanismes bien connus des magistrats permettent d’assurer leur impartialité, je pense notamment au déport, que j’ai moi-même pratiqué. Lorsque j’étais avocate générale et conseillère régionale Europe Écologie, j’ai demandé à la cour d’appel devant laquelle je requérais de renvoyer une affaire mettant en cause un collectif antipublicité, dont je ne connaissais aucun protagoniste, car il me semblait qu’en apparence au moins, mon impartialité aurait pu être contestée. Cela répond à votre question sur la théorie des apparences : il ne suffit pas que la femme de César soit innocente, il faut que chacun en soit convaincu ! Citons aussi les mécanismes de récusation ou de publicité des saisines et des audiences, garants d’impartialité. J’espère que mon parcours professionnel vous aura convaincus de ma légitimité. ».

    Dans le jeu des questions et réponses, il y a eu quelques questions intéressantes, certaines empoisonnées, que je propose d'aborder ici.

    Question de Sophie Blanc (RN) : « Le Conseil Constitutionnel a pris des décisions qui, pour beaucoup de Français, ont paru aller au-delà de ses compétences, vérifier la conformité des textes à la Constitution, à tel point qu’il a pu devenir un véritable constituant. Je pense à sa décision du 6 juillet 2018 consacrant la valeur constitutionnelle du principe de fraternité, dont la portée a véritablement créé du droit constitutionnel sans l’aval du peuple français ni de ses représentants. Je n’imagine pas un seul instant que lorsque le peuple français a approuvé la Constitution le 28 septembre 1958, il imaginait une telle interprétation d’un des mots de la devise républicaine. Considérez-vous que seuls le peuple et le Congrès détiennent le pouvoir constituant ? ».

    Réponse de Laurence Vichnievsky : « J’en viens au concept de fraternité, madame Blanc : il me paraît très large et difficile à manier, à tel point qu’on peut s’interroger sur le domaine qu’il recouvre et la prédictibilité des décisions qui en découlent. Je le répète, le constituant, c’est vous, dans le respect de l’article 89 de la Constitution. ».

    Questions d'Olivier Marleix (LR) : « Quant à votre engagement politique, il traduit indiscutablement une forme d’indépendance d’esprit à l’égard des différentes formations. Pour avoir siégé avec vous à la commission des lois, je peux témoigner de l’indépendance qui vous animait dans nos travaux législatifs. Vous vous êtes engagée dans la lutte contre la corruption, la prévention des conflits d’intérêts ou encore le renforcement des obligations de transparence. À ce sujet, la loi Sapin 2 a omis, à l’article 25, de citer les membres du Conseil Constitutionnel parmi les cibles possibles de lobbying. Faut-il les y inclure ? Les règles de déport et de prévention des conflits d’intérêts semblent manquer de transparence au sein du Conseil. Vous paraissent-elles suffisantes ? Enfin, un membre du Conseil Constitutionnel dont la nomination aurait été validée à une voix grâce à l’abstention massive d’un groupe parlementaire, et qui aurait à juger d’une QPC sur l’exécution provisoire d’une peine d’inéligibilité décisive pour le chef dudit groupe, devrait-il prendre part à la délibération ? ».

    Réponse de Laurence Vichnievsky : « Je m’exprime devant vous autant que je pense pouvoir le faire, mais je ne pourrai pas me prononcer, par exemple, sur une QPC pendante devant le Conseil Constitutionnel. (…) On peut ne pas se satisfaire d’une décision du Conseil constitutionnel, mais comme M. Marleix a lancé un jour dans l’hémicycle : "Le constituant, c’est nous !". C’est vrai. Si le constituant estime qu’il y a matière à réviser la Constitution, pourquoi pas, mais ce n’est pas à moi de le dire. (…) Faut-il étendre les règles concernant le lobbying aux membres du Conseil Constitutionnel ? J’y suis favorable, de même que je suis favorable à ce que ses membres remplissent le même type de déclarations que les parlementaires à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Aucune raison ne justifie cette exclusion, le Conseil Constitutionnel n’ayant écarté cette obligation de déclaration que pour une raison de forme et non de fond. Les règles de déport et de prévention des conflits d’intérêts vous semblent manquer de transparence et de clarté au sein du Conseil Constitutionnel. Elles sont les mêmes dans toutes les juridictions. À défaut de fixer des critères positifs, on peut prévoir un critère négatif comme le fait d’ailleurs le règlement du Conseil Constitutionnel puisqu’il dit que la seule circonstance d’avoir participé à l’élaboration d’une loi n’impose pas le déport systématique du membre concerné. (…) J’avais indiqué que l’appréciation devait se faire in concreto, de préférence dans le cadre d’une discussion avec le président et, le cas échéant, avec les autres membres du conseil, on peut manquer d’objectivité quand on décide seul. ».

