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  • François Guizot à Matignon ?

    « Il y a eu un temps, où la conquête des droits sociaux et politiques a été la grande affaire de la nation. (…) À présent, usez de ces droits ; fondez votre gouvernement, affermissez vos institutions, éclairez-vous, enrichissez-vous, améliorez la condition matérielle et morale de la France ; voilà les vraies innovations ; voilà ce qui donnera satisfaction à cette ardeur du mouvement, à ce besoin de progrès qui caractérise cette nation. » (François Guizot, le 1er mars 1843, à la Chambre des députés).




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    Cette injonction semble toujours d'actualité, plus de cent quatre-vingts ans plus tard ! Son auteur, François Guizot, est mort il y a exactement 150 ans, le 12 septembre 1874. Il avait 86 ans, avait définitivement quitté la vie politique en 1849 à son échec aux élections législatives et passait son temps à écrire, historien érudit de la vie politique (membre de l'Académie française depuis 1836 !).

    Mais le plus important était qu'il n'était pas qu'un simple observateur de la vie politique, il en a été l'un des acteurs majeurs sous la Monarchie de Juillet, entre 1830 et 1848, sous le roi des Français Louis-Philippe, cumulant de nombreux ministères successifs jusqu'à devenir chef du gouvernement du 18 septembre 1847 au 24 février 1848, date de la Révolution de 1848. Il a été notamment longtemps Ministre des Affaires étrangères (du 29 octobre 1840 au 23 février 1848) et auparavant, a fait adopter une loi sur l'enseignement qui a permis de doubler le nombre des écoles primaires. Membre de l'opposition sous le roi Charles X, il était le représentant de la politique orléaniste de Louis-Philippe, d'ouverture économique. François Guizot représentait le libéralisme économique en France.

    À son époque, François Guizot était peu populaire, trop conservateur pour les révolutionnaires et les républicains, trop audacieux pour les conservateurs et les royalistes. Son rival était Adolphe Thiers qui a compris qu'il valait mieux la république, mais conservatrice, pour éviter les révolutions et assurer la stabilité politique qui favorise la prospérité économique. Les deux hommes étaient opposants à Napoléon III sous le Second Empire, rejetant tout autocratisme politique.

    Du reste, au contraire des images populaires qui furent véhiculées par la gauche révolutionnaire pendant deux siècles, François Guizot se moquait beaucoup de l'argent qui ne l'intéressait pas personnellement (il est même mort pauvre) mais souhaitait l'émergence et la prospérité d'une classe moyenne qui allait faire tourner l'économie :
    « Je veux, je cherche, je sers de tous mes efforts la prépondérance politique des classes moyennes en France. L’organisation définitive et régulière de cette grande victoire que les classes moyennes ont remportée sur le privilège et sur le pouvoir absolu de 1789 à 1830, voilà le but vers lequel j’ai constamment marché. » (discours à la Chambre du 3 mai 1837). Victor Hugo, qui ne l'appréciait guère, le décrivait ainsi dans "Choses vues, 1847-1848", avec ses mots crûs : « M. Guizot est personnellement incorruptible et il gouverne par la corruption. Il me fait l’effet d’une femme honnête qui tiendrait un bordel. ».

    L'objectif de gouvernement de François Guizot était triple : paix, prospérité et stabilité. Ce sera sans doute les objectifs du nouveau Premier Ministre Michel Barnier dans un cadre institutionnel un peu particulier, inédit, que certains appellent maintenant "coalitation" (mot valise pour évoquer coalition et cohabitation ; en d'autres termes, une cohabitation où le parti présidentiel participerait au gouvernement).

    Déjà dans le choix de la composition de son gouvernement, plus encore dans le choix de ses priorités qui seront énoncées dans son discours de politique générale devant les députés au début du mois d'octobre 2024, Michel Barnier devra se donner les conditions de l'apaisement des Français, les conditions de la poursuite de la crédibilité économique de la France, et les conditions de la stabilité politique.

     

     
     


    Apaisement des Français : pendant la trêve olympique, les Français étaient heureux d'une sorte de mise sur pause des divisions politiques après une période électorale assez longue et pénible, stressante (avril-juillet 2024). À leur retour de vacances, ils étaient toutefois inquiets de l'absence de nomination du Premier Ministre et le choix de Michel Barnier a été salué comme une sorte de soulagement. Soulagement d'avoir un nouveau chef du gouvernement, dont l'expérience lui donne à la fois d'être immédiatement opérationnel et surtout d'avoir cette autorité politique et institutionnelle indispensable tant vis-à-vis du Président de la République que des parlementaires. Le choix des ministres devra aussi aller dans ce sens, notamment en ce que la composition soit représentative des Français, de leur éclatement de représentativité, et donc, il faudrait à l'évidence que certains ministres soient de gauche. Soulagement aussi que le choix du nouveau Premier Ministre ait reçu des réactions bienveillantes tant parmi une majorité de groupes parlementaires (une majorité de non-censure) que parmi les Français eux-mêmes. Un attentisme bienveillant qui permettra au moins à Michel Barnier de poser les sujets sur la table et de les négocier, chose qui serait impossible s'il était censuré immédiatement.

    Crédibilité économique : ce sera bien sûr la première épreuve du nouveau gouvernement, le projet de loi de finance pour 2025. J'avais analysé le projet de loi de finances 2018 (le premier de l'ère Macron) comme un projet qui se différenciait de François Guizot en ce sens qu'il faisait la part trop belle aux très riches et pas assez à la classe moyenne. Ce sera donc le défit de Michel Barnier de soulager fiscalement la classe moyenne et de trouver d'autres recettes fiscales auprès des plus riches, à la condition qu'il s'agisse bien de très-riches et pas d'une classe moyenne supérieure qui ne serait qu'une classe moyenne. Cette crédibilité, c'est évidemment la trajectoire de réduction du déficit public à 3% d'ici à 2028 et donc, la capacité soit à réduire les dépenses publiques, soit à augmenter les recettes fiscales et sociales, soit probablement les deux. Globalement, ce sera plutôt un pied sur la gauche.

    Enfin, la stabilité politique du gouvernement. Un ministre n'est jamais ministre très longtemps a priori, c'est un contrat à durée ultradéterminée. Ici, l'objectif de Michel Barnier serait de tenir au moins pendant un an, jusqu'en été 2025, le temps que le Président de la République retrouve son droit de dissolution. Sans celui-ci, la situation institutionnelle risque d'être bloquée si le gouvernement Barnier venait à être rapidement censuré. C'est la raison pour laquelle il devra bien faire des concessions également sur sa droite, notamment à propos de l'immigration, pour s'attirer la bienveillante neutralité du groupe RN. Il ne s'agit en aucun cas d'un accord, mais d'un équilibre politique à trouver : la gauche, en particulier le parti socialiste, a refusé l'option Bernard Cazeneuve à Matignon qui aurait donné aux socialistes un poids politique immense sur le gouvernement (droit de vie ou de mort). Ils ont préféré refuser leur propre ressortissant qui était le dernier Premier Ministre socialiste à ce jour. Emmanuel Macron a dû nécessairement se tourner vers sa droite pour préserver la stabilité politique, ce qui a donné, mécaniquement, un poids politique immense au RN.

    Michel Barnier, le Premier Ministre le plus âgé de toutes les républiques, donne un arrière-goût de vieille France à la vie politique française. Et ce n'est pas forcément un inconvénient. Il replace la France dans une trajectoire historique plus large, gaulliste, nationale, libérale. Et soyons clairs, peu, à part quelques arrivistes en fin de carrière, voulaient prendre sa place aujourd'hui et la plupart des responsables politiques sont bien contents de trouver un homme responsable pour s'y coller. François Guizot à Matignon aujourd'hui ? Peut-être. Ce n'est pas un académicien, ce n'est pas un historien, c'est un montagnard, un paysan, et aussi étonnant que cela puisse être, au même titre que furent populaires en leur temps Michel Rocard, Édouard Balladur et Lionel Jospin, Michel Barnier pourrait même bénéficier d'un préjugé favorable de la part du peuple français sensible à l'épreuve qu'il s'apprête à franchir. Auquel cas, les députés devront en tenir compte. Tous les députés.



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (11 septembre 2024)
    http://www.rakotoarison.eu

    Pour aller plus loin :
    François Guizot à Matignon ?
    Guizot vs PLF2018.
    La France est-elle un pays libéral ?
    Benjamin Constant.
    Saint-Just.
    Adolphe Thiers.
    Napoléon III.
    Georges Clemenceau.
    Victor Hugo.
    L’élection présidentielle de 1848.
    Le Traité de Vienne.
    Napoléon Ier.
    Sarajevo.

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    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240912-guizot.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/francois-guizot-a-matignon-256680

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/09/11/article-sr-20240912-guizot.html







     

  • Violence scolaire : quand une enseignante s'y met...

    « Certains vont essayer de relativiser l’étendue et l’horreur des violences conjugales. Certains auront peut-être l’indécence de temporiser, au lieu d’agir. Ce n’est pas notre intention. Car on ne le répétera jamais assez : l’absolue singularité des violences conjugales, c’est qu’elles se produisent à l’endroit où l’on devrait se sentir le plus en sécurité. » (Édouard Philippe, le 3 septembre 2019).


     

     
     


    Ce que disait Édouard Philippe, alors Premier Ministre, le 3 septembre 2019 au Grenelle contre les violences conjugales, est vrai aussi pour les enfants à l'école : en effet, pour les enfants, l'école, comme la famille, doit être le lieu de la sécurité absolue. Sécurité physique et sécurité affective. Alors, lorsqu'il y a des faits de violence à l'école, c'est un véritable scandale.

    Souvent, il est question de violences entre élèves, de harcèlement scolaire, voire de violences commises par des élèves sur des enseignants. Le fait médiatique du jour, c'est encore pire : la violence vient de l'autorité, vient de l'enseignant, et encore pire que pire, sur une enfant à peine sortie de la petite enfance.

    La vidéo que l'avocate de la famille, Vanