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femmes

  • Aung San Suu Kyi : Libérez-nous de la peur !

    « Ce n’est pas le pouvoir qui corrompt, mais la peur : la peur de perdre le pouvoir pour ceux qui l’exercent, et la peur des matraques pour ceux que le pouvoir opprime… » (Aung San Suu Kyi, 1991).


     

     
     



    Il y a eu un pape qui, une fois élu, a proclamé aux habitants de la Terre : « N'ayez pas peur ! ». C'était Jean-Paul II. Elle, inspirée par Gandhi, elle a proclamé à ses compatriotes birmans : « Libérez-nous de la peur ! ». Elle, c'est Aung San Suu Kyi, "dissidente" birmane qui a atteint, ce jeudi 19 juin 2025, son 80e anniversaire. Elle fait partie des femmes remarquables du monde contemporain, admirable par son courage, sa persévérance, sa cohérence. Elle est en quelque sorte la Nelson Mandela de l'Asie. Elle fait partie de mon Panthéon des femmes politiques.

    Un combat audacieux contre la peur : « Dans sa forme la plus insidieuse, la peur prend le masque du bon sens, voire de la sagesse, en condamnant comme insensés, imprudents, inefficaces ou inutiles les petits gestes quotidiens de courage qui aident à préserver respect de soi et dignité humaine. (…) Dans un système qui dénie l’existence des droits humains fondamentaux, la peur tend à faire partie de l’ordre des choses. Mais aucune machinerie d’État, fût-elle la plus écrasante, ne peut empêcher le courage de ressurgir encore et toujours, car la peur n’est pas l’élément naturel de l’homme civilisé. ».

    À la tête, depuis le 27 septembre 1988, de la Ligue nationale pour la démocratie (LND), un parti d'opposition, Aung San Suu Kyi a toujours combattu la dictature militaire établie dans son pays depuis des décennies. Son combat politique non-violent a été reconnu par le prestigieux Prix Nobel de la Paix en octobre 1991, mais aussi par une quinzaine d'autres distinctions internationales, comme le Prix Sakharov en 1990 (attribué par le Parlement Européen), la Médaille présidentielle de la Liberté en 2000, le prix le plus important des États-Unis, etc.

    Elle savait de qui tenir. Son père était le général Bogyoke Aung San qui a été un acteur majeur de l'indépendance de la Birmanie, nommé Premier Ministre de la Birmanie britannique le 28 septembre 1946 et assassiné le 19 juillet 1947 à Rangoon, à l'âge de 32 ans, quand sa fille a eu 2 ans. Sa mère était Khin Kyi qui s'est engagée dans la vie politique birmane après la mort de son mari, elle fut députée, la première femme ministre en Birmanie en 1953 et sa première ambassadrice. Celle-ci est morte d'un AVC le 28 décembre 1988 et son enterrement cinq jours plus tard fut une manifestation de l'opposition, 200 000 personnes, contre la junte militaire au pouvoir.
     

     
     


    C'est peu avant la mort de sa mère, alors qu'elle est revenue en Birmanie pour s'occuper d'elle (elle habitait au Royaume-Uni auparavant avec sa famille), qu'Aung San Suu Kyi a cofondé la LND pour s'opposer pacifiquement à la dictature militaire installée depuis le 2 mars 1962. Une nouvelle junte militaire a pris le pouvoir en 18 septembre 1988 pour réprimer très violemment les manifestations des militants démocrates dans le pays. Lors des élections législatives du 27 mai 1990, les premières élections depuis 1960 qui furent pluralistes, organisées sous la pression populaire, la LND les a très largement gagné avec 52,5% des voix pour 72,6% de participation, lui assurant l'élection de 392 sièges sur les 492 au total. Mais la junte militaire a annulé ces élections et imposé la dictature d'un Conseil d'État pour la restauration de la Loi et de l'Ordre de 1990 à 2011.

    De juillet 1989 à juillet 1995, de septembre 2000 à mai 2002 et de mai 2003 à novembre 2010, Aung San Suu Kyi a été arrêtée, enfermée ou placée en résidence surveillée. Elle a été empêchée de voir ses enfants résidant en Grande-Bretagne ainsi que son mari ethnologue qui est mort d'un cancer en mars 1999. Elle n'a pas assisté à l'enterrement de son mari de peur de ne plus pouvoir rentrer en Birmanie. Le 30 mai 2003, elle a failli être assassinée par la junte dans un attentat qui a tué plusieurs de ses compagnons politiques. Pendant cette vingtaine d'années d'opposition, elle a eu le soutien très fort de ce qu'on appelle la communauté internationale.

    Une nouvelle Constitution adoptée le 29 mai 2008 après le référendum du 10 mai 2008 (malgré le rejet de l'opposition) est entrée en vigueur le 31 janvier 2011 et consacre une transition démocratique. Libérée le 13 novembre 2010, Aung San Suu Kyi a été élue députée lors d'élections partielles le 1er avril 2012 et les élections législatives générales du 8 novembre 2015 lui ont apporté une large victoire de 255 sièges sur 440, avec 57,1% des voix. Elle pouvait enfin gouverner.

    Aung San Suu Kyi a voulu se présenter à l'élection présidentielle du 15 mars 2016 (la junte militaire laissait le pouvoir sous quelques conditions, en particulier de garder trois ministères régaliens, la défense, l'intérieur et les frontières). Mais la Constitution du 29 mai 2008 a prévu une clause spéciale contre la Prix Nobel de la Paix en écartant des fonctions politiques les personnes mariées à des étrangers ou qui sont parents d'enfants étrangers, ce qui est le cas d'Aung San Suu Kyi. Elle n'a pas réussi, malgré une confortable majorité, à réviser la Constitution. Ainsi, ce fut son proche Htin Kyaw qui a été élu par 360 voix sur 652 parlementaires et est devenu Président de la République du 30 mars 2016 au 21 mars 2018.
     

     
     


    Ne pouvant être nommée Première Ministre en raison de la clause constitutionnelle déjà évoquée, Aung San Suu Kyi a obtenu un titre spécial, "Conseillère spéciale de l'État" qui correspond en fait au poste de chef du gouvernement, du 6 avril 2016 au 1er février 2021. Elle a cumulé cette responsabilité avec le poste de Ministre des Affaires étrangères et de Ministre de la Présidence.

    Pendant ces près de cinq années, Aung San Suu Kyi a ouvert son pays à l'économie de marché, mais elle a dû faire des compromis en raison de l'armée encore très puissante constitutionnellement. Elle a fait redémarrer économiquement la Birmanie avec une croissance annuelle de 7% de 2016 à 2020, bénéficiant de la levée des sanctions financières internationales.

    C'est sur le génocide des Rohingya, minorité musulmane du pays comptant 1 million de personnes, que la gestion d'Aung San Suu Kyi a été contestée sur le plan international. En effet, la Prix Nobel de la Paix est restée très passive devant la persécution et les massacres commis à partir d'octobre 2016 par l'armée et la police birmanes. En janvier 2018, une étude a évalué le massacre à au moins 25 000 Rohingya tués et 18 000 filles Rohingya violées. L'exil et le déplacement de centaines de milliers de personnes ont provoqué une véritable crise humanitaire. Par son silence et sa passivité, Aung San Suu Kyi s'est vue retirer un certain nombre de distinctions internationales qu'elle avait reçues lorsqu'elle était dans l'opposition. Elle a été "blâmée" le 29 décembre 2016 par onze autres Prix Nobel de la Paix dont Desmond Tutu.

    Toutefois, selon Alexandra de Mersan, une anthropologue qui connaît bien la Birmanie , pour "Paris Match" le 8 juin 2017, Aung San Suu Kyi « a tenté de mener une première conférence de réconciliation nationale, invitant les ethnies, les groupes, les organisations pour discuter. Ce que n'ont jamais fait les militaires. Mais pendant ces discussions, les conflits continuaient à faire rage dans ces États. ». Pour l'armée birmane, auteure des exactions, c'était le moyen de démontrer que l'ancienne opposante était incapable de gouverner son pays.

     

     
     


    Ce scandaleux nettoyage ethnique par l'armée n'a pas empêché le parti d'Aung San Suu Kyi de remporter une large victoire aux élections législatives du 8 novembre 2020 avec l'obtention de 258 sièges sur 440 et 68,0% des voix pour 72,0% de participation. Cette victoire était de trop pour l'armée birmane qui a repris l'initiative en faisant un coup d'État le 1er février 2021. Le Président Win Myint, de la LND aussi, a été démis de ses fonctions au profit d'un militaire et Aung San Suu Kyi a été de nouveau arrêtée et elle est encore en prison à l'heure actuelle. Elle a été jugée pour des motifs fallacieux (comme la gestion de la crise du covid-19), avec un premier procès qui l'a condamnée le 6 décembre 2021 à quatre ans de prison (réduits à deux ans), et un second procès le 30 décembre 2022 à trente-trois ans de prison (réduits à vingt-sept ans).

    L'une des raisons de cette reprise en main est que la forte victoire électorale d'Aung San Suu Kyi devait lui permettre de réviser la Constitution et réduire l'influence politique de l'armée, ce qui était inacceptable pour la junte. Citée par Wikipédia, la politologue Sophie Boisseau du Rocher, spécialiste de géopolitique dans l'Asie du Sud-Est, estimait le 18 février 2021 sur France Culture : « L’armée n’a jamais envisagé une vraie transition politique. Elle voulait encadrer le processus pour en tirer parti. Aung San Suu Kyi a réussi à contourner ces contraintes car à l’origine elle n’avait pas de liberté de pouvoir. Elle représente désormais un vrai risque car avec 82% des sièges à l’Assemblée, le nouveau gouvernement pourra faire avancer la réforme constitutionnelle. ». Dans la même émission radiophonique, l'anthropologue François Robinne résumait ainsi : « Il y a eu deux élections récemment en 2015 et 2020. En 2015 le peuple a porté Aung San Suu Kyi au pouvoir. En 2020 c’est un peu différent, le peuple a voté contre le pouvoir militaire. ».

    Un coup d'État de trop ? Toutes les forces vives de Birmanie, en particulier la jeunesse et les professions intellectuelles, se sont opposées à ce retour de la dictature militaire... mais elle subsiste toujours en 2025 et Aung San Suu Kyi est encore en prison.


    En 1991, elle écrivait : « A l'heure où des personnages tout-puissants et sans scrupules peuvent disposer et disposent de fait, grâce aux immenses progrès techniques, d'armes meurtrières contre les faibles et les déshérités, il est urgent de lier plus étroitement la politique à la morale, dans les nations comme à l'échelle internationale. ». Avec ce qui se passe en Ukraine ou en Iran, on peut affirmer que cette réflexion est plus que jamais d'actualité.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (14 juin 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Aung San Suu Kyi.
    Le tsunami de l'océan Indien, 20 ans plus tard.

    Gandhi.


     

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250619-aung-san-suu-kyi.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/international/article/aung-san-suu-kyi-liberez-nous-de-261247

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/06/18/article-sr-20250619-aung-san-suu-kyi.html

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  • Nicole Croisille, une femme avec Nous

    « Et je perdais mon temps dans ce désert doré
    J'étais seule quand je t'ai rencontré
    Les autres s'enterraient, toi tu étais vivant »
    ("Une femme avec toi", 1975).




     

     
     


    La très talentueuse chanteuse Nicole Croisille s'est éteinte ce mercredi 4 juin 2025 à l'âge de 88 ans, des suites d'une saleté de maladie (elle a connu la chimiothérapie). Coïncidence ? Même jour et même âge que Philippe Labro. Si ce dernier a bénéficié d'une bonne couverture médiatique (ce qui est logique, la disparition d'un des leurs touche les journalistes), j'ai l'impression qu'on a un peu oublié Nicole Crosille dans les médias.

    Elle était pourtant très présente dans l'actualité culturelle jusqu'à récemment (2020). Effectivement, elle jouait encore en 2020 dans une pièce de Sacha Guitry aux côtés de Michel Sardou, au Théâtre de la Michodière, à Paris. C'était le genre de personne qui mourrait artiste. Elle était d'ailleurs jalouse de son autonomie et n'aurait pas accepté d'être diminuée, elle laissait échapper qu'elle ne concourait pas pour être centenaire. Elle était du reste favorable à l'euthanasie.

    On a parlé d'elle comme de "la" chanteuse de Claude Lelouch, celle du Chabadabada de 1966, dans le film "Un homme et une femme". Des paroles de Pierre Barouh et une composition de Francis Lai, Nicole Croisille l'a interprétée aux côtés de Pierre Barouh.





    C'était peut-être cela, son talon d'Achille, elle était une interprète exceptionnelle et émouvante mais elle dépendait de paroliers et de compositeurs. C'est pour cela que sa carrière a été en dents de scie.

    Comme je l'avais déjà exprimé il y a plus de trois ans, j'ai adoré la chanson "Une femme avec toi" de Vito Pallavicini et Alfredo Ferrari adaptée par Pierre Delanoë. Elle est sortie en 1975 et caractérisait excellemment ces années 1970 faites d'amour et d'insouciance, juste avant les crises économiques, sociales, morales, géopolitiques qui n'en finissent plus de bousculer notre monde contemporain (évidemment, j'exagère, c'est juste une vue de l'esprit, il y a eu bien des crises avant les années 1980).
     

     
     


    Pour moi, cette chanson si bien servie avec cette belle voix était comme une lueur dans un océan d'incertitude et d'inquiétude. L'idée que l'amour triompherait un jour. Qu'une femme puisse te dire : « Et enfin pour la première fois, je me suis enfin sentie : Femme, femme, une femme avec toi ! », quelle émotion, quelle force !





    Autre très belle chanson que Nicole Croisille a interprétée, toujours grâce à Claude Lelouch, dans "Itinéraire d'un enfant gâté" c'est "J'aurais voulu être artiste", chanson de Michel Berger et Luc Plamondon pour Starmania modifiée à la deuxième personne du singulier "Tu aurais voulu être un artiste", dont le vrai titre est "Le blues du businessman".





    Dans le même film, Nicole Croisille a également interprété "Qui me dira".





    Claude Lelouch l'a aussi recrutée, quelques années auparavant, pour son film "Les Uns et les Autres" dont elle a chanté aussi la bande originale mais aussi pour jouer un rôle. En 1995, le réalisateur l'a fait Madame Thénardier dans ses "Misérables".





    Cette rencontre avec Claude Lelouch a été fondamentale et pour Nicole Croisille, c'était la raison de sa voix si émouvante. Lorsqu'elle l'a rencontré, le réalisateur lui a dit : « Quand tu fais des notes invraisemblables, et qu'elles sont de très belles notes, je m'en fous complètement. Ça ne m'intéresse pas. Ce qui m'intéresse, c'est que tu me racontes une histoire, et c'est que je sente ton émotion. ». Réaction de l'intéressée, racontée le 16 octobre 2028 sur France 5 : « J'ai compris qu'il fallait que j'arrête d'être une technicienne de la voix, j'avais quand même fait le cursus d'une chanteuse d'opéra, et puis, que je m'attache à dire pourquoi j'étais en train de chanter. ». Et après, elle a vraiment compris cela avec la discussion avec le chef d'une chorale sénégalaise : « La voix, c'est le reflet de l'âme. Quand nous, on prie, c'est avec notre voix. ». Ce qui l'a fait réfléchir : « Je me suis dit : il faut que j'arrête d'être une chanteuse de métier. Il faut que j'arrive d'être quelqu'un qui utilise sa voix pour communiquer des émotions. ».

