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disparition

  • Où est donc passé Teddy Vrignault ?

    « Les gens bien intentionnés les qualifient d'amuseurs. Les gens moins bien intentionnés les classent parmi les "rigolos". Ils valent beaucoup mieux que ça. Le délire verbal, le coq-à-l'âne, la gymnastique des mots, est probablement le genre exigeant le plus de maîtrise, le plus de rigueur, en un mot : le plus de style. Ce n'est pas Raymond Devos qui me contredira. » (Michel Audiard, à propos des Frères ennemis).


     

     
     


    C'est l'histoire banale du mec qui sort un dimanche soir pour chercher un paquet de clopes. Et il ne revient jamais. La femme est pourtant sûre qu'il reviendra. Une disparition sans préavis comme en font les romans ou les films à New York. Il y a quarante ans, le 1er novembre 1984, c'était le tour de Teddy Vrignault. Il allait avoir 56 ans le 22 novembre 1984. Il habitait à Montmartre avec son épouse Simone.

    Il a dit à sa femme : je vais chercher des clopes. Il a pris sa voiture, une 504 Peugeot de couleur dorée avec le toit noir, sans son carnet de chèque mais avec quelques billets de banque, et il est parti. On le cherche encore aujourd'hui. L'enquête n'a rien donnée. On n'a jamais retrouvé ni l'homme pourtant assez facilement identifiable (avec de belles moustaches) ni sa voiture. Par l'article 112 du code civil sur les disparitions, il a été considéré par l'État comme décédé le 1er novembre 2004, mais rien n'indique qu'il ne serait pas encore vivant aujourd'hui, auquel cas il aurait presque 96 ans. Sa femme n'avait rien remarqué d'anormal, si ce n'était que Teddy avait des problèmes d'argent, était déprimé et prenait des somnifères pour dormir.

    En France, il y a environ 50 000 à 60 000 personnes signalées disparues chaque année ; et chaque année, on retrouve entre 800 et 2 000 corps non identifiés. Certains, d'une famille de disparus, militent pour créer un fichier des empreintes ADN des cadavres anonymes à analyser systématiquement. En 2008, il y a eu 5 650 recherches administratives pour des disparitions présumées volontaires de personnes adultes (notre cas ici), et 2 456 (soit 44%) ont été découvertes après enquête, mais seulement la moitié de celles-ci ont accepté de communiquer leurs coordonnées. Je ne sais pas si l'année 2008 est statistiquement représentative d'une moyenne, et certainement pas de l'année 1984, mais cela signifie que Teddy Vrignault a fait partie de plusieurs milliers d'adultes qui se sont volatilisées a priori volontairement chaque année. Son cas, malheureusement, n'est donc pas très rare.

    Rappelons que la liberté de circulation implique aussi le liberté de disparaître (dès lors qu'on ne trouble l'ordre public et qu'on respecte la loi). Les enquêtes sont motivées par la légitimité de la détresse familiale, mais la procédure administrative de recherche dans l'intérêt des familles (datant de la
    Première Guerre mondiale et organisée selon la circulaire n°83-52 du 21 février 1983) a été abrogée par la circulaire du 26 avril 2013 en raison de la possibilité de faire des recherches, accessible à tous, grâce à l'Internet et aux réseaux sociaux.

    Enfin, si, un petit signe pourrait laisser entendre qu'il n'est hélas plus de ce monde. Un détective privé (un généalogiste) a retrouvé, sur le site Geneanet l'acte de décès (qu'on peut lire dans le fichier de l'INSEE) de Pierre Édouard Georges Vrignault (le vrai nom d'état-civil de Teddy Vrignault), correspondant à la bonne date de naissance, bon lieu de naissance, et qui serait décédé le 29 janvier 1999 à l'âge de 70 ans au 18
    e arrondissement de Paris. S'il s'agissait de la même personne, cela signifierait qu'elle serait restée dans la même ville (et dans le même arrondissement) pendant quatorze ans sans avoir été retrouvée, ce qui est difficile à imaginer car l'homme était une célébrité. C'est le journal "France Dimanche" qui a donné cette information le 17 avril 2020, malheureusement après le décès d'André Gaillard.
     

