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  • Guerre en Iran : pensons au peuple iranien !

    « Alors, à ceux qui exigent un soulèvement immédiat, des remerciements ou des applaudissements : prenez du recul. À ceux qui, sous couvert de bienveillance, tentent de nous imposer leur vision de notre avenir : abstenez-vous. » (Mona Jafarian, le 18 juin 2025).


     

     
     


    Le conflit entre Israël et l'Iran est désormais à son paroxysme et personne ne peut dire comment cela va se terminer. L'inquiétude est grande d'un embrasement généralisé de la région (du Proche-Orient) voire d'une extension vers les pays qui pourraient s'impliquer dans ce conflit, comme les États-Unis dont la position hésitante montre à l'évidence que Donald Trump navigue à vue sans plan d'origine.

    En Europe, on observe aussi avec inquiétude ce conflit mais on attend depuis quarante-six ans la fin de la dictature de mollahs qui a tant réprimé l'humanité en général, que ce soit sur le sol iranien lui-même avec les nombreuses exécutions qu'à l'extérieur au moyen d'attentats terroristes nombreux dont, entre autres, la France a été victime avec l'assassinat de soldats français et, encore aujourd'hui, l'emprisonnement de deux otages français.
     

     
     


    Je propose ici de retranscrire le message de Mona Jafarian, fondatrice de l'Association Femme Azadi, qui est une « association de femmes franco-iraniennes menant des actions politiques, médiatiques et événementielles pour porter la voix du peuple iranien dans sa révolution ». Dans ce message publié le 18 juin 2025 sur son compte Twitter, elle a mis en garde contre la facilité de croire que la guerre résoudrait tout, et a demandé de penser avant tout à l'intérêt du peuple iranien qui n'est pas complice mais victime des mollahs.

    « Je ne sais pas si certains réalisent ce que vivent les Iraniens en ce moment. Quarante-six ans d’une des dictatures les plus barbares au monde ont brisé plusieurs générations, chacune portant les traumatismes de la précédente. Pour beaucoup, cela signifie n’avoir jamais connu leur pays libre. Ils ont traversé une guerre meurtrière contre l’Irak, grandi sous la menace des pendaisons, des massacres, des tortures. Ils ont vu leur peuple se soulever à de nombreuses reprises, être réprimé dans des bains de sang, dans l’indifférence glaçante de la communauté internationale.

    Et aujourd’hui, ce même régime, qui a ruiné une grande nation autrefois prospère et respectée, provoque désormais la guerre sur son propre sol. Le peuple se retrouve pris dans une déchirure insoutenable : la douleur de chaque frappe sur sa terre mêlée au soulagement de voir ses bourreaux être enfin visés et éliminés les uns après les autres.

     

     
     


    Dans les commentaires, certains exigent de ce peuple meurtri et terrorisé, qu’il se soulève en cinq jours, alors même qu’on lui demande dans le même souffle de fuir, d’évacuer, de se cacher. Beaucoup oublient que la guerre n’a rien d’un jeu vidéo, surtout lorsqu’elle est vécue sous un régime criminel qui continue de réprimer, de surveiller, de terroriser de l’intérieur, aujourd’hui plus encore, par peur de s’effondrer.

    Qu’on soit en Iran ou en exil, nous savons que cette guerre, que nous redoutions depuis des années, est peut-être aussi celle qui ouvrira la voie à notre liberté. Mais cela ne la rend pas beaucoup plus facile à supporter.

     

     
     


    Alors, à ceux qui exigent un soulèvement immédiat, des remerciements ou des applaudissements : prenez du recul. À ceux qui, sous couvert de bienveillance, tentent de nous imposer leur vision de notre avenir : abstenez-vous.

    Nous avons alerté le monde avant tout le monde. Nous avons combattu ce régime avant tout le monde. Nous avons versé plus de sang que quiconque pour tenter de libérer le monde de cette pieuvre terroriste.

    À ceux qui nous soutiennent vraiment,qui ressentent ce que nous portons dans nos cœurs : merci.

    Et à nos rares alliés : nous n’oublierons jamais ceux qui furent à nos côtés dans cette longue lutte pour la liberté. »

     

     
     


    J'ajoute ceci : merci à ces femmes résistantes d'avoir été là depuis si longtemps pour nous alerter, nous, Français, de l'impasse de cette théocratie iranienne. Mais comme l'a exprimé le Président Emmanuel Macron, une solution politique durable sur la gouvernance en Iran ne pourra jamais venir de la conquête d'une armée étrangère. L'exemple de l'Irak l'a hélas trop bien démontré en 2004.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (19 juin 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Guerre en Iran : pensons au peuple iranien !
    Israël vs Iran : Emmanuel Macron l'équilibriste.
    Beyrouth, il y a trente-cinq ans.
    Majid Kavousifar.
    Varisha Moradi.
    Aïnaz Karimi.
    Arezou Khavari.
    Ahou Daryaei.
    Ebrahim Raïssi.
    Khosro Besharat.
    Mobilisons-nous pour Toomaj Salehi !
    Fatwa de mort contre Salman Rushdie.
    Alireza Akbari.
    Mehran Karimi Nasseri.
    Claude Malhuret contre la mollarchie.
    Mahsa Amini, les femmes iraniennes, leur liberté et Claude Malhuret.
    Révolution : du rêve républicain à l’enfer théocratique de Bani Sadr.
    L'Iran de Bani Sadr.
    De quoi fouetter un Shah (18 février 2009).
    N’oubliez pas le Guide (20 février 2009).
    Incompréhensions américaines (1) et (2).
    Émission de France 3 "L’Iran et l’Occident" (17-18 février 2009).
    Session de septembre 2006 à l’ONU : Bush, Ahmadinejad, Chirac.
    Dennis Ross et les Iraniens.
    Un émissaire français à Téhéran.
    Gérard Araud.
    Stanislas de Laboulaye.
    Des opposants exécutés par pendaison en Iran.
    Expulsion de Vakili Rad, assassin de Chapour Bakhtiar, dernier Premier Ministre du Shah d'Iran, par Brice Hortefeux à la suite du retour de l'étudiante Clotilde Reiss.
    Mort de l'ancien Premier Ministre iranien Mohammad Reza Mahdavi-Kani à 83 ans le 21 octobre 2014.


     

     
     





    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250618-iran.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/international/article/guerre-en-iran-pensons-au-peuple-261626

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/06/19/article-sr-20250618-iran.html




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  • Aung San Suu Kyi : Libérez-nous de la peur !

    « Ce n’est pas le pouvoir qui corrompt, mais la peur : la peur de perdre le pouvoir pour ceux qui l’exercent, et la peur des matraques pour ceux que le pouvoir opprime… » (Aung San Suu Kyi, 1991).


     

     
     



    Il y a eu un pape qui, une fois élu, a proclamé aux habitants de la Terre : « N'ayez pas peur ! ». C'était Jean-Paul II. Elle, inspirée par Gandhi, elle a proclamé à ses compatriotes birmans : « Libérez-nous de la peur ! ». Elle, c'est Aung San Suu Kyi, "dissidente" birmane qui a atteint, ce jeudi 19 juin 2025, son 80e anniversaire. Elle fait partie des femmes remarquables du monde contemporain, admirable par son courage, sa persévérance, sa cohérence. Elle est en quelque sorte la Nelson Mandela de l'Asie. Elle fait partie de mon Panthéon des femmes politiques.

    Un combat audacieux contre la peur : « Dans sa forme la plus insidieuse, la peur prend le masque du bon sens, voire de la sagesse, en condamnant comme insensés, imprudents, inefficaces ou inutiles les petits gestes quotidiens de courage qui aident à préserver respect de soi et dignité humaine. (…) Dans un système qui dénie l’existence des droits humains fondamentaux, la peur tend à faire partie de l’ordre des choses. Mais aucune machinerie d’État, fût-elle la plus écrasante, ne peut empêcher le courage de ressurgir encore et toujours, car la peur n’est pas l’élément naturel de l’homme civilisé. ».

    À la tête, depuis le 27 septembre 1988, de la Ligue nationale pour la démocratie (LND), un parti d'opposition, Aung San Suu Kyi a toujours combattu la dictature militaire établie dans son pays depuis des décennies. Son combat politique non-violent a été reconnu par le prestigieux Prix Nobel de la Paix en octobre 1991, mais aussi par une quinzaine d'autres distinctions internationales, comme le Prix Sakharov en 1990 (attribué par le Parlement Européen), la Médaille présidentielle de la Liberté en 2000, le prix le plus important des États-Unis, etc.

    Elle savait de qui tenir. Son père était le général Bogyoke Aung San qui a été un acteur majeur de l'indépendance de la Birmanie, nommé Premier Ministre de la Birmanie britannique le 28 septembre 1946 et assassiné le 19 juillet 1947 à Rangoon, à l'âge de 32 ans, quand sa fille a eu 2 ans. Sa mère était Khin Kyi qui s'est engagée dans la vie politique birmane après la mort de son mari, elle fut députée, la première femme ministre en Birmanie en 1953 et sa première ambassadrice. Celle-ci est morte d'un AVC le 28 décembre 1988 et son enterrement cinq jours plus tard fut une manifestation de l'opposition, 200 000 personnes, contre la junte militaire au pouvoir.
     

     
     


    C'est peu avant la mort de sa mère, alors qu'elle est revenue en Birmanie pour s'occuper d'elle (elle habitait au Royaume-Uni auparavant avec sa famille), qu'Aung San Suu Kyi a cofondé la LND pour s'opposer pacifiquement à la dictature militaire installée depuis le 2 mars 1962. Une nouvelle junte militaire a pris le pouvoir en 18 septembre 1988 pour réprimer très violemment les manifestations des militants démocrates dans le pays. Lors des élections législatives du 27 mai 1990, les premières élections depuis 1960 qui furent pluralistes, organisées sous la pression populaire, la LND les a très largement gagné avec 52,5% des voix pour 72,6% de participation, lui assurant l'élection de 392 sièges sur les 492 au total. Mais la junte militaire a annulé ces élections et imposé la dictature d'un Conseil d'État pour la restauration de la Loi et de l'Ordre de 1990 à 2011.

    De juillet 1989 à juillet 1995, de septembre 2000 à mai 2002 et de mai 2003 à novembre 2010, Aung San Suu Kyi a été arrêtée, enfermée ou placée en résidence surveillée. Elle a été empêchée de voir ses enfants résidant en Grande-Bretagne ainsi que son mari ethnologue qui est mort d'un cancer en mars 1999. Elle n'a pas assisté à l'enterrement de son mari de peur de ne plus pouvoir rentrer en Birmanie. Le 30 mai 2003, elle a failli être assassinée par la junte dans un attentat qui a tué plusieurs de ses compagnons politiques. Pendant cette vingtaine d'années d'opposition, elle a eu le soutien très fort de ce qu'on appelle la communauté internationale.

    Une nouvelle Constitution adoptée le 29 mai 2008 après le référendum du 10 mai 2008 (malgré le rejet de l'opposition) est entrée en vigueur le 31 janvier 2011 et consacre une transition démocratique. Libérée le 13 novembre 2010, Aung San Suu Kyi a été élue députée lors d'élections partielles le 1er avril 2012 et les élections législatives générales du 8 novembre 2015 lui ont apporté une large victoire de 255 sièges sur 440, avec 57,1% des voix. Elle pouvait enfin gouverner.

    Aung San Suu Kyi a voulu se présenter à l'élection présidentielle du 15 mars 2016 (la junte militaire laissait le pouvoir sous quelques conditions, en particulier de garder trois ministères régaliens, la défense, l'intérieur et les frontières). Mais la Constitution du 29 mai 2008 a prévu une clause spéciale contre la Prix Nobel de la Paix en écartant des fonctions politiques les personnes mariées à des étrangers ou qui sont parents d'enfants étrangers, ce qui est le cas d'Aung San Suu Kyi. Elle n'a pas réussi, malgré une confortable majorité, à réviser la Constitution. Ainsi, ce fut son proche Htin Kyaw qui a été élu par 360 voix sur 652 parlementaires et est devenu Président de la République du 30 mars 2016 au 21 mars 2018.
     

     
     


    Ne pouvant être nommée Première Ministre en raison de la clause constitutionnelle déjà évoquée, Aung San Suu Kyi a obtenu un titre spécial, "Conseillère spéciale de l'État" qui correspond en fait au poste de chef du gouvernement, du 6 avril 2016 au 1er février 2021. Elle a cumulé cette responsabilité avec le poste de Ministre des Affaires étrangères et de Ministre de la Présidence.

    Pendant ces près de cinq années, Aung San Suu Kyi a ouvert son pays à l'économie de marché, mais elle a dû faire des compromis en raison de l'armée encore très puissante constitutionnellement. Elle a fait redémarrer économiquement la Birmanie avec une croissance annuelle de 7% de 2016 à 2020, bénéficiant de la levée des sanctions financières internationales.

    C'est sur le génocide des Rohingya, minorité musulmane du pays comptant 1 million de personnes, que la gestion d'Aung San Suu Kyi a été contestée sur le plan international. En effet, la Prix Nobel de la Paix est restée très passive devant la persécution et les massacres commis à partir d'octobre 2016 par l'armée et la police birmanes. En janvier 2018, une étude a évalué le massacre à au moins 25 000 Rohingya tués et 18 000 filles Rohingya violées. L'exil et le déplacement de centaines de milliers de personnes ont provoqué une véritable crise humanitaire. Par son silence et sa passivité, Aung San Suu Kyi s'est vue retirer un certain nombre de distinctions internationales qu'elle avait reçues lorsqu'elle était dans l'opposition. Elle a été "blâmée" le 29 décembre 2016 par onze autres Prix Nobel de la Paix dont Desmond Tutu.

    Toutefois, selon Alexandra de Mersan, une anthropologue qui connaît bien la Birmanie , pour "Paris Match" le 8 juin 2017, Aung San Suu Kyi « a tenté de mener une première conférence de réconciliation nationale, invitant les ethnies, les groupes, les organisations pour discuter. Ce que n'ont jamais fait les militaires. Mais pendant ces discussions, les conflits continuaient à faire rage dans ces États. ». Pour l'armée birmane, auteure des exactions, c'était le moyen de démontrer que l'ancienne opposante était incapable de gouverner son pays.

     

     
     


    Ce scandaleux nettoyage ethnique par l'armée n'a pas empêché le parti d'Aung San Suu Kyi de remporter une large victoire aux élections législatives du 8 novembre 2020 avec l'obtention de 258 sièges sur 440 et 68,0% des voix pour 72,0% de participation. Cette victoire était de trop pour l'armée birmane qui a repris l'initiative en faisant un coup d'État le 1er février 2021. Le Président Win Myint, de la LND aussi, a été démis de ses fonctions au profit d'un militaire et Aung San Suu Kyi a été de nouveau arrêtée et elle est encore en prison à l'heure actuelle. Elle a été jugée pour des motifs fallacieux (comme la gestion de la crise du covid-19), avec un premier procès qui l'a condamnée le 6 décembre 2021 à quatre ans de prison (réduits à deux ans), et un second procès le 30 décembre 2022 à trente-trois ans de prison (réduits à vingt-sept ans).