    L'âge n'a jamais été pour elle un obstacle au travail (au contraire de la maladie). Ainsi, il y a encore moins de dix ans, le 11 octobre 2015 sur France 3, elle était toujours sur les plateaux de télévision pour s'adonner à son sport favori ("Téléphone-moi !").





    En réaction aux vidéos des chansons sur Youtube, beaucoup d'internautes ont exprimé leur émotion à l'annonce de la disparition de cette grande artiste. Tous pleurent la grande dame... mais aussi une partie d'eux-mêmes et de leur propre histoire. Merci Madame d'avoir su si bien traduire des émotions intemporelles. Elles le resteront par la magie des enregistrements.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (04 juin 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    La Nicole s'amuse.
    Nicole Croisille.
    Mike Brant.
    Olena Kohut.
    Joséphine Baker.
    Florence Arthaud.
    Herbert Léonard.
    Jeanne Calment.
    Pierre Bachelet.
    Gérard Lenorman.
    Pierre Dac.
    Marianne Faithfull.
    Marcel Zanini.
    Patricia Kaas.
    Kim Wilde.






    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250604-nicole-croisille.html

    https://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/nicole-croisille-une-femme-avec-261365

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/06/04/article-sr-20250604-nicole-croisille.html


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  • Qui se souvient de la candidate Huguette Bouchardeau ?

    « Je crois que beaucoup de gens peuvent se reconnaître sur les projets du PSU, et que par ailleurs, les voix des femmes, dans cette campagne, eh bien, elles ne seront pas trop représentées et que je pense que si ma candidature n'avait que ce rôle-là, ça vaudrait déjà la peine ! » (Huguette Bouchardeau, le 13 avril 1981 sur RTL).



     

     
     


    Candidate à l'élection présidentielle de 1981, Huguette Bouchardeau a fêté son 90e anniversaire ce dimanche 1er juin 2025. Née à Saint-Étienne, cette dame assez curieuse de la vie politique a marqué le début des années 1980. Qui s'en souvient ?

    La candidate bossait encore en pleine campagne présidentielle car elle n'était pas payée autrement : elle enseignait à Lyon, elle était mère de ses enfants (dont la plus jeune avait 13 ans) et femme de son mari à Saint-Étienne, et elle faisait campagne à Paris (où on lui avait loué un petit appartement) et partout en France (des meetings dans 160 villes !).

    Huguette Bouchardeau était alors la secrétaire nationale du PSU, le parti socialiste unifié, et s'était présentée à l'élection présidentielle pour mettre les femmes à l'affiche, l'écologie et le partage du temps de travail. Elle allait bientôt avoir 46 ans. Elle n'était pas la première femme à s'être présentée puisque la porte-parole de Lutte ouvrière Arlette Laguiller était déjà candidate en 1974, et avec cette dernière et la gaulliste Marie-France Garaud (qui s'est éteinte l'an dernier), elle faisait partie des trois femmes capables de participer à la compétition.

    Et rien que cela, c'était déjà un exploit, car la nouvelle règle à partir de 1976, c'était d'être parrainée par 500 maires ou parlementaires, élus régionaux et départementaux... au lieu de 100. Cette règle avait empêché (momentanément pour l'un) à deux candidats de 1974 de se représenter en 1981, Jean-Marie Le Pen, pour le Front national, et Alain Krivine, pour la LCR (ces deux anciens candidats se sont éteints également récemment).

    La trajectoire de la dame du PSU pourrait se résumer très grossièrement à cette phrase : Huguette Bouchardeau est passée d'une Arlette Laguiller un peu plus intellectuelle (aux cheveux ébouriffés) à une Marie-France Garaud un peu plus à gauche (au chignon bien mis), de militante rebelle à ministre écoutée !


    Parlons d'abord du PSU. J'éviterai de préciser l'histoire précise du PSU car c'est très compliqué, aussi compliqué que l'histoire des groupuscules d'extrême gauche ou d'extrême droite, à cela près que, ici, le PSU n'était pas à l'extrême gauche, mais à une deuxième gauche toujours très difficile à définir, une gauche "alternative", une gauche déjà soucieuse d'écologie et une gauche clairement antimilitariste et pacifiste.

    En novembre 1999, Huguette Bouchardeau expliquait ainsi le fonctionnement des partis : « Autour de 1968, avec toutes les batailles qui ont eu lieu au PSU autour de Rocard, contre Rocard, quand je voyais le PSU se déchirer en multiples tendances, j'éprouvais une sorte d'horreur devant ce type de débat. (…) C'est très simple : les tendances dans les partis politiques n'ont jamais été organisées autour de programmes différents mais toujours autour d'hommes qui cherchaient le drapeau avant le parti. Ce n'était pas des tendances mais des écuries. Beaucoup de femmes refusaient cette lutte pour le pouvoir qui était l'essentiel de la vie politique. Elles ont été peu intéressées par ces luttes politiques. ».

    Le retour de De Gaulle au pouvoir a secoué considérablement l'échiquier politique : le centre droit (les indépendants) a rejoint les gaullistes, une partie du centre démocrate (MRP) aussi, l'autre moitié est restée dans l'opposition, et la gauche, SFIO et PCF, est entrée dans l'opposition. L'un des grands partis d'avant-guerre, le parti radical, a été laminé par le gaullisme, en raison du légitimisme : le légitimisme de la Troisième République se trouvait au sein du parti radical avant la guerre, mais désormais, celui de la Cinquième République se trouvait chez les gaullistes, naturellement.

    L'histoire des formations politiques est indissociable de l'histoire des personnalités politiques, bien sûr. Le PSU a été fondé le 3 avril 1960 sous la présidence du grand mathématicien Laurent Schwartz au terme de l'unification de trois forces groupusculaires : le PSA (parti socialiste autonome) qui provenait de socialistes dissidents de la SFIO en 1958 (Édouard Depreux, Daniel Mayer, François Tanguy-Prigent, André Philip) et d'anciens radicaux anti-gaullistes (dont le plus illustre Pierre Mendès France) ; l'UGS (Union de la gauche socialiste) issue de la fusion d'autres formations minusculaires en 1957 et qui se voulait à la fois marxiste et chrétien (Gilles Martinet) ; enfin, des communistes dissidents rejetant le PCF dès 1952 (Jean Poperen, François Furet).

    Les deux points de convergence des fondateurs du PSU furent l'opposition à la guerre d'Algérie (au contraire de Guy Mollet, chef de la SFIO), et l'opposition au retour du Général De Gaulle (au contraire de la SFIO). Édouard Depreux a été le premier secrétaire national du PSU d'avril 1960 à juin 1967.


    Le PSU voulait se positionner politiquement entre la SFIO (puis le PS) et le PCF, et il était proche aussi du CERES créé par Jean-Pierre Chevènement en 1966 (future aile gauche du PS). En fait, ce parti pourrait aussi être qualifié de parti utopiste en ce sens que ses propositions étaient complètement indépendantes de la réalité du pays. Ou encore autogestionnaire, surtout lors de l'affaire Lip. Le PSU était très proche de la CFDT. Curieusement, beaucoup de personnalités politiques de gauche ont traversé ce parti, souvent pour rejoindre ensuite le PS de François Mitterrand, à des moments différents.

    Le plus connu fut Michel Rocard, secrétaire national du PSU de juin 1967 à novembre 1973, candidat du PSU à l'élection présidentielle de 1969, qui a rallié François Mitterrand au PS en 1974 avec toute la direction (rocardienne) du PSU, créant ainsi le courant rocardien au sein du PS.

    Citons rapidement quelques personnalités qui se sont retrouvées adhérentes du PSU à un moment ou l'autre : Édouard Depreux, Michel Rocard, Pierre Mendès France, Robert Verdier, Alain Savary, Daniel Mayer, Pierre Bérégovoy, Charles Hernu, Gilles Martinet, Jean Verlhac, Jean Poperen, Claude Bourdet, Alain Badiou, André Philip, François Tanguy-Prigent, Pierre Dreyfus-Schmidt, Serge Mallet, Roland Florian, Marcel Debarge, Laurent Schwartz, Robert Chapuis, Henri Leclerc, Bernard Lambert, Jean Le Garrec, Pierre Brana, Pierre Bourguignon, Bernard Ravenel, Jean-Pierre Mignard, Michel Destot, Tony Dreyfus, Alain Richard, Bernard Langlois, Serge Depaquit, Charles Piaget, Victor Leduc, Huguette Bouchardeau.

    Engagée dès 1957 au sein de l'UGS, Huguette Bouchardeau est devenue secrétaire nationale du PSU de janvier 1979 à juin 1983. Serge Depaquit (un proche), lui a succédé. L'histoire chaotique du PSU est terrifiante puisqu'à chaque congrès, il y avait plusieurs courants jusqu'à cinq ou six, qui se disputaient les places de direction, avec des alliances, des scissions de courant, etc. Finalement, le PSU a disparu par encéphalogramme plat officiellement le 7 avril 1990 mais bien avant dans les faits.


    Comme je l'ai écrit, il serait donc très injuste et inexact de réduire le PSU à uniquement Michel Rocard et Huguette Bouchardeau, mais l'histoire n'a retenu que les deux seuls candidats à l'élection présidentielle (de même que l'histoire ne retiendra de LCR/NPA ses seuls candidats à l'élection présidentielle, Alain Krivine, Olivier Besancenot et Philippe Poutou, ainsi que LO ses seules candidats à l'élection présidentielle Arlette Laguiller et Nathalie Arthaud).
     

     
     


    Revenons à Huguette Bouchardeau qui est avant tout une brillante intellectuelle : quand elle s'est présentée, elle était une agrégée de philosophie (c'est rare en politique), elle a défendu une thèse de doctorat sur l'enseignement de la philosophie de 1900 à 1972 en France et elle était maître de conférence à l'Université de Lyon-2, poste qu'elle n'avait pas quitté en campagne.

    Parallèlement, elle a eu une forte action militante dès sa jeunesse : responsable syndicale à l'UNEF, puis à la FEN, à la CFDT, et militante politique à l'UGS puis au PSU. Elle était alors basée à Saint-Étienne (elle enseignait à Lyon) et a été plusieurs fois candidate du PSU localement. Huguette Bouchardeau a milité aussi, à l'époque, avec les Amis de la Terre, préfiguration du mouvement écologiste.

    Lorsqu'elle a été élue secrétaire nationale du PSU en janvier 1979, Huguette Bouchardeau a été la première femme à diriger un parti politique en France (à l'époque, Margaret Thatcher dirigeait le parti conservateur en Grande-Bretagne). Elle a mené la tête de liste du PSU aux premières élections européennes le 10 juin 1979 et sa liste s'est retrouvée dernière, avec 332 voix, oui, j'ai bien écrit 332 et pas 337 000 voix, donc, 0,00%. En fait, son parti n'avait pas l'argent pour payer le matériel de campagne (entre autres, les bulletins de vote) et lors de son meeting de campagne le 11 mai 1979 à Rouen, elle s'en est pris à cette règle électorale qui favoriserait les riches (à cause du seuil de 5% pour pouvoir être remboursé). Ainsi, elle a fait campagne pour faire voter nul, faute de bulletins du PSU à distribuer.

    Cette campagne nationale, sa première, ne l'a pas fait vraiment connaître. C'est en 1981 qu'elle a eu droit aux projecteurs de l'actualité. C'était la première fois qu'il y a eu autant de candidats à l'élection présidentielle, dix en 1981 dont six à gauche. L'élection de François Mitterrand a eu lieu au second tour malgré cette division au premier tour. Huguette Bouchardeau ne lui a certes pas fait beaucoup d'ombre avec seulement 1,1% des suffrages exprimés le 26 avril 1981, soit au dernier rang avec 321 353 voix. Pourtant, avec Michel Crépeau (du MRG), elle aurait pu apporter 3,3% aux 25,9% du candidat du PS, ce qui lui aurait donné un résultat supérieur au score du Président sortant Valéry Giscard d'Estaing (28,3%). Finalement, ce ne fut qu'en différé, puisque les candidats du MRG et du PSU ont apporté immédiatement leur soutien au second tour à François Mitterrand. Michel Crépeau allait être récompensé par un porte-feuille (l'Environnement, puis le Commerce, enfin la Justice) entre 1981 et 1986.

    C'était parce qu'Huguette Bouchardeau avait déjà un nom dans le militantisme féministe qu'elle a été hissée à la tête du PSU en 1979. Vingt ans plus tard, en novembre 1999, elle en rigolait encore : « Dans les meetings, je disais, en provoquant, que quand une profession commence à se féminiser, elle est en voie de dévalorisation. J'ai toujours dit ce que je pensais sur ce sujet-là. Pendant quelques mois, j'ai mal vécu ce début de secrétariat national du PSU, j'avais le sentiment qu'ils m'avaient mise là parce que c'était bien qu'un parti qui se disait féministe, écolo, etc., ait une femme à sa tête, mais ils se disaient quand même que j'étais là comme simple porte-parole. D'ailleurs, un membre du bureau national me l’a déclaré un jour : "Rocard 'pensait' la théorie du PSU et puis il en parlait, maintenant, on peut très bien avoir une porte-parole". Nous, on pense, et toi, tu causes… Vraiment, j'en ai entendu des vertes et des pas mûres, et tout ça dans la plus grande gentillesse, car vraiment ils m'aimaient bien, je crois. C'est vrai que si je ne leur avais pas paru capable de faire ça, ils ne m'auraient pas poussée, ou sinon ils auraient pris quelqu'un qui présentait bien, qui était mignonne. Ce n'est pas ce qu'ils ont cherché. Ils se sont vraiment dit que faire une place à une femme à la tête d'un parti, c'était la bonne position. (…) Ils voulaient une femme à la tête du parti et une candidate aux élections présidentielles. Ce qui fait qu'en treize ans (la première fois que j'ai été candidate aux législatives, c'était en 1968), tout s'était inversé. En 1968, les gens disaient : "ils sont fous de la présenter, elle leur fait perdre des points". En 1981, on en était venu à se dire qu’une femme peut en faire gagner. Mais cette expérience a été pénible… J'ai été nommée à la tête du PSU en janvier 79, et en juillet, j'ai écrit en trois semaines un bouquin qui s'appelle "Un coin dans leur monde" où je règle leur compte à mes amis politiques, parce que je supportais très mal qu'on m'ait mise là pour autre chose. ».


    Les militants du PSU avaient été sidérés par la tribune que la candidature à l'élection présidentielle avait offerte à Arlette Larguiller en 1974. Ils voulaient donc l'imiter avec aussi une femme. Huguette Bouchardeau, candidate du PSU, a eu aussi le soutien du parti communiste révolutionnaire (PCR) et de la fédération de la gauche alternative (FGA).
     

     
     


    Un mot sur la campagne dont je propose en fin d'article quatre interventions orales, une interview et trois prestations de campagne officielle. À la différence d'Arlette Laguiller qui parlait très vite pour mettre le maximum de phrases en un temps donné, Huguette Bouchardeau était très lente en diction, presque trop lente, comme un enseignant faisant une dictée dans une école primaire. Mais à la différence de François Bayrou (par exemple), le débit n'était pas saccadé mais très lisse (elle n'était pas pédagogue pour rien ; vous me direz, François Bayrou non plus, mais la différence, c'est qu'il avait une infirmité, le bégaiement). On sentait ainsi l'intellectuelle fluide qui savait manier concepts et idées (bien que femme, oserais-je écrire, pour reprendre le machisme au sein même du PSU !).

    Mais des concepts et idées totalement irréalistes. Par exemple, elle s'est opposée très fermement à la dissuasion nucléaire et a proposé que dès son élection, la France se mît à poils sur le plan de la défense. C'est terrible de réécouter ses mots à une époque où l'on considère que justement, la France n'a pas suffisamment concentré son effort de défense. Elle était encore dans la lignée du "faites l'amour, pas la guerre" en pensant qu'il n'y avait que de gentils dans le monde et aucun méchant qui voudrait s'en prendre aux territoires des autres (quelle erreur !).


    Elle était aussi pour la réduction du temps de travail, les 35 heures et même les 30 heures par semaine, en pensant que les Français vivraient mieux en travaillant moins (c'était encore l'époque du : on rase gratis !). À l'instar de Michel Rocard et Edmond Maire (secrétaire général de la CFDT), elle croyait aussi à l'autogestion des entreprises (à la suite de l'expérience Lip).

    Neuf propositions ont été inscrites sur son tract de campagne : 1. « La loi des 30 heures et les 35 heures tout de suite » ; 2. « Vivre, travailler et décider au pays » ; 3. « L'abandon de l'arme atomique » ; 4. « Des énergies alternatives au nucléaire » ; 5. « La prise de parole des femmes et la défense de leurs droits » ; 6. « La fin des privilèges et des inégalités » ; 7. « La révision de la Constitution de 58 » ; 8. « L'abolition de la peine de mort, de la loi Peyrefitte, et des tribunaux d'exception » ; 9. « Un plan d'urgence contre la faim dans le monde ».

    Mais la candidature d'Huguette Bouchardeau était d'abord un moyen de mettre les femmes à l'avant-scène de la politique, et en ce sens, elle y est parvenue par sa notoriété naissante. L'une des meilleures illustrations de l'effet présidentiel sur sa notoriété, c'était ses multiples candidatures aux élections législatives dans la première circonscription de la Loire (ville de Saint-Étienne) : en juin 1968, elle n'a eu que 8,3% ; en mars 1973, que 4,5% ; en mars 1978, que 1,2%... (dans ces scrutins, Michel Durafour a été élu) et en juin 1981, elle est arrivée en troisième position avec 24,2%, ce qui était pas mal, mais insuffisant car elle a été devancée par le candidat communiste Paul Chomat qui était en avance de 126 voix sur elle, si bien qu'elle s'est désistée au second tour pour Paul Chomat qui a battu Michel Durafour avec moins de 500 voix d'avance.

    Huguette Bouchardeau ne l'a pas vraiment utilisée car sa célébrité est partie aussi vite qu'elle n'est venue. Pourtant, ce n'était pas faute de poursuivre une carrière politique, chose qu'elle a pu faire en rejoignant la majorité socialo-communiste (au grand dam de la majorité du PSU qu'elle allait quitter en 1986).

     

     
     


    Ainsi, Huguette Bouchardeau est entrée au gouvernement, nommée Secrétaire d'État auprès du Premier Ministre chargée de l'Environnement et de la Qualité de la vie du 22 mars 1983 au 17 juillet 1984 dans le dernier gouvernement de Pierre Mauroy, puis Ministre de l'Environnement du 17 juillet 1984 au 20 mars 1986 dans le gouvernement de Laurent Fabius. Elle a été à l'origine de la loi n°83-630 du 12 juillet 1983 relative à la démocratisation des enquêtes publiques et à la protection de l'environnement (dite loi Bouchardeau) qui dit dans son article premier : « La réalisation d'aménagements, d'ouvrages ou de travaux, exécutés par des personnes publiques ou privées, est précédée d'une enquête publique soumise aux prescriptions de la présente loi, lorsqu'en raison de leur nature, de leur consistance ou du caractère des zones concernées, ces opérations sont susceptibles d'affecter l'environnement. (…) Les travaux qui sont exécutées en vue de prévenir un danger grave et immédiat sont exclus du champ d'application de la présente loi. ».
     

     
     


    Huguette Bouchardeau s'est aussi battue sur le plan européen pour réduire la pollution automobile contre l'industrie automobile française (on sait aujourd'hui que ce combat a eu un bénéficiaire industriel, les États-Unis, et que la réglementation motivée par l'écologie a toujours eu en France des intérêts économiques qui ne sont ni nationaux ni européens).

    L'ancienne ministre a été ensuite élue députée du Doubs en mars 1986, sur la liste socialiste (elle était en deuxième place et la liste, avec 35,5% des voix, a gagné deux sièges, à la proportionnelle), elle a donc siégé à l'Assemblée comme députée apparentée au groupe socialiste. Candidate de la France unie (mouvement rassemblant les débauchés du mitterrandisme), elle a été réélue en juin 1988 dans la quatrième circonscription du Doubs (Sochaux) au second tour avec 56,8% des voix face à un candidat UDF-CDS.
     

     
     


    Après la démission de Laurent Fabius, devenu premier secrétaire du PS, du perchoir, Huguette Bouchardeau a été candidate aux deux tours de l'élection du nouveau Président de l'Assemblée Nationale le 22 janvier 1992. Au premier tour, à 17 heures 10, elle a obtenu 44 voix sur 541 votants et 534 exprimés (256 à Henri Emmanuelli, 207 à Jacques Chaban-Delmas et 27 au communiste Georges Hage).

    Elle a expliqué qu'elle se maintenait au second tour, contrairement à son collègue communiste, avec ces paroles : « Monsieur le président, les applaudissements que nous venons d'entendre comme le résultat que je viens d'obtenir me paraissent significatifs. J'ai voulu, par ma candidature, mes chers collègues, donner un signe. Notre assemblée devrait travailler dans une plus grande indépendance à l'égard du gouvernement et des partis politiques. Je veux affirmer encore cette option et je maintiens donc ma candidature, en souhaitant qu'une fois faite la démonstration par les uns ou les autres de leur fidélité à leur famille d'origine, le plus grand nombre d'entre nous se retrouve sur une candidature en faveur d'une véritable indépendance de notre assemblée. ». Au second tour, à 18 heures 50, elle a reçu moins de voix qu'au premier tour, seulement 32 sur 550 votants et 546 exprimés (289 à Henri Emmanuelli, élu, et 225 à Jacques Chaban-Delmas).


    Parfois opposée aux décisions des gouvernements socialistes, elle ne s'est pas représentée en 1993 (la circonscription allait revenir à Pierre Moscovici en 1997), mais elle a été élue maire d'Aigues-Vives, commune de 2 300 habitants près de Lunel, dans la Gard, de juin 1995 à mars 2001 et s'est ensuite retirée de la vie politique locale.

    Parallèlement à ses activités politiques, Huguette Bouchardeau a mené une activité éditoriale intense. Elle a été directrice de collection aux éditions Syros de 1978 à 1984, puis a créé HB éditions en 1995 (sa maison d'édition a disparu en juin 2002 après la publication d'environ 150 ouvrages). Elle est surtout l'auteure de plus d'une vingtaine de livres, surtout des essais, en particulier centrés sur certaines femmes qu'elle admire, en particulier : George Sand (1990), Rose Noël (1992), Simone Weil (1995), Agatha Christie (1998), Elsa Triolet (2000), Nathalie Sarraute (2003), Simone Signoret (2005) et Simone de Beauvoir (2007).

    Pour finir, écoutons Huguette Bouchardeau dire à Margaret Maruani et Chantal Rogerat, en novembre 1999, sa conception d'être une femme engagée : « Quand j'étais petite fille, je me disais : “est-ce que je travaillerai ou est-ce que je me marierai ?”. Qui se pose encore ces questions-là ? Cela ne veut pas dire que les tâches ménagères soient partagées parfaitement, que les filles aillent moins dans les professions du soin, de secrétariat. Mais il faut voir les classes scientifiques, les classes d'ingénieurs. Il y en a beaucoup plus… Il faut voir dans la vie politique, les femmes comme Aubry, Buffet, Guigou, Royal, Voynet. Nous avons été, nous, une génération intermédiaire à dire que nous nous situions hors du pouvoir… Maintenant elles font le même type de carrière politique que les hommes. L'histoire des femmes ne se fait pas simplement au moment où il y a des grandes manifestations, où il y a une sorte de théorisation de lutte des femmes. Les conquêtes des femmes se prolongent dans le silence, et individu par individu presque, avec quelques femmes qui théorisent, quelques femmes qui font avancer, quelques femmes qui disent “attention, il y a un piège…” » (publié dans la revue "Travail, genre et sociétés" 1999/2 n°2).



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    Sylvain Rakotoarison (31 mai 2025)
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    Pour aller plus loin :
    Huguette Bouchardeau.
    François Mitterrand.
    Valéry Giscard d'Estaing.
    Jacques Chirac.
    Georges Marchais.
    Michel Debré.
    Brice Lalonde.
    Marie-France Garaud.
    Arlette Laguiller.




















    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250601-huguette-bouchardeau.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/qui-se-souvient-de-la-candidate-260929

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/06/01/article-sr-20250601-huguette-bouchardeau.html



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  • Thérèse de Lisieux, mystique et comique, d'une invincible gaieté !

    « Il paraît que Thérèse était très drôle en récréation. Je crois bien qu’elle était gaie. Elle n’avait pas le goût de la tristesse. (…) "Mystique, comique, tout lui va !" (…). L’œuvre de Thérèse est comme un tableau impressionniste : si on a le nez dessus, on risque de ne voir que le sentimentalisme et de passer à côté de l’essentiel. » (Maurice Bellet).



     

     
     


    Le prêtre et philosophe Maurice Bellet aimait beaucoup sainte Thérèse de Lisieux. Le journaliste qui l'a ainsi cité, Adrien Bail, évoquait ainsi la jeune fille dans "Le Pèlerin" du 25 septembre 2013 : « Sœur Thérèse de l’Enfant-Jésus a gardé l’espièglerie, mêlée à un profond sérieux, de son enfance, où elle jouait déjà au théâtre (…) et raconte ses aventures avec sa cousine Marie ou sa sœur Céline, dignes de la comtesse de Ségur. Ce côté enfantin lui fera imaginer "un ascenseur" pour aller au Ciel… Il reste cependant un style qui peut être un obstacle. (…) On retrouve [le] sourire sur de nombreux clichés de Thérèse. Il imprègne son dialogue amoureux avec Jésus et sa symbolique : les roses, les oiseaux… Tout traduit une invincible gaieté qui résistera à l’agonie. ».

    Thérèse de Lisieux, sœur carmélite qui a été un modèle de foi pour celui qui doute et qui désespère, a été canonisée il y a un siècle, le 17 mai 1925, par le pape Pie XI à la Basilique Saint-Pierre de Rome. La jeune fille qui est morte de tuberculose à l'âge de 24 ans le 30 septembre 1897 avait été béatifiée peu auparavant, le 29 avril 1923 par le même pape Pie XI. J'ai évoqué la trajectoire de Thérèse il y a quelques quelques années.

    Malgré son jeune âge, on peut considérer Thérèse de Lisieux comme une grande intellectuelle de la foi, une sorte de philosophe de la sérénité qui a beaucoup influencé les esprits du XXe siècle. Son livre posthume "Histoire d'une âme", publié l'année suivant sa mort, a été vendu à plus de 500 millions d'exemplaires en une cinquantaine de langue et une quarantaine d'éditions (depuis 1898). Beaucoup de lecteurs ont été transformés par la lecture de cette œuvre qui avait été écrite sans aucune intention d'être publiée, et cela beaucoup d'années avant que le pape ne s'en soit mêlé. Thérèse de Lisieux a d'abord été une sainte pour le peuple avant de l'être pour le Vatican et le pape.

     

     
     


    Lors de sa canonisation le 17 mai 1925, Pie XI le rappelait : « L'Esprit de vérité lui ouvrit et lui fit connaître ce qu'il a coutume de cacher aux sages et aux savants pour le révéler aux tout-petits. Ainsi, selon le témoignage de notre prédécesseur immédiat, elle a possédé une telle science des réalités d'en-haut qu'elle peut montrer aux âmes une voie sûre pour le salut. ». En d'autres termes, certains sont des théoriciens de la foi, alors qu'elle, elle a été une praticienne de la foi, elle a été philosophe sur le tas, ressentant l'incarnation du divin et de l'Amour dans son être.

    Le pape Pie XII, à l'occasion de la consécration de la Basilique Sainte-Thérèse à Lisieux, remarquait le 11 juillet 1954 : « Message d'humilité d'abord ! Quelle étrange apparition au sein d'un monde imbu de lui-même, de ses découvertes scientifiques, de ses virtuosités techniques, que le rayonnement d'une jeune fille que ne distingue aucune action d'éclat, aucune œuvre temporelle. Avec son dépouillement absolu des grandeurs terrestres, le renoncement à sa liberté et aux joies de la vie, le sacrifice combien douloureux des affections les plus tendres, elle se pose en vivante antithèse de tous les idéals du monde. Quand les peuples et les classes sociales se défient ou s'affrontent pour la prépondérance économique ou politique, Thérèse de l'Enfant-Jésus apparaît les mains vides : fortune, honneur, influence, efficacité temporelle, rien ne l'attire, rien ne la retient que Dieu seul et son Royaume. Mais en revanche, le Seigneur l'a introduite dans sa maison, lui a confié ses secrets. ».

    Le pape Jean-Paul II, futur saint, le confirmait lorsqu'il l'a reconnue comme une Docteure de l'Église (très rare pour une femme) le 19 octobre 1997 : « Parmi les petits auxquels les secrets du Royaume ont été manifestés d'une manière toute particulière, resplendit Thérèse de l'Enfant-Jésus et de la Sainte-Face (…). Pendant sa vie, Thérèse a découvert "de nouvelles lumières, des sens cachés et mystérieux" et elle a reçu du divin Maître la "science d'Amour" qu'elle a montrée dans ses écrits avec une réelle originalité. Cette science est l'expression lumineuse de sa connaissance du mystère du Royaume et de son expérience personnelle de la grâce. Elle peut être considérée comme un charisme particulier de la sagesse évangélique que Thérèse, comme d'autres saints et maîtres de la foi, a puisée dans la prière. En notre siècle, l'accueil réservé à l'exemple de sa vie et à sa doctrine évangélique a été rapide, universel et constant. (…) Son message, souvent résumé dans ce qu'on appelle la "petite voie", qui n'est autre que la voie évangélique de la sainteté ouverte à tous, a été étudié par des théologiens et des spécialistes de la spiritualité. ».

    Dans son exhortation apostolique "Evangelii Gaudium", le pape François déclarait le 24 novembre 2013 aux évêques, prêtres, diacres et simples fidèles laïcs, notamment ceci : « Un défi important est de montrer que la solution ne consistera jamais dans la fuite d’une relation personnelle et engagée avec Dieu, et qui nous engage en même temps avec les autres. C’est ce qui se passe aujourd’hui quand les croyants font en sorte de se cacher et de se soustraire au regard des autres, et quand subtilement ils s’enfuient d’un lieu à l’autre ou d’une tâche à l’autre, sans créer des liens profonds et stables : "Imaginatio locorum et mutatio multos fefellit" [Plusieurs s’imaginant qu’ils seraient meilleurs en d’autres lieux, ont été trompés par cette idée de changement]. C’est un faux remède qui rend malade le cœur et parfois le corps. Il est nécessaire d’aider à reconnaître que l’unique voie consiste dans le fait d’apprendre à rencontrer les autres en adoptant le comportement juste, en les appréciant et en les acceptant comme des compagnons de route, sans résistances intérieures. Mieux encore, il s’agit d’apprendre à découvrir Jésus dans le visage des autres, dans leur voix, dans leurs demandes. C’est aussi apprendre à souffrir en embrassant Jésus crucifié quand nous subissons des agressions injustes ou des ingratitudes, sans jamais nous lasser de choisir la fraternité. » (paragraphe 91).

    Il faisait en particulier référence à sainte Thérèse de Lisieux et à son expérience intérieure qu'elle avait elle-même racontée : « Un soir d’hiver j’accomplissais comme d’habitude mon petit office, il faisait froid, il faisait nuit… tout à coup j’entendis dans le lointain le son harmonieux d’un instrument de musique, alors je me représentai un salon bien éclairé, tout brillant de dorures, des jeunes filles élégamment vêtues se faisant mutuellement des compliments et des politesses mondaines ; puis mon regard se porta sur la pauvre malade que je soutenais ; au lieu d’une mélodie j’entendais de temps en temps ses gémissements plaintifs (…). Je ne puis exprimer ce qui se passa dans mon âme, ce que je sais c’est que le Seigneur l’illumina des rayons de la vérité qui surpassèrent tellement l’éclat ténébreux des fêtes de la terre, que je ne pouvais croire à mon bonheur. ».

     

     
     


    Dans son autre exhortation apostolique "Amoris Laetitia" publiée le 19 mars 2016, le pape François plaçait encore Thérèse de Lisieux en exemple : « Une façon de communiquer avec les proches décédés est de prier pour eux. La Bible affirme que "prier pour les morts" est une pensée "sainte et pieuse". (…) Certains saints, avant de mourir, consolaient leurs proches en leur promettant qu’ils seraient proches pour les aider. Sainte Thérèse de Lisieux faisait part de son désir de passer son Ciel à continuer de faire du bien sur la terre. » (paragraphe 257).

    Et il ajoutait : « Si nous acceptons la mort, nous pouvons nous y préparer. Le parcours est de grandir dans l’amour envers ceux qui cheminent avec nous, jusqu’au jour où "il n’y aura plus de mort, ni de pleur, ni de cri ni de peine". Ainsi, nous nous préparerons aussi à retrouver les proches qui sont morts. (…) Ne perdons pas notre énergie à rester des années et des années dans le passé. Mieux nous vivons sur cette terre, plus grand sera le bonheur que nous pourrons partager avec nos proches dans le ciel. Plus nous arriverons à mûrir et à grandir, plus nous pourrons leur apporter de belles choses au banquet céleste. » (paragraphe 258).

    Le père dominicain Serge-Thomas Bonino, théologien français, normalien, président de l'Académie pontificale romaine de saint Thomas d'Aquin et de religion catholique depuis 2014, était le secrétaire général de la Commission théologique internationale de 2011 à 2020, une des six commissions de la Curie romaine, celle chargée de traiter les questions théologiques de grande importance. Le 29 novembre 2011, dans un commentaire sur un document sur les perspectives, principes et critères de la théologie, il évoquait Thérèse comme une petite qui a reçu le Mystère : « Il y a aussi à notre époque des petits qui ont connu ce mystère. Nous pensons à sainte Bernadette Soubirous ; sainte Thérèse de Lisieux, avec sa nouvelle lecture de la Bible "non scientifique", mais qui entre dans le cœur de l'Écriture Sainte ; jusqu’aux saints et bienheureux de notre époque : sainte Joséphine Bakhita, la bienheureuse Teresa de Calcutta, saint Damien de Veuster. Nous pourrions en citer tant ! ». Entre-temps, Mère Teresa a été elle-même canonisée.

    Depuis que son enseignement est connu, soit depuis près de cent trente ans, tous ont considéré Thérèse de Lisieux comme un exemple d'humilité, d'une "petite" qui a pu entrer par la grande porte mieux que les "grands". C'est pourquoi il est étonnant que sa canonisation, il y a juste cent ans, ait fait l'objet d'une cérémonie très pompeuse et luxueuse. À l'évidence, ce n'était pas du tout l'intention de Thérèse de vouloir être au centre de pompes pontificales qui ont honoré avec beaucoup trop de fastes la petite fille souriante et aimante qu'elle avait toujours été. Elle n'est qu'une, parmi de très nombreux autres, peut-être complètement anonymes, qui sont entrés dans le Mystère de la foi. En toute discrétion.



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    Sylvain Rakotoarison (17 mai 2025)
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    Pour aller plus loin :
    L'ultra-foi en l'Amour.
    Sainte Thérèse de Lisieux.
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    Pâques : Pourquoi cherchez-vous le Vivant parmi les morts ?
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    Mgr Jean-Marc Aveline.
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    Le pape François à Marseille (1) : ne pas légiférer sur l'euthanasie.
    Le voyage du pape François à Marseille (22 et 23 septembre 2023).
    Mgr Jacques Gaillot.
    Mgr Albert Decourtray.

    Maurice Bellet.
    Lucile Randon (Sœur André).
    François : les 10 ans de pontificat du pape du bout du monde.
    Santé et Amour.
    Le testament de Benoît XVI.
    Célébration des obsèques du pape émérite Benoît XVI le 5 janvier 2023 (vidéo).

    L’encyclique "Caritas in veritate" du 29 juin 2009.
    Sainte Jeanne d'Arc.
    Sainte Thérèse de Lisieux.
    Hommage au pape émérite Benoît XVI (1927-2022).
    Les 95 ans du pape émérite Benoît XVI.
    L’Église de Benoît XVI.
    Saint François de Sales.
    Le pape François et les étiquettes.
    Saint  Jean-Paul II.
    Pierre Teilhard de Chardin.
    La vérité nous rendra libres.
    Il est venu parmi les siens...
    Pourquoi m’as-tu abandonné ?
    Dis seulement une parole et je serai guéri.
    Le ralliement des catholiques français à la République.
    L’abbé Bernard Remy.


     

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250517-sainte-therese-de-lisieux.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/religions/article/therese-de-lisieux-mystique-et-260872

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/05/17/article-sr-20250517-sainte-therese-de-lisieux.html


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  • Triste dimanche de mai

    « Cela fait 14 ans qu’elle me suit… Toujours présente malgré mes tentatives de fuite, elle s’accroche à moi. Ce soir, elle est bien présente mais j’essaie de la faire taire en me rappelant tous les maux qu’elle me fait endurer depuis ces années. » (Agathe Hilairet, 2022 sur Instagram).




     

     
     


    Cyril Lacombe, le procureur de la République de Poitiers, a annoncé ce lundi 5 mai 2025 la triste nouvelle. Les forces de l'ordre ont retrouvé dans un sous-bois au sud de Vivonne, la veille, le corps sans vie d'Agathe Hilairet, qui avait disparu le 10 avril 2025 à 10 heures après avoir commencé un jogging depuis Vivonne, à 20 kilomètres au sud de Poitiers. Selon France Info, c'est un promeneur qui aurait retrouvé le corps dans une zone qui n'avait pas été fouillée.

    Le père de la jeune fille de 28 ans avait alors alerté les forces de l'ordre en début d'après-midi alors qu'elle ne revenait pas. Grande sportive, elle faisait cet itinéraire de course à pied quasiment tous les jours. La dernière connexion de son smartphone a été géolocalisée dans l'après-midi à Voulon, à une dizaine de kilomètres de Vivonne.


    La gendarmerie a très vite pris au sérieux cette disparition. Dès le 11 avril 2025, plus d'une centaine de gendarmes ont été mobilisés pour effectuer les recherches, ainsi que des militaires et des plongeurs. Un hélicoptère avec une caméra thermique a également été utilisé pour l'occasion. En tout, une surface de 100 kilomètres carrés a été passée au peigne fin. Le 14 avril 2025, le parquet de Poitiers a ouvert une information judiciaire contre X pour enlèvement et séquestration afin de se donner plus de moyens d'investigation (notamment des perquisitions, des auditions, des analyses ADN et numériques). En six jours, la diffusion de l'appel à témoins a permis de recevoir 178 signalements.
     

     
     


    L'inquiétude était grande car la jeune joggeuse souffrait d'anorexie mentale depuis l'âge de 12 ans, un combat qu'elle menait quotidiennement, avec des centaines d'internautes qui la suivaient sur les réseaux sociaux (en particulier Instagram). Elle était d'une taille très mince (initialement, son poids a été donné à 35 kilogrammes pour 1,65 mètre). Les pistes de la fugue organisée et du suicide ont été écartées par la famille à partir de la lecture des derniers mots de son journal intime ou des recherches Internet qu'elle avait effectuées, même si rien n'était exclu pour les autorités.

    L'autopsie réalisée ce lundi 5 mai 2025 n'a donné aucun résultat conclusif sur la cause de la mort en raison de l'état du corps. Une crise cardiaque, par exemple, ne laisserait plus beaucoup de traces visibles après trois semaines dans des conditions extérieures très humides. D'autres analyses et examens sont en cours de réalisation pour poursuivre les investigations.

    L'hypothèse d'une mauvaise rencontre reste encore très plausible sinon probable (on dit même qu'elle est toujours privilégiée à ce stade de l'enquête). La découverte du corps a levé une inconnue mais pour la pire des possibilités. Tant que la personne était disparue, tout restait possible et notamment qu'elle fût encore en vie. Hélas, dans ce genre de disparition, plus le temps est long, plus les chances que la personne disparue ait survécu s'amenuisent.
     

     
     


    La vraie question pour le procureur est de savoir si la jeune femme est morte d'un pépin de santé (en l'occurrence, probablement d'un arrêt cardiaque) ou si elle a été la victime d'un prédateur détraqué, auquel cas il faudra chercher le ou les coupables.

    Je regrette que dans la presse, on continue encore, et malheureusement, ce n'est pas la première fois, à parler de la "joggeuse" de Vivonne. Elle est morte, certes, en faisant son jogging (cela semble à peu près établi), mais elle n'était pas une "joggeuse professionnelle" (si cette fonction existe ?). Elle était une personne à part entière, et j'imagine que sa famille et les proches ne la voyaient pas comme une coureuse mais comme une fille, une amie, ou une collègue.
     

     
     


    Alors, disons-le : la jeune femme s'appelait Agathe, elle venait d'avoir 28 ans le 30 mars dernier. Elle adorait faire du sport, et en particulier courir depuis l'âge de 13 ans, elle aimait aussi beaucoup dessiner, faire de la broderie et jouer à des jeux vidéo. Après une première année de droit à Poitiers, elle a réorienté sa trajectoire professionnelle comme assistante de direction, selon "Le Parisien", et occupait alors un poste d'assistante d'accueil pour une association promouvant l'insertion professionnelle à Poitiers. Les parents vont pouvoir commencer à faire leur deuil. Une réalité qui s'effondre sur cette tragédie. Pensée aux proches.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (05 mai 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Agathe Hilairet.
    Pourquoi Aboubakar Cissé a-t-il été assassiné ?
    Le mystère Émile sur le point d'être percé ?
    La profanation du cimetière juif de Carpentras.
    Crash de l'A320 de Germanwings.
    L'accident de Villa Castelli.
    Morts mystérieuses à Santa Fe.
    Repose en paix Louise, on ne t'oubliera pas !
    Gisèle Pélicot, femme de l'année 2024 ?
    5 ans de prison dont 2 ferme pour Pierre Palmade.
    40 ans de confusions dans l'Affaire Grégory.
    Philippine : émotion nationale, récupérations politiques, dysfonctionnements de l'État ?
    Viols de Mazan : quelques réflexions sur Pélicot et compagnie...
    Violence scolaire : quand une enseignante s'y met...
    Création du délit d'homicide routier : seulement cosmétique ?
    La France criminelle ?
    La nuit bleue de Lina.
    La nuit de Célya.
    La nuit d'Émile Soleil.
    Affaire Grégory : la vérité sans la boue ?
    Alexandra Sonac et sa fille adolescente.
    Harcèlement scolaire et refus d'obtempérer.
    Alisha, victime d’un engrenage infernal.
    À propos de la tragique disparition de Karine Esquivillon...
    Meurtre de Lola.
    Nos enseignants sont des héros.
    Patricia Bouchon.
    Sémantique de l'horreur.
    La sécurité des personnes face aux dangers.

     

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250505-agathe-hilairet.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/societe/article/triste-dimanche-de-mai-260830

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/05/05/article-sr-20250505-agathe-hilairet.html



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  • Les écolos, trait de division de la société française

    « Sans cesse questionnée sur son positionnement entre PS et LFI, elle ne dit rien de définitif, ménage les deux camps. Et voilà sa force. Voilà aussi pourquoi elle sera réélue. Et pourquoi ce congrès ne sert à rien (d’ailleurs, l’abstention est forte). Les militants écolos auraient pu acter une stratégie claire en vue des municipales et de la présidentielle. Mais, non, ils resteront au milieu. Marine Tondelier parle d’un parti "trait d’union". » (Maxence Lambrecq, le 17 avril 2025 sur France Inter).



     

     
     


    Plutôt que le trait d'union proposé par un éditorialiste de France Inter, j'oserais plutôt parler d'un trait de division de la société française. "Les Écologistes", nouvelle appellation du parti Europe Écologie-Les Verts (EELV) depuis le 14 octobre 2023 (mais je garderai le nom de EELV car je trouve que les appellations, nombreuses aujourd'hui, "Les quelque chose", comme "Les Républicains", "Les Centristes", "Les Patriotes", sont peu adaptées à la syntaxe française, donc EELV se réunit en congrès fédéral ce samedi 26 avril 2025 à Pantin, suivi d'une "Grande Convention" des investiture les 26 et 27 avril 2025 au même endroit.

    Pas de suspense puisque le vote des adhérents a eu lieu du 16 au 18 avril 2025, et le résultat a été communiqué le 19 avril 2025, veille de Pâques, avec une très large et attendue victoire de la secrétaire nationale sortante, Marine Tondelier.

    On devrait même dire "sectaire nationale" si on lit l'article d'Anne-Sophie Mercier publié le 9 mars 2025 dans "Le Canard enchaîné" : « Elle est pétillante, mais elle sait aussi asphyxier ceux qui, chez les Verts, sont susceptibles de lui faire de l’ombre. Et ce n'est pas Julien Bayou qui dira le contraire. Aujourd'hui, Yannick Jadot, Sandrine Rousseau ou Éric Piolle essaient de se faire entendre (…). "On n’a plus rien à envier à La France insou­mise". C’est la phrase qu’on entend beaucoup, ces temps-ci, dans la bouche des opposants écolos à Marine Tondelier. (…) Ils découvrent le vrai visage de leur secrétaire générale, sacrément douée pour causer démocratie et transparence, avec son sourire télégénique, son aisance à l’oral et son inamovible veste verte, tout en verrouillant le parti, changeant les règles quand ça lui chante et éliminant les adversaires avec méthode et détermination. (…) "C’est drôle, cette bronca des opposants. Tondelier a été formée à la maîtrise de l’appareil par Duflot et Placé, qui n’étaient pas manchots. Elle a été la patronne des jeunes écolos et déléguée aux journées d’été, des postes extrêmement politiques. Ils espéraient quoi à la place ?" s’amuse un pilier du parti. ».


    L'un des exemples du verrouillage, c'est d'avoir sorti de la boucle de son courant Éric Piolle, le maire de Grenoble, qui a pourtant été l'un de ses soutiens les plus actifs, car ce dernier voudrait devenir porte-parole du mouvement écologiste mais Marine Tondelier préférerait y placer le Normand Guillaume Hédouin (les deux candidats seront départagés au cours d'un ultime second tour).
     