     
     


    Car il faut en effet rappeler qui est Teddy Vrignault à qui il faut absolument associer André Gaillard (1927-2019). Tous les deux étaient des humoristes. Ils s'étaient rencontrés par hasard au cours de leur service militaire en Allemagne, ils faisaient un spectacle ensemble mais n'étaient pas du même escadron. Après leur retour dans le civil, ils se sont perdus de vue (déjà) et se sont recroisés quelques années plus tard par hasard aux Champs-Élysées à Paris. Très vite, ils ont apprécié l'un chez l'autre l'humour sophistiqué, basé principalement sur des jeux de mots, sur la richesse du vocabulaire. Ils ont suivi des cours de théâtre et leur première représentation a eu lieu le 24 octobre 1953 dans un cabaret parisien. Ils étaient lancés.
     

     
     


    Avec un petit côté désuet, Teddy Vrignault, le grand chevelu à moustaches, André Gaillard, le chauve avec des rouflaquettes d'avant-guerre, ont formé un duo, les Frères ennemis, très connus dans les années 1960. Ils se sont produits de 1953 à 1984, pendant trente et une années, et en faisant rigoler un public bon enfant au cours de 750 sketchs différents (qui ont fait l'objet de publications livresques). Comme l'a rappelé Jérémy Gallet le 5 octobre 2019 sur le site Avoir-alire : « Des Frères Ennemis, duo comique injustement oublié, on retient les sketchs absurdes, qui lorgnent sur l’humour de Raymond Devos et Pierre Dac, avec des réparties débitées à la mitraillette, un art consommé du coq-à-l’âne et le contraste physique entre le chevelu Teddy Vrignault, brun ténébreux, sorte de mélange entre Claude Giraud et Lee Van Cleef, et André Gaillard, le dégarni, avec moustaches et rouflaquettes d’antan. Le binôme avait commencé, tel Richard et Lanoux, Darras et Noiret, par écumer les cabarets, dans les années 50, dont L’Écluse, lieu incontournable du rire, avant que le petit écran ne les rende populaires. ».
     

     
     


    Ils ont eu la chance de démarrer à Saint-Germain-des-Prés, un quartier parisien très encourageant pour les artistes. Ils ont aussi tourné dans plusieurs films, notamment de Jean Yanne et Pierre Richard, dans des seconds rôles, avec un humour qui n'a jamais été vulgaire et que certains (anciens) regrettent beaucoup. Cependant, les années 1970 ont vu leur succès décliner à cause de nouveaux modes de l'humour, plus audacieux, plus féroces (à l'instar de Coluche, Thierry Le Luron, Pierre Desproges et Michel Leeb, préférés des émissions de télévision).

    Quand Teddy Vrignault a disparu, les deux frères d'humour avaient encore un contrat pour des représentations en province toute l'année. Le site
    Wikipédia (qui ne semble se baser sur aucun indice sérieux) laisse entendre que c'est le désespoir d'une perte de succès qui lui aurait fait abandonner sa vie d'artiste pour retrouver l'anonymat, mais ce n'est pas très convainquant. En 2010 (ou 2011), André Gaillard, invité de Thierry Ardisson, a plutôt laissé entendre un problème avec son épouse (mais sans plus de conviction). Teddy était (à l'imparfait ?) quelqu'un de pas très tendre, très distant dans les relations personnelles, dur au contact, et ce ne devait peut-être pas être très facile avec sa femme. Il n'aurait peut-être pas osé lui dire en face qu'il voulait se séparer (mais partir sans rien dire est pour moi une forme très avancée de la goujaterie). Supputations de café du commerce. Le mystère restera.
     

     
     


    Toujours est-il qu'on n'a jamais eu de nouvelles par la suite. André Gaillard a tenté de continuer les sketchs à deux, notamment avec leur régisseuse Colette Duval (1930-1988), championne de saut en parachute et mannequin, avec qui ça a bien marché, aidés par Thierry Le Luron qui leur a proposé de se produire devant 4 000 spectateurs. Hélas, sa nouvelle partenaire est morte d'un cancer au bout de trois ans (le 22 mai 1988), ce qui a fait dire à un copain : c'est dur de travailler avec toi ! En 1993-1994, le seul Frère ennemi non disparu a trouvé un nouveau partenaire de réparties en la personne de Jean-Louis Blèze (1927-2012), cancre récurrent de "La Classe", l'émission présentée par Fabrice sur France 3, mais sans retrouver les heures glorieuses de son duo initial.