    Questions de Jérémie Iordanoff (EELV) : « Pensez-vous que le Conseil Constitutionnel doive contrôler au fond les questions soumises à référendum au titre de l’article 11 de la Constitution, ou considérez-vous, comme Richard Ferrand, que la décision Hauchemaille et Meyet du 24 mars 2005 a une portée nulle ? En d’autres termes, rechercherez-vous, comme M. Ferrand, la bienveillance du Rassemblement national ? Le Conseil d’État et le Conseil Constitutionnel se sont dits incompétents pour statuer sur le décret de dissolution de l’Assemblée Nationale. Si à l’avenir, un Président procédait à une nouvelle dissolution sans respecter le délai d’un an prévu à l’article 12 de la Constitution, Conseil Constitutionnel devrait-il pouvoir censurer le décret ? ».

    Réponse de Laurence Vichnievsky : « L’une portant sur le contrôle au fond des questions soumises à référendum au titre de l’article 11. On pourrait en effet déduire de la jurisprudence Hauchemaille qu’un contrôle est possible, ce n’est que mon interprétation et je ne suis pas membre du Conseil Constitutionnel. Si vous me faites confiance et si je suis nommée, nous aurons à statuer sur ce point. Il me semble y avoir matière à contrôle, sinon le vide créé pourrait permettre des consultations très critiquées comme les deux référendums du Général De Gaulle. ».

    Question d'
    Émeline K/Bidi (PCF) : « (…) Nous préconisons enfin que des opinions séparées puissent être jointes aux décisions. En tant que magistrate attachée à l’indépendance de la justice, vous y serez probablement sensible. Que pensez-vous de ces propositions ? ».

    Réponse de Laurence Vichnievsky : « Quant à la possibilité d’exprimer des opinions dissidentes, j’ai un point de vue un peu différent de celui de la majorité des membres actuels et anciens du Conseil Constitutionnel, ainsi que, sans doute, de la majorité de la doctrine. En ma qualité d’ancien juge, j’estime qu’il n’est pas possible de publier des opinions dissidentes au sein des juridictions françaises, en dehors du Conseil Constitutionnel, car les décisions rendues concernent des personnes. Les décisions du juge constitutionnel portent, quant à elles, sur des principes, même si, du fait de la QPC, elles concernent aussi, de manière croissante, des personnes, ma position est donc susceptible d’évoluer. L’argument de la confidentialité ne me paraît pas pertinent. La publication d’une opinion dissidente présenterait à mes yeux l’intérêt de favoriser la transparence du délibéré, de permettre des évolutions jurisprudentielles, car cela susciterait un débat, notamment au sein de la doctrine, et, surtout, de montrer que le Conseil Constitutionnel statue en droit et non en fonction de considérations politiques, ce qui mettrait un terme à beaucoup de critiques dirigées contre l’institution. En même temps, j’entends la position de ceux qui estiment que la collégialité et le secret du délibéré vont ensemble et que cela protège les juges. On entend dire aussi que, dans le cadre du contrôle a priori, l’expression d’opinions dissidentes s’apparenterait à une troisième chambre de discussion, ce qui n’est pas possible. La réflexion sur le sujet n’est pas mûre. Il faut être prudent et continuer à en discuter. ».
     

     
     


    Question de Brigitte Barèges (ciottiste) : « Accepteriez-vous le poste de Présidente du Conseil constitutionnel ? Cela introduirait de la parité dans une institution qui en a bien besoin. » (le Président du Conseil Constitutionnel n'a été désigné que le lendemain de cette audition).

    Réponse de Laurene Vichnievsky : « Je ne suis pas opposée par principe à l’élection du Président du Conseil Constitutionnel par ses pairs mais cette procédure n’appartient pas à notre tradition juridique. Elle a cours dans les juridictions internationales car c’est la seule manière possible d’en désigner le président parmi les candidats présentés par les États. ».

    Question de Jean-François Coulomme (FI), sur le projet de loi agricole : « Ce texte met en opposition plusieurs droits fondamentaux : le droit d’entreprendre, le droit de propriété, le droit de l’environnement, le droit à la libre expression, le droit de manifester, le droit à vivre dans un environnement sain. Si vous deviez vous pencher sur ce texte, à quels principes donneriez-vous la priorité ? ».