    L'une des raisons de cette reprise en main est que la forte victoire électorale d'Aung San Suu Kyi devait lui permettre de réviser la Constitution et réduire l'influence politique de l'armée, ce qui était inacceptable pour la junte. Citée par Wikipédia, la politologue Sophie Boisseau du Rocher, spécialiste de géopolitique dans l'Asie du Sud-Est, estimait le 18 février 2021 sur France Culture : « L’armée n’a jamais envisagé une vraie transition politique. Elle voulait encadrer le processus pour en tirer parti. Aung San Suu Kyi a réussi à contourner ces contraintes car à l’origine elle n’avait pas de liberté de pouvoir. Elle représente désormais un vrai risque car avec 82% des sièges à l’Assemblée, le nouveau gouvernement pourra faire avancer la réforme constitutionnelle. ». Dans la même émission radiophonique, l'anthropologue François Robinne résumait ainsi : « Il y a eu deux élections récemment en 2015 et 2020. En 2015 le peuple a porté Aung San Suu Kyi au pouvoir. En 2020 c’est un peu différent, le peuple a voté contre le pouvoir militaire. ».

    Un coup d'État de trop ? Toutes les forces vives de Birmanie, en particulier la jeunesse et les professions intellectuelles, se sont opposées à ce retour de la dictature militaire... mais elle subsiste toujours en 2025 et Aung San Suu Kyi est encore en prison.


    En 1991, elle écrivait : « A l'heure où des personnages tout-puissants et sans scrupules peuvent disposer et disposent de fait, grâce aux immenses progrès techniques, d'armes meurtrières contre les faibles et les déshérités, il est urgent de lier plus étroitement la politique à la morale, dans les nations comme à l'échelle internationale. ». Avec ce qui se passe en Ukraine ou en Iran, on peut affirmer que cette réflexion est plus que jamais d'actualité.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (14 juin 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Aung San Suu Kyi.
    Le tsunami de l'océan Indien, 20 ans plus tard.

    Gandhi.


     

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250619-aung-san-suu-kyi.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/international/article/aung-san-suu-kyi-liberez-nous-de-261247

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/06/18/article-sr-20250619-aung-san-suu-kyi.html

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  • La Légion d'honneur perdue de Nicolas Sarkozy

    « Par arrêté du grand chancelier de la Légion d’honneur en date du 5 juin 2025 est constatée, avec effet au 17 mai 2023, l’exclusion de droit de l’ordre national de la Légion d’honneur de M. Nicolas SARKÖZY de NAGY BOCSA, né le 28 janvier 1955 à Paris. Cette exclusion entraîne la privation définitive de l’exercice des droits et prérogatives attachés à la qualité de membre de la Légion d’honneur ainsi que l’interdiction de porter les insignes de toute décoration française ou étrangère ressortissant à la grande chancellerie de la Légion d’honneur. » (Arrêté du 5 juin 2025 publié dans le Journal officiel du 15 juin 2025).



     

     
     


    L'ancien Président de la République Nicolas Sarkozy était grand-croix de la Légion d'honneur et grand maître de l'Ordre national du Mérite. C'est le grade le plus haut pour les deux ordres les plus importants de France. Normal : Nicolas Sarkozy l'était par sa qualité de Président de la République française.

    Nicolas Sarkozy était d'abord chevalier de la Légion d'honneur sur décision du Président Jacques Chirac le 31 décembre 2004 comme « ancien ministre d'État, ancien député des Hauts-de-Seine, ancien maire de Neuilly-sur-Seine ; 24 ans d'activités professionnelles, de fonctions électives et de services militaires ».

    Mais tous les verbes sont à l'imparfait. Très imparfait ! Car Nicolas Sarkozy n'est plus ainsi décoré. Deux arrêtés signés le 5 juin 2025 par le général François Lecointre, grand chancelier de la Légion d'honneur et chancelier de l'Ordre national du Mérite, ont exclu d'office de ces deux ordres Nicolas Sarkozy (et également Gilbert Azibert et Thierry Herzog). Ces arrêtés sont applicables rétroactivement dès le 17 mai 2023, date de sa condamnation en appel.

     

     
     


    La raison, c'est sa condamnation définitive à un an de prison ferme après le rejet du pourvoi en cassation le 18 décembre 2024, dans l'affaire Bismuth (suspicion d'un pacte de corruption). En effet, les deux ordres ont pour règlement l'exclusion d'office de toutes les personnes membres de ces ordres qui auraient été condamnées à au moins un an de prison ferme, ce qui est donc le cas de l'ancien Président de la République. Très précisément, le code de la Légion d'honneur proclame : « Est exclue toute personne condamnée pour un crime ou condamnée à une peine définitive de prison ferme d’un an minimum. ».
     

     
     


    Toutefois, des logiques contradictoires s'affrontent. La première est donc l'exclusion, comme simple citoyen jugé et condamné. La seconde, c'est de rappeler que le Président de la République est de droit grand-croix de la Légion d'honneur. Or, on ne peut pas lui retirer le fait d'avoir exercé les fonctions de Président de la République du 16 mai 2007 au 15 mai 2012 (élu par une majorité confortable des électeurs).

    Le seul précédent cité par les médias ne l'est pas vraiment. En considérant le maréchal Philippe Pétain comme un prédécesseur de Nicolas Sarkozy, certains journalistes considèrent de fait légal le régime de Vichy (mal nommé, je pense aux malheureux habitants de Vichy qui liraient cela, celui de la Révolution nationale).

    En effet, le 15 août 1945, Pétain a été condamné à mort, à l'indignité nationale et à la confiscation de ses biens pour intelligence avec l'ennemi et haute trahison. On voit à quel point la comparaison est historiquement stupide.

     

     
     


    Le journaliste Renaud Dély en a profité pour évoquer les peines planchers dans son éditorial politique du 16 juin 2025 sur France Info : « En renvoyant l’ancien Président de la République au précédent du maréchal Pétain, cette décision abîme, de fait, la fonction présidentielle. Au lieu d’indexer la déchéance uniquement sur la durée d’une peine, sans doute l’Ordre devrait-il modifier sa règle pour tenir compte de la nature des faits ayant entraîné une condamnation. À écarter les circonstances et les faits incriminés, ce genre de décisions couperets illustre l’absurdité de ces fameuses peines planchers automatiques que la droite, et Nicolas Sarkozy, aiment d’ordinaire à prôner en matière pénale. ».

    L'opposition des deux logiques se faisait par deux représentants respectifs.

    D'une part, le grand chancelier de la Légion d'honneur, le général François Lecointre, ancien chef d'état-major des armées, qui, le 4 mars 2025, avait rappelé que la dégradation des deux ordres nationaux était "de droit" et ne correspondait donc pas à une décision : « C'est un sujet majeur. Le sujet de la discipline est d'autant plus important que l'exemplarité de l'ordre tient aussi au fait que les gens qui sont décorés puissent être sanctionnés. ». Lorsque les deux arrêtés ont été publié, il a été ainsi communiqué : « Le Grand chancelier de la Légion d'honneur s'est assuré auprès d'éminents juristes de la bonne application des textes en vigueur à ce cas spécifique. ».

    Plusieurs enfants et petits-enfants de titulaires de la Légion d'honneur et de l'Ordre national du Mérite avaient déposé un recours le 6 mai 205 auprès du tribunal administratif de Paris pour obtenir la déchéance de l'ancien chef de l'État de ces deux ordres.

    D'autre part, l'actuel Président de la République Emmanuel Macron avait clairement déclaré le 24 avril 2025 son opposition à la dégradation de Nicolas Sarkozy : « De mon point de vue, de là où je suis, je pense que ce ne serait pas une bonne décision. (…) Je pense que c'est très important que (…) les anciens Présidents soient respectés et donc le Président de la République que je suis, en tant que grand maître, ne prendra aucune décision de ce type. ». Mais en l'occurrence, ce n'est pas au Président de la République de prendre une telle décision, mais au grand chancelier (le Président de la République la prend quand c'est une dégradation qui n'est pas "de droit" et qui demande donc une décision spécifique, dans le cadre d'une procédure disciplinaire ordinaire).
     

     
     


    Par ailleurs, la condamnation définitive correspond à l'épuisement de toutes les voies de recours judiciaire en France. C'est du reste pour cette raison que Nicolas Sarkozy a dû effectuer sa peine de prison ferme sous la forme de la pose d'un bracelet électronique à sa cheville le 7 février 2025. Celui-là a été retiré le 14 mai 2025 en raison de sa libération conditionnelle rendue possible par son grand âge (âgé de plus de 70 ans qu'il a atteints le 28 janvier 2025) et décidée le 12 mai 2025 par le juge d'application des peines sur une requête du 16 avril 2025, selon le parquet de Paris. L'avocate de Nicolas Sarkozy Jacqueline Laffont-Haïk avait alors précisé : « Cette mesure, qui au regard de la loi aurait pu intervenir dès le premier jour, est strictement conforme à la loi et à la jurisprudence. ».
     

     
     


    Or, le caractère définitif de la condamnation peut être discuté. Effectivement, Nicolas Sarkozy a fait un recours auprès de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) contre la France pour ce jugement définitif, obligé de s'opposer à la France pour clamer son innocence. Il a donc également déposé un second recours auprès la CEDH contre la France pour sa dégradation des deux ordres nationaux.
     

     
     


    Ainsi, le 15 juin 2025, son avocat Patrice Spinosi a affirmé : « Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le Grand Chancelier. Il n'a jamais fait de cette question une affaire personnelle. (…) [Il] a fait valoir des arguments juridiques, c'était au nom de la fonction même de Président de la République. (…) La condamnation de la France [par la CEDH] impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre [de Nicolas Sarkozy] en même temps que l'exclusion de l'ordre de la Légion d'Honneur, l'une n'étant que la conséquence de l'autre. ». Il a martelé : « Aujourd’hui, il faut bien comprendre que désormais tout Président de la République qui sera condamné à une peine d’emprisonnement d’un an se verra nécessairement retirer l’ordre de la Légion d’honneur. (…) Ce combat, Nicolas Sarkozy ne l’a pas mené pour lui-même, il l’a mené au nom de la fonction qu’il a occupée de Président de la République. ».
     

     
     


    Ce dimanche, l'ancien Président de la République a reçu le soutien de son fils le plus jeune, Louis Sarkozy, qui, dans un message envoyé sur Instagram le 15 juin 2025, a rendu éloge à son père en rappelant son courage le 13 mai 1993 lors de la prise d'otages d'enfants dans une école maternelle de Neuilly-sur-Seine alors qu'il était maire de Neuilly-sur-Seine et ministre  : « Il est des Légions d’honneur que l’on ne perd pas. Celles que l’on reçoit en sauvant des enfants des griffes d’un kamikaze. Celles que l’on mérite en arrachant des infirmières, des médecins, ou une Française, à un emprisonnement étranger. Ces Légions-là ne dépendent d’aucun décret. Elles vivent dans la mémoire des vies sauvées, dans les sourires des enfants libérés. Elles valent plus que n’importe quelle médaille, plus que n’importe quelle reconnaissance officielle. Ce sont elles, les vraies Légions d’honneur. Le reste n’est que littérature. ». Son épouse Carla Bruni a retransféré ce message sur son compte le lendemain.
     

     
     


    La prochaine échéance judiciaire de Nicolas Sarkozy aura lieu le 25 septembre 2025 avec le délibéré de l'affaire libyenne dans laquelle l'ancien Président de la République risque jusqu'à sept ans de prison, selon le réquisitoire du procureur général. La question de la candidature de Nicolas Sarkozy à l'élection présidentielle de 2027 ne peut plus se poser en raison de son inéligibilité pendant trois ans. Marine Le Pen n'est pas la seule personnalité dans ce cas.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (16 juin 2025)
    http://www.rakotoarison.eu

    Pour aller plus loin :
    La Légion d'honneur perdue de Nicolas Sarkozy.
    Un nouveau bijou pour Nicolas Sarkozy ?
    Le doyen Nicolas Sarkozy.
    L'honneur perdu de Nicolas Sarkozy.
    Nicolas Sarkozy réagit à la dissolution dans le JDD (15 juin 2024).
    Il y a 15 ans : Nicolas Sarkozy, l'Europe et les crises (déjà).
    Discours du Président Nicolas Sarkozy le 16 décembre 2008 au Parlement Européen de Strasbourg (texte intégral).
    Discours du Président Nicolas Sarkozy le 10 juillet 2008 au Parlement Européen de Strasbourg (texte intégral).

    Sale temps pour Nicolas Sarkozy !
    La justice harcèle-t-elle la classe politique ?
    Carla Bruni.
    La sagesse de Nicolas Sarkozy.
    Pour qui votera Nicolas Sarkozy au premier tour ?
    Bygmalion : Éric Zemmour soutient Nicolas Sarkozy.
    Injustice pour Nicolas Sarkozy ?
    Sarko et ses frères...


     

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250615-sarkozy.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/la-legion-d-honneur-perdue-de-261567

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/06/14/article-sr-20250615-sarkozy.html


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  • Yvon Gattaz : mettez-vous à votre conte !

    « Mettez-vous à votre contre. Et ça s'écrit comme ça, conte, car c'est un conte de fée. N'ayez pas peur, c'est un conte de fée, et c'est un conte de fée qui curieusement réussit, et moi, je suis très content que les jeunes fassent fortune. » (Yvon Gattaz, en novembre 2018 à HEC).


     

     
     


    L'ancien patron des patrons Yvon Gattaz est né il y a exactement 100 ans le 17 juin 1925, soit un jour après Jean d'Ormesson. Vaillant chef d'entreprise, il ne concevait pas, comme Maurice Allais, la retraite avant l'âge de 100 ans. Il ne l'a donc jamais prise puisqu'il n'a pas atteint cet âge canonique du centenaire, de peu puisqu'il est parti il y a six mois, le 12 décembre 2024.

    En effet, Yvon Gattaz, centralien, créateur et chef d'entreprise respecté, qui a commencé ex nihilo (comme il le disait, mais il se sentait obligé de traduire pour les plus jeunes, à partir de rien), n'a jamais cessé de promouvoir l'esprit d'entreprise, la création d'entreprise, notamment auprès des plus jeunes.

    Il voulait notamment expliquer la culture de l'échec : ce n'est pas grave d'échouer si cela permet de rebondir, et on ne réussit pas forcément dès la première fois. En France, le côté perfectionniste tend à n'oser faire une chose que lorsqu'on est sûr de pouvoir la réussir, or, l'esprit d'entreprise, c'est de prendre des risques (calculés), c'est l'audace d'autoriser l'échec.

    Il avait l'habitude de citer Chamfort : « Si les raisonnables ont duré, les enthousiastes ont vécu. ».

    Le 17 juin était pour Yvon Gattaz un jour important, d'ailleurs, car c'était aussi le 17 juin 1952 qu'il a créé avec son frère, également ingénieur, leur entreprise Radiall, dans un petit atelier du dixième arrondissement. L'entreprise a pu naître, vivre et survivre grâce à l'adéquation de son modèle économique avec le marché.