    André Gaillard a poursuivi sa carrière de comédien et d'humoriste, au cinéma, à la télévision, au théâtre et aussi chez Philippe Bouvard, aux "Grosses Têtes". Affecté jusqu'à sa mort par la disparition de son ami, au point d'aller chez Jacques Pradel, dans l'émission "Perdu de vue" dans les années 1990, sans succès, le dernier Frère ennemi, qui est mort le 30 septembre 2019 (à 91 ans et demi), a eu la satisfaction de voir ses deux filles Silvia et Valérie reprendre les sketchs paternels en 2010 sous le nom de Sœurs Z'ennemies. Quant à l'ami Teddy, il aura parfaitement réussi sa dernière (mauvaise) blague.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (26 octobre 2024)
    http://www.rakotoarison.eu

    Pour aller plus loin :
    Teddy Vrignault.
    Pierre Richard.
    François Truffaut.
    Roger Hanin.
    Daniel Prévost.
    Michel Blanc.
    Brigitte Bardot.
    Marcello Mastroianni.
    Jean Piat.
    Sophia Loren.
    Lauren Bacall.
    Micheline Presle.
    Sarah Bernhardt.
    Jacques Tati.
    Sandrine Bonnaire.
    Shailene Woodley.
    Gérard Jugnot.
    Marlène Jobert.
    Alfred Hitchcock.
    Les jeunes stars ont-elles le droit de vieillir ?
    Charlie Chaplin.










    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20241101-teddy-vrignault.html

    https://www.agoravox.fr/culture-loisirs/culture/article/ou-est-donc-passe-teddy-vrignault-256593

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/10/25/article-sr-20241101-teddy-vrignault.html




     

  • La nuit bleue de Lina

    « Ça donne un peu d’espoir pour retrouver une trace. Est-ce qu’elle est vivante ? On l’espère tous... » (un habitant de Plaine, le 27 juillet 2024 sur France Info).


     

     
     


    Lina Delsarte a été, avec Émile Soleil, l'une de des enfants disparus de l'année 2023, en période estivale (ou quasi-estivale). Les deux disparitions étaient très différentes, l'une concernant un petit bout de chou de 2 ans, disparu le 8 juillet 2023, l'autre une adolescente déjà grande de 15 ans, disparue le 23 septembre 2023. Mais elles avaient un point commun.

    Les deux enquêtes étaient telles, dans leur incapacité à privilégier une piste ou l'autre, avec même parfois des fausses pistes, qu'à la fin de l'année 2023, il y avait une quasi-certitude que la disparition de ces deux enfants resterait un mystère complet. Pendant longtemps, les enquêtes ont pédalé dans la semoule, les recherches pourtant très élaborées n'ont abouti à rien, aucun indice, aucune piste sérieuse.

    Lina a disparu sur le chemin entre chez elle et la gare pour prendre le train pour Strasbourg et rejoindre son petit ami de 19 ans, le samedi 23 septembre 2023 en fin de matinée. La dernière géolocalisation de son smartphone a été enregistrée à 11 heures 22, ce qui correspond aussi à l'heure où des témoins l'ont aperçue. C'est le petit ami qui l'attendait à la gare de Strasbourg qui a alerté la mère de Lina de son absence, et les caméras de surveillance n'ont pas vu Lina embarquer dans le train prévu. La gendarmerie a publié un avis de disparition inquiétante dès l'après-midi du samedi. Plusieurs opérations de ratissage ont eu lieu les jours qui ont suivi, sans résultat. Le petit ami a été menacé plusieurs fois par des accusateurs qui le considéraient comme responsable de la disparition.

    Grâce à l'ADN, les enquêtes ont cependant pu avancer d'un bond. Hélas, pas pour de bonnes nouvelles. Le corps d'Émile a été retrouvé dans une forêt, ses ossements, identifiés par une analyse génétique, ont été retrouvés par une randonneuse et, si on ne sait pas ce qui est réellement arrivé au malheureux Émile, on sait, trois fois hélas, qu'il n'est plus de ce monde depuis longtemps.
     

     
     


    Pour Lina, qui a disparu à Plaine, dans le Bas-Rhin, la situation reste encore très mystérieuse même si l'enquête a beaucoup avancé grâce à son ADN, le premier indice de cette enquête, qu'on a retrouvé dans une voiture volée qui se trouvait pas loin de lieu de disparition de l'adolescente le jour de sa disparition et qui a été retrouvée dans le Languedoc-Roussillon fin mai et début juin 2024 (cette information a été communiquée par la justice le 26 juillet 2024). La procureure de Strasbourg a annoncé le 30 juillet 2024 que le véhicule volé incriminé a été saisi et son propriétaire, après avoir été entendu par la police pour le vol de son véhicule, s'est suicidé peu de temps après, le 10 juillet 2024 à Besançon, en laissant une lettre à ses deux enfants disant ses regrets et sa honte, sans évoquer Lina.