    Réponse de Laurence Vichnievsky : « La tâche du juge, qu’il s’agisse du juge judiciaire ou du juge constitutionnel, consiste souvent à concilier des intérêts légitimes, juridiquement protégés mais souvent opposés. Le Conseil Constitutionnel, à l’instar du Conseil d’État, prend ses décisions en respectant trois principes : la nécessité, la proportionnalité et l’adéquation. ».

    Sur l'indépendance politique et le devoir de réserve, Laurence Vichnievsky a aussi précisé à ses interlocuteurs : « Je pense avoir aussi apporté la preuve de mon indépendance dans ma carrière politique qui a commencé aux côtés de Daniel Cohn-Bendit au sein du parti Europe Écologie-Les Verts (EELV). Alors que j’étais l’un des deux porte-parole nationaux, j’avais écrit une tribune sur la nécessité de payer la dette et sur l’âge de la retraite. Cela n’avait pas du tout plu, et j’avais quitté mes fonctions de porte-parole puis la direction d’EELV quelques mois plus tard. Que j’aie eu tort ou raison, je n’ai pas renié mes convictions et j’ai pris mes distances avec ce parti. En tant que députée, je pense avoir été loyale à mon groupe, mais je n’ai jamais voté contre mes convictions, il faut dire qu’au sein du mouvement auquel j’appartiens encore, il y a un grand respect du vote et de la liberté de vote. L’indépendance n’est pas une compétence mais un état d’esprit qui ne rend pas toujours la vie facile sur le plan personnel, qui peut être source de mauvaises surprises et de désagréments. Le statut peut aider à garder cet état d’esprit. S’agissant des membres du Conseil constitutionnel, j’observe qu’ils sont nommés pour un long mandat unique. À part être membre du Conseil Constitutionnel, ils ne peuvent rien faire d’autre que d’éventuelles études universitaires, ce qui est très bien. À cet égard, la situation me serait très familière puisqu’elle s’apparente à celle que j’ai connue en tant que magistrat. À mon avis, le devoir de réserve est une obligation majeure à respecter. Je revendique de l’avoir fait lorsque j’étais magistrat, et, si vous me faites confiance, je le respecterai en tant que membre du Conseil Constitutionnel car c’est aussi une manière de répondre aux critiques d’appartenance partisane. (…) À quelle distance le Conseil Constitutionnel doit-il se tenir des débats politiques ? Comme déjà indiqué, j’estime que l’obligation de réserve est le meilleur moyen d’établir cette distance. Si vous confirmez cette proposition de nomination, il est évident que je quitterai mes amis du Modem et les fonctions que j’exerce au bureau exécutif. Si je ne l’ai pas encore fait, c’est que je ne veux pas préjuger de votre décision. En ce qui concerne le réseau X, je pourrais évoquer d’autres raisons. J’ai toujours fait un usage très modéré de ce réseau, et il y a longtemps que je ne m’y suis pas exprimée. Si cette proposition se concrétisait, je ne m’exprimerais plus sur les réseaux sociaux et je m’astreindrais à un silence médiatique total. Pour moi, c’est une évidence. ».
     

     
     


    À l'issue de son audition devant la commission des lois de l'Assemblée, Laurence Vichnievsky a recueilli pour sa désignation 28 avis favorables et 22 avis défavorables sur 65 votants.


    Philippe Bas (66 ans) nommé par Gérard Larcher


    S'il y avait un seul sénateur qui peuit se déclarer fait pour être membre du Conseil Constitutionnel, ce serait lui, Philippe Bas, qui a été président de la commission des lois du Sénat du 9 octobre 2014 au 30 septembre 2020 (il aurai souhaité poursuivre à la commission des lois en 2020 mais les statuts du groupe LR lui interdisaient de rester à cette présidence plus de six ans de suite). Il a connu la notoriété comme président de la commission d'enquête sur l'affaire Benalla, menant les auditions du Sénat en 2018 avec fermeté et courtoisie, refusant de se laisser intimider par l'Élysée. Cet exercice l'avait placé en bonne position pour devenir un jour le successeur de Gérard Larcher à la Présidence du Sénat.