    Après une courte expérience d'ingénieur salarié dans une aciérie, il a ainsi dirigé son entreprise pendant plus d'une quarantaine d'années. Elle fait partie de ces entreprises moyennes qui manquent tant à la France (où il y a surtout des grands groupes ou des petites entreprises) et qui a permis la prospérité industrielle de l'Allemagne pendant longtemps. Cela nécessite de développer son activité, de ne pas avoir peur d'intégrer des investisseurs, de faire de nouveaux paris.

    S'amusant à parler de lui à la troisième personne, il racontait : « Ils ont eu la chance de trouver un créneau porteur premier marché, qui est (…) le vrai secret stratégique de la création d'entreprise. Trouver le créneau premier marché porteur. ».

    Parmi ses paris personnels, l'idée de représenter le patronat français lors de l'élection de François Mitterrand et de l'arrivée d'un gouvernement socialo-communiste au pouvoir. C'était un vrai challenge ! Yvon Gattaz a présidé le CNPF (qui allait devenir le Medef, lui-même présidé pendant un certain temps par son fils Pierre Gattaz) de décembre 1981 à décembre 1986. Un quinquennat très politique et pas de tout repos car il a fallu négocier avec le Premier Ministre Pierre Mauroy sur de nombreux fronts, dont la réduction du temps de travail à 39 heures, la hausse des charges salariales, l'impôt sur la grande fortune et les nationalisations de pans entiers de l'économie française.
     

     
     


    Fier d'avoir été élu le 29 mai 1989 à l'Académie des sciences morales et politiques (section Économie politique, statistiques et finaces), qu'il a même présidée en 1999, Yvon Gattaz n'était pas un taiseux (même au-delà de 90 ans) et n'était pas avare de ses conseils aux jeunes. Il a créé justement l'Association Jeunesse et Entreprise en 1986 pour encourager les jeunes à créer leur entreprise, pour les aider, les conseiller, leur donner du moral.

    C'est ce goût de la transmission de sa passion d'entreprendre qui l'a gardé très vivant jusqu'à sa disparition, n'hésitant pas à multiplier les conférences et les tables rondes dans les campus et les universités, l'œil toujours pétillant.

    Répondant à un directeur de HEC très emballé par la lecture d'un de ses livres et voulant l'inviter dans sa grande école, Yvon Gattaz le mettait en garde : « Je lui ai expliqué que la création d'entreprise ne pouvait pas s'enseigner ex cathedra par un académicien comme un cours de philosophie, ça n'est pas vrai. La création d'entreprise, ça se transmet, ça ne s'enseigne pas. ».

    La réputation d'Yvon Gattaz à proposer des formules chocs, des aphorismes, est telle qu'on les a appelées gattazinades (comme les raffarinades) ou les gattazeries. Du reste, il en était très fier.

    En voici une qu'il considérait comme essentielle : « Le talent de la gestion, c'est la gestion des talents. ».

    Il l'explicitait ainsi : « Savoir gérer les talents des autres est un talent considérable et c'est ça qui va assurer le succès de votre prochaine entreprise. Ou vous savez gérer les talents de vos collaborateurs ou vous ne savez pas. Si vous ne savez pas, vous êtes foutus ! Il faut utiliser tous les talents qui sont autour de vous, car soi-même, on n'a pas tous les talents. (…) C'est le problème de la complémentarité des talents. Le talent de la gestion, c'est la gestion des talents. ».

    Il aimait même citer les gattazinades des autres, souvent apocryphes, comme cette citation attribuée à tort à André Malraux : « Le futur est un présent que nous fait le passé. ».

    Lors d'une conférence à des étudiants de HEC, en novembre 2018 (il avait alors 93 ans), il l'a terminée sur un slide qui révélait le secret du créateur d'entreprise (un secret qui n'est pas vraiment une surprise, car c'est la personnalité des créateurs qui compte le plus dans une telle initiative) : « La recette d'Yvon Gattaz : 10% de finance, 10% de compétence, 40% de vaillance et 40% d'inconscience. ».

    Je vous recommande d'écouter Yvon Gattaz qui, malgré son âge, avait encore cette vaillance des jeunes entrepreneur. Et peut-être aussi cette inconscience dans un pays où beaucoup de jeunes encore se rêvent fonctionnaires !..


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (14 juin 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Yvon Gattaz.
    Comment créer les emplois de demain ?
    Vite et bien !
    François-Xavier Ortoli.
    Gilberte Beaux.
    Carlos Tavares.
    Carlos Ghosn.
    Bernard Madoff.
    Jacques Séguéla.
    Gustave Eiffel.
    Francis Mer.








    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250617-yvon-gattaz.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/economie/article/yvon-gattaz-mettez-vous-a-votre-260691

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/06/17/article-sr-20250617-yvon-gattaz.html


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  • Jean d'Ormesson : "la mort est l'autre nom de la vie" !

    « Le charme de la vie, sa grâce, son bonheur viennent de sa précarité. Il lui suffirait de durer un peu trop pour devenir lassante et peut-être atroce. » (Jean d'Ormesson, 2003).



     

     
     


    L'écrivain Jean d'Ormesson est né il y a exactement 100 ans, le 16 juin 1925. Il a eu la chance d'être bien né et d'avoir du talent, en plus d'une vie facile et d'une santé robuste, bref, une existence heureuse qui ne le prédisposait pas d'être un artiste. En effet, les artistes généralement sont créatifs par les aspérités de leur vie, leurs malheurs, leurs angoisses, leurs tristesses... et lui, le grand Jean, reconnaissait qu'il avait eu de la chance... sauf un peu avant la fin de sa vie où il a dû vivre des moments très difficiles avec la maladie (qui ne l'a heureusement pas vaincu). Il s'est éteint le 5 septembre 2017 à l'âge de 92 ans.

    Fils d'un diplomate qui était un grand ami de Léon Blum, Jean d'Ormesson se considérait comme un "homme de droite" et a dû refuser de nombreuses propositions d'être Ministre de la Culture. J'ai déjà évoqué, ici et , l'excellence du personnage : normalien, agrégé de philosophie, membre de cabinets ministériels, journaliste et éditorialiste politique jusqu'à diriger l'un des principaux quotidiens français, "Le Figaro", il était avant tout un écrivain reconnu rapidement et sacré académicien à l'âge de 48 ans. Il a longtemps été le plus jeune membre de l'Académie français avant d'en être le doyen (le plus ancien élu) aussi pendant longtemps, ce qui a fait que pendant près de quarante-quatre ans, il incarnait l'Académie dans son institution, dans son esprit, dans ses cooptations, dans toute sa splendeur.
     

     
     


    Je propose, pour lui rendre une nouvelle fois hommage, quelques extraits de ses œuvres.


    1. "Comme un chant d'espérance" (2014)

    Le temps : « Avec son passé qui n'est plus, son avenir qui n'est pas encore et sont éternel présent toujours en train de s'évanouir entre souvenir et projet, le temps est la plus prodigieuse de toutes les machineries. Aucun phénomène de la nature, aucune invention humaine, aucune combinaison de l'esprit, aucune intrigue de roman, de cinéma, de théâtre ou d'opéra, si compliquée qu'elle puisse être, ne lui parvient à la cheville. ».

    Les hommes : « L'histoire est une parenthèse au cœur de l'éternité. Les hommes sont une parenthèse au cœur de l'histoire. Chacun de nous est une parenthèse au cœur de la foule des hommes. ».

    Dieu : « En face et à la place d'un hasard aveugle et d'une nécessité qui serait surgie de nulle part, une autre hypothèse, tout aussi étrange et à peine plus absurde, mais peut-être plus rassurante, en tout cas plus romanesque et largement répandue, met au cœur du big bang ce mélange de tout, de rien et d'éternité que nous avons pris l'habitude d'appeler Dieu. ».

    Le mystère : « Toute mort est un mystère parce que toute vie est un mystère. ».

    L'espérance : « L'immense avantage de Dieu, qui est si peu vraisemblable, est de donner au monde, invraisemblable lui aussi, une espèce de cohérence et quelque chose qui ressemble à l'espérance. Sous l'œil et sous la main de Dieu, l'histoire, incompréhensible sans Dieu, cruelle et paradoxale avec lui, prend un semblant de sens : elle est un discours qui se poursuit, un roman en route vers sa fin, un labyrinthe mis en mouvement. C'est un parcours et un jeu, accidenté comme tous les parcours, incertain comme tous les jeux. C'est une énigme en attente de sa solution hors du temps. C'est une épreuve. ».

    La vie : « Le monde est une vallée de larmes. Et une vallée de roses. La vie est une fête. Une fête délicieuse et très gaie. Et une fête sinistre. Comme l'indique avec évidence ses premiers pas hors du rien entre surabondance et absence, l'univers est un oxymore. ».

    La liberté : « Les hommes sont libres. Ou ils se croient libres. Ils sont, en vérité, si étroitement maintenus dans un fragment dérisoire de l'espace et dans leur époque d'où il leur est interdit de s'échapper que leur fameuse liberté, dont ils font si grand cas, n'est que trompe-l'œil et illusion. ».

    La naïveté : « Les dinosaures avant leur disparition, les vertébrés, les primates dont nous descendons ne se croyaient pas au centre d'un univers fait pour eux. Cette conviction naïve est venue aux hommes avec leur pensée. ».

    La littérature : « Les livres ne survivent pas grâce aux histoires qu'ils racontent. Ils survivent grâce à la façon dont elles sont racontées. La littérature est d'abord un style qui éveille l'imagination du lecteur. ».

    La chance : « Comme dans n'importe quel jeu, il y a dans le jeu de l'histoire, avant et après la vie et la pensée, des gagnants et des perdants, des vainqueurs et des vaincus. Les hommes attribuent souvent les hasards qui ont décidé de leur destin à ce qu'ils appellent leur étoile. Il n'y a pas de grande figure, de conquérant, de découvreur, d'inventeur, de créateur qui n'ait pas, au moins une fois dans sa vie, été servi par le hasard. Une rencontre. Une occasion. Une situation passagère à saisir par les cheveux. Les Grecs anciens honoraient un petit dieu appelé Kairos, qui veillait sur l'instant opportun, sur le moment précis où il fallait s'emparer de l'avenir. L'empereur Napoléon, qui, plus que personne, croyait à son étoile, avait l'habitude de demander à l'officier à qui il avait l'intention de confier un commandement s'il était heureux, c'est-à-dire s'il avait de la chance. ».


    2. "C'était bien" (2003)


    La destinée : « Qu'ai-je aimé dans cette vie que j'aurai tant aimée ? C'est une question que chacun de nous, à moins de se résigner à passer pour un veau, doit bien finir par se poser. Il y a dans toute existence au moins deux interrogations auxquelles se mêle un peu d'angoisse. L'une au début : "que faire ?". Elle m'a tourmenté jusqu'aux larmes. L'autre à la fin : "qu'ai-je donc fait ?". ».

    Délice et poison : « La vie m’a toujours paru délicieuse, et le monde, plein de larmes. ».

    La vanité de la science : « Une malédiction frappe la science qui court de succès en succès : tous ses triomphes, et ils sont réels, sont des victoires à la Pyrrhus. À mesure que se gonfle, dans l'océan de ce que nous ne savons pas, la sphère de ce que nous savons, le nombre de points de contact entre savoir et ignorance croît proportionnellement. ».

    La vanité de la science (bis) : « La science est de la famille des traîtres : elle appartient de naissance au camp de l'espérance et il lui arrive de basculer dans le camp de l'horreur. ».

    Le futur antérieur : « L’univers est une machine à créer du passé à partir de l’avenir. La mission de l’avenir est de se changer en passé. Entre l’avenir et le passé flotte un truc stupéfiant que nous appelons le présent. Présent ! Le présent est absent. À peine l’avenir s’est-il changé en présent que le présent tombe dans le passé. C’est un piège perpétuel, une trappe qui se ferme et se rouvre en même temps, un tour de magie noire et blanche dont nous sommes les victimes, un enchantement sans fin dont nous sommes les témoins aveuglés par eux-mêmes. La totalité de l’histoire, qui n’est faite que du souvenir du passé et de l’attente de l’avenir, se joue dans le présent. Nous vivons dans un éternel présent toujours en train de s’effacer et toujours en train de se récrire. ».

    L'écriture : « J'écrivais des romans pour tromper mon chagrin et le noyer sous les mots. ».

    La déchéance : « Un mot de Cioran m'a enchanté : "J'ai connu toutes les formes de déchéance y compris le succès". ».

    La sagesse : « Ne vous laissez pas abuser. Souvenez-vous de vous méfier. Et même de l'évidence : elle passe son temps à changer. Ne mettez trop haut ni les gens ni les choses. Ne les mettez pas trop bas. Non, ne les mettez pas trop bas. Montez. Renoncez à la haine : elle fait plus de mal à ceux qui l'éprouvent qu'à ceux qui en sont l'objet. Ne cherchez pas à être sage à tout prix. La folie aussi est une sagesse. Et la sagesse, une folie. Fuyez les préceptes et les donneurs de leçons. Jetez ce livre. Faites ce que vous voulez. Et ce que vous pouvez. Pleurez quand il le faut. Riez. J'ai beaucoup ri. J'ai ri du monde et des autres et de moi. Rien n'est très important. Tout est tragique. Tout ce que nous aimons mourra. Et je mourrai moi aussi. La vie est belle. ».


    3. "Je dirai malgré tout que cette vie fut belle" (2016)

    La naissance : « En dépit de tant de malheurs et de tant de chagrins, c’est un bonheur d’être né. ».

    L'étonnement : « J'ai toujours été étonné. Je n'en suis pas encore revenu, je n'en reviens toujours pas, je n'en reviendrai jamais. Dès l'enfance, d'être là. Une espèce d'étranger dans un monde d'emblée étrange. J'étais étonné d'être bavarois, d'être roumain, d'être carioca, c'est-à-dire brésilien de Rio. Et puis j'ai été étonné d'être normalien. Étonné d'être en fin de compte quelque chose, même au rabais, comme une espèce de philosophe. Étonné d'avoir pénétré dans le saint des saints et d'être devenu un écrivain. Je me mettais assez bas dans un monde mis très haut. Dès mes plus jeunes années, j'étais porté à l'admiration. ».

    L'origine : « La Puisaye, avec Saint-Fargeau pour capitale, avec Bléneau, Toucy et Saint-Sauveur, la patrie de Colette, est une petite région française, à l'extrême nord de la Bourgogne, entre le Loing et la Loire, couverte, comme son nom l'indique, de forêts et de points d'eau. Si je m'enracine quelque part... c'est en Puisaye. je suis un cosmopolite poyaudin et toujours émerveillé, égaré plus tard un peu partout autour de la Méditerranée. ».