    De nouvelles fouilles ont été effectuées du 30 juillet au 2 août 2024, en Alsace et dans les Vosges, sans résultat non plus, malgré la géolocalisation de la voiture dans cette zone au moment de la disparition de Lina (le conducteur y aurait fait un arrêt d'une heure trente).

    Le principal suspect, le propriétaire de la voiture qui aurait transporté Lina le jour de sa disparition, est mort sans avoir indiqué s'il était le responsable de la disparition voire de la mort de Lina et sans avoir indiqué le cas échéant où elle se trouvait, elle ou son corps.

    La presse a évoqué largement le profil chaotique de ce suspect, un quadragénaire qui a eu de lourds antécédents de drogue, de bipolarité, de problèmes psychiques, et aussi de vols, d'enlèvements de jeunes filles, etc. Il était très dépressif et connu de la justice. Ce qui est notable également, c'est que, contrairement à un assassin d'enfants comme Michel Fourniret, dont le visage et la silhouette laissent deviner une personne inquiétante, le suspect n'effrayait pas physiquement, semblait tout à fait normal, sans allure inquiétante, avec du reste un nom et une apparence bien français (je le précise car il est souvent de bon ton de répéter, à tort, que les auteurs de meurtres seraient souvent issus de l'immigration, pour rester soft).

    La justice a communiqué avec parcimonie et retard ces nouveaux éléments de l'enquête, probablement avec un objectif précis. Peut-être envisage-t-elle une autre personne impliquée ? Les chances de revoir Lina sourire à nouveau, bien vivante, se réduisent malheureusement depuis ces nouveaux faits.

    Ce qui est troublant aussi, c'est que deux autres affaires, qui n'ont en principe rien à voir avec sa disparition, ont eu lieu : la mort de son premier petit ami (à 22 ans) le 1er octobre 2023 d'un accident de voiture (il roulait trop vite et a été flashé à 185 kilomètres par heure ; l'enquête a conclu qu'il ne s'agissait pas d'un suicide). En outre, Lina avait déposé plainte en juin 2022 car victime d'un viol en réunion (elle avait 13 ans), plainte initialement classée sans suite mais reprise par l'ouverture d'une information judiciaire en février 2024, là aussi sans rapport avec sa disparition.

    Lina avait obtenu le brevet des collèges en juin 2023 et préparait un CAP Aide à la personne. Elle aurait dû fêter son 16e anniversaire ce samedi 10 août 2024. Un anniversaire de larmes.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (03 août 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    La nuit bleue de Lina.
    La nuit de Célya.
    La nuit d'Émile Soleil.
    Affaire Grégory : la vérité sans la boue ?
    Alexandra Sonac et sa fille adolescente.
    Harcèlement scolaire et refus d'obtempérer.
    Alisha, victime d’un engrenage infernal.
    À propos de la tragique disparition de Karine Esquivillon...
    Meurtre de Lola.
    Nos enseignants sont des héros.
    La sécurité des personnes face aux dangers.


     

     
     





    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240730-lina.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/societe/article/la-nuit-bleue-de-lina-256111

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/07/30/article-sr-20240730-lina.html




     

  • La nuit de Célya

    Tristesse infinie. Petite pitchounette meurtrie. Dont on a ôté la vie.


     

     
     


    Les téléspectateurs de ce vendredi 12 juillet 2024, dans la soirée, ont pu apprendre la nouvelle : une alerte enlèvement. Le nom de l'enfant disparu, Célya, son âge, 6 ans, ses vêtements, les lieux où elle pourrait être, etc. Et une photo. Rien n'est inutile pour retrouver un enfant. On sait bien que c'est aux premières heures qu'on peut retrouver un enfant et plus le temps s'allonge, plus la probabilité des retrouvailles s'écroule.

    Dans une sorte d'insensé espoir, on se dit que c'est une erreur, l'enfant s'est perdue, on va vite la retrouver et on en sera pour une bonne peur, qu'on racontera plus tard, comme souvenir d'un été particulièrement stressant. Peut-être en rigolant. Et puis l'optimisme s'écroule, s'effondre, lorsqu'on lit un macabre communiqué, comme un couperet de guillotine, cette nuit, du parquet de Rouen : « Le corps sans vie de Célya a été retrouvé. ».