     
     


    Les résultats sont sans équivoque en faveur de la non-ligne de Marine Tondelier, mais il n'y a pas de quoi pavoiser. D'abord, il n'y a que 13 725 adhérents inscrits, ce qui est faible pour un parti d'envergure nationale. Ensuite, il y a eu un très fort taux d'abstention, 51,2%. Enfin, le score de Marine Tondelier, 4 795 voix, soit 72,6% des suffrages exprimés, ne représente que 34,9% du total des adhérents, soit un peu plus d'un tiers. Ce n'est donc pas un vote de large adhésion.
     

     
     


    Trois autres candidats ont participé à cette compétition, dont Karima Delli (12,8%) et aussi Harmonie Lecerf Meunier, qui a pour caractéristique de représenter le courant "Radicalement vôtre", le courant extrémiste de Sandrine Rousseau, arrivée dernière avec seulement 422 voix, soit 6,4% des suffrages exprimés, mais aussi 3,1% de l'ensemble des adhérents ! Étant donné que les écologistes ne représentent que 5,5% du paysage électoral français (score de la liste menée par Marie Toussaint aux élections européennes du 9 juin 2024), ce courant ne représente finalement que 0,17% de l'électorat français. On peut ainsi trouver que la présence hégémonique de Sandrine Rousseau dans les médias ne représente pas vraiment son audience électorale réelle, ce qui a fait dire à quelqu'un, sur Twitter : « Ça fait de Sandrine Rousseau la seule politique qui totalise plus de passages médias que de voix au congrès de son parti. ».
     

     
     


    Marine Tondelier a réussi l'OPA le 10 décembre 2022, par sa capacité à être présente dans les médias et à s'exprimer auprès des militants, à marginaliser les deux courants opposés lors de la primaire de 2021 qui avait abouti au second tour à un duel entre Yannick Jadot, représentant de l'aile réformiste et raisonnable, et Sandrine Rousseau, représentante de l'aile extrémiste, wokiste, décroissant. Marine Tondelier, elle, se moque de savoir quelle aile choisir.

    On le voit notamment à la lecture du texte qui a été également proposé au vote à l'occasion de ce congrès. Le flou habite ce texte supposé d'orientation politique. Sa rédaction bourrée d'écriture inclusive est illisible pour cette raison. Il suffit de lire la conclusion pour comprendre que cette rhétorique de bisounours où rien n'est proposé, ni méthode ni programme concret, n'a d'autre raison d'être que de servir de support à l'inconsistance d'une future candidature présidentielle de Marine Tondelier : « Ce mandat sera celui du renforcement de notre parti, un parti démocratique, accueillant et émancipateur, afin que l'écologie politique gagne du terrain dans tous les territoires, dans les institutions et dans toutes les couches de la société. À l’heure de la montée des régimes autoritaires dans nombre de pays du monde, nous devons appliquer des pratiques conformes à la vision de la société démocratique que nous désirons. ».

    Rien que la lecture des titres suffit à comprendre que ce parti est incapable de réponde aux enjeux actuels, faire face à des dirigeants comme Vladimir Poutine et Donald Trump : « Ancrer la diplomatie dans le multilatéralisme, la justice et l'écologie » ; « Construire une Europe de la paix, solidaire, souveraine et écologique » ; « Lutter contre les nouvelles tentatives de déstabilisation »... Ce serait fédérateur si ces titres n'étaient pas des slogans creux, des incantations sans mode d'emploi, sans proposition efficace.et surtout, c'est à mon sens le plus grave, sans idée originale. La plus marquante est cette phrase sans précision et totalement vide, incantatoire : « La guerre en Ukraine souligne l'urgence d'une diplomatie efficace et d'une défense commune européenne. ». Oui ? Et alors ? Concrètement, cela signifie quoi ?

     

     
     


    Pire, on retrouve les vieilles rengaines anachroniques et dogmatiques qui ont fait élire Donald Trump aux États-Unis et pourraient faire gagner le RN en France : « Il est urgent de mettre fin au capitalisme débridé qui pille les ressources, perpétue souvent des rapports de domination postcoloniaux et accroît les inégalités. ». Ou encore : « La coopération avec les Suds [au pluriel, oui ! contre la langue française] doit être co-construite avec les populations et se diriger vers des projets féministes, écologistes, équitables et garants de la souveraineté alimentaire. ».

    Ou encore, on le ressent aussi dans le chapitre sur le fonction interne : « Un parti qui réaffirme son engagement écoféministe et antiraciste. Il devra affronter l'offensive du masculinisme et des réactionnaires, qui peut se déployer même dans nos rangs. ». Voilà une vision bien peu bienveillante (adjectif mis pourtant à l'affiche) des rapports entre les hommes et les femmes. C'est d'autant plus inconsistant que Marine Tondelier a pris la direction de EELV en évinçant Julien Bayou accusé d'agressions sexuelles par Sandrine Rousseau, mais lorsqu'il a été totalement blanchi par la justice du pays, il n'a pas été réintégré, ni réhabilité dans son honneur au sein de son parti et il reste toujours persona non grata.
     

     
     


    Ce texte présenté le 9 avril 2025 est nul pour laisser une grande liberté à Marine Tondelier dans ses ambitions présidentielles. Comme des dizaines d'autres responsables politiques, depuis qu'elle a gagné en notoriété avec la campagne des élections législatives, et surtout, postlégislatives (elle se déplaçait avec une technocrate de la mairie de Paris, vous savez, celle qui devait être Première Ministre, Lucie Castets), elle a senti ses ailes pousser, celles d'un parfum présidentiel, en tablant sur les divisions du PS et leur incapacité, depuis 2011, à présenter un véritable leader (au point de faire élire un homme aussi limité que François Hollande), et sur la vieillesse et les excès verbaux et idéologiques de Jean-Luc Mélenchon.

    Seulement4 232 adhérents ont approuvé ce texte dit d'orientation, peut-être 85,0% des suffrages exprimés (le choix était pour ou contre ; il n'y avait pas d'autres textes !), mais avec une très forte abstention (je-m'en-foutisme), 58,7%, cela ne représente que 30,8% des adhérents, soit moins que le score de Marine Tondelier elle-même.

     

     
     


    Jean-Vincent Placé avait d'ailleurs trouvé lui-même la bonne formule dès le 28 août 2015 pour décrire son parti : « |Il] est un astre mort, une structure morte qui donne aujourd'hui une vision caricaturale et politicienne de l'écologie. ». Cette appréciation demeure d'actualité, avec d'autres acteurs.
     

     
     


    Ce qui est remarquable, comme Jean-Luc Mélenchon, Marine Tondelier veut changer de Constitution alors qu'elle a adopté, comme Jean-Luc Mélenchon aussi, précisément ce qui la caractérise le plus, à savoir l'obsession présidentielle. Mais, on peut raisonnablement rester optimiste pour l'avenir. Jamais un dirigeant écologiste n'a duré plus de quelques années, son quart d'heure de célébrité : Dominique Voynet, Noël Mamère, Nicolas Hulot, Eva Joly, Cécile Duflot, Jean-Vincent Placé, Yannick Jadot, Julien Bayou, etc. ne sont jamais restés très longtemps sur le devant de la scène et sont retombés rapidement dans l'anonymat vide de leur inconsistance politique. L'avenir tout tracé de Marine Tondelier.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (21 avril 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Les écolos, trait de division de la société française.
    Dominique Voynet.
    Laurence Vichnievsky.
    Marine Tondelier.
    François Ruffin.
    Clémentine Autain.
    Julien Bayou.
    Élysée 2022 (49) : vers une quatrième cohabitation ?
    Élysée 2022 (44) : la consécration du mélenchonisme électoral.
    Élysée 2022 (43) : le sursaut républicain !
    Yannick Jadot.
    Sandrine Rousseau.
    Élysée 2022 (5) : profondes divisions chez les écologistes.
    Grégory Doucet.
    René Dumont.


     

     
     



    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250419-ecolos.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/les-ecolos-trait-de-division-de-la-260554

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/04/24/article-sr-20250419-ecolos.html



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  • Abbé Pierre : le Vatican savait dès 1955 !

    « [La Conférence des évêques de France] exprime sa proximité aux personnes victimes et redit sa détermination à agir pour que toute la vérité possible soit faite sur les actes commis par l’abbé Pierre. » (communiqué du 4 février 2025).



     

     
     


    Depuis le 17 juillet 2024, les Français sont orphelins de l'une des personnalités qu'ils ont le plus adorée depuis les cinquante dernières années, à savoir l'abbé Pierre, une véritable institution de la charité, spirituelle mais aussi économique et sociale, qui fait vivre encore aujourd'hui des milliers de personnes qui avaient besoin d'une seconde chance dans tous les établissements Emmaüs (et qui, du reste, aide aussi tous ceux qui ont été amenés à vider une maison familiale et qui ne savaient pas que faire de tous les meubles, objets, etc. accumulés depuis des décennies voire des générations et devenus invendables).

    Les révélations sur l'obsession sexuelle, car c'est bien de cela qu'il s'agit, de l'abbé Pierre arrivent progressivement au grand public par petites grappes d'informations, cela devient même une série à épisodes assez malsaine mais pourtant nécessaire. Rappelons qu'à l'origine, non pas du scandale (seul l'abbé Pierre en est à l'origine), mais de ces révélations, c'est l'enquête interne de la Fondation Abbé Pierre et d'Emmaüs International, saisis par des femmes victimes de l'abbé Pierre, qui ont diligenté une enquête indépendante (oui, même si les enquêteurs sont connus, elle est indépendante) et qui ont remis leur copie à ces organismes qui n'avaient pas beaucoup d'autre choix que de la rendre publique.

    Pour les Français, croyants ou pas croyants, cela fait mal car c'est une sorte de saint qui s'écroule dans la mémoire collective. À ce sujet, il faut rappeler que le nom de l'abbé Pierre avait longtemps circulé pour transférer ses cendres au Panthéon. Heureusement qu'on ait hésité ou attendu et il faut vraiment faire attention à ceux qu'on honore, sous peine de rendre ridicule le principe même d'honorer. Je ne sais pas s'il existe un protocole pour dépanthéoniser, mais tant qu'à faire, autant éviter à devoir l'envisager.

    Deux petites introductions encore avant la révélation des derniers faits.

    La première, courte, est d'insister sur le fait qu'il n'existe pas d'homme providentiel (j'inclus aussi les femmes), quel que soit le domaine dans lequel il exercerait. Pour la raison simple que tout homme est faillible et qu'il faut rester humble. C'est la complexité de l'âme humaine : on peut faire des grandes choses et être un salopard ! On le sait pour les artistes, écrivains géniaux, peintres géniaux, musiciens géniaux (inutile de citer des exemples, on les a en tête), mais c'est vrai que c'est plus difficile lorsqu'il s'agit de personnes religieuses qui, en principe, ont un devoir d'exemplarité plus fort, et l'Église de France a fait ce douloureux travail d'introspection avec le rapport Sauvé, pas encore terminé (l'affaire Bétharram le rappelle), mais indispensable pour repartir sur des bases saines et confiantes. L'homme et la bête. Ange et démon. C'est un classique de la littérature mondiale.

    L'autre introduction préalable, c'est d'évoquer certains commentaires qu'on a pu entendre depuis ce 17 juillet 2024 : en gros, ils disent qu'on n'en finit pas de bafouer l'Église catholique, que l'abbé Pierre est mort depuis dix-huit ans et qu'il faut le laisser en paix, et certains commentaires, tentés par le complotisme, iraient même jusqu'à dire que c'est une opération pour discréditer la religion, le christianisme, le catholicisme, et l'Église catholique, voire la tradition.


    Alors, d'une part, insistons : l'origine médiatique de toute cette affaire provient des institutions catholiques elles-mêmes ulcérées de découvrir qu'en leur sein, parmi les personnes les plus insoupçonnables, et ce sont les plus croyants, les plus pratiquants, ceux pour qui l'Église catholique représente le plus de choses qui sont demandeurs de cette vérité, qui existe. D'autre part, il ne s'agit pas de malmener la mémoire de l'abbé Pierre car, oui, il a fait de belles choses malgré tout, et cette œuvre caritative doit pouvoir se poursuivre, mais sans embellir l'homme. Ceux qui ne sont pas en paix, ce sont ses victimes, très nombreuses, et elles doivent pouvoir se reconstruire, parler, crier même si nécessaire, du moins pour celles qui sont encore vivantes.

    Ceux qui émettent ce genre de commentaires choqués qu'on ose remuer la mouise sont plutôt des identitaires, c'est-à-dire, des revendiqués catholiques pour la seule raison de s'opposer à l'islam, se prévaloir d'un ordre ancien, naturel, qui veulent agiter un étendard de valeurs dites chrétiennes mais qui ne le sont pas du tout (par exemple, lorsqu'on commence à regarder leurs positions sur l'immigration, etc.). Cette branche conservatrice de l'extrême droite a, d'habitude, plus de compassion pour les victimes lorsque les délinquants ou criminels portent des prénoms pas très catholiques.

    Revenons alors à l'abbé Pierre.
     

     
     


    Le premier rapport commandé par Emmaüs France, Emmaüs International et la Fondation Abbé Pierre, rédigé par la féministe Caroline de Haas, a été publié le 17 juillet 2024. Il évoque le cas de sept femmes dont une mineure victimes de l'abbé Pierre entre les années 1970 et 2005 : « comportements inadaptés d'ordre personnel », « proposition sexuelle », « propos répétés à connotation sexuelle », « tentatives de contacts physiques non sollicités », « contacts non sollicités sur les seins »... La Conférence des évêques de France a réagi immédiatement en tweetant « sa profonde compassion et sa honte que de tels faits puissent être commis par un prêtre » et « redit sa détermination à se mobiliser pour faire de l'Église une maison sûre ».

    Un nouveau rapport du même prestataire a été publié le 6 septembre 2024 renforçant l'image d'un prêtre libidineux, avec dix-sept témoignages dont douze directs : propos à caractère sexuel, baisers volés, agressions sexuelles sur personne vulnérable dont plusieurs mineures... entre les années 1950 et 2000. Autant le premier rapport pouvait laisser planer un doute, ce deuxième rapport confirme qu'il y a bien un "problème" avec l'abbé Pierre, d'autant plus que les accusations sont même internationales. Le 13 septembre 2024, la Fondation Abbé Pierre, Emmaüs France et Emmaüs International ont annoncé un changement de logo et de nom pour ne plus se référer à la personne de l'abbé Pierre qui, d'attractif, deviendrait répulsif (le 25 janvier 2025, la fondation s'appelle désormais Fondation pour le Logement des Défavorisés). Une commission d'enquête d'historiens indépendants a été mise en place pour faire la lumière sur tous les abus de l'abbé Pierre.


    Quelques jours plus tard, Mgr Éric de Moulins-Beaufort, président de la Conférence des évêques de France, a confirmé que « quelques évêques au moins » étaient au courant « dès 1955-1957 » du caractère déviant de l'abbé Pierre « à l'égard des femmes » et a rendu accessibles toutes les archives sur le prêtre. Les 216 pièces confirment le comportement problématique sans préciser la nature exacte des actes mis en cause. En particulier, la lettre d'un prélat, peut-être le secrétaire général de l'épiscopat, datée du 13 novembre 1964, parlait déjà d'un « grand malade mental » qui a perdu « tout contrôle de soi, notamment après des livres à succès » et assurait que « de jeunes filles en ont été marquées pour la vie ».