    Mais reprenons depuis le début. Philippe Bas n'était pas, à l'origine, un homme politique mais un haut fonctionnaire avec une trajectoire relativement classique : IEP Paris, ENA (dans la même promotion que Pierre Moscovici, Philippe Wahl, Guillaume Pepy et François Villeroy de Galhau), Conseil d'État. De 1988 à 1997, Philippe Bas a été membre de plusieurs cabinets ministériels auprès de Jean-Pierre Soisson (Travail), Philippe Douste-Blazy (Santé), Simone Veil (Santé et Affaires sociales) comme directeur adjoint de cabinet et Jacques Barrot (Travail et Affaires sociales) comme directeur de cabinet. Il a été également de 1989 à 1992 conseiller d'Abdou Diouf, Président du Sénégal.

    Après l'échec de la dissolution de 1997, le Président Jacques Chirac a fait venir Philippe Bas auprès de lui à l'Élysée, d'abord comme conseiller social, puis Secrétaire Général adjoint de l'Élysée le 13 septembre 2000, enfin Secrétaire Général de l'Élysée du 8 mai 2002 au 2 juin 2005 (il a succédé à Dominique de Villepin nommé au Quai d'Orsay).

    Après une carrière dans les coulisses, Philippe Bas s'est exposé en acceptant d'être membre du gouvernement de Dominique de Villepin : Ministre délégué à la Sécurité sociale, aux Personnes âgées, aux Personnes handicapées et à la Famille du 2 juin 2005 au 26 mars 2007 et Ministre de la Santé et des Solidarités du 26 mars 2007 au 15 mai 2007 après la démission de Xavier Bertrand pour se consacrer totalement à la campagne présidentielle en faveur de Nicolas Sarkozy.

    À la fin de la Présidence de Jacques Chirac, Philippe Bas a voulu s'implanter dans la Manche. Candidat malheureux dans la Manche, il a échoué aux élections législatives de juin 2007 malgré son investiture UMP, battu par un candidat UMP dissident très implanté localement (le député UMP sortant avait été nommé à la Cour des Comptes pour "libérer" la circonscription).


    En mars 2008, Philippe Bas a toutefois réussi à se faire élire, puis réélire jusqu'à maintenant, conseiller général puis conseiller départemental de la Manche, d'abord vice-président du conseil général de mars 2008 à mars 2015, puis président du conseil départemental de mars 2015 à octobre 2017 (il a quitté l'assemblée départementale de novembre 2015 à janvier 2016 en raison de l'invalidation de son élection de mars 2015 mais il s'est fait réélire dès le premier tour le 6 décembre 2015). En 2017, en raison de la loi contre le cumul, il a préféré le Sénat à la présidence du conseil départemental.

    Après son échec aux législatives, il a aussi réintégré le Conseil d'État et a été nommé président de l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrants, devenu l'Office français de l'immigration et de l'intégration, du 29 novembre 2007 au 23 janvier 2011, puis président de l'Agence nationale de sécurité alimentaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail jusqu'à son élection au Sénat en septembre 2011.

    Car en septembre 2011, Philippe Bas s'est fait aussi élire sénateur de la Manche, réélu en septembre 2017 et en septembre 2023 (il vient de démissionner pour entrer au Conseil Constitutionnel). Président de la commission des lois du 9 octobre 2014 au 30 septembre 2023, il a aussi exercé les fonctions de questeur du Sénat (chargé de gérer le Sénat) du 6 octobre 2020 au 3 octobre 2023.

    Spécialisé dans le droit du travail, Philippe Bas a réalisé notamment, lorsqu'il travaillait à l'Élysée, la mise en œuvre du régime social des indépendants (ordonnance n°2005-299 du 31 mars 2005 et décret n°2005-362 du 27 mai 2005). Comme ministre, il a installé l'Agence française de l'adoption, il a appliqué la loi Handicap, le plan Petite enfance et le plan Solidarité grand âge.

     

     
     


    Philippe Bas a eu aussi une grande influence sur le gouvernement lorsqu'il était au Sénat puisque c'est grâce à lui que l'IVG a été inscrite dans la Constitution. Il a en effet réussi à convaincre la majorité sénatoriale conservatrice d'accepter cette révision constitutionnelle avec la formulation qu'il a lui-même proposée : au lieu de parler d'un "droit" à l'IVG, la Constitution évoque ainsi la « liberté de la femme de mettre fin à sa grossesse ».

    Philippe Bas a aussi co-organisé un colloque le jeudi 17 octobre 2024 au Sénat pour célébrer les 50 ans de saisine parlementaire du Conseil Constitutionnel, la révision voulue par le Président Valéry Giscard d'Estaing qui a étendu la saisine à 60 parlementaires, permettant ainsi aux parlementaires de l'opposition de faire invalider une disposition d'un texte législatif en cas de non-conformité à la Constitution.

