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  • Cadeau de Noël pour Mary Jane Veloso

    « Après plus d’une décennie de diplomatie et de consultations avec le gouvernement indonésien, nous avons réussi à retarder son exécution suffisamment longtemps pour parvenir à un accord pour enfin la ramener aux Philippines. » (Bongbong Marcos, le 20 novembre 2024).


     

     
     


    Il est parfois des combats heureux, et je dois dire que lorsque j'avais alerté sur la situation de Mary Jane Veloso, il y a plus de huit années, on pouvait imagier que ce combat serait difficile voire perdu d'avance.

    Lorsque le grand boxeur philippin Manny Pacquiao, « l'un des sportifs les mieux payés du monde » selon Anthony Verdot-Belaval de "Paris Match", avait rencontré Mary Jane Veloso dans sa prison indonésienne, le 10 juillet 2015, il avait déclaré, ému sur le sort de la jeune femme : « Nous espérons pouvoir aider à sauver la vie de Mary Jane. Je pense que Mary Jane est une victime de trafic d'êtres humains. ». Mais pensait-il qu'elle s'en tirerait ? En tout cas, il l'a aidée financièrement pour qu'elle puisse être défendue convenablement avec de vrais avocats.

    En effet, Mary Jane Veloso, qui va avoir 40 ans le 10 janvier prochain, mère de famille venant des Philippines, a été arrêtée à Yogyakarta, en Indonésie, en avril 2010 en train de transporter une valise de 2,6 kilogrammes de drogue. L'Indonésie ne plaisantant pas avec les trafiquants de drogue, Mary Jane Veloso a été condamnée à mort en octobre 2010. Elle a même failli être exécutée en avril 2015 alors que son nom, avec aussi celui du Français Serge Atlaoui, avait été inscrit sur la liste de prochaines exécutions. Heureusement, son nom a été retiré in extremis (comme celui de Serge Atlaoui).

     

     
     


    Il faut dire qu'elle avait du mal à être soutenue par son État d'origine, les Philippines. Le Président philippin de l'époque, Rodrigo Duterte avait annoncé qu'il n'interférerait pas avec la justice indonésienne. Certaines rumeurs avaient même annoncé le 12 septembre 2016 que le Président philippin aurait donné son accord pour l'exécution de sa ressortissante. Il faut dire aussi que depuis le début de la Présidence de Rodrigo Duterte, le 30 juin 2016, jusqu'au début septembre 2016, il y avait déjà eu, dans son pays, 2 000 exécutions de personnes condamnées pour trafic de drogue. Alors, une de plus ou de moins... (Ce chiffre de 2 000 exécutions aux Philippines est à expliquer, car les Philippines ont définitivement aboli la peine de mort le 24 juin 2006 : Rodrigo Duterte, en revanche, qui n'a pas réussi à rétablir la peine de mort, avait encouragé l'élimination physique des trafiquants de drogue, hors justice).

    Heureusement, Mary Jane Veloso a bénéficié d'un fort soutien de la part de sa famille, mais aussi du peuple philippin, des réseaux sociaux,de célébrités régionales. On ne l'a pas oubliée, et c'est heureux, car cela fait plus de quatorze années qu'elle clame son innocence. Innocence ? Oui, parce qu'en tant que migrante (qui n'a pas eu du tout de chance dans la vie), elle a été piégée ; elle a été victime d'une femme chef d'un réseau de trafic d'être humains qui utilisait des pigeons pour le transport de drogue, en guise de travail rémunéré (on les appelle en fait des "mules"). Cette chef de réseau a d'ailleurs été arrêtée et Mary Jane Veloso est intervenue comme témoin dans cette affaire (d'où le sursis à son exécution, ce qui est particulièrement cynique).