    Les circonstances : « Il me semble parfois que les choses se sont faites presque toutes seules et que je n’y suis pour rien. Je n’ai pas choisi de naître. Je ne suis pas arrivé n’importe quand. On ne m’a pas déposé n’importe où. Je n’ai pas débarqué hier devant Troie, entre Achille et Ulysse. Ni avant-hier pour la guerre du feu. Ni demain ou après-demain parmi des robots distingués et de plus en plus savants. Non. Je me suis retrouvé sans le vouloir entre deux guerres mondiales, au temps de Staline et d’Hitler, dans un corps qui, bon gré, mal gré, a été le mien pour toujours, c’est-à-dire pour un éclair. ».

    L'engagement : « J'aimais étudier. Je ne tenais pas tellement à vivre. Peut-être, après une enfance très heureuse, redoutais-je l'épreuve de la vie. Je craignais comme la peste de m'engager dans l'une ou l'autre des voies que m'offrait l'existence. ».


    L'histoire : « Selon la formule de Raymond Aron, les hommes font l'histoire, mais ils ne savent pas l'histoire qu'ils font. ».

    Les inégalités : « Il est très bon de faire maigrir les gros si c'est pour engraisser les maigres. Mais vous connaissez les proverbes chinoises si subtils. L'un d'entre eux est célèbre : "Quand les gros maigrissent, les maigres meurent". ».


    La lecture : « J'aimais beaucoup lire. Ou faire semblant de lire. À la différence du théâtre ou du cinéma qui vous imposent leur rythme, il y a un style de lecture très proche de la rêverie. N'allez pas croire qu'il s'agisse de paresse. C'est à peu près l'opposé. Au lieu de lire bêtement, à la suite, le livre qui vous est proposé, vous vous arrêtez, au contraire, à chaque ligne pour ajouter au texte quelque chose de votre cru. Pour enrichir l'extérieur d'un apport intérieur. Pour y mêler vos sentiments et votre propre expérience. Pour vous approprier l'œuvre étrangère qui vous est proposée. ».

    L'amour filial : « Si quelque chose a marqué mon enfance, c'est l'amour. Un amour calme, sans tempêtes, sans fureur. Mais un amour fort. L'amour durable des parents entre eux. L'amour exigeant des parents pour leurs enfants. L'amour, mêlé de respect, des enfants pour leurs parents. ».
     

     
     


    Intimidation : « Le comité de lecture de Gallimard m'a beaucoup plus intimidé que l'Académie française. D'un côté, une institution ; de l'autre côté, une légende. ».

    L'Académie française : « La vérité, mon bon maître, la voici : l'Académie est une institution très illustre, au caractère indéfinissable, mi-indépendante, mi-publique, qui n'a que des rapports accidentels et lointains avec la littérature. De Corneille et Racine, de La Fontaine et Voltaire à Chateaubriand et Hugo, elle brille par ses choix, et de Molière et Rousseau à Baudelaire, à Zola, à Aragon, elle brille par ses erreurs. En dépit de ses faiblesses, elle a contribué sans aucun doute à l'éclat de notre culture et sa renommée n'est pas près de faiblir. ».

    L'amour de la vie : « J'ai tout aimé de ce monde calomnié par mes maîtres, Cioran et l'Ecclésiaste. Je sais bien, comme Renan et comme eux, que la vie est peut-être triste, qu'elle est en tout cas semée d'échecs et de chagrins et qu'elle est vouée à la mort. Mais je crois aussi qu'elle est belle et qu'il faut apprendre à l'aimer. J'ai essayé de l'aimer et d'être dans cette vallée de larmes aussi heureux que possible. ».



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (14 juin 2025)
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    Pour aller plus loin :
    Jean d'Ormesson.
    Philippe Labro.
    Huguette Bouchardeau.
    Sainte Thérèse de Lisieux.
    Le pape François.

    L'abbé Pierre.
    André Siegfried.
    Boualem Sansal.
    Robert Badinter.
    Charles De Gaulle.

    Natacha Polony.
    Jules Verne.
    Racine.
    Molière.
    Frédéric Dard.
    Alfred Sauvy.
    George Steiner.
    Françoise Sagan.
    La vie fut belle.
    Le dandy doyen.



     

     
     






    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250616-jean-d-ormesson.html

    https://www.agoravox.fr/culture-loisirs/culture/article/jean-d-ormesson-la-mort-est-l-260629

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/06/14/article-sr-20250616-jean-d-ormesson.html



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  • Israël vs Iran : Emmanuel Macron l'équilibriste

    « C'est une étape nouvelle dans la guerre qui se joue dans la région. Je sais l'inquiétude légitime de nos compatriotes face à ces événements. » (Emmanuel Macron, le 13 juin 2025 à l'Élysée).



     

     
     


    Ça y est, souvent redouté et maintenant réalisé. Israël a attaqué l'Iran ce vendredi 13 juin 2025. Cette date, comme d'autres dates récentes, marquera sans doute l'histoire du Proche-Orient. Après les massacres du 7 octobre 2023, l'État d'Israël a fait des offensives à Gaza, au Liban, et maintenant en Iran pour assurer sa défense et son existence, souvent au prix de nombreuses victimes civiles innocentes. À ce moment crucial, le Président de la République française Emmanuel Macron a tenu à s'exprimer sur ce sujet grave au cours d'une conférence de presse organisée le soir même à l'Élysée (on pourra la lire ou la regarder dans son intégralité ici).

    Les premières paroles furent pour justifier l'attaque d'Israël par la condamnation du programme nucléaire iranien : « La France a condamné depuis longtemps et à de multiples reprises l'accélération du programme nucléaire et balistique iranien. L'Iran a continué d'enrichir de l'uranium sans aucune justification civile et à des niveaux désormais très proches de ce qui est nécessaire pour un engin nucléaire, accumulant près de 40 fois plus d'uranium enrichi que ce qui lui était autorisé. Elle s'est ainsi affranchie de toutes ses obligations vis-à-vis de la Communauté internationale, rompant ses propres promesses. ».

    Le chef de l'État a aussi condamné le développement du programme de missiles : « Parallèlement, l'Iran développe à marche forcée un programme de missiles. Certains sont en théorie capables d'emporter un engin nucléaire et d'autres ont la portée permettant d'atteindre certaines parties de notre territoire national. ».
     

     
     


    Enfin, il a considéré l'Iran comme complice des organisateurs du pogrom du 7 octobre 2023 mais aussi comme un État hostile à la France et aux Français : « L'Iran porte une lourde responsabilité dans la déstabilisation de toute la région, a soutenu le Hamas, le Hezbollah, les Houthis, s'est félicité de l'attentat terroriste du 7 octobre, à la suite duquel 50 compatriotes ont perdu la vie, et détient toujours deux otages français, Cécile Kohler et Jacques Paris. (…) L'Iran fournit aussi des missiles à la Russie pour l'aider dans son agression contre l'Ukraine. ».

    Tout cela pour réaffirmer haut et fort le problème actuel de l'Iran : « Et donc, je le dis avec la plus grande clarté, le risque de cette marche vers l'arme nucléaire par l'Iran menace la région, l'Europe et, plus généralement, la stabilité collective. Nous ne pouvons pas vivre dans un monde où l'Iran posséderait la bombe atomique, car c'est une menace existentielle et une menace pour notre sécurité à tous. ».


    Et pour réaffirmer haut et fort le soutien à Israël : « Mais nul n'est plus directement visé qu'Israël, dont l'Iran appelle sans relâche à la destruction. Je l'ai souvent répété, Israël a le droit, comme chaque peuple, de vivre délivré de l'angoisse de l'anéantissement, du risque de l'attaque et de la menace du terrorisme. Nous restons attachés à cette exigence pour la sécurité d'Israël. Je l'ai réaffirmé ce matin au Premier Ministre Benyamin Netanyahou. ». Mais la France n'a pas soutenu l'attaque d'Israël contre l'Iran : « Est-ce que, pour autant, nous la soutenons, nous avons voulu l'accompagner, nous l'avons planifiée avec eux ? La réponse est non. ».
     

     
     


    Donc, la situation du nucléaire iranien est extrêmement grave : « Pour autant, la voie que la France continue avec constance de poursuivre est une voie diplomatique, c'est-à-dire celle qui consiste à redonner la légitimité à l'AIEA de poursuivre son programme, à demander de suivre l'ensemble des sites d'enrichissement et de revenir à des seuils qui correspondaient aux engagements internationaux. Nous avons été parmi les pays les plus exigeants et les plus constants sur la question du nucléaire iranien comme du balistique iranien, mais nous avons toujours privilégié la voie de la discussion diplomatique et des exigences techniques de l’AIEA plutôt que l'intervention militaire. C'est pourquoi la France n'était pas engagée dans une discussion avec Israël sur ce sujet, et c'est pourquoi la France ne recommandait pas des attaques de la part d'Israël. ».

    En même temps, la France veut contribuer au retour à la paix par une action diplomatique intense : « Face au risque majeur de déstabilisation pour toute la région, la France appelle désormais toutes les parties à la plus grande retenue pour éviter l'escalade. La question du nucléaire iranien est une question grave, une question existentielle. C'est par la négociation qu'elle doit désormais être réglée. C'est pourquoi je regrette que l'Iran n'ait pas pris au sérieux les propositions avancées par les États-Unis et a refusé jusqu'alors toutes les concessions comme les gestes nécessaires. Nous appelons à la reprise du dialogue, à la conclusion d'un accord, seul chemin pour désamorcer la situation, et nous sommes prêts à mettre tous nos efforts pour atteindre cet objectif. Depuis ce matin, j'ai eu l'occasion de m'entretenir avec le Président Trump, nos alliés européens, en particulier britanniques et allemands, ainsi que nos partenaires dans la région, jusqu'à l'instant même, les dirigeants d'Arabie saoudite, du Bahreïn, de la Jordanie, du Qatar, des Émirats arabes unis, de l'Égypte ou du Liban. Nous serons aux côtés de nos partenaires dans la région, auxquels j'ai rappelé notre solidarité et notre engagement, y compris celui de nos forces pour les protéger. Ce matin, j'ai tenu un Conseil de sécurité et de défense nationale sur la situation au Proche et Moyen-Orient et ses conséquences pour notre pays. (…) Plusieurs mesures ont aussi été actées pour garantir la sécurité de nos ressortissants, de nos troupes et de nos ambassades dans la région. Je demande à nos compatriotes de ne pas se rendre sur place, quel que soit le prétexte. Notre dispositif militaire dans la région est quant à lui en alerte. (…) Chaque jour, chaque heure, la France agit pour la paix et la sécurité pour tous au Moyen-Orient. ».

    Pour Emmanuel Macron, l'attaque de l'Iran ne doit cependant pas faire oublier la situation très grave de Gaza : « Les efforts pour rétablir le cessez-le-feu, rompus depuis le 1er mars, n'ont à ce stade pas abouti. Pourquoi ? Parce que cette logique militaire, celle de l'occupation, des déplacements, du siège, ne mènent nulle part, si ce n'est à un conflit permanent. Pour arrêter la guerre, il faut redonner une perspective de paix afin de bâtir les deux États et assurer la paix et la sécurité pour tous. C'est ce que porte la France depuis le 7 octobre, fidèle en cela à son engagement historique. Et c'est aussi le rappel qu'une vie vaut une vie et que pour la France, il n'y a pas de double standard. C'est par cette exigence que seront restaurées la paix et la sécurité régionales. ».

     

     
     


    Ainsi, la France rappelle très clairement son objectif de la création d'un État palestinien au côté de l'État d'Israël dans le cadre d'une conférence de paix : « Les objectifs que nous poursuivons à travers cette conférence internationale coorganisée avec l'Arabie Saoudite sont les suivants. En premier lieu, sécuriser la libération des otages et permettre l'arrivée dans la bande de Gaza d'une aide humanitaire massive. Ensuite, consolider le cessez-le-feu le plus durable possible. Troisièmement, enclencher un processus politique qui se substitue aux armes et qui permette d'obtenir une réforme de l'autorité palestinienne et la mise en place d'une administration sous l'autorité palestinienne dans la bande de Gaza, excluant le Hamas, qui doit être désarmé. L'objectif, c'est donc un État palestinien démilitarisé, reconnaissant l'existence et la sécurité d'Israël, qui doit recevoir le soutien d'une mission internationale de stabilisation. C'est le préalable indispensable à l'intégration régionale d'Israël et à l'établissement de sa reconnaissance mutuelle. Si nous devons décaler la tenue de cette conférence pour des raisons logistiques et sécuritaires, dans la mesure où les dirigeants de l'autorité palestinienne ne peuvent rejoindre les Nations unies, elle aura lieu au plus vite. Et dès les prochains jours, en lien évidemment avec les dirigeants de la région et plus particulièrement avec l'Arabie Saoudite, une date sera refixée. Ce report ne saurait remettre en cause notre détermination à avancer vers la mise en œuvre de la solution des deux États, quelles que soient les circonstances. ».

    D'où la détermination intacte d'Emmanuel Macron qui ne plaira pas à Israël : « J'ai dit ma détermination à reconnaître l'État de Palestine. Elle est entière et c'est une décision souveraine. En ces heures, l'urgence d'un Moyen-Orient en paix est d'autant plus grande. Je mettrai à profit les grandes échéances des prochains jours et notamment le sommet du G7 dès la semaine prochaine pour rapprocher les points de vue de nos partenaires, nous concerter plus avant avec les États-Unis d'Amérique et avancer dans ce sens. ».
     

     
     


    Le Président français a bien mesuré le caractère explosif de la situation d'une possible guerre entre l'Iran et Israël : « Je ne vais pas ici documenter le pire, mais nous nous préparons à tout. Il est évident que selon les ripostes qui seront décidées par l'Iran, mais aussi si Israël devait continuer des opérations en Iran, sur le sol iranien qui aille au-delà des cibles jusqu'alors indiquées, nous rentrerions dans des situations dont aujourd'hui, nul ne peut totalement se figurer les conséquences. ».

    Pour résumer, Emmanuel Macron souhaite que la France se trouve au barycentre de la recherche de la paix, surtout en réaffirmant le soutien à Israël mais aussi en rappelant ses désaccords fermes sur la politique israélienne à Gaza : « Nous sommes attachés à la paix et la sécurité pour tous. Eh oui, parfois, nous avons des désaccords avec Israël, et nous les assumons. Ou plutôt, nous avons des désaccords avec le Premier Ministre Netanyahou et son gouvernement, et nous les assumons. Parce que parfois, nous considérons que les décisions qu'il prend sont mauvaises pour la sécurité d'Israël elle-même. Et lorsqu'il mène une opération massive, terrestre, qui fait tant de victimes civiles à Gaza, nous considérons que c'est à la fois une trahison de ce qu'est l'histoire même et l'identité d'Israël et dangereux pour la sécurité d'Israël aujourd'hui et demain. Voilà. Et donc si je devais vous résumer les choses et la position française, elle est assez simple. Nous sommes pour la paix, la sécurité et la stabilité pour tous dans la région. Nous ne voulons pas d'un Proche et Moyen-Orient avec un Iran qui soit doté de l'arme nucléaire. Nous ne voulons pas d'un Proche et Moyen-Orient où Gaza soit durablement occupée, des civils maltraités. Et nous croyons que la solution est la stabilité, c'est un Israël vivant en paix à côté d'un État palestinien, vivant en paix et en sécurité, et ayant reconnu l'existence et les droits d’Israël à se défendre dans la région. C’est ça ce que nous poursuivons. Et je crois que c’est honnêtement une perspective honnête, cohérente, et j’espère, réaliste. ».