    Des dizaines, peut-être des centaines de personnes ont communié à cette disparition, ont aidé, ont cherché à s'informer, à avoir des nouvelles de la petite, se sont mis à la place de sa mère, se sont inquiétés pour elle. Incontestablement, même si c'est très anecdotique, il y a encore des pistes de progression pour le Ministère de la Justice dans la communication avec le grand public. Sans ménagement. Sans ambages, on apprend que le pire est arrivé. Effondrement infini.

    Un peu plus tard, on apprend que l'alerte enlèvement a été très utile, et il faut s'en féliciter car la procédure est maintenant bien rodée et peut sauver des vies. Hélas, ici, cela n'a pas suffi. Un témoin a pu informer la police qu'il avait vu le véhicule du beau-père de Célya.
     

     
     


    C'est à partir de cette information que la brigade des recherches de la gendarmerie nationale d'Yvetot, en Seine-Maritime, a pu faire des investigations dans les environs et a trouvé le corps sans vie de Célya dans un bois, pas loin du véhicule. Le propriétaire du véhicule et auteur présumé du meurtre de la petite fille de 6 ans est encore en fuite et peut d'ailleurs être dangereux (des conseils de prudence et de vigilance sont donnés).

    Dans le communiqué du procureur de la République de Rouen publié au milieu de la nuit (lire en fin d'article), il est précisé que la mère de Célya a d'abord été victime de coups de son compagnon et a été hospitalisée, sans que ses jours, heureusement, ne soient en danger. Enfin, c'est une façon de parler, car lorsqu'elle s'apercevra de la situation, sa vie sera foutue, elle aura une blessure indélébile, incicatrisable, le monde s'est écroulé pour elle. Perdre un enfant. Toujours innocent. Insurmontable.

    Beaucoup de réactions affluent, en particulier sur Twitter, même des politiques, dont le député FI Carlos Martens Bilongo. Soit les internautes s'adressent à l'enfant pour lui souhaiter la paix, un monde doux dans le ciel, soit ils pensent à la famille, à sa mère (qui est hospitalisée). Compassion. Certains se demandent si la mort remonte à avant ou après l'alerte enlèvement, d'autres évoquent la peine de mort, se lâchent même sur leur propre idéologie qui y voit matière à récupération politique, mais heureusement, ils sont très peu nombreux. Face à l'amour d'une vie, au départ d'un enfant, la décence reste relativement bien partagée. Quelques-uns enfin ont publié la photographie du suspect, le compagnon de la mère, comme pour inciter au lynchage, alors qu'il faut rappeler que la sanction doit être prononcée par la justice et tant qu'un suspect n'est pas jugé, il est présumé innocent. Je sais, c'est dur de l'écrire, mais qui est-on pour condamner alors qu'on ne connaît rien de rien ?

    Entre les statistiques des homicides volontaires et la photo de la petite Célya, entre les arguments nauséeux de gros bourrins qui se nourrissent, comme des vampires, des victimes, et l'innocence de cette âme assassinée, il y a effectivement un immense fossé. La violence, celle de la maison d'à-côté, la guerre, lointaine ou proche, dans les cœurs, les arguments de force, de brutalité, hélas, font partie inhérente de cette humanité qui peut le meilleur et le pire, et parfois en même temps.


    Est-ce un féminicide d'avoir voulu assassiner sa mère, d'avoir assassiné sa belle-fillette ? On pourrait aussi appeler un célyacide, tellement chaque victime, chaque meurtre est une histoire entière, spécifique, singulière et doit prendre un nom différent. Quelles qu'en soient ses raisons, ou ses déraisons, l'auteur de cette horreur définitive, suprême, de prendre la vie d'un enfant a nécessairement tort, mérite jugement, condamnation et châtiment. Mais de grâce, nous, hommes et femmes libres et éclairés de la société des Lumières, endeuillés, enlarmés par cette tragique, par les autres et par les suivantes hélas, restons humains et n'imitons pas les bourreaux. Ce serait assassiner une seconde fois l'enfance.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (13 juillet 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    La nuit de Célya.
    La nuit d'Émile Soleil.
    Affaire Grégory : la vérité sans la boue ?

     

     
     




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    https://www.agoravox.fr/actualites/societe/article/la-nuit-de-celya-255815

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/07/13/article-sr-20240713-celya.html