    Mgr Jean-Marie Villot, évêque auxiliaire de Paris et secrétaire général de l'épiscopat, patron de l'abbé Pierre à l'époque, et futur cardinal et même, futur Secrétaire d'État (numéro deux au Vatican) de 1969 à 1979, a écrit une lettre sans ambiguïté le 10 janvier 1958 au cardinal Pierre Gerlier, archevêque de Lyon : « Il ne faut pas se dissimuler que tout cela pourra un jour ou l’autre être connu et que l’opinion serait bien surprise alors de voir que la hiérarchie catholique a maintenu sa confiance à l’abbé Pierre. Il y a longtemps déjà que le parti communiste a un dossier à son sujet. Toute la psychologie de l'abbé, attachante par l'humilité avec laquelle il parle de ses faiblesses, n'en est pas moins fort inquiétante et trouble par la facilité avec laquelle il les accepte et en minimise la gravité. ». Il ne faut pas oublier que l'abbé Pierre était déjà une personnalité médiatique de grande envergure dans les années 1950, résistant dès 1942, député MRP de Nancy à la Libération de 1945 à 1951, et connu pour son fameux appel à la radio de l'hiver 1954. En décembre 1957, pourtant, l'abbé Pierre avait été discrètement délocalisé et interné dans un hôpital psychiatrique en Suisse, sur consigne de l'évêque de Grenoble.

     

     
     


    Le 13 décembre 2024, le journal "Le Monde" a publié un article faisant état d'une longue lettre de dix-sept pages du jeune abbé Pierre âgé de 19 ans, adressée en 1932 à son maître des novices chez les capucins (conservée dans les archives de l'ordre), qui racontait une tentative d'automutilation de son pénis avec un couteau dès l'âge de 5 ans, ce qui montrait bien que le sexe l'a préoccupé depuis très longtemps, et la lettre racontait aussi des abus sexuels qu'il a subis quand il avait 7 ans par des élèves plus âgés, « sous la menace d'un pistolet ».

    L'abbé Pierre fut jugé inapte à la vie religieuse juste après son ordination sacerdotale, et il fut affecté non pas à Lyon (sa ville natale) mais à Grenoble pour une raison non connue. À La Côte-Saint-André, en 1942, il était l'aumônier de l'orphelinat et a été soupçonné de comportements ambigus avec les jeunes filles qui l'aidaient.

    Un troisième rapport comprenant neuf nouveaux témoignages et une nouvelle synthèse a été publié le 13 janvier 2025, particulièrement accablant pour l'abbé Pierre : il est accusé d'un viol sur un garçon de 9 ans, d'autres agressions sur deux enfants de 8 à 10 ans, une femme de la famille de l'abbé Pierre abusée de manière incestueuse à la fin des années 1990. En tout, les trois rapports font état de trente-trois accusations contre l'abbé Pierre. D'autres sources d'information font état du recensement de cinquante-sept victimes.

    Le parquet de Paris a définitivement exclu le 24 janvier 2025 toute poursuite concernant les violences sexuelles de l'abbé Pierre, en raison de son décès et de la prescription. Aucune enquête judiciaire ne sera donc ouverte, ce qui confirme la nécessité que la lumière se fasse par d'autres voies non judiciaires. Rendue publique le 4 février 2025, la lettre du parquet a précisé à l'Église catholique : « Le parquet de Paris a fait savoir que l’action publique était éteinte par le décès du mis en cause en 2007 en ce qui le concernait personnellement, et prescrite en ce qui aurait éventuellement pu concerner des non-dénonciations de faits. (…) Une enquête judiciaire a pour objectif de rechercher si des faits pénalement répréhensibles peuvent et doivent être jugés. S’il arrive que le parquet ouvre des enquêtes sur la dénonciation de faits manifestement prescrits au préjudice de mineurs, comme il y a par ailleurs incité une circulaire ministérielle, c’est afin de rechercher si d’autres mineurs auraient par la suite été victimes de faits similaires (…). Si ces faits plus récents s’avèrent non prescrits, le parquet peut alors engager des poursuites contre le mis en cause pour l’ensemble des faits. Ce n’est évidemment pas le cas lorsque celui-ci est décédé. ».
     

     
     


    Enfin, le nouveau rebondissement de cette triste histoire a eu lieu le 17 avril 2025 avec la publication du livre d'investigation des journalistes Marie-France Etchegoin, ancienne du "Nouvel Observateur", et Laetitia cherel, de la cellule d'investigation de Radio France, intitulé "L'abbé Pierre, la fabrique d'un saint" (chez Allary Éditions) : « Dès l’automne 1955, non seulement le haut clergé français connaissait la face noire et la dangerosité de l’abbé Pierre mais le Saint-Siège aussi. ». La mise en cause du Vatican n'est pas étonnante étant donné la structure centralisatrice de l'Église catholique. En 1955, l'ancien ambassadeur auprès du Vatican Jacques Maritain a qualifié l'abbé Pierre de « grand malade » peut-être atteint de « schizophrénie ». Le Vatican a adressé le 11 novembre 1955 une lettre à l'évêque de Versailles Mgr Alexandre Renard pour demander l'ouverture d'une « procédure judiciaire » à l'encontre de l'abbé Pierre. Mgr Renard a répondu : « Il semble que les relations “inhonestae” [déshonorantes] de l’abbé ont été moins graves qu’il n’a été dit. », pour refuser de salir « un symbole aux yeux des masses qu’il galvanise à la manière d’un prophète ».

    Au-delà de son comportement sexuel problématique, les deux journalistes d'investigation ont aussi mis le doigt sur d'autres faces très sombres de l'abbé Pierre. Il a prononcé des discours ouvertement pétainistes en 1941, avant d'être résistant, comme celui-ci : « Partout où aujourd'hui la France renaissante de notre grand maréchal agit, soyez présents, soyez au premier rang, soyez des plus grands lutteurs, dans la conscience et l'enthousiasme ! ». Le livre rappelle d'ailleurs le soutien tardif apporté publiquement au négationniste Roger Garaudy, ce qui avait provoqué (déjà) une vive polémique (l'abbé Pierre s'en était tiré en parlant simplement d'un soutien « à titre amical »). Les auteures dépeignent un homme « manipulateur », un « Rastignac » qui « intrigue pour grimper dans la carrière de député » et qui « manipule pour faire taire les gêneurs », en totale contradiction avec son image de modestie et de convivialité.

    Dès le 13 septembre 2024, le pape François lui-même a affirmé que le Vatican était au courant de ces violences sexuelles depuis, au moins, la mort de l'abbé Pierre, en 2007. En revanche, le Vatican n'a pas réagi au livre publié le 17 avril 2025 disant qu'il était informé dès 1955.

    Ce qui est notable, si j'ai bien compris, c'est que le Vatican, conscient du grave problème sexuel de l'abbé Pierre, a demandé aux évêques français d'initier une procédure judiciaire dès 1955. On ne pourrait donc pas reprocher au Vatican de ne rien avoir fait. En revanche, l'épiscopat français de l'époque est fautif d'avoir voulu sinon étouffer l'affaire au moins garder le silence afin de préserver la réputation de l'abbé Pierre et, par la même occasion, la réputation de l'institution religieuse.


    Alors, les accusations portées contre l'abbé Pierre n'ont pas pour but de porter des accusations contre l'Église catholique, même si c'en est la conséquence. Elles sont graves car les victimes sont là, nombreuses, traumatisées. Et par ricochet, l'Église catholique, celle de France, est touchée pour avoir fermé les yeux et laisser un prédateur durablement en capacité de faire de nouvelles victimes, jusqu'à l'âge de 93 ans selon un témoignage ! Lors de la remise du rapport Sauvé, il était question de faire toute la vérité sur les agressions sexuelles au sein de l'Église. Comme pour Notre-Dame de Bétharram, les victimes ont encore du mal à s'exprimer. Il est temps que tout soit révélé, seule la vérité peut sortir l'Église de cette affreuse impasse.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (18 avril 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Abbé Pierre : le Vatican savait dès 1955 !
    Le scandale bouleversant de l'abbé Pierre.
    L'appel de l'abbé Pierre.
    Viens m’aider à aider !
    Le départ d'un Juste.

     

     
     



    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250417-abbe-pierre.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/religions/article/abbe-pierre-le-vatican-savait-des-260551

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/04/17/article-sr-20250417-abbe-pierre.html


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  • Soumy : grâce musicale versus vulgarité brutale

    « La version russe du cessez-le-feu se résume à un dimanche sanglant. Il faut aider l’armée ukrainienne. » (Donald Tusk, Premier Ministre polonais, le 13 avril 2025).




     

     
     


    Quel scandale ! On mesure, à quel point, en France et ailleurs, certaines officines ont été complètement dévoyées sur le sens des mots (ce n'est pas nouveau et il y a eu d'admirables auteurs pour décrire ce phénomène particulièrement éloquent).

    Les deux bombardements meurtriers qui ont été décidés par l'armée russe de Vladimir Poutine a touché la population civile ukrainienne dans la matinée du dimanche 13 avril 2025, en pleine cérémonie des Rameaux, fête chrétienne, à Soumy (Sumy).

    Ces deux missiles balistiques visaient la population civile et a atteint son objectif puisque 35 personnes ont été massacrées, dont deux enfants, et 117 personnes blessées. Selon la CNN, c'est l'attaque la plus meurtrière d'une zone civile depuis le début de l'année.


    La ville de Soumy est une ville d'environ 260 000 habitants située au nord-est de l'Ukraine, à 30 kilomètres de la frontière russe, à 140 kilomètres de Kharkiv et à 130 kilomètres de Koursk (du côté russe).

    Des images d'apocalypse ont marqué la population, comme ce bus rouge en plein centre-ville, frappé par un missile et complètement calciné (aucun passager n'a survécu), ou ces habitants qui circulaient nombreux dans les rues du centre-ville.
     

     
     


    À écouter ces poutinolâtres adorateurs du massacre des peuples, ce nouveau massacre serait la faute de Volodymyr Zelensky, le Président ukrainien. On marche véritablement sur la tête, dans des inversions accusatoires complètement absurdes, surtout depuis que Donald Trump a retrouvé la Maison-Blanche. Rappelons que d'un côté, il y a un peuple, ukrainien, qui n'aspire qu'à la paix, qui n'a jamais eu de velléités agressives vis-à-vis de son voisin russe, dont on dit que les habitants sont leurs frères, et de l'autre, un autocrate (je ne confond bien sûr pas le peuple russe des oligarques russes), assoiffé de sang, et affamé de nouvelles conquêtes territoriales pour faire sa Grande Russie et surtout, maintenir le pouvoir de sa clique de voyous.
     

     
     


    L'explication foireuse de Moscou, officiellement, c'était qu'une réunion de militaires aurait été visée, mais ces deux missiles balistiques, peut-être équipés de sous-munitions (destinées à faire le plus de morts possible) comme c'était le cas dans d'autres bombardements, visaient pourtant bien des civils et à ce jour, aucune des victimes ne semblait porter l'uniforme militaire. Et si c'était vrai, l'armée russe aurait pu avoir la décence de présenter ses excuses pour tant de civils massacrés. Bien sûr, les deux gamins qui sont morts étaient des militaires dangereux pour l'armée russe...
     

     
     


    Trois jours de deuil ont été décrétés en Ukraine pour rendre hommage aux victimes. Elles méritent toutes notre compassion pour cette guerre folle issue d'une folie guerrière propre au siècle dernier (on connaît tellement bien la leçon). Plus les États-Unis se montrent mous voire lèche-derrière (je réemploie le vocabulaire de leur Président) vis-à-vis de Vladimir Poutine, plus l'autocrate du Kremlin se montre cruel et gourmand au dépens des Ukrainiens.

    Le procureur général de Soumy a annoncé que parmi les victimes se trouvaient un garçon de 11 ans et un jeune homme de 17 ans qui ne demandaient qu'à vivre. Maryna Choudessa aussi est morte, avec sa mère : elle était institutrice et ses petits écoliers sont aujourd'hui traumatisés par sa disparition. Lioudmyla a, de son côté, déploré la mort de sa mère, Tetiana Kvacha, qui avait décidé de prendre le bus qui a été touché, ce qu'elle faisait pourtant rarement. Mauvais destin. Voulu par Vladimir Poutine et ses sbires (y compris ceux de la désinformation).
     

     
     


    Parmi les victimes, il y avait aussi la musicienne Olena Kohut, organiste soliste à l'Orchestre philharmonique de Soumy et membre de l'Orchestre du Théâtre national de Soumy, également universitaire, enseignant dans une école d'art. Elle était reconnue pour sa maîtrise musicale (piano et orgue) et son dévouement au développement des jeunes talents.

    En tant qu'organiste soliste, elle interprétait des mélodies qui captivaient le public et ses prestations avaient une immense portée culturelle. Olena Kohut a aussi interprété l'hymne ukrainien dans plusieurs églises à travers l'Europe pour promouvoir la culture ukrainienne.


    Ses collègues du Théâtre national de Soumy ont exprimé sur Facebook leur grande affliction : « Le 13 avril 2025, à la suite d’une frappe de missile russe, notre famille du théâtre a subi une douleur indescriptible. Les blessures infligées ont tué notre collègue, artiste du théâtre orchestral, Olena Kohut. Olena était une personne extrêmement brillante, une véritable professionnelle, une collègue sympathique et une amie fiable. Sa musique, son sourire, sa gentillesse resteront à jamais gravés dans nos mémoires. Nous adressons nos plus sincères condoléances à sa famille, à ses proches et à ses amis. Nous partageons votre douleur et votre chagrin. Souvenirs joyeux et respect éternel. ».

    « Une perte irréparable pour notre collectif, pour toute la communauté musicale, pour tous ceux qui ont connu et apprécié Olena en tant qu’artiste et personne », pour ses amis de l'Orchestre philharmonique de Soumy.

    Les auteurs d'autres condoléances ont rappelé : « Camarades et élèves se souviennent d'Olena comme d'une personne qui transmettait non seulement ses connaissances, mais aussi son humanité, sa gentillesse et son optimisme. Elle savait libérer le potentiel de chaque élève et apportait un soutien sincère à ses élèves. ».
     

     
     


    Il ne faut pas l'oublier, il ne faut pas les oublier, toutes ces victimes ukrainiennes meurtries dans leur chair et leur territoire. Le criminel de guerre sera jugé. Il payera. Rien ne sera oublié. C'est le destin de tous les auteurs du terrorisme, fût-il terrorisme d'État. Et honte à tous ceux qui justifient ces morts !


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (14 avril 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Soumy : grâce musicale versus vulgarité brutale.
    Moonraker.
    Olena Kohut.
    Ukraine : Trump, porte-parole de Poutine !
    3 ans de guerre en Ukraine.
    Zelensky : Poutine, c'est l'anti-Europe !
    L'aide de la France à l'Ukraine le 6 juin 2024.
    Emmanuel Macron très gaullien à la télévision pour expliquer la gravité de la situation en Ukraine.
    Débat parlementaire sur l'Ukraine : les masques tombent en France !
    Ukraine : Sophia Aram traite à la sulfateuse les néopacifistes à la notoriété déclinante !
    L'Europe face à Poutine.
    Ukraine : Emmanuel Macron est-il un va-t-en-guerre ?
    Rapport de la commission d'enquête n°1311 de l'Assemblée Nationale relative aux ingérences politiques, économiques et financières de puissances étrangères (enregistré le 1er juin 2023).
    Jean-Pierre Chevènement et ses relations avec la Russie.
    François Fillon et ses relations avec la Russie.
    Ukraine : Gabriel Attal attaque durement le RN et Marine Le Pen !
    Soutien à l'Ukraine : la conférence de l'Élysée pour une défense européenne.
    Conférence de presse du Président Emmanuel Macron lors de la Conférence de soutien à l'Ukraine le 26 février 2024 à l'Élysée (vidéos).
    2 ans de guerre en Ukraine : Poutine zéro en histoire !
    Amitié franco-ukrainienne : fake news et accord de coopération.
    Lee Marvin, les Douze Salopards et la Russie.
    La France Unie soutient l'Ukraine !
    Condoléances cyniques.
    Mort d'Evgueni Prigojine.