    Par cette intervention du Président français, la France se retrouve partie prenante d'une solution de paix au Proche-Orient... comme depuis une cinquantaine d'années.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (13 juin 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Israël vs Iran : Emmanuel Macron l'équilibriste.
    Conférence de presse du Président Emmanuel Macron le 13 juin 2025 à l'Élysée (vidéo et texte intégral).
    Emmanuel Macron à la télévision : Mélanie avant l'Urgence Océan.
    Mélanie, la douceur incarnée.
    Il y a un an, la dissolution !
    Emmanuel Macron : qu'allait-il faire dans cette galère ?
    Interview du Président Emmanuel Macron le mardi 13 mai 2025 sur TF1 (vidéo).
    Emmanuel Macron à l'initiative pour la paix en Ukraine.
    Emmanuel Macron, le référendum et les Français.
    Emmanuel Macron veut-il influencer l'élection du nouveau pape ?
    Budget 2026 : François Bayrou promet-il du sang et des larmes ?
    Discours du Premier Ministre François Bayrou le 15 avril 2025 à Paris (texte intégral et vidéo).
    Emmanuel Macron sur le front du commerce international.
    Discours du Président Emmanuel Macron sur les taxes douanières américaines le 3 avril 2025 à l'Élysée (texte intégral et vidéo).
    Emmanuel Macron : la patrie a besoin de vous !
    Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron le 5 mars 2025 (texte intégral et vidéo).
    Emmanuel Macron à la télévision le dimanche soir !
    Interview du Président Emmanuel Macron le dimanche 9 février 2025 sur France 2 (vidéo).
    Vœux 2025 d'Emmanuel Macron : aux Français de trancher ?
    Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron, le 31 décembre 2024 à Paris (texte intégral et vidéo).
    Emmanuel Macron face à ses choix.
    Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron le 5 décembre 2024 (texte intégral).
    Emmanuel Macron et les joyeux JO.
    Interview du Président Emmanuel Macron le 23 juillet 2024 sur France 2 (vidéo intégrale).
    Lettre aux Français par Emmanuel Macron le 10 juillet 2024 (texte intégral).
    Emmanuel Macron et son n'ayez-pas-peur !
    Interview d'Emmanuel Macron à Génération Do It Yourself le 24 juin 2024 (podcast intégral).
    Lettre aux Français d'Emmanuel Macron le 23 juin 2024 (texte intégral).
    Sidération institutionnelle.
    Emmanuel Macron, haut et fort dans l'intérêt de la France et des Français.
    Interview du Président Emmanuel Macron le 6 juin 2024 sur TF1 et France 2 (vidéo intégrale).
    Discours du Président Emmanuel Macron le 6 juin 2024 en Normandie.
    Les 80 ans du Débarquement en Normandie.
    Le souverainisme européen selon Emmanuel Macron : puissance, prospérité et humanisme.
    Discours du Président Emmanuel Macron sur l'Europe le 25 avril 2024 à la Sorbonne à Paris (texte intégral et vidéo).
    Emmanuel Macron et son plan de relance de l’Europe (le26 septembre 2017 à la Sorbonne).
    Texte intégral du discours d’Emmanuel Macron le 26 septembre 2017 à la Sorbonne.
    Emmanuel Macron très gaullien à la télévision pour expliquer la gravité de la situation en Ukraine.
    Ukraine : Emmanuel Macron est-il un va-t-en-guerre ?
    Soutien à l'Ukraine : la conférence de l'Élysée pour une défense européenne.
    Amitié franco-ukrainienne : fake news et accord de coopération.
    Pour que la France reste la France !
    Conférence de presse du Président Emmanuel Macron le 16 janvier 2024 à 20 heures 15 à l'Élysée (texte intégral et vidéo).
    Gabriel Macron.
    Tribune du Président Emmanuel Macron dans "Le Monde" du 29 décembre 2023.

    Le gouvernement de Gabriel Attal sarkozysé.
    Liste complète des membres du premier gouvernement de Gabriel Attal.
    Cérémonie de passation des pouvoirs à Matignon le 9 janvier 2024 (texte intégral et vidéo).
    Gabriel Attal plongé dans l'enfer de Matignon.
    Élisabeth Borne remerciée !
    Macron 2024 : bientôt le grand remplacement ...à Matignon ?
    Vœux 2024 d'Emmanuel Macron : mes chers compatriotes, l’action n’est pas une option !
     

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250613-macron.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/international/article/israel-vs-iran-emmanuel-macron-l-261515

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/06/13/article-sr-20250613-macron.html


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  • Emmanuel Macron à la télévision : Mélanie avant l'Urgence Océan

    « Question redoutable pour une mort insupportable. Les politiques sont légitimement sommés de trouver des remèdes à une situation révoltante : aucun éducateur ne devrait risquer sa vie en encadrant des adolescents. Et le service public encore une fois, n’a pas su protéger l’un de ses serviteurs. Indignation maximale, parfois surjouée, souvent récupérée, mais pour réclamer quoi ? C’est là que les solutions faciles, que les "y'a qu'à, faut qu'on" viennent soudain buter contre le réel. » (Patrick Cohen, le 11 juin 2025 sur France Inter).



     

     
     


    Le Président de la République Emmanuel Macron était l'invité d'une très longue émission de télévision sur France 2 ce mardi 10 juin 2025. L'émission, intitulée "Urgence Océan" a duré près de deux heures trente et été diffusée en direct dans la soirée depuis la ville de Nice où se tenait la Conférence des Nations Unies sur l'Océan.

    Au contraire de l'émission du 13 mai 2025 sur TF1 où Emmanuel Macron avait maladroitement tenté de revenir dans le jeu de la politique intérieure sans avoir été capable d'annoncer une seule mesure concrète, le chef de l'État n'était pas dans ce cadre, ce mardi, à contre-emploi, au contraire, en plein de son rôle de Président de la République censé prendre de la hauteur et anticiper des enjeux à long terme, dans ce qu'on pourrait appeler une diplomatie du climat.

    Certes, seulement 1,5 million de téléspectateurs étaient à l'appel ce mardi soir, mais pour une émission de cette qualité, c'était en fait déjà beaucoup. La longue durée était nécessaire pour présenter les sujets techniques et scientifiques (Thomas Pesquet, entre autres, était parmi les invités), et je recommande vivement de visionner cette émission (vidéo en fin d'article).

     

     
     


    Toutefois, l'actualité très chaude de la journée, un pays sous le coup de l'émotion du meurtre de Mélanie, assistante d'éducation à Nogent, en Haute-Marne, par un collégien de 14 ans, a provoqué un nécessaire changement dans l'émission en permettant au Président de la République de consacrer son premier quart d'heure à ce drame terrible.

    Au-delà de l'expression de son émotion, Emmanuel Macron est revenu en effet sur les mesures pouvant empêcher de nouveaux drames de ce type : un adolescent utilisant une arme blanche, un couteau, pour tuer une personne. Il a ainsi insisté sur l'importance d'interdire la vente de couteau aux adolescents de moins de 15 ans.


    Dans l'après-midi du 11 juin 2025, le Premier Ministre François Bayrou a confirmé au Sénat cette mesure : « Il n'est pas normal que la détention d'armes par des adolescents se développe ainsi. Nous allons interdire la vente de ces armes aux mineurs et multiplier les contrôles de port d'armes. (…) En particulier, on ne pourra plus livrer par internet ce type d'armes sans la signature d'un adulte. ».
     

     
     


    Mais tout le développement d'Emmanuel Macron sur la vente des couteaux m'a paru un peu vain. En effet, dans le cas du meurtre à Nogent, l'adolescent avait pris un couteau de 34 centimètres dans la cuisine de ses parents. Rien ne pourra empêcher un adolescent de dérober ou d'acquérir une arme blanche. On peut bien sûr lui mettre plus d'obstacles, mais ce n'est pas une mesure vraiment efficace.

    Du reste, je dois donner ma propre expérience. À l'Assemblée Nationale le 10 juin 2025, François Bayrou avait confié cette anecdote qui n'a pas été diffusée avec beaucoup d'écho et pourtant, très significative : « C’est une décomposition de la société dans laquelle nous vivons et c’est le surgissement de pratiques de vie communes. L’un de mes collègues disait à l’instant tout bas que son petit garçon de 10 ans lui a demandé quand il pourrait avoir un couteau à l’école. Cela concerne tous les milieux. ».

    J'ai réfléchi à cette anecdote et je me suis rappelé qu'au même âge, autour de 10 ans, et même 9 ans, lorsque j'étais en colonie de vacances, j'étais dans le même état d'esprit, nous voulions, nous, moi et mes compagnons de vacances, avoir des couteaux, des canifs, c'étaient soit des canifs multifonctions (des couteaux suisses), soit des opinels. En montagne, en randonnée, nous étions contents de disposer d'un tel couteau, pour faire des arcs ou encore pour jouer entre nous (nous nous lancions le couteau dans le sol). Précisons, pour rassurer, qu'il n'était pas question d'utiliser ces couteaux comme des armes, mais plutôt comme des accessoires de jeu que nous savions dangereux et auxquels nous faisions attention. Pendant longtemps, j'ai gardé un canif dans ma poche comme pas mal d'hommes (il me semble), jusqu'aux premières vagues d'attentats et à l'instauration des plans Vigipirate ou de ses premiers équivalents, qui interdisait le passage dans certains lieux avec de tels objets considérés comme des armes blanches.

    Dans son analyse, Emmanuel Macron a voulu donner une explication de cette supposée recrudescence des violences d'adolescents : d'une part, l'explosion des familles, la cellule familiale permettait d'instaurer un certain nombre de valeurs et aussi un dialogue au sein de la famille ; d'autre part, les réseaux sociaux, où l'enfant s'isole dans une bulle totalement irréelle l'incitant parfois de passer à l'acte.

    Il est ressorti de cette analyse que le Président de la République militait très fermement pour l'interdiction des réseaux sociaux avant 15 ans et donc, pour obliger les plate-formes des réseaux sociaux à vérifier que leurs utilisateurs aient plus de 15 ans, comme cela était le cas à 18 ans pour les sites à contenu pornographique.

    Au Sénat le mercredi, François Bayrou a reparlé de cette mesure : « Le Président de la République s'est exprimé plusieurs fois sur l'interdiction des réseaux sociaux aux moins de 15 ans, qui relève de la compétence de l'Union Européenne. Il l'a dit hier : si l'Union Européenne ne nous suit pas, nous prendrons nos responsabilités en ouvrant ce chemin pour la France. ».


    Là encore, si dans le cas général, il peut y avoir un effet, dans le cas du meurtre de Mélanie, le mis en cause était peu présent dans les réseaux sociaux et ces derniers ne sont donc pas en cause dans cette contribution au passage à l'acte.

    Deux choses graves ont notamment motivé le meurtre de Mélanie : l'adolescent n'a eu aucune empathie pour sa victime ni ses proches, il se moque qu'elle soit tuée ; la présence de cinq gendarmes à l'entrée de l'établissement ne l'a pas empêché de passer à l'acte. La peur du gendarme n'a pas fonctionné ou a pesé peu face à l'extrême violence qu'il avait en lui.

    La troisième vague de mesures, confirmée par François Bayrou au Sénat, concerne la santé mentale : « Nous devons traiter la question des auteurs, la main qui tient l'arme. Un travail considérable est à mener pour protéger la santé mentale des jeunes. À l'adolescence, certains basculent en quelques jours (…) : ce garçon était référent harcèlement et n'était pas considéré comme ayant des problèmes. Tous les signes d'un risque de basculement doivent être identifiés ; nous devons former à cet égard les enseignants et les élèves eux-mêmes. ».

    Mais sans doute que le plus important reste la carence éducative des parents que nul ne peut remplacer, et surtout pas l'État. Comme l'a expliqué Emmanuel Macron, l'explosion des familles a fait perdre beaucoup de repères aux enfants, la notion de bien et de mal, aussi la notion de réalité et de virtualité. L'existence de l'autre, le respect qui est dû à l'autre, son intégrité physique.

    C'est ce que proposait aussi le journaliste Patrick Cohen dans sa chronique sur France Inter le 11 juin 2025 : « Prendre enfin à bras le corps le sujet de la santé mentale des jeunes, pour laquelle les alertes se multiplient depuis la fin de la crise du covid. Miser sur la prévention. Arrêter de faire croire qu’il est possible de tout contrôler et de tout empêcher. ».

    D'ailleurs, l'éditorialiste a voulu pondérer les impressions sur la violence des adolescents : « D’abord l’usage des couteaux n’a rien de français, le fléau est européen. Pour la seule ville de Londres, 10 adolescents sont morts poignardés l’an dernier, 18 en 2023. Ensuite, les chiffres globaux de la délinquance des mineurs en France vont à rebours de ceux qui vous parlent d’ensauvagement généralisé ou d’un pays à feu et à sang. En sept ans, cette délinquance a baissé de 25% ! 65 000 mineurs poursuivis par la justice en 2016. 48 000 en 2023. Avec un recul presque similaire des condamnés, ainsi que des mis en cause par la police et la gendarmerie. En revanche, les actes les plus violents ont bondi. Le nombre d’adolescents poursuivis pour meurtre ou tentative d’homicide, a plus que doublé : 108 en 2016. 255 en 2023. Narcotrafic et règlements de comptes. Cela reste à la fois très minoritaire et très médiatisé. ».


    Sur France 5, ce mercredi 11 juin 2025, le docteur Jean-David Zeitoun, spécialiste en épidémiologie clinique et auteur d'un essai sur les causes de la violence, expliquait que la violence n'a cessé de se réduire depuis sept cents ans ! D'un rapport cinquante. On était beaucoup plus violent dans le passé, mais cela reste encore à un niveau aujourd'hui inacceptable.

    Le Président du Sénat Gérard Larcher a ouvert la séance du 11 juin 2025 par une minute de silence, comme ses collègues députés la veille : « Aucune forme de violence n'a sa place au sein de l'école de la République. Face à la multiplication de ces événements tragiques, nous devons agir collectivement pour renforcer la sécurité des élèves et du personnel qui les encadre, afin que de tels drames ne puissent se reproduire. ». Dans ce domaine, la démagogie et la récupération politique ne sont d'aucune utilité.
     

     
     


    Je voulais évoquer la prestation télévisée d'Emmanuel Macron, mais c'est le drame de Nogent qui est revenu, pressant, imposant, dans les esprits. Oui, c'est important, essentiel même, de se préoccuper du combat pour le climat, du combat pour préserver l'océan. Mais à l'évidence, cette émission pédagogique est arrivée au plus mauvais moment. Elle a au moins le mérite d'avoir été faite et de pouvoir être regardée de nouveau pour bien comprendre les phénomènes en jeu.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (11 juin 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Emmanuel Macron à la télévision : Mélanie avant l'Urgence Océan.
    Mélanie, la douceur incarnée.
    Sidération institutionnelle.
    Il y a un an, la dissolution !
    La proposition de loi Duplomb pour les agriculteurs.
    Le rejet de la 7e motion de censure contre le gouvernement Bayrou.
    Interview de François Bayrou le 27 mai 2025 sur BFMTV (vidéo intégrale).