     

     
     


    Comme avec Serge Atlaoui, rien n'a véritablement bougé tant que le Président indonésien Joko Widodo restait au pouvoir (il est resté pendant deux mandats). Le 24 novembre 2024, quelques semaines après l'arrivée de son successeur (et héritier politique), Prabowo Subianto, le 20 octobre 2024, ce dernier a annoncé qu'il était temps de renvoyer ces condamnés à mort dans leur pays, sous condition qu'ils terminent leur peine chez eux. La condition était assez hypocrite, surtout pour la France et les Philippines qui ont aboli la peine de mort. Le nouveau Président indonésien a toutefois déclaré que si les pays d'origine amnistiaient ou graciaient leurs ressortissants, ce serait leur problème et il le respecterait. On ne pouvait pas être plus conciliant.

    En fait, c'est le Président philippin Bongbong Marcos qui a fait le premier une annonce optimiste dès le 20 novembre 2024 en affirmant que l'Indonésie était d'accord pour le retour de Mary Jane Veloso : « L’histoire de Mary Jane résonne chez beaucoup, une mère prise au piège de la pauvreté qui a fait un choix désespéré qui a changé le cours de sa vie. Bien qu’elle ait été tenue responsable en vertu de la loi indonésienne, elle reste victime de sa situation. ».
     

     
     


    Edouardo de Vega, sous-secrétaire du Ministère philippin de la Justice, a déclaré de son côté, le même jour, que l'Indonésie n'avait rien demandé aux Philippines en contrepartie : « Quand elle arrivera ici, elle ne sera pas immédiatement libérée. Cela signifie que nous nous engageons à la détenir jusqu’à ce qu’un accord mutuel soit trouvé pour qu’elle soit graciée. Mais, au moins, elle sera ici. ».

    Dans une interview télévisée, Cesar Veloso, le père de Mary Jane, a déclaré le 20 novembre 2024 : « Nous sommes vraiment heureux, toute la famille, en particulier les enfants de Mary Jane, sautaient et disaient : "quelqu’un va prendre soin de nous", c’est ce que disent mes petits-enfants. Nous sommes donc très heureux. ».

    Le 24 novembre 2024, Prabowo Subianto a donc annoncé son accord de principe au souhait formulé par Bongbong Marcos du rapatriement à Manille de Mary Jane Veloso, mais rien n'avait été encore conclu. C'est ce vendredi 6 décembre 2024 à Jakarta que l'accord a eu lieu, entre les deux pays. Il est ainsi question de rapatrier Mary Jane Veloso avant Noël prochain (« si Dieu le veut ! »), probablement le 20 décembre 2024.

    Pour sa famille (chrétienne), c'est une divine surprise et sans doute le meilleur Noël qu'elle va passer. Mary Jane Veloso a passé plus du tiers de sa vie en prison et elle va retrouver ses deux enfants qui auront pris près d'une quinzaine d'années en plus ! Celia Veloso (65 ans), la mère de Mary Jane, s'est déclarée à l'AFP « ravie et surprise » de la nouvelle : « Nous pouvons enfin être ensemble ce Noël ! ».
     

     
     


    L'accord sur les conditions du transfert de la condamnée à mort a été signé entre Yusril Ihza Mahendra, le Ministre indonésien en charge des Affaires juridiques, des droits humains, de l'immigration et des affaires pénitentiaires, et Raul Vasquez, autre sous-secrétaire du Ministère philippin de la Justice.

    Yusril Ihza Mahendra a effectivement annoncé la bonne nouvelle le 6 décembre 2024 : « Nous acceptons de renvoyer la personne concernée aux Philippines (…). Mon objectif est que cela puisse être réalisé avant Noël, peut-être vers le 20 décembre. ». Si Raul Vasquez a exprimé la « sincère gratitude » des autorités philippines pour cette décision indonésienne, il a précisé : « C'est un cadeau approprié qui confirme les bonnes relations entre les deux pays (…). Nous comprenons et respectons la décision du tribunal indonésien concernant la peine. (…) Une fois transférée dans le pays, elle purgera sa peine, comme convenu, conformément aux lois et réglementations philippines en matière pénale. ».
     