    Dans son allocution d'introduction à l'une des tables rondes du colloque, Philippe Bas a affirmé : « Progressivement, à partir de sa fonction d’auxiliaire de la rationalisation du parlementarisme, le Conseil Constitutionnel est devenu la clef de voûte de l’État de droit. Cette évolution s’est opérée à partir d’une révolution juridique considérable, avec une audace extraordinaire dans l’histoire de la République. Le Conseil a agi de sa propre initiative, alors que la Constitution ne lui conférait pas cette fonction et que ni la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, ni le préambule de la Constitution de 1946, ni les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République ne s’imposaient aux législateurs. La révision de 1974 a non seulement donné un fondement constitutionnel à cette évolution prétorienne, mais a aussi permis au Conseil Constitutionnel d’exercer sa fonction de garant de l’État de droit en multipliant les occasions de sa saisine. ».

     

     
     


    Philippe Bas a insisté aussi sur le fait que le Conseil Constitutionnel n'est pas qu'une instance juridique mais elle est aussi une instance politique : « Le Conseil Constitutionnel reste une institution originale dont l’action a une dimension politique dans le cadre de la séparation des pouvoirs. Notre colloque rend aussi hommage à la vision personnelle de Valéry Giscard d’Estaing, animée par une tradition philosophique libérale. Lecteur de Montesquieu et de Tocqueville, il arrive au pouvoir dans un système de bipolarisation et de fait majoritaire à son apogée. Pourtant, par sa première initiative politique d’envergure, il agit en faveur d’un meilleur équilibre des pouvoirs. Cette alchimie historique a permis d’instaurer un contre-pouvoir qui s’exerce au nom du droit et des libertés, face au pôle majoritaire unissant Président, gouvernement et majorité parlementaire. Il le fait en attribuant à l’opposition la capacité de déclencher ce contre-pouvoir pour limiter le pouvoir exorbitant de la majorité. Le Conseil Constitutionnel a ainsi été créé pour atténuer les effets potentiels sur les libertés, en incorporant les principes fondamentaux du droit et de la liberté au bloc de constitutionnalité. ».

    Philippe Bas a aussi rendu hommage à Alain Poher, Président du Sénat de 1968 à 1992, en rappelant que sur les (seulement) dix saisine du Conseil Constitutionnel entre 1959 et 1974, « trois émanaient du Président du Sénat, dont celles ayant permis au Conseil Constitutionnel de se prononcer sur l’incorporation des droits fondamentaux au bloc de constitutionnalité ».

    De plus, l'ancien président de la commission des lois du Sénat a rejeté le risque de connivence entre le gouvernement et le Conseil Constitutionnel car les membres du Conseil sont très soucieux de leur indépendance : « Les politiques, désireux de faire aboutir leurs réformes, ont de plus en plus de mal à accepter ces décisions. Je ne constate pas de connivence entre le politique et le Conseil Constitutionnel, mais plutôt l’inverse. Les membres nommés, qu’ils soient politiques ou non, font preuve d’indépendance et de conscience dans l’exercice de leur mission. Les législateurs maintiennent une relation frictionnelle avec le Conseil, ce qui atteste d’une indépendance mutuelle. ».

     

     
     


    Philippe Bas, au-delà de son expérience de haut fonctionnaire, de ministre et de sénateur, est ainsi un véritable expert de la Constitution. Ce n'est donc pas étonnant que les sénateurs de la commission des lois aient plébiscité sa désignation au Conseil Constitutionnel, en apportant 36 avis favorables et 2 avis défavorables sur 41 votants à l'issue de son audition le 19 février 2025.

    Les trois nouveaux membres du Conseil Constitutionnel Richard Ferrand, Laurence Vichnievsky et Philippe Bas ont pris leur fonction le 7 mars 2025.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (08 mars 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    L'installation du nouveau Conseil Constitutionnel présidé par Richard Ferrand.
    Laurence Vichnievsky.
    Philippe Bas.
    Richard Ferrand validé de justesse par le Parlement.
    Alain Juppé à la rescousse de Richard Ferrand ?
    Richard Ferrand bientôt proposé rue de Montpensier ?
    Laurent Fabius.
    Nominations au Conseil Constitutionnel en février 2010.
    Les nominations présidentielles.
    Jean-Louis Debré.
    Pierre Mazeaud.
    Yves Guéna.
    Roland Dumas.
    Robert Badinter.
    Daniel Mayer.










    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250307-philippe-bas.html

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/02/26/article-sr-20250307-philippe-bas.html

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