    Sergueï Kirienko.
    Victoria Amelina.

    L'effondrement du pouvoir de Poutine.
    Putsch en Russie : faut-il sauver le soldat Poutine ?
    Poutine en état d'arrestation !
    Ukraine, un an après : "Chaque jour de guerre est le choix de Poutine".
    L'Ukraine à l'Europe : donnez-nous des ailes !
    Kherson libéré, mais menace nucléaire ?

    Volodymyr Zelensky demande l'adhésion accélérée de l'Ukraine à l'OTAN.
    6 mois de guerre en Ukraine en 7 dates.
    Les massacres de Boutcha.
    Le naufrage du croiseur russe Moskva.
    L’assassinat de Daria Douguina.
    Kiev le 16 juin 2022 : une journée d’unité européenne historique !
    L'avis de François Hollande.
    Les valeurs valent mieux que les bénéfices !
    Poutine paiera pour les morts et la destruction de l’Ukraine.
    Ukraine en guerre : coming out de la Grande Russie.
    Robert Ménard, l’immigration et l’émotion humanitaire.
    Ukraine en guerre : Emmanuel Macron sur tous les fronts.
    Nous Européens, nous sommes tous des Ukrainiens !








    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250413-soumy.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/europe/article/soumy-grace-musicale-versus-260468

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/04/14/article-sr-20250413-soumy.html


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  • Pour qui roule Natacha Polony ?

    « Sur beaucoup de points, une gauche jaurésienne souscrira aux thèses qu’elle développe, sur le social, sur la critique de la mondialisation ou du libéralisme, sur la lutte contre un consumérisme sans âme. Dans l’arc néoconservateur, Natacha Polony se situe sur la gauche, plus près de Chevènement, qui aurait pu signer l’ouvrage, que de Dupont-Aignan ou Finkielkraut. Pourtant à la lecture, point un certain agacement, qui se manifeste souvent, quand on consulte ces innombrables essais à la française, tissés de raisonnements rapides et d'affirmations non démontrées, qu'on trouve autant à gauche qu'à droite. » (Laurent Joffrin, le 24 octobre 2017 dans "Libération").




     

     
     


    L'éditorialiste politique a confié bien plus tard qu'elle avait voté pour François Bayrou au premier tour de l'élection présidentielle de 2007, et blanc au second tour. Natacha Polony fête son 50e anniversaire ce mardi 15 avril 2025. Autant dire qu'elle a maintenant "un peu de bouteille", car elle a déjà à peu près un quart de siècle d'expérience.

    J'apprécie beaucoup Natacha Polony alors que ses opinions sont souvent divergentes avec les miennes. Mais parfois, je me suis aperçu qu'elle concluait de la même manière, comme son vote Bayrou de 2007 (je doute qu'elle soit prête à récidiver avec le Premier Ministre d'aujourd'hui !). Je lui reconnais un élément rare : elle pense par elle-même, elle réfléchit sans prêt-à-penser tout fait, tout artificiel, et c'est donc rafraîchissant. Elle apporte du vent intellectuel neuf (certes, pas tout le temps).


    Son dada serait surtout le souverainisme, mais pourquoi ne pas rappeler que le Président Emmanuel Macron a prôné le souverainisme dès les premières minutes de sa Présidence en insistant sur le souverainisme européen ? La crise du covid-19, la guerre en Ukraine et, enfin, l'arrivée du gros éléphant Donald Trump dans un monde en porcelaine particulièrement fragile et complexe ont renforcé ce besoin de souveraineté : souveraineté alimentaire, souveraineté pharmaceutique, souveraineté militaire, souveraineté industrielle, souveraineté numérique, etc.

    Comme l'exprimait Laurent Joffrin (qui n'est toutefois pas, pour moi, vraiment une référence), Natacha Polony serait moins de droite que de gauche. Je ne sais pas. C'est vrai, elle a commencé en 2001 comme secrétaire nationale du parti de Jean-Pierre Chevènement qu'elle a activement soutenu lors de l'élection présidentielle de 2002 et elle s'est même présentée à Paris avec cette étiquette aux élections législatives de juin 2002 (sans succès, inutile de rappeler le score, elle a eu le mérite de s'engager). Du reste, Jean-Pierre Chevènement lui-même, séduit par la brillante intelligence présidentielle, a soutenu activement Emmanuel Macron à l'élection présidentielle de 2022.

    L'intéressée nie en bloc son appartenance au bloc conservateur et se revendique d'une gauche qui n'aurait pas oublié le socialisme (réel). Elle-même, au fond, est la preuve vivante que le découpage du paysage politique entre la droite et la gauche n'a plus aucun sens. Les deux derniers duels présidentiels, en 2017 et en 2022, l'ont d'ailleurs acté : le clivage n'est pas encore la gauche et la droite, mais entre un centrisme ouvert et un extrémisme fermé. Cela ne dit rien de plus sur là où se situe Natacha Polony selon ces nouveaux enjeux politiques.


    Citons encore Laurent Joffrin qui a commencé son commentaire sur un ouvrage de Natacha Polony avec une ironie particulièrement vache : « Bâillonnée, pourchassée, censurée, traquée par les sbires de la pensée unique, "criminalisée", écrit-elle, pour ses pensées non conformes, Natacha Polony a néanmoins réussi, contre tous les bien-pensants européistes, contre les dévots de la mondialisation heureuse acharnés à sa perte, à publier un livre. Cette héroïne autoproclamée de la liberté de pensée, elle a même fondé un "comité Orwell" contre la "police de la pensée", s'était retranchée à Europe 1, une radio clandestine qu'on sait dévouée à la critique virulente de notre société, et chez Ruquier, ce dissident obscur et marginal. Elle est maintenant réfugiée sur LCI, propriété de Martin Bouygues, une sorte de bolchevik fiévreux, et au "Figaro", ce samizdat bien connu qui combat avec panache l'oligarchie. » (24 octobre 2017).

    L'ancien directeur de "Libération" a raison sur l'idée qu'on ne peut pas être victime d'un isolement idéologique et bénéficier en même temps d'un grand écho médiatique, car depuis une quinzaine d'années, Natacha Polony est présente, très présente dans le paysage médiatique et intellectuel, tant dans la presse écrite qu'à la radio et à la télévision (et elle a aussi écrit une douzaine d'ouvrages politiques) : "Le Figaro", "Marianne", France 2, Canal Plus, Paris Première, C8, France 5, LCI, BFMTV, Europe 1 (pour une revue de presse quotidienne le matin), France Inter, Sud Radio, etc. (et même Polony TV). De quoi avoir de l'audience pour être écoutée !

    À ce jour, sa plus grande responsabilité est sans doute d'avoir été nommée directrice de la rédaction de l'hebdomadaire "Marianne" créé entre autres par Jean-François Kahn, du 6 septembre 2018 au 1er mars 2025. Toutefois, sa participation médiatique qui l'a fait connaître du grand-public a été son recrutement comme l'une des deux chroniqueurs polémistes de l'émission de Laurent Ruquier "On n'est pas couché" diffusée sur France 2 tous les samedis soirs, de septembre 2011 à juin 2014, exercice qu'elle a pratiqué avec Audrey Pulvar (désormais adjointe PS de la ville de Paris), puis Aymeric Caron (désormais député FI de Paris). Dans cet art de la critique, elle a succédé à Éric Zemmour, qui a vu, lui aussi, sa notoriété grimper (d'autant plus qu'il a fait dans la provocation), et elle a laissé sa place à Léa Salamé (qui anime désormais l'émission du samedi soir sur France 2).
     

     
     


    Pour autant, je l'ai découverte avant sa participation chez Laurent Ruquier, dans une émission plus confidentielle, celle animée par Frédéric Taddeï, "Ce soir (ou jamais !)", diffusée sur France 3 (dont elle était l'invitée parmi les plus fréquents). Précisément l'émission diffusée le 25 novembre 2010 : à l'époque, Natacha Polony était une journaliste de 35 ans du service éducation du journal "Le Figaro" et elle enseignait également la culture générale à l'Université Léonard-de-Vinci des Hauts-de-Seine ("l'Université Pasqua"). Elle était une invitée parmi d'autres invités, notamment le chanteur Jacques Higelin, la femme politique Clémentine Autain (37 ans), pas encore députée, et la journaliste Christine Ockrent, à l'époque directrice générale déléguée de l'Audiovisuel extérieur de la France (RFI, France 24).

    J'ai eu assez vite le coup de cœur pour la (presque) la benjamine de l’émission et sans doute l’une des plus douées : dans mon esprit de 2010, je me disais que Natacha Polony, sans aucun doute, allait faire parler d’elle dans les prochaines années. Déjà plusieurs bouquins à son actif, un blog très approfondi sur l’éducation, et une audace qu’on pourrait croire uniquement sortie des jeunes pousses. Natacha Polony n’a pas hésité à aborder de front le problème de Christine Ockrent et de son époux de Kouchner. Elle a émis beaucoup d’idées subtiles, nuancées avec une clarté qui pourrait désarmer ses contradicteurs. Enfin, elle était charmante (c’est un élément agréable et néanmoins mineur quand on n’a pas un objectif autre qu’intellectuel).


    Au départ, j’avais du mal à la positionner : de droite ? de gauche ? "Le Figaro" la mettrait à droite… sauf qu’elle était chevènementiste dans sa jeunesse. Ce passé de militante s’entendait bien dans l’émission ; Natacha Polony n’avait pas peur de prendre la parole, comme on coupe un gâteau, avec le tranchant d’une lame verbale. Un ton vif qui allait de paire avec une intelligence au-dessus de la moyenne. Son pedigree est aussi joli que son minois (je l'écris en plaisantant, qu'on m'épargne des critiques de sexisme que je ne cultive pas !) : Louis Le Grand, Science Po Paris, DEA de littérature consacré aux poèmes, et agrégation de lettres modernes. Et depuis l'émission, elle a eu le temps de recevoir le Prix Edgar-Faure en 2014 (récompensant un auteur d'essai politique) et le Prix Richelieu en 2016 (récompensant un journaliste pour sa défense de la langue française).

    Certains peuvent s'en souvenir. Cette émission de Frédéric Taddeï était un talk-show un peut désordonné, où les invités parlaient en même temps et s'interrompaient, mais cultivait une vertu cardinale, la liberté d'expression. Consacrée à l'actualité, l'émission de ce soir-là, celle du 25 novembre 2010, proposait trois sujets d'actualité (de l'époque).


    Le premier sujet avait trait à une vidéo d’Éric Cantona qui a fait un "buzz" d’enfer sur Internet. Du coup, l’émission s’y colla. En gros, c’était un footballeur qui jouait les experts financiers. Ou révolutionnaires. Il proposait de faire mettre en difficulté toutes les banques en proposant à tous les citoyens de retirer leur argent des banques. Bon, l’idée était complètement absurde : c’était le genre suicidaire. Les banques aident aussi au développement (ou à la survie) de nombreuses petites entreprises et commerces qui font l’activité et l’emploi. C’est ce qu’a rappelé fort judicieusement Natacha Polony. Ensuite, il faudrait que ces dits citoyens aient encore de l’argent à retirer. Pas sûr par les temps qui couraient…

    Le deuxième sujet était plus "grave" puisqu’il parlait de "la journée de la jupe". Là, pareil, on parlait des femmes dans le mauvais sens. Encore une fois très judicieusement, Natacha Polony faisait remarquer qu’il fallait faire la distinction entre la violence conjugale, qui se pratique entre deux êtres individuels, et la forte pression qu’un groupe ou communauté pouvait faire sur les femmes en général. D’un côté, individu, de l’autre, société. Ce n'était pas dit explicitement, mais la journaliste pensait très fort au voile. Mais elle n’a pas été vraiment comprise car très vite, d’autres invités ont projeté leurs propres fantasmes en disant qu’il s’agirait de discrimination ("culturelle"), puisque le problème serait surtout en banlieue chaude, où les jeunes filles ne pourraient plus se promener en jupe sans se faire traiter de prostituées.

    Le troisième sujet était beaucoup plus cocasse : l’interdiction d’antenne d’Audrey Pulvar qui animait une émission politique sur I-Télé alors que son compagnon (de lit) s’était déclaré candidat à la candidature présidentielle. Il s’agissait d’Arnaud Montebourg (candidat à la primaire socialiste d'octobre 2011). Sur ce sujet, évidemment, Christine Ockrent, femme de l’ancien Ministre des Affaires étrangères Bernard Kouchner (et donc son patron de tutelle pour France 24), était en première ligne. Elle a montré un ton plutôt odieux, condescendant et très mal à l’aise à tel point qu’elle ponctuait avec de l’humour à pirouettes chaque phrase de Natacha Polony qui, décidément, était vraiment éclatante, en ce sens que, effectivement, Natacha Polony n'hésitait pas à mettre les pieds dans le plat. Deux thèses s’opposaient : celle de Christine Ockrent estimant que les femmes qui ont acquis elles-mêmes de fortes responsabilités (elle s’est sentie obligée de rappeler son CV) savaient faire la part encore le lit conjugal et la conscience professionnelle ; et l’autre, considérant que le fait même qu’il y ait suspicion, même sans acte d’influence, de collusion entre journalistes et personnalités politiques était suffisant pour faire arrêter l’émission d'Audrey Pulvar, qui n'était pas la seule journaliste dans ce cas depuis des décennies (Anne Sinclair, Catherine Nay
    , Béatrice Schönberg, Marie Drucker, etc.).

    C'est ainsi que j'ai découvert Natacha Polony il y a environ quinze ans : courageuse, indépendante, débatteuse, pensant par elle-même. Et par la suite, je n'ai pas été déçu, machine bien huilée, qui fonctionne bien, mais manquant peut-être de carburant. Le souverainisme comme seul moteur est un peu léger. Et surtout, pour aller où ? Car si elle ne se satisfait pas de cette société de consommation, si elle est même plutôt ouverte à la décroissance, et qu'elle se définirait aussi comme illibérale mais dans le sens économique du terme. Elle rejette le wokisme qu'elle considère comme "une dictature des minorités", elle rejette aussi les populismes, tant l'extrême droite que l'extrême gauche. C'est ce qui rend son positionnement sur l'échiquier politique un peu confus, ce qui, finalement, devrait être le cas de tous les journalistes, même les éditorialistes politiques, qui, a priori, ne sont pas des militants mais des informateurs et des analystes (ou analyseurs ?).

    On parlait de la reine Christine, je propose de la remplacer par la reine Natacha !

     

     
     


    Je vous soumets pour terminer quelques citations de ses ouvrages politiques.

    Indécence (et elle avait raison) : « C'est le mot qui revient à l'esprit spontanément : indécence. Devant des députés qui refusent d'allonger le congé des parents ayant perdu un enfant, au motif que "ça va pénaliser les entreprises". Devant un Carlos Ghosn qui réclame à Renault le paiement de sa retraite chapeau. Devant Ségolène Royal qui parle, à propos d'une jeune fille menacée de mort pour avoir répondu à des insultes homophobes par une diatribe contre l'islam, d'une "adolescente peut-être encore en crise d'adolescence" à qui il faudrait enseigner "le respect"… C'est même un des traits les plus frappants de notre époque : la disparition d'une forme de retenue qui s'imposait jusqu'à présent à toute personne publique. ».