     
     


    Une telle décision de clémence devrait aussi être annoncée pour le Français Serge Atlaoui et cinq condamnés australiens (parmi les neuf Australiens qui ont été condamnés, parmi lesquels deux ont été exécutés en 2015, un autre est mort en détention d'un cancer et un quatrième a été libéré en 2018). La chute du gouvernement Barnier risque cependant de faire retarder les négociations entre l'Indonésie et la France, faute pour l'Indonésie d'avoir un interlocuteur.

    Mais il ne faut pas se réjouir trop vite : l'Indonésie n'en a pas fini avec la peine de mort. Actuellement, 530 personnes attendent leur exécution dans les couloirs de la mort en Indonésie, dont 96 étrangers (dont deux femmes). Le gouvernement indonésien a même évoqué le 5 décembre 2024 une reprise des exécutions (arrêtées en juillet 2016). Le Ministre indonésien coordonnateur des politiques et de la sécurité Budi Gunawan a en effet déclaré :
    « Le gouvernement va étudier l'accélération de l'exécution de la peine de mort pour les condamnés pour trafic de drogue qui (…) ne disposent plus de recours légaux. ».

    Le combat pour l'abolition universelle de la peine de mort est donc loin d'être achevé. Comme par un écho de coïncidence, le Sénat allait célébrer, au cours d'un colloque présidé par Gérard Larcher le lundi 9 décembre 2024 au Palais du Luxembourg, le ministre et avocat Robert Badinter, celui qui a aboli la peine de mort en France et que la France probablement panthéonisera un jour.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (07 décembre 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Cadeau de Noël pour Mary Jane Veloso.
    Enfin une bonne nouvelle pour Serge Atlaoui ?
    Varisha Moradi.
    7 pistes de réflexion sur la peine de mort.
    Une lueur d’espoir pour Serge Atlaoui ?
    Taxe Nutella : Serge Atlaoui, otage de l’huile de palme ?
    Vives inquiétudes pour Mary Jane Veloso.
    Le cauchemar de Serge Atlaoui.
    Peine de mort pour les djihadistes français ?






    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20241206-mary-jane-veloso.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/international/article/cadeau-de-noel-pour-mary-jane-258018

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/12/06/article-sr-20241206-mary-jane-veloso.html


     

  • Les 75 ans de la Chine communiste

    « Nous devons considérer la situation économique actuelle de manière globale, objectivement et sereinement, affronter les difficultés sans détour et renforcer la confiance. » (26 septembre 2024).


     

     
     


    C'est le 1er octobre 1949, il y a soixante-quinze ans exactement, que les forces communistes ont gagné sur les forces nationalistes : la République populaire de Chine, autrement dite, la Chine communiste a été proclamée par Mao Tsé-Toung au balcon de la Cité interdite, à la Porte céleste de la Place Tiananmen, au cœur de Pékin. Événement historique qui dure encore.

    Car le régime communiste chinois est celui qui a duré le plus longtemps dans l'histoire récente. L'Union Soviétique, effectivement, n'aura duré que soixante-quatorze ans (1917-1991). Le régime chinois dure et est conçu pour encore durer longtemps avec son leader Xi Jinping qui revendique l'héritage des deux grands fondateurs, Mao Tsé-Toung et Deng Xiaoping.

    Cette Chine-là est très difficile à comprendre. Rien n'est simple et une vision simpliste resterait toujours erronée. Je m'amusais à entendre ma (regrettée) grand-mère, férue d'actualités, qui ressortait des pays qu'elle n'avait jamais visités comme la Russie ou la Chine des clichés éculés qui ont la vie dure. Au contraire de la Russie (que j'ai connue un petit peu pour avoir travaillé avec des scientifiques russes fort sympathiques et de haute performance), je ne suis jamais allé en Chine, mais j'ai eu quelques amis chinois très sympathiques aussi qui m'ont beaucoup appris.