    La longévité du Professeur Bayrou.
    Les Républicains.
    Le PS.
    EELV.
    Emmanuel Macron : qu'allait-il faire dans cette galère ?
    Interview du Président Emmanuel Macron le mardi 13 mai 2025 sur TF1 (vidéo).
    Emmanuel Macron à l'initiative pour la paix en Ukraine.
    Emmanuel Macron, le référendum et les Français.
    Emmanuel Macron veut-il influencer l'élection du nouveau pape ?
    Bétharram : François Bayrou a apporté les preuves de sa bonne foi.
    Bétharram : François Bayrou bouleversé par le témoignage de sa fille.
    Budget 2026 : François Bayrou promet-il du sang et des larmes ?
    Discours du Premier Ministre François Bayrou le 15 avril 2025 à Paris (texte intégral et vidéo).
    Emmanuel Macron sur le front du commerce international.
    François Bayrou et l'heure de vérité de l'Europe.
    Gabriel Attal attaque Marine Le Pen sur l'Ukraine.
    Manuel Valls pour la paix, mais pas au prix de la fin de l'Ukraine !
    Claude Malhuret s'en prend à Néron et à son bouffon !
    Emmanuel Macron : la patrie a besoin de vous !
    François Bayrou : la France avait raison !
    Le Pen : inéligibilité, exécution provisoire, récidive et ordre public.
    Marine Le Pen, est-elle si clean que cela ? (22 février 2017).
    Condamnation Le Pen : la justice vole-t-elle l'élection présidentielle de 2027 ?
    Le fond accablant de l'affaire Le Pen.
    Texte intégral du jugement délibéré du 31 mars 2025 sur l'affaire Le Pen (à télécharger).
    Affaire Le Pen : ne confondons pas victime et coupable !
    Marine Le Pen : voler l'argent des Français !
    Marine Le Pen et la sérénité d'une future condamnée ?
    L'avenir judiciaire de Marine Le Pen dans une décision du Conseil Constitutionnel ?
    L'installation du nouveau Conseil Constitutionnel présidé par Richard Ferrand.
    Richard Ferrand validé de justesse par le Parlement.
    François Bayrou et la motion de censure de congrès du PS.
    François Bayrou surmonte une 6e motion de censure en cinq semaines !
    Bétharram : François Bayrou contre-attaque !
    Bétharram : François Bayrou coupable... de quoi, au fait ?
    Alain Juppé à la rescousse de Richard Ferrand ?
    Mission accomplie : les budgets 2025 (PLF et PLFSS) définitivement adoptés (ouf !).
    4 motions de censure et pas d'enterrement !
    Emmanuel Macron à la télévision le dimanche soir !
    Interview du Président Emmanuel Macron le dimanche 9 février 2025 sur France 2 (vidéo).
    Sam Altman salue la France, centre névralgique de l'intelligence artificielle.
    François Bayrou, le début du commencement.
    La quadrature du cercle de Michel Barnier.







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    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/06/11/article-sr-20250610-macron.html


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  • Mélanie, la douceur incarnée

    « Je sais qu’elle était très très heureuse d’occuper cette profession, d’aider les jeunes, l’ambiance était bon enfant, conviviale, familiale. (…) C’était quelqu’un de très souriante, très gentille, la douceur incarnée. (…) D’une nature bienveillante, elle avait tout pour elle. On est très triste, très touché. » (Une cousine, le 10 juin 2025 à l'AFP).




     

     
     


    Le témoignage d'une cousine sur Mélanie a de quoi être émouvant. Quel contraste entre cette "douceur incarnée" et l'ultraviolence dont elle a été victime. Mélanie, assistante d'éducation (autrement dit, surveillante) de 31 ans, est devenue malgré elle une héroïne victime ; elle a commencé dans ce poste en septembre dernier. Elle se destinait à devenir accompagnatrice d'élèves en situation de handicap (AESH).

    Elle était auparavant une apprentie coiffeuse mais, mère d'un enfant de 4 ans, elle a voulu un peu plus de temps pour son garçon, selon les confidences de son ancienne patronne au "Dauphiné". Un ancien client sur BFMTV : « C’était une femme adorable, vraiment très très gentille, pas un mot au-dessus de l’autre, qui aimait faire profiter de son métier aussi. ». Elle était aussi conseillère municipale de sa petite commune (une centaine d'habitants), Sarcey, à 10 kilomètres de Nogent, en Haute-Marne.


    En allant au boulot ce mardi 10 juin 2025, elle ne pensait pas y perdre sa vie. Vers 8 heures 15, un collégien de 14 ans, apparemment sans histoire, l'a poignardée devant le collège Françoise-Dolto à Nogent. Un contrôle de sacs des élèves était effectué par la gendarmerie nationale à l'entrée du collège. L'adolescent a poursuivi Mélanie avec un couteau et l'a blessée. Hélas, à mort. Il a blessé aussi un gendarme qui l'a arrêté. En urgence absolue, la victime aurait dû être héliportée jusqu'à l'hôpital de Dijon, mais son état s'est dégradé et elle a succombé à ses blessures. Une victime, une nouvelle victime de la violence d'adolescent. Les 324 élèves du collège ont été confinés dans le gymnase puis ont pu quitter l'établissement ramenés par leurs parents. Le procureur de Chaumont a annoncé qu'un dispositif d'accompagnement des élèves et des enseignants a été mis en place.

    La classe politique s'est rapidement emparé de cette tragédie. Parfois pour une sinistre récupération politique, comme Marine Le Pen dans l'hémicycle : « Un nouveau drame vient donc de toucher l’école et, par conséquent, l’ensemble de notre nation. Un drame, pas un fait divers sur lequel on "brainwasherait". Un drame, qui appelle une réponse politique. C’est parce qu’il n’y a jamais eu de réponse politique que notre société a vu la vie être progressivement désacralisée ; c’est parce qu’il n’y a jamais eu de réponse politique que l’ultraviolence s’est banalisée, en particulier chez les mineurs ; c’est parce qu’il n’y a jamais eu de réponse politique que des enfants deviennent orphelins et que des parents sont obligés d’enterrer des enfants victimes de la barbarie. ».

    Le verbe "brainwasher" (faire un lavage de cerveau) avait été utilisé maladroitement par le Président Emmanuel Macron le 8 juin 2025 lors d'une interview dans la presse régionale. Il regrettait alors qu'on ne parlât que de fait-divers sans s'appesantir sur des sujets de fond comme le combat pour le climat (il allait participer au Sommet pour l'océan à Nice) :
    « Certains préfèrent brainwasher sur l’invasion du pays et les derniers faits divers. ». Il s'en prenait ainsi à la suppression des ZFE et à la suspension provisoire de MaPrimeRénov' (dispositif d'aide à la rénovation énergétique en vigueur depuis cinq ans).

     

     
     


    Emmanuel Macron s'est expliqué plus longuement dans une interview ce mardi 10 juin 2025 sur France 2 : « Il y a des moments d’indignation sur l’écologie et ensuite ça sort complètement du débat public. ». S'en prenant à la « tyrannie du fait-divers », il a précisé sa pensée : « Il y a des gens qui regardent la télévision ou les réseaux sociaux, ils sont dans une société de l’information qui passe d’un fait divers à l’autre. Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas avoir de la considération pour ces personnes qui vivent [ces drames], accompagner les familles, qu’il ne faut pas réagir de manière intraitable. ».

    Il a dénoncé la surexploitation des faits-divers par des partis démagogiques : « Ils finissent par rendre les gens fous parce que les gens ont le sentiment de passer d’un fait-divers à l’autre, en passant des punaises de lit le matin à un drame qui s’est passé la journée. (…) On ne peut pas avoir un débat politique qui devient du suivisme de l’actualité. ».

    Dans la matinée, Emmanuel Macron avait réagi sur Twitter comme le reste de la classe politique au meurtre de Mélanie : « Alors qu’elle veillait sur nos enfants à Nogent, une assistante d’éducation a perdu la vie, victime d’un déferlement de violence insensé. (…) Tous, nous sommes aux côtés de sa famille, de ses proches, de ses collègues et de l’ensemble de la communauté éducative. (…) La Nation est en deuil et le gouvernement mobilisé pour faire reculer le crime. ».

    Au-delà de Twitter, c'est surtout l'Assemblée Nationale qui a été le lieu des réactions politiques. L'après-midi se déroulait en effet la séance hebdomadaire des questions au gouvernement. La Présidente de l'Assemblée Yaël Braun-Pivet a proposé une minute de silence à la mémoire de Mélanie et aussi des deux jeunes pompiers de 22 et 23 ans, Tanguy et Maxime, qui ont perdu la vie le 9 juin 2025 dans la soirée à Laon, piégés par l'effondrement d'un appartement en flammes dont ils tentaient de secourir les habitants : « Face à ces drames effroyables, j’adresse les sincères condoléances de la représentation nationale aux familles et aux proches des victimes. Je veux, en notre nom à tous, dire la reconnaissance de la nation envers nos soldats du feu, qui risquent leur vie pour nous protéger. Je veux aussi dire notre soutien à l’ensemble de la communauté éducative. La violence n’a pas et n’aura jamais sa place dans nos établissements scolaires. En la mémoire de nos trois compatriotes décédés, je vous invite à observer une minute de silence. ».

    Le Premier Ministre François Bayrou est aussi intervenu en début de séance pour exprimer son émotion et présenter quelques mesures :
    « Immense gratitude et mobilisation : c’est ce que nous devons aussi à cette jeune assistante d’éducation (…). D’habitude, ces faits concernent des milieux sociaux profondément fragilisés ; or ce n’est pas le cas ici. Mais une chose est certaine dans ce second drame : c’est que les armes blanches, les couteaux, sont en train de devenir, parmi les jeunes, voire les très jeunes enfants (…), une réalité de tous les jours. (…) Nous ne pouvons pas demeurer indifférents et les bras ballants face à ce qui est en train de se passer, devant cette vague qui progresse. Nous avons des décisions à prendre, certaines de nature législative, d’autres d’ordre réglementaire. Nous avons commencé à les prendre, puisque je rappelle que le drame de ce matin s’est déroulé alors que les gendarmes procédaient à un contrôle des sacs. Ces contrôles, nous les avons multipliés depuis trois mois : plus de 6 000 ont été effectués, qui ont permis de saisir près de 200 couteaux et 200 autres objets dangereux. Nous ne pouvons pas nous contenter de déplorer ce qui s’est passé ; nous sommes obligés, en conscience, de prendre de nouvelles décisions pour que nos enfants et ceux qui travaillent avec eux puissent être, au minimum, en sûreté. C’est une œuvre très difficile, parce que, comme tout le monde le voit bien, il ne s’agit pas d’un fait isolé, mais d’une dérive de la société et des enfants dont nous avons la charge, et que nous n’arrivons pas à mettre à l’abri des drames qu’ils fomentent eux-mêmes. ».

    Quelques minutes plus tard, en réponse à Marine Le Pen :
    « L’ampleur de la vague, nous la connaissons tous, quels que soient les bancs sur lesquels nous siégeons. C’est une décomposition de la société dans laquelle nous vivons et c’est le surgissement de pratiques de vie communes. L’un de mes collègues disait à l’instant tout bas que son petit garçon de 10 ans lui a demandé quand il pourrait avoir un couteau à l’école. Cela concerne tous les milieux et d’abord, naturellement, les plus fragiles. On a deux choses essentielles à faire. La première, c’est de construire des règles et une réponse pénale susceptibles de dissuader ces jeunes, souvent des garçons, de saisir un couteau et de le mettre dans leur sac. Je l’ai rappelé, nous avons publié le 27 mars une circulaire pour que des contrôles de police et de gendarmerie aient lieu à l’entrée des établissements scolaires. Depuis, il y a eu 6 200 contrôles, au cours desquels près de 200 couteaux ont été saisis et 567 conseils de discipline ont été réunis pour lutter contre ce fléau. Nous allons travailler à l’application effective de l’interdiction de port de ce type d’armes. Il va falloir durcir la réglementation, parce qu’un certain nombre de ces couteaux ne sont pas considérés comme des armes, même s’ils sont construits, pour une part d’entre eux, pour figurer des armes très violentes. La deuxième chose que nous devons faire, c’est travailler à la question de la santé mentale des plus jeunes. À la première alerte, il faut qu’il puisse y avoir un examen, un diagnostic et une proposition de traitement, ou en tout cas une reprise de contrôle de ces jeunes. Ces deux missions, nous ne pouvons pas les éluder. Le 29 avril, j’ai demandé à Mme Naïma Moutchou et au préfet François Ravier de coprésider un groupe de travail, dont les conclusions m’ont été rendues le dernier jour du mois de mai. J’ai bien l’intention que les cinquante propositions de ce groupe de travail soient conduites à leur terme et je vais, si elle l’accepte, confier à votre collègue Naïma Moutchou la mission de vérifier leur application effective.Ce n’est pas une baguette magique ; nous n’avons pas la clef de toutes les questions qui se posent, car ces questions, pour l’essentiel, sont dans la société française, dans sa désorganisation, dans ses dérives. En revanche, ce que doit faire la loi, c’est assurer que les principes sont respectés autant que l’on puisse identifier des manquements à ces principes. J’ajoute que, même si les premières expériences n’ont pas été évidentes, nous devons travailler à l’installation de portiques à l’entrée des établissements scolaires ; ceux implantés dans plusieurs régions n’ont pas été maintenus partout, mais je suis persuadé que nous ne pouvons en rester à l’observation des accidents qui se multiplient. Le gouvernement a lui aussi l’intention d’aller dans le sens de cette expérimentation. ».

     

     
     


    La députée Naïma Moutchou (Horizons) a, elle aussi, posé une question sur le meurtre de Mélanie, en rappelant une longue et inquiétante série de meurtres : « La société reste sidérée de ce qui est en train de se passer. Les Français sont sous le choc, en colère : presque chaque jour, l’actualité leur jette à la figure un nouveau drame, de nouvelles violences. Chaque jour ou presque, des adolescents tuent à l’arme blanche, des enfants et leurs surveillants sont poignardés jusque dans l’enceinte des établissements scolaires. Ce matin, Mélanie, assistante d’éducation, a perdu la vie ; hier, c’étaient Elias, Laurène, Thomas, Sékou, Inès, Enzo, Matisse, tant d’autres encore, tous tués à l’arme blanche par des mineurs. Cette liste ne recense pas des faits divers, mais les signes d’un effondrement. Nous voyons l’autorité reculer partout, la violence gagner partout ; nous voyons sombrer une partie de la jeunesse qui bascule dans la brutalité la plus décomplexée, des adolescents qui sortent armés pour commettre le pire. C’est tout sauf une crise passagère, c’est un fléau, l’ennemi public numéro un : voilà la conclusion de la mission que vous m’aviez confiée à ce sujet, ainsi qu’au préfet François Ravier. Notre rapport, que je vous ai remis le 28 mai, ne constitue pas un simple document ; ce doit être un électrochoc, une prise de conscience, et surtout l’occasion d’agir. ».