    Voile : « L'égalité homme-femme fait partie des valeurs non négociables d'une société qui a développé, plus que toute autre en Europe, le travail des femmes, leur liberté à mener de front vie professionnelle et vie familiale. Tout cela, nous le disions, articulé autour d'un "commerce apaisé" entre les sexes, une capacité à réguler le désir par le langage. Le voile, qu'on le veuille ou non, est la négation symbolique de tout cela. Il est la transformation d'un verset du Coran prescrivant de masquer les atours (leur "gorge", selon une traduction qui fait à peu près consensus) des femmes pour les protéger des agressions et une volonté obsessionnelle de cacher tout ce qui pourrait susciter la concupiscence. La réalité est là : le voile signifie que les femmes doivent se cacher parce que les hommes seraient incapables de contenir leurs désirs, et qu'elles-mêmes, créatures faibles et impures, risqueraient d'y succomber. » (2015).


    Crise narcissique : « L'individualisme contemporain a voulu faire croire que l'épanouissement de chacun passait par la proclamation de son "identité" personnelle, par l'affichage en bandoulière de ses spécificités, de son Moi. Chacun est incité à mettre en avant la petite part de lui est qui "différente". Il n'est de gloire que dans l'altérité, il n'est de noblesse que dans la minorité. Pire, cette singularité aspire désormais à la reconnaissance. On réclame des aménagements dans les écoles publiques comme on réclame un menu sans gluten dans un restaurant. La crise que vit la France est avant tout une crise narcissique. » (2015).

    Individualisme apatride : « La démocratie est notamment menacée par l'alliance redoutable des marchés financiers et des nouvelles technologies, alliance sanctifiée par le caractère indépassable du bon plaisir individuel. En devenant virtuelles et planétaires, ces forces se sont détachées de tout territoire et sont désormais hors d'atteinte des volontés populaires. » (2016).

    Capitalisme : « Le capitalisme n'est plus un système de production par le capital, mais un système de production de capital, favorisé par le crédit, les dettes et la création monétaire de banques centrales. » (2016).

    Commerce international (où l'on voit qu'elle avait tort) : « On a vu, ces dernières semaines, le débat se focaliser sur les traités de libre-échange comme étant un des symboles de l’aberration européenne qui consiste à sacrifier ses forces productives dans dans l’espoir de pénétrer les marchés de pays qui n’ont et n’auront pas avant longtemps les mêmes règles sociales et environnementale que nous. Sacrifice des PME pour le bénéfice de quelques grands groupes, sacrifice des agriculteurs pour le bénéfice de l’industrie (allemande), de la banque et des assurances. Nos partenaires européens sont encore majoritairement convaincus des bienfaits du libre-échange et de la dérégulation. ». Donald Trump a fait la meilleure démonstration du contraire !

    Contre l'écriture inclusive : « Une écriture inclusive défendue par des historiennes et des militantes, les grammairiens et les linguistes sachant, eux, que ce n'est pas "le masculin qui l'emporte sur le féminin" en langue française mais le genre neutre qui se confond avec le masculin pour des raisons de phonétique historique. » (2018).

    Citoyen acheteur : « L'ensemble de notre organisation économique et sociale est fait pour produire un type humain spécifique, qui n'a plus rien à voir avec le citoyen doué de libre arbitre : le consommateur. » (2021).


    Écologie sélective : « On continue le libre-échange, les porte-conteneurs, la production de masse écoulée grâce à la publicité, mais on taxe vos diesels. Pour votre bien. » (2021).

    Bonhomme de neige : « Il a neigé toute la nuit. Voilà ma matinée.
    08h00 : je fais un bonhomme de neige.
    08h10 : une féministe passe et me demande pourquoi je n'ai pas fait une bonne femme de neige.
    08h15 : alors je fais aussi une bonne femme de neige.
    08h17 : la nounou des voisins râle parce qu'elle trouve la poitrine de la bonne femme de neige trop voluptueuse.
    08h20 : le couple d'homos du quartier grommelle que ça aurait pu être deux bonshommes de neige.
    08h25 : les végétariens du n°12 rouspètent à cause de la carotte qui sert de nez au bonhomme. Les légumes sont de la nourriture et ne doivent pas servir à ça.
    08h28 : on me traite de raciste, car le couple est blanc.
    08h31 : les musulmans de l'autre côté de la rue veulent que je mette un foulard à ma bonne femme de neige.
    08h40 : quelqu'un appelle la police, qui vient voir ce qui se passe.
    08h42 : on me dit qu'il faut que j'enlève le manche à balai que tient le bonhomme de neige car il pourrait être utilisé comme une arme mortelle. Les choses empirent quand je marmonne : "ouais, surtout si vous l'avez dans le c...".
    08h45 : l'équipe de tv locale s'amène. Ils me demandent si je connais la différence entre un bonhomme de neige et une bonne femme de neige. Je réponds : "oui, les boules" et on me traite de sexiste.
    08h52 : mon téléphone portable est saisi, contrôlé et je suis embarqué au commissariat.
    09h00 : je parais au journal tv ; on me suspecte d'être un terroriste profitant du mauvais temps pour troubler l'ordre public.
    09h10 : on me demande si j'ai des complices.
    09h29 : un groupe djihadiste inconnu revendique l'action.
    MORALE : il n y a pas de morale à cette histoire. C'est juste la France dans laquelle nous vivons aujourd'hui. Ça, c'était la version humoristique. » (2018).


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (12 avril 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Natacha Polony.
    Alain Finkielkraut.
    Éric Zemmour.
    Clémentine Autain.
    Ségolène Royal.

    Pierre Dac.
    Julien Dray.
    Jean-Louis Debré.
    Jean-François Kahn.
    Axel Kahn.
    Philippe Val.
    Sophia Aram.
    Claude Allègre.
    Hubert Reeves.
    Alain Peyrefitte.
    Jean-Pierre Elkabbach.
    Patrick Cohen.
    Fake news manipulatoires.
    Bernard Pivot.
    Christine Ockrent.
    Vive la crise !
    Yves Montand.
    Jean Lacouture.
    Marc Ferro.
    Dominique Baudis.
    Frédéric Mitterrand.
    Jean-Jacques Servan-Schreiber.
    Christine Angot.
    Jean-François Revel.
    Philippe Alexandre.
    Alain Duhamel.


     

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250415-natacha-polony.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/medias/article/pour-qui-roule-natacha-polony-259420

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/04/13/article-sr-20250415-natacha-polony.html


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  • Splendide Josiane Balasko !

    « J'ai grandi dans un bistrot. On se chambrait sans arrêt. Il est toutefois important d'avoir de l'autodérision. Je suis la première à me moquer de moi-même. » (Josiane Balasko, le 9 juillet 2023 à Neuchâtel).



     

     
     


    Issue d'un milieu populaire, fille d'un cafetier d'origine yougoslave, proche du parti communiste et engagée auprès des sans-papiers, l'actrice française Josiane Balasko fête ses 75 ans ce mardi 15 avril 2025. Elle est actrice, mais aussi réalisatrice, scénariste, metteuse en scène de pièce de théâtre, et même écrivaine, elle fait partie de ces gens qui ne se laissent pas facilement enfermer dans des petites cases. Ainsi, en 2019, elle a publié un recueil de nouvelles fantastiques aux éditions Pygmalion, "Jamaiplu", après quelques romans.

    On ne peut pas dire qu'elle a démarré comme une starlette qui se basait sur sa beauté physique pour ouvrir de nombreuses portes du cinéma. Elle avait déjà, jeune, un physique, mais pas de starlette. D'ailleurs, elle en usait, voire en abusait, comme ses compères du Splendid, et elle disait même en 2005 : « On avait l'habitude de jouer avec nos physiques. Bon pour Michel Blanc et Gérard Jugnot, c'était facile… Et pour moi aussi, allez ! ».


    L'actrice désormais pleinement septuagénaire expliquait le 26 novembre 2023 sur France 2 : « Ça ne m’a jamais dérangé qu’on dise que je n’étais pas trop belle, ce n’est pas grave. Je crois que les gens qui posaient ces questions, quel que soit le respect que j’ai pour eux, ne savent pas ce que c’est les gens de la rue. Ils ne voient que des gens minces qui suivent des régimes et qui s’habillent chez les grands couturiers et évidemment, je ne rentrais pas dans le truc. ».
     

     
     


    Josiane Balasko, Michel Blanc, qui est parti il y a quelques mois, Gérard Jugnot, mais aussi Christian Clavier, Thierry Lhermitte, Marie-Anne Chazel, Bruno Moyniot, et quelques autres... évidemment, on ne peut pas évoquer la figure de Josiane Balasko sans évoquer la Troupe du Splendid, les deux (trois) gros succès de leur jeunesse qui les ont fait franchir le plafond de verre de la notoriété et du succès, avec les deux numéros des "Bronzés" (Josiane est Nathalie) et "Le Père Noël est une ordure" (Josiane est Madame Musquin, mais seulement au cinéma, elle n'a pas joué dans la pièce de théâtre). Comme plusieurs de cette troupe d'acteurs étonnants, Josiane Balasko a su à la fois cultiver une notoriété collective (qui l'a amenée à recevoir un César d'honneur collectif pour toute la Troupe du Splendid en 2021) et sa propre carrière, différente de celle des autres.

    Au début, c'était pourtant un peu difficile, car elle jouait le rôle de la bonne copine, de la fille à embrouilles, de la complexée, de la faire-valoir des vrais héros. Pas très réjouissant, comme perspectives. Mais heureusement, Bertrand Blier lui a proposé le rôle principal de "Trop belle pour toi" (sorti le 12 mai 1989), celui de la maîtresse d'un homme riche, Gérard Depardieu, marié à une très belle femme, Carole Bouquet. Josiane Balasko a alors changé de catégorie. Elle est nommée pour la première fois pour le César de la meilleure actrice.

     

     
     


    En tout, Josiane Balasko a été récompensée par trois Césars, celui du meilleur scénario pour "Gazon maudit" (sorti le 1996) qu'elle a réalisé, un César d'honneur en 2000 et le César anniversaire de la Troupe du Splendid en 2021, mais elle a été aussi nommée trois fois au César de la meilleure actrice (1990, 1994 pour "Tout le monde n'a pas eu la chance d'avoir des parents communistes" et 2004 pour "Cette femme-là"), une fois du meilleur réalisateur (1996) et une fois de la meilleure actrice dans un second rôle (2020) pour son rôle dans le film très médiatisé de François Ozon "Grâce à Dieu".

    La carrière de Josiane Balasko a donc commencé surtout par des comédies, mais elle a réussi aussi à avoir des rôles plus dramatiques, l'âge aidant, et dans les derniers films où elle a joué, elle n'a plus le rôle principal mais un second rôle.

    À côté du cinéma, elle joue aussi parfois des pièces de théâtre, la dernière pièce est une pièce qu'elle a mise en scène en 2021 au Théâtre des Nouveautés, "Un chalet à Gstaad", une comédie de boulevard alors qu'elle tournait en même temps au cinéma dans un rôle dramatique pour "Quand vient l'automne" de François Ozon (sorti le 9 septembre 2024), avec Hélène Vincent et Ludivine Sagnier.





    "Un chalet à Gstaad", c'est un face-à-face entre bourgeois qui ont fuit la France pour des raisons fiscales, des exilés fiscaux. Ils se fréquentent mais ils ne s'entendent pas forcément. Josiane Balasko est la femme d'un homme très riche et passe son temps chez l'esthéticienne ou dans le whisky. L'actrice précisait le 22 septembre 2022 sur France Info : « Ce sont des bourgeois très riches qui ne savent pas ce qu'est le RSA. Ce sont des gens que je ne connais pas, vraiment, ou que j'ai dû peut-être entrapercevoir, mais sans jamais les fréquenter. Donc ce sont des portraits qui sont imaginaires, certains sont exilés fiscaux. Ils se reçoivent entre eux, pas forcément parce qu'ils s'apprécient, mais c'est parce qu'ils n'ont pas trop le choix. ».

    Mais elle n'est pas qu'actrice, elle est aussi réalisatrice et ce n'est pas du tout le même métier. À ce jour, elle a réalisé huit films entre 1985 et 2013, dont son plus grand succès, près de 4 millions d'entrées en France, "Gazon maudit" qui évoque le thème de l'homosexualité féminine (c'était très original à l'époque) dans un jeu à trois avec Victoria Abril et Alain Chabat. Elle allait dire plus tard : « Je me suis inspirée d'une histoire qui était arrivée à des gens que je connaissais vaguement. » (le titre, très bien vu, a été trouvé par Bertrand Blier). Elle a rencontré des femmes bien plus tard qui lui ont assuré que son film leur avait permis de parler à leur entourage de leur homosexualité, ce qui lui a donné de la fierté.

    D'autres films qu'elle a réalisés ont eu beaucoup moins de succès, mais au moins, elle a exercé sa liberté de création, et maintenant, elle n'a plus trop envie de faire de la réalisation, c'est trop de travail pour elle. Elle préfère écrire des nouvelles : « Quand j'écris une nouvelle, il n'y a pas beaucoup d'enjeux. Si je me plante, il y a peu d'incidences, sauf mon amour-propre (…). On ne sait jamais ce qui va se passer quand on crée. Si ça va passer, si ça va émouvoir ou faire rire. On lance les dés à chaque fois. » (2023). L'intérêt de l'écriture, c'est que l'histoire est « à budget illimité », au contraire d'un film au cinéma. Elle peut imaginer tout, sans engager trop de moyens (cette réflexion peut être remise en cause avec l'intelligence artificielle, puisqu'on peut maintenant faire des œuvres créatives, en image ou en film, en très peu de temps).

    En tout cas, Josiane Balasko ne regrette pas du tout d'avoir abandonné le dessin malgré les encouragements de sa mère (qu'elle a tout de même suivie au début puisqu'elle a commencé ses études à l'École des arts graphiques). Elle a préféré suivre sa voie, celle du théâtre. 75 ans, dont déjà cinquante-cinq d'une belle carrière : bravo et bon anniversaire !



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    Sylvain Rakotoarison (12 avril 2025)
    http://www.rakotoarison.eu

    Pour aller plus loin :
    Josiane Balasko.
    Joséphine Baker.
    Moonraker.
    Gene Hackman.
    Pierre Dac.
    Bertrand Blier.
    Pierre Arditi.
    Pierre Palmade.
    Carla Bruni.
    Valeria Bruni Tedeschi.
    Teddy Vrignault.
    Pierre Richard.
    François Truffaut.
    Roger Hanin.
    Daniel Prévost.
    Michel Blanc.
    Brigitte Bardot.
    Marcello Mastroianni.
    Jean Piat.
    Sophia Loren.
    Lauren Bacall.
    Micheline Presle.
    Sarah Bernhardt.
    Jacques Tati.
    Sandrine Bonnaire.
    Shailene Woodley.
    Gérard Jugnot.
    Marlène Jobert.
    Alfred Hitchcock.
    Les jeunes stars ont-elles le droit de vieillir ?
    Charlie Chaplin.

     

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250415-josiane-balasko.html

    https://www.agoravox.fr/culture-loisirs/culture/article/splendide-josiane-balasko-259484

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/04/13/article-sr-20250415-josiane-balasko.html



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