    Il serait illusoire de croire que la Chine soit un ennemi pour le monde dit occidental. D'une part, la Chine n'a jamais cherché à s'étendre comme la France, l'Italie, l'Allemagne, la Russie, mais en revanche, elle a toujours considéré que ses territoires devaient être réunifiés (d'où la bombe à retardement de Taïwan). D'autre part, malgré des différences culturelles très fortes, il y a quelques points communs comme un élitisme très fort. La France a ses classes préparatoires et ses écoles à haute valeur ajoutée en système parallèle au système universitaire classique. La Chine aussi fait des concours très sélectifs pour permettre aux meilleurs d'atteindre les plus hauts postes.
     

     
     


    Ainsi, il faut comprendre l'acceptabilité de l'absence de démocratie par des personnes culturellement et scientifiquement éclairées ainsi : la démocratie, c'est-à-dire les élections pluralistes avec vote secret, libre, sincère, cela aboutit à des pertes de temps et parfois à des blocages politiques ; le système chinois (un système cryptocommuniste à la sauce chinoise) fonctionne bien parce que ce sont les meilleurs qui sont au pouvoir. En somme, le régime communiste depuis 1949 serait le fameux despotisme éclairé cher aux philosophes des Lumières. Le système de cooptation pourrait être apparenté à une sorte de grand concours général pour les postes au pouvoir. L'intérêt, c'est qu'il n'y aurait pas d'incompétents aux postes à responsabilité. Bon, bien sûr, c'est la théorie, et le régime de Mao a même été particulièrement désordonné entre le Grand Bond en avant et la Révolution culturelle. La corruption reste encore très présente et si régulièrement, des potentats sont disgraciés pour raison de corruption, c'est plus un prétexte pour purger politiquement et asseoir un nouveau pouvoir que pour réellement sortir de la corruption.

    C'est évident que la liberté d'expression laisse à désirer en Chine. La moindre manifestation est interdite et la moindre critique envers le régime est une crime de haute trahison. Et pourtant, d'où le fait que rien n'est simple, il y a parfois des choses étranges, des tolérances qui n'existeraient pas en France, par exemple. Ainsi, on voit une petite maison toute seule au milieu d'un énorme boulevard au milieu d'un nouveau quartier bétonné. C'est impressionnant. Le propriétaire refusait de quitter sa maison. En France, l'expropriation aurait été décidée. Il suffit de revoir l'excellent film "Le Chat" de Pierre Granier-Deferre (sorti le 24 avril 1971) avec Jean Gabin et Simone Signoret (et Annie Cordy), qui se passe sur fond de construction du nouveau quartier de La Défense. Une maison à Courbevoie (je crois), celle des héros, va être immanquablement détruite, sans prendre en compte l'avis des propriétaires et des habitants.

    Pendant trop longtemps, on a considéré que la Chine n'était que l'usine du monde, que c'étaient les petites mains de la planète en ne voyant pas que chaque année, des dizaines de milliers de Chinois sortent diplômés de leurs écoles d'ingénieur, qu'ils sont aussi dans la capacité à faire de la haute valeur ajoutée, tant technologique que culturelle (la Chine est présente dans le secteur de la haute couture, par exemple, ou du cinéma de grande qualité).

    Pays de paradoxes incontestablement quand on imagine que ce pays communiste fabrique le plus de nouveaux millionnaires chaque année dans le monde. Sorte de nation au capitalisme étatique, à la mort de Mao, Deng Xiaoping a tout misé sur l'économie au contraire de la Russie. Mikhaïl Gorbatchev, pour réformer un système sclérosé, a voulu ouvrir progressivement sur les libertés politiques avec la perestroïka et la glasnost, mais son économie a été reconfisquée par toute une nouvelle nomenklatura appelée oligarchie. C'est le cas aussi en Chine où les dignitaires communistes sont très riches et leur famille aussi. Mais sans ouverture politique. Ce choix a été formellement pris au printemps 1989, en ordonnant la répression de la Place Tiananmen.

    L'objectif de la Chine est la paix parce qu'on ne fait pas beaucoup d'affaires en période de guerres, d'instabilités politiques, de désastres économiques. J'ai eu l'occasion de mesurer le niveau d'agressivité commerciale de certaines entreprises chinoises, très impressionnant. Impression et efficace. La Chine est fascinante.