    Parmi les pistes d'action : « Il est temps, comme nous le préconisons, d’interdire strictement la vente aux mineurs et la détention par ces derniers de tout type d’arme blanche, d’imposer le défèrement systématique des auteurs de tels faits, de prévoir des sanctions pénales bien plus rapides et des peines minimales, de sécuriser nos établissements scolaires, d’améliorer la chaîne de signalement. Il est temps d’investir dans la prévention, dans la santé mentale des jeunes, dans la médecine scolaire, de s’attaquer aux conséquences délétères des réseaux sociaux en interdisant le téléphone portable à l’école. Les mesures sont prêtes, applicables ; nous ne pouvons plus attendre, nous contenter d’hommages, de minutes de silence, encore et encore. ». François Bayrou a exprimé sa volonté de mettre immédiatement en œuvre ces mesures.
     

     
     


    Arrivée sur les lieux du drame, à Nogent, la Ministre d'État, Ministre de l'Éducation nationale Élisabeth Borne a déclaré : « Ses professeurs sont totalement sidérés de ce qui a pu se produire. Il avait fait l'objet en début année de deux exclusions temporaires pour des perturbations de la classe. Mais depuis le mois de novembre, il n'y avait pas du tout de difficultés avec cet élève. (…) On doit agir aussi sur la santé mentale, j'ai demandé aux assises de la santé scolaire qu'il y ait dans chaque établissement un protocole de repérage et de prise en charge pour les élèves qui peuvent avoir des problèmes psychologiques ou psychiatriques. (…) Avec le Ministre de la Santé, on s'est assurés que les jeunes signalés par l'Éducation nationale bénéficient d'une priorité pour la prise en charge dans les centres médicopsychologiques. (…) On doit aussi agir pour prévenir l'usage excessif des écrans et des réseaux sociaux, parce qu'on sait que c'est bien souvent ce qui peut conduire à des comportements violents, un peu déréalisés, de la part de nos jeunes. (…) Je suis très mobilisée pour prévenir de tels drames. (…) On doit travailler avec les familles, pour prévenir de tels drames. (…) On va continuer à chercher toutes les mesures qui peuvent nous permettre d’éviter de tels drames. ».

    Précisant les affirmations du Premier Ministre, Élisabeth Borne a déclaré qu'entre le 26 mars et le 23 mai 2025, il y a eu 6 000 fouilles inopinées menées dans les collèges et les lycées, ce qui a provoqué 567 conseils de discipline pour détention de couteau, la saisie de 186 couteaux et 32 gardes-à-vue.

     
     


    Quant au Ministre d'État, Ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, qui était en déplacement à Laon en hommage aux deux jeunes pompiers décédés, il a fait cette déclaration mesurée : « La réponse ne peut pas être seulement sécuritaire, car il y avait des gendarmes. ». Il a ajouté : « Ou il y a une hypothèse de santé mentale, et il faudra voir s’il y avait eu un signalement, ou alors c’est autre chose, et on tombe dans ce que j’ai appelé la barbarie. ». Il ne croyait pas en l'intérêt des portiques devant les écoles.

    Invité de BFMTV en fin d'après-midi ce mardi, l'ancien Premier Ministre Gabriel Attal a dit ne pas croire non plus aux détecteurs de métaux à l'entrée des établissements qui pourraient accroître les attroupements en période de menace terroriste :
    « On peut regarder le couteau, mais je pense qu'il faut surtout regarder le gamin de 14 ans. (…) Il y a une violence de plus en plus forte, débridée, de plus en plus jeune. ».

    François Bayrou, interrogé ensuite dans le journal de 20 heures sur TF1, a rappelé ses propositions :
    « L'élargissement de la liste des armes blanches, des couteaux, c'est tout de suite que ça entre en vigueur et l'imposition que ce soit une vérification d'âge de celui qui reçoit le colis c'est tout de suite aussi. ».


    Ce fut l'occasion pour certains de se moquer du Premier Ministre en énumérant de nombreux instruments qui pourraient être dangereux (jusqu'à la pince à épiler et à l'épluche-légume). Et ils ont raison : les armes blanches pourront toujours passer d'une manière ou d'une autre dans les établissements scolaires. Les portiques n'ont pas été d'une grande efficacité lors de premières expérimentations.

    L'élément principal est sans doute la détection psychologique, l'évaluation de la santé mental des élèves, comme l'a affirmé le porte-parole de la fédération de parents d'élèves PEEP Laurent Zameczkowski : « Le véritable problème est la santé mentale de nos jeunes. », et c'est évidemment très difficile à appréhender. Ce qui est notable, c'est la position de Bruno Retailleau qui convient que le problème n'est pas seulement sécuritaire. La solution se trouve certainement dans l'éducation qu'apportent les parents à leurs enfants, la transmission des valeurs et en particulier du caractère sacré de la vie.

    Hommage à Mélanie, tombée sur le champ de bataille de l'éducation.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (10 juin 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Mélanie, la douceur incarnée.
    L'Affaire Joël Le Scouarnec.
    L'Affaire Bétharram.
    Agathe Hilairet.
    Pourquoi Aboubakar Cissé a-t-il été assassiné ?
    Le mystère Émile sur le point d'être percé ?
    La profanation du cimetière juif de Carpentras.
    Crash de l'A320 de Germanwings.
    L'accident de Villa Castelli.
    Morts mystérieuses à Santa Fe.
    Repose en paix Louise, on ne t'oubliera pas !
    Gisèle Pélicot, femme de l'année 2024 ?
    5 ans de prison dont 2 ferme pour Pierre Palmade.
    40 ans de confusions dans l'Affaire Grégory.
    Philippine : émotion nationale, récupérations politiques, dysfonctionnements de l'État ?
    Viols de Mazan : quelques réflexions sur Pélicot et compagnie...
    Violence scolaire : quand une enseignante s'y met...
    Création du délit d'homicide routier : seulement cosmétique ?
    La France criminelle ?
    La nuit bleue de Lina.
    La nuit de Célya.
    La nuit d'Émile Soleil.
    Affaire Grégory : la vérité sans la boue ?
    Alexandra Sonac et sa fille adolescente.
    Harcèlement scolaire et refus d'obtempérer.
    Alisha, victime d’un engrenage infernal.
    À propos de la tragique disparition de Karine Esquivillon...
    Meurtre de Lola.
    Nos enseignants sont des héros.
    Patricia Bouchon.
    Sémantique de l'horreur.
    La sécurité des personnes face aux dangers.



     

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250610-melanie.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/societe/article/melanie-la-douceur-incarnee-261457

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/06/10/article-sr-20250610-melanie.html




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  • Il y a un an, la dissolution !

    « [Le Président de la République] ne peut être procédé à une nouvelle dissolution dans l'année qui suit ces élections. » (Article 12 de la Constitution).




     

     
     


    La dissolution prononcée par le Président de la République Emmanuel Macron le 9 juin 2024, une heure après la fermeture des bureaux de vote pour les élections européennes, a désormais un an. C'est encore insuffisant pour qu'il retrouve son droit de dissolution. Il faudra attendre le 7 juillet 2025. Ne tournons pas autour du pot : c'était une erreur politique, une énorme erreur politique.

    Une erreur comme il en existe peu dans l'histoire des Présidents de la Cinquième République. Une erreur comme le 21 avril 1997.

     

     
     


    Certes, recourir au peuple ne devrait jamais être une erreur, mais pas comme ça, pas à chaud, sous le coup de l'émotion, pas juste après un scrutin déjà très polarisé, pas au début des vacances estivales, pas avec cette impression de se faire "violer" l'urne (car il y a eu cette impression pour de nombreux électeurs français).

    Ce n'est pas tant l'échec du camp présidentiel qui est une erreur (c'est un échec électoral, mais ces élections pouvaient avoir leur justification) que le fait d'avoir sidéré une majorité des Français, dans une sorte d'électrochoc qui a, finalement, été salutaire à bien des égards.

    Que croyait le Président de la Président ? Gagner ces élections anticipées par l'effet de surprise ? Quelques jours seulement après un scrutin très clair sur le plan politique ? Croire au Père Noël serait à peu près de la même veine. Ou alors essayer une cohabitation douteuse avec le Rassemblement national pour faire comme en 1988 ? Mais Emmanuel Macron ne peut plus se représenter.

    Pourtant, il ne faut pas négliger que les résultats n'ont pas été ce qu'on croyait. Les sondages donnaient gagnant le RN et ce n'est pas le RN qui a gagné. En ce sens, lorsqu'il disait qu'il fallait espérer, ne pas croire à la fatalité politique, ne pas succomber aux sondages, il avait raison.

     

     
     


    La situation politique a-t-elle été pour autant retournée ? Pas du tout. Elle est politiquement pire qu'avant la dissolution.

    Avant la dissolution, le bloc présidentiel (Renaissance, MoDem, Horizons) n'avait certes pas la majorité absolue, mais avec LR, cette majorité absolue existait. En d'autres termes, aucune motion de censure ne pouvait être adoptée sans l'aval de LR. Après la dissolution, le socle commun (bloc présidentiel et LR) n'a plus de majorité absolue et ne peut plus empêcher l'adoption d'une motion de censure résultant d'une collusion entre l'extrême droite, l'extrême gauche... et le parti socialiste. Cela s'est passé avec la censure contre le gouvernement de Michel Barnier le 4 décembre 2024.
     

     
     


    Mais il n'y a pas que le camp présidentiel qui a perdu avec la dissolution. Le RN a aussi beaucoup perdu en crédibilité et il a semblé avoir perdu une occasion unique d'arriver au pouvoir. Certes, les sondages le donnent encore gagnant à de prochaines éventuelles élections législatives, mais comme en été 2024 : cela signifie qu'une nouvelle dissolution n'aurait aucune utilité car les rapports de force resteront sensiblement les mêmes.

    De même, la gauche, la dissolution n'a pas réussi à lui redonner une dynamique de pouvoir. D'une part, encore une fois, c'est faux de dire que la nouvelle farce populaire ait gagné les élections de 2024, car le socle commun a plus de voix que l'ensemble de la gauche, en sachant d'ailleurs que cette gauche-là n'est d'accord sur rien. D'autre part, elle a mis en évidence l'extrême nocivité de la gauche populiste et islamo-gauchiste et l'extrême faiblesse de la gauche de gouvernement que le congrès du PS vient même de confirmer récemment.
     

     
     


    Toutefois, une formation politique tire son épingle du jeu, Les Républicains. En revenant au pouvoir, LR a gagné en crédibilité alors qu'il devenait urgent pour ce parti de faire preuve de responsabilité après douze années d'opposition (la plus longue période d'opposition pour ce courant politique était auparavant de seulement cinq années !). De plus, le dernier congrès de LR en mai 2025 a permis de lever l'hypothèque de Laurent Wauquiez dont l'impopularité aurait fait couler LR avec lui, comme en 2019. Des ministres LR, un congrès réussi (réussissant à mobiliser de nombreux adhérents, au contraire du PS), la clef de voûte, c'est Bruno Retailleau dont l'avenir dépendra surtout de son action, et de la perception de son action, au Ministère de l'Intérieur.

    Pour autant, est-ce un échec politique complet pour Emmanuel Macron ? Eh non ! Sur le plan politique, la configuration extrêmement serrée de l'Assemblée lui a permis d'obtenir ce qu'il n'avait pas obtenu entre juin 2022 et juillet 2024, à savoir, d'une part, la participation de LR au gouvernement, et d'autre part, la bienveillante neutralité du PS. Il ne doit cette dernière, du reste, que par la grande habileté du Premier Ministre François Bayrou (qui a encore échappé à une motion de censure) et nul autre ne saurait s'en prévaloir.

     

     
     


    Bien sûr, l'enjeu des prochains mois sera le budget de 2026 et surtout, la réduction du déficit abyssal. Pour François Bayrou, cela paraît mission impossible, mais il faut noter que le mode de gouvernance est assez nouveau : il n'a déposé aucun projet de loi en dehors des lois de finances. Ainsi, il laisse les parlementaires légiférer, soutenant à l'occasion une proposition ou une autre. François Bayrou essaie de prouver que son amour du régime parlementaire n'est pas vain et nul doute que les socialistes sont très sensibles à ce sujet.

    Cette guerre de position peut-elle durer à l'Assemblée ? Peut-être. Dans un mois, Emmanuel Macron retrouve son pouvoir de dissolution. C'est plus facile d'éviter une censure avec un tel pouvoir, car la censure impliquerait pour les députés leur propre censure.

     

     
     


    Le RN serait prêt à une nouvelle dissolution, enfin, c'est ce qu'il prétend, car en 2024, au contraire, il n'était pas prêt du tout, et si dissolution signifie anticipation de l'élection présidentielle, alors il n'est pas du tout prêt à cause de l'inéligibilité actuelle de Marine Le Pen qui a tout intérêt à préserver le calendrier originel de l'élection présidentielle.

    La gauche n'a pas non plus intérêt à une nouvelle dissolution car elle ne sait pas du tout si elle retrouverait ses sièges actuels. Les outrances de Jean-Luc Mélenchon et la mollesse d'Olivier Faure pourraient sérieusement encourager dans leur électorat l'abstention voire la reconnaissance des réussites d'Emmanuel Macron sur de nombreux sujets (en particulier, économiques ; je répète, la France toujours première puissance européenne pour l'attractivité des investisseurs).

    Paradoxalement, si la situation est beaucoup plus fragile qu'avant la dissolution, elle peut aussi être plus performante en ce sens que le gouvernement aurait plus les moyens de réformer le pays par cet équilibre précaire. Ce sera alors le grand exploit de François Bayrou.



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (09 juin 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Sidération institutionnelle.
    Il y a un an, la dissolution !
    La proposition de loi Duplomb pour les agriculteurs.
    Le rejet de la 7e motion de censure contre le gouvernement Bayrou.
    Interview de François Bayrou le 27 mai 2025 sur BFMTV (vidéo intégrale).