     

     

     

     
     


    Dans le compte rendu publié par l'Agence Chine Nouvelle à l'occasion de la réunion du bureau politique du parti communiste chinois le 26 septembre 2024, une critique a été reconnue : la Chine va mal, son économie est terne, et les objectifs sont loin d'être atteints. En cause, la crise de l'immobilier. L'État va devoir injecter des ressources supplémentaires dans ce secteur en crise. Cette reconnaissance de l'imperfection sort de la langue de bois habituelle où tout va toujours bien madame la marquise.

    Dès 1973, ministre et écrivain, Alain Peyrefitte avait pressenti le surgissement de la Chine comme acteur économique mondial incontournable (dans "Quand la Chine s'éveillera... le monde tremblera"), et à l'époque, ce n'était pas évident de l'anticiper tant le niveau de pauvreté était énorme et l'économie peu développée (épuisée et détruite par l'ère Mao). Il est coutume d'expliquer que la Chine a connu un siècle d'humiliation (1842-1949), elle à la culture millénaire, devenu une sous-culture par un monde dit occidental qui se croyait tout permis, depuis la première guerre de l'opium. La fin de l'empire en 1912 et la guerre civile entre communistes et nationalistes (1927-1949) ont fini d'achever le délitement de la société, sur fond d'invasion japonaise en Mandchourie.

    La période Mao (1949-1976) a été un nouveau calvaire chinois par la répression et des décisions économiques complètement stupides. Mais Deng a su redresser la Chine vers une modernité que les dirigeants des trente dernières années ont choyée et encouragée.


    Jean-Luc Domenach, interviewé par la revue "Histoire" de juillet 2005, a raconté ainsi : « Les communistes n’ont pas seulement su se maintenir puis vaincre militairement, ils ont fait leurs classes dans les zones de guérilla, puis dans les zones libérées ; ils ont appris à établir leur pouvoir en s’appuyant sur les élites locales, avant de liquider celles-ci progressivement. Et les dirigeants, Mao en tête, se sont révélés d’une extrême lucidité stratégique et habileté tactique. Excellent stratège, Mao s’est solidement installé à la tête du parti dans les années 1938-1945, à la faveur d’une manipulation cynique du pouvoir. Très tôt, par exemple, il prend le contrôle de la communication avec Staline. ». Et de compléter : « En revanche, l’inexpérience économique des dirigeants communistes et leur absence de programme précis les contraignent à se tourner exclusivement vers le modèle soviétique. Ce qui rend les choses très dangereuses, c’est qu’ils arrivent au pouvoir portés par un enthousiasme populaire inimaginable. La majorité de la population va suivre les yeux fermés ce pouvoir qui ne sait pas très bien où il va... ».
     

     
     


    Les années après Mao ont vu la population se consacrer totalement dans le développement économique : « Bien des cadres locaux ont cherché à soulager les populations, des habitudes aussi se sont prises. Bien souvent, l’horreur du totalitarisme a été quelque peu étouffée par le désir commun de survivre et de s’en sortir. À mon avis, on ne comprend pas la violence avec laquelle cette société s’est jetée, après 1978, dans un développement brutal et inégal si on ne tient pas compte du sentiment, largement partagé, que l’on a trop longtemps souffert, qu’il faut créer l’irréversible. Au fond, l’idée d’une sorte de deuxième Grand Bond pour que les horreurs du temps de Mao ne soient plus possibles. ».

    Petit à petit, la Chine a imité les sociétés capitalistes avec leur propre système, et depuis plus de dix ans, voici la Chine communiste classée au deuxième rang mondial pour le PIB (produit intérieur brut), derrière les États-Unis (la première place sera très difficile à atteindre), acteur majeur de l'économie mondiale, renonçant à développer une classe moyenne au profit des millionnaires et de la course en avant de la croissance (5% comme objectif pour l'année 2024), avec des enjeux puissants, l'ambition de devenir durablement une puissance militaire et diplomatique (ce qu'elle est déjà avec l'arme nucléaire et le droit de veto au Conseil de Sécurité de l'ONU) et consolidant son dynamisme par une démographie que seule l'Inde est en mesure d'égaler.

    Le Président chinois actuel Xi Jinping l'a d'ailleurs bien formulé lors de son intervention au Forum de Davos le 17 janvier 2017 : « La Chine est devenue la deuxième plus grande puissance économique du monde grâce à trente-huit années de réformes et d’ouverture. Un chemin droit mène à un avenir brillant. La Chine est arrivée à ce niveau parce que le peuple chinois, sous la direction du parti communiste chinois, a ouvert une voie de développement qui correspond aux conditions réelles de la Chine (…). La Chine a, ces dernières années, réussi à s’engager dans une voie de développement qui lui convient, en s’appuyant à la fois sur la sagesse de sa civilisation et sur les pratiques des autres pays de l’Est et de l’Ouest. En explorant ce chemin, la Chine refuse de rester insensible à l’évolution des temps ou de suivre aveuglément les pas des autres. ».

    C'est cette constante réorientation qui a permis au régime communiste de durer aussi longtemps. La question maintenant est la suivante : l'avenir permettra-t-il un assouplissement politique sur les libertés individuelles, l'ouverture démocratique, la défense des droits humains, le respect de la vie et la protection des minorités ? Pour l'heure, l'enjeu est autre : il est dans l'hypersurveillance de la société chinoise par des moyens technologiques ultraévolués (reconnaissance faciale, système de points du comportement individuel, etc.). Cette société, au fond, se projette bien plus rapidement que le monde dit occidental dans une société décrite par exemple dans "Le Cinquième élément", le film de science-fiction de Luc Besson (sorti le 7 mai 1997) avec Bruce Willis et Milla Jovovich, où la surveillance devient massive et totale (comme aussi dans "Bienvenue à Gattaca" d'Andrew Niccol, sorti le 24 octobre 1997, avec Ethan Hawke, Uma Thurman et Jude Law).



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (28 septembre 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Les 75 ans de la Chine communiste.
    Xi Jinping, le nouveau maître du monde ?
    Covid-19 : de bonnes nouvelles de Chine (et de moins bonnes nouvelles).
    Jiang Zemin.
    Xi Jinping confirmé empereur de Chine.
    Xi Jinping sort renforcé du 20congrès du PCC.
    À la veille du 20e congrès du parti communiste chinois...
    Ieoh Ming Pei.
    Zao Wou-Ki.
    Laisser jaillir l'émotion intérieure.
    Chu Teh-Chun.
    De la théocratie à la démocratie laïque.
    Les frontières arrêteront-elles le coronavirus ?
    Le docteur Li Wenliang, lanceur d’alerte de l’épidémie de coronavirus.
    Li Peng, de Tiananmen à Hongkong.
    Manifestations à Hongkong.
    La Paix céleste selon la Chine.
    La Chine au cinéma : une fidélité à soi-même, dans le film "Les Éternels".
    La Chine communiste peut-elle devenir une grande démocratie ?
    Li Rui.
    Li Peng a 90 ans.
    La maoïsation de Xi Jinping.
    Zhou Enlai.
    La diplomatie du panda.
    Xi Jinping et la mondialisation.
    La Chine à Davos.
    Deng Xiaoping.
    Wang Guangmei.
    Mao Tsé-Toung.
    Tiananmen.
    Hu Yaobang.
    Le 14e dalaï-lama.
    Chine, de l'émergence à l'émargement.
    Bilan du décennat de Hu Jintao (2002-2012).
    Xi Jinping, Président de la République populaire de Chine.
    Xi Jinping, chef du parti.
    La Chine me fascine.
    La Chine et le Tibet.
    Les J.O. de Pékin.
    Qui dirige la Chine populaire ?
    La justice chinoise.
     

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20241001-chine-communiste.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/international/article/les-75-ans-de-la-chine-communiste-256582

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/09/30/article-sr-20241001-chine-communiste.html