    La longévité du Professeur Bayrou.
    Les Républicains.
    Le PS.
    EELV.
    Emmanuel Macron : qu'allait-il faire dans cette galère ?
    Interview du Président Emmanuel Macron le mardi 13 mai 2025 sur TF1 (vidéo).
    Emmanuel Macron à l'initiative pour la paix en Ukraine.
    Emmanuel Macron, le référendum et les Français.
    Emmanuel Macron veut-il influencer l'élection du nouveau pape ?
    Bétharram : François Bayrou a apporté les preuves de sa bonne foi.
    Bétharram : François Bayrou bouleversé par le témoignage de sa fille.
    Budget 2026 : François Bayrou promet-il du sang et des larmes ?
    Discours du Premier Ministre François Bayrou le 15 avril 2025 à Paris (texte intégral et vidéo).
    Emmanuel Macron sur le front du commerce international.
    François Bayrou et l'heure de vérité de l'Europe.
    Gabriel Attal attaque Marine Le Pen sur l'Ukraine.
    Manuel Valls pour la paix, mais pas au prix de la fin de l'Ukraine !
    Claude Malhuret s'en prend à Néron et à son bouffon !
    Emmanuel Macron : la patrie a besoin de vous !
    François Bayrou : la France avait raison !
    Le Pen : inéligibilité, exécution provisoire, récidive et ordre public.
    Marine Le Pen, est-elle si clean que cela ? (22 février 2017).
    Condamnation Le Pen : la justice vole-t-elle l'élection présidentielle de 2027 ?
    Le fond accablant de l'affaire Le Pen.
    Texte intégral du jugement délibéré du 31 mars 2025 sur l'affaire Le Pen (à télécharger).
    Affaire Le Pen : ne confondons pas victime et coupable !
    Marine Le Pen : voler l'argent des Français !
    Marine Le Pen et la sérénité d'une future condamnée ?
    L'avenir judiciaire de Marine Le Pen dans une décision du Conseil Constitutionnel ?
    L'installation du nouveau Conseil Constitutionnel présidé par Richard Ferrand.
    Richard Ferrand validé de justesse par le Parlement.
    François Bayrou et la motion de censure de congrès du PS.
    François Bayrou surmonte une 6e motion de censure en cinq semaines !
    Bétharram : François Bayrou contre-attaque !
    Bétharram : François Bayrou coupable... de quoi, au fait ?
    Alain Juppé à la rescousse de Richard Ferrand ?
    Mission accomplie : les budgets 2025 (PLF et PLFSS) définitivement adoptés (ouf !).
    4 motions de censure et pas d'enterrement !
    Emmanuel Macron à la télévision le dimanche soir !
    Interview du Président Emmanuel Macron le dimanche 9 février 2025 sur France 2 (vidéo).
    Sam Altman salue la France, centre névralgique de l'intelligence artificielle.
    François Bayrou, le début du commencement.
    La quadrature du cercle de Michel Barnier.


     

     
     





    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250609-dissolution.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/il-y-a-un-an-la-dissolution-261386

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/06/09/article-sr-20250609-dissolution.html




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  • Congrès du PS : "l'homme le plus riche du cimetière"

    « La réponse est donc non. Le PS ne fera pas renaître la social-démocratie. À la place, à sa place, Olivier Faure pourra-t-il insuffler une dynamique, d’impulser un projet autonome ? Redonner ses chances à la gauche ? Il peut aussi se contenter d’être l’homme le plus riche du cimetière… » (Patrick Cohen, le 6 juin 2025 sur France Inter).



     

     
     


    Le chroniqueur de France Inter a trouvé la bonne formule : Patrick Cohen parlait en effet ce vendredi 6 juin 2025 dans la matinale de « l'homme le plus riche du cimetière ». En d'autres termes, Olivier Faure, premier secrétaire du PS sortant, a été reconduit à ce poste lors du vote des adhérents du PS le jeudi 5 juin 2025.

    Selon les résultats "officiels", je mets les guillemets car ne sont pas indiqués, à ma connaissance, les nombres de voix exacts, Olivier Faure a gagné le duel avec 50,9% face à son rival Nicolas Mayer-Rossignol, le maire de Rouen, qui n'a eu que 49,1%. Un score très serré mais pourtant, sans surprise sur son issue dans la mesure où Olivier Faure était le grand favori depuis l'annonce du soutien qu'il a reçu de Boris Vallaud, le troisième larron qui n'a pas été qualifié pour la finale.
     

     
     


    Le vrai résultat de cette élection bidonnée, c'est le nombre de votants au premier tour (je n'ai pas celui du second tour), qui est de l'ordre de 24 000 personnes, soit très loin des près de 100 000 pour LR. S'il fallait un mot pour qualifier ce parti, c'est le mot "moribond" qui viendrait immédiatement à l'esprit. Ce parti est moribond et la poursuite dans la continuité avec Olivier Faure, qui a été le fauteur de la catastrophe industrielle de la dernière élection présidentielle (1,7% !), et aussi de la désertification des fédérations (40 fédérations ont moins de 100 adhérents !), en gros, une perte de 50 000 adhérents depuis 2018, ne peut que lui être fatal. Un article du journal "Le Monde", pourtant assez complaisant avec le PS, propose une description apocalyptique de ce parti.
     

     
     


    Ce qui est donc clair, c'est que, d'une part, il reste très peu d'adhérents du PS actifs (c'est-à-dire qui votent), et d'autre part, ce parti moribond est complètement divisé en deux. Si le camp du maire de Rouen a finalement reconnu sa défaite, au contraire d'il y a deux ans en janvier 2023, il avait toutefois publié un communiqué très polémique dans la nuit du 5 au 6 juin 2025 : « Les résultats provisoires du 2e tour du congrès du PS donnent 50/50. Le parti est divisé, la direction sortante est désavouée, nous appelons à la responsabilité et à l'unité. (…) L'écart à ce stade est plus faible encore qu'au précédent congrès (Marseille), où le résultat n'avait finalement pas été validé. (…) On nous disait loin derrière, distancé. Finalement, alors que Boris Vallaud avait indiqué son choix pour Olivier Faure, nous remontons et faisons jeu égal. C'est un vrai désaveu pour la direction sortante, incapable d'avoir une majorité au premier tour le 27 mai dernier, et qui n'obtient pas de majorité claire au second tour. ».

     

     
     


    Si les mayer-rossignolistes (j'ose le terme) ont raison de parler d'un désaveu de la direction sortante par la faible mobilisation des adhérents, ils oublient aussi qu'eux-mêmes participent à ce désastre politique en renforçant les divisions et petitesses politiciennes qui restent illisibles au commun des électeurs. Du reste, en réaction à la publication du communiqué de ce camp sur Twitter, les internautes étaient sans complaisance et mettaient tout le monde dans le même paquet : « Un parti qui fait 2% aux présidentielles et scindé en 2, 2026 est déjà perdu grâce à des "stratèges" sans idées dans votre genre Olivier Faure, Nicolas Mayer-Rossignol, Boris Vallaud ».
     

     
     


    Du côté des fauristes (j'ose encore), l'audace était de mise. Je sais que la politique, c'est l'art de raconter des choses qui n'existent pas, mais là, ils y vont assez faure, comme j'oserais encore l'écrire !
     

     
     


    Pour faire voter Olivier Faure, les caciques et apparatchiks ont apporté quelques arguments sur un plateau (qui n'est plus d'argent). D'une part, en votant Olivier Faure, on voterait : « pour une gauche unie de Ruffin à Glucksmann », « pour vaincre la haine » (le beau programme politique concret et solide mis en priorité !), « pour poursuivre ensemble le redressement du PS » (encore fallait-il qu'il commençât !), « pour taxer les riches » (ça marche toujours à gauche, un argument qui a mené à la faillite des finances publiques), etc. (je n'insiste pas car le flot est illisible et insipide).
     

     
     


    Mais à côté de cette affiche passe-partout, il y a un argument massue donné par les fauristes : « De plus en plus de Françaises et de Français misent sur lui pour l'avenir ! ». Mais qui sont donc ces mystérieux Françaises et Français ? On pourrait croire qu'Olivier Faure égalerait Marine Le Pen et Édouard Philippe dans les sondages et que la présidentielle de 2027 va se jouer dans un mouchoir de poche. Pas du tout, ils nous montrent le Baromètre du Figaro de juin 2025 sur la cote d'avenir des personnalités politiques et confortent l'idée première par le fait « qu'Olivier Faure signe la plus forte progression à gauche ». En lisant la liste, on s'aperçoit que la cote d'Olivier Faure est derrière Raphaël Glucksmann, Robert Ménard, François Ruffin, Éric Ciotti, Fabien Roussel et est équivalente à celle de Laurent Wauquiez ou de Nicolas Dupont-Aignan. Pas de quoi en tirer gloriole !
     

     
     


    Cela dénote au moins l'idée très nette qu'Olivier Faure a l'intention de se présenter à l'élection présidentielle (le ridicule ne tue pas, sinon, ça se saurait), ce qui entre en contradiction avec sa volonté de rassembler (dans un très petit éventail) de François Ruffin à Raphaël Glucksmann, alors que tous les deux sont aussi de potentiels candidats à l'élection présidentielle.
     

     
     


    Politiquement et stratégiquement, la victoire de la ligne Olivier Faure est clairement celle de l'alliance avec Jean-Luc Mélenchon. D'ailleurs, dès ce vendredi matin, la numéro deux du PS et maire de Nantes, Johanna Rolland expliquait doctement sur Public Sénat que le PS ferait des alliances ponctuelles avec les insoumis.

    C'est donc clair que la direction sortante et reconduite n'a rien compris à la signification d'une alliance avec le parti mélenchoniste qui se veut consciemment islamo-gauchiste, mettant en péril les valeurs de la République et la cohésion d'une société déjà très fragilisée par les divisions idéologiques. Cela montre aussi que cette direction n'a pas compris non plus pourquoi elle a été autant désavouée depuis si longtemps (et qu'elle n'a bénéficié que du vide de leadership).

    Les résultats serrés du choix de la tête du PS sont tels qu'ils sont insignifiants. Patrick Cohen l'a noté avec raison le 6 juin 2025 : « Impossible de parler d’une victoire nette, d’un vote qui indique un cap, une perspective, une clarification dans la remise en mouvement de la gauche non-mélenchoniste. Ou même une aspiration au changement plutôt qu’une volonté de continuité. Si le métier du commentateur est bien de donner du sens aux événements, encore faut-il que les événements aient un minimum de talent… On notera aussi que c’est la troisième fois que le parti socialiste se joue à 50-50. La dernière fois, c'était à Marseille il y a deux ans, avec les deux mêmes duellistes, le même vainqueur Olivier Faure, quasiment le même score, mais davantage de contestation. ».
     

     
     


    Ce n'est évidemment pas l'analyse d'Olivier Faure lui-même quand il a appris sa réélection à 3 heures 35 du matin (nuit du 5 au 6 juin 2025). Très content, voire triomphaliste, il a fait croire qu'il était un nouveau François Mitterrand qui, lui, avait bâti réellement un mouvement entre 1971 et 1981 : « Dès demain, nous poursuivrons le travail commencé en 2018 pour amplifier la dynamique, avec un parti socialiste ancré au cœur de la gauche. Il nous reste tant à construire ensemble pour ouvrir le chemin vers de nouvelles victoires. ». L'expression "vers de nouvelles victoires" fleure bon Ségolène Royal qui, dans son enthousiasme de son échec électoral le 6 mai 2007, avait terminé son discours en criant « En avant vers de nouvelles victoires ! ».

    Des internautes médisants ont cependant proposé un autre discours pour Olivier Faure, plus proche de la réalité...

     

     
     


    Certains ont même présenté un nouvel emblème pour le PS, au lieu de sa traditionnelle rose, une brosse des toilettes. Un autre a lâché désabusé : « Olivier Faure fanfaronne car il a été réélu à la tête du PS. Tout ce cinéma après avoir vendu son âme aux crapules de LFI. Tout le cinéma pour faire 2% à l'élection présidentielle. ». Précisons que le 2% est une surestimation de la réalité qui est à 1,7%. Celui qui a le mieux synthétisé la situation a écrit : « Au royaume des serpillières, les torchons sont rois. » !

    Le quart d'heure de gloire était quand même pour Olivier Faure ce 6 juin 2025 : il a été l'invité du prestigieux journal télévisé de 20 heures sur TF1. Il a notamment déclaré : « Il faut que la victoire d'hier qui m'a reconduit à la tête du parti socialiste soit utile aux Française et aux Français. ». Cela va donc être difficile voire mission impossible pour le député de Seine-et-Marne qui n'aurait jamais été réélu dans sa circonscription sans l'aide des mélenchonistes.
     

     
     


    Ce qui frappe le plus lorsqu'on veut écouter la vidéo de cette interview (oui, je me risque à tout), c'est... la durée de celle-ci. En général, lorsqu'on est un personnage qui compte dans la vie politique, on a dix minutes ou un quart d'heure au moins pour s'expliquer. Mais dans le cas d'Olivier Faure, on note qu'il n'a eu droit qu'à 3 minutes 48. Ne croyez pas que c'est un scandale de la chaîne. C'est simplement la réalité électorale de ce micro-parti (je le répète, 1,7% à l'élection présidentielle). C'est même déjà beaucoup comme durée.

    De même, cette vidéo sur Youtube ne sera pas virale (quelques centaines de vues après plusieurs heures). Et quelques commentaires fort peu flatteurs, comme celui-ci : « Le PS coule ! ». Un autre : « Créer une dynamique ? (…) Et pourquoi pas un programme, pendant que vous y êtes ? ».

     
     


    En fait, la réélection d'Olivier Faure satisfait tous ses adversaires politiques. D'abord Jean-Luc Mélenchon qui est heureux de voir confirmer la ligne qui souhaite l'alliance avec ses insoumis. Ensuite, Marine Le Pen se frotte les mains car elle comprend que l'alternance ne se fera pas à gauche tant elle est divisée, et espère bien recueillir les souhaits de renouvellement. Enfin, le Président Emmanuel Macron peut, lui aussi, être satisfait car cela va obliger les sociaux-démocrates du PS à quitter ce parti et rejoindre le bloc central à l'instar de Manuel Valls, François Rebsamen, Juliette Méadel, François Patriat, Jean-Yves Le Drian, Florence Parly, etc. Son objectif de réunir des socialistes aux républicains n'a jamais été aussi près d'être atteint.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (06 juin 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Congrès du PS : "l'homme le plus riche du cimetière".
    Congrès du PS : Olivier Faure est-il en difficulté ?
    Congrès du PS : le choc de complexité !
    Robert Badinter.
    Congrès du PS à Rennes : l'explosion de la Mitterrandie.
    La préparation du congrès de Rennes (27 janvier 1990).
    Histoire du PS.
    Manuel Valls.
    Martine Aubry.
    Hubert Védrine.
    Julien Dray.
    Comment peut-on encore être socialiste au XXIsiècle ?
    François Bayrou et la motion de censure de congrès du PS.
    Lionel Jospin.
    Claude Allègre.
    François Mitterrand.
    Jacques Delors.
    Mazarine Pingeot.
    Richard Ferrand.
    Didier Guillaume.

    Pierre Joxe.
    André Chandernagor.
    Didier Migaud.
    Pierre Moscovici.

    La bataille de l'école libre en 1984.
    Bernard Kouchner.
    Hubert Curien.
    Alain Bombard.
    Danielle Mitterrand.
    Olivier Faure.
    Lucie Castets.

    Bernard Cazeneuve
    Gabriel Attal.
    Élisabeth Borne.
    Agnès Pannier-Runacher.
    Sacha Houlié.
    Louis Mermaz.
    L'élection du croque-mort.
    La mort du parti socialiste ?
    Le fiasco de la candidate socialiste.
    Le socialisme à Dunkerque.
    Le PS à la Cour des Comptes.







    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250605-parti-socialiste.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/congres-du-ps-l-homme-le-plus-261390

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/06/05/article-sr-20250605-parti-socialiste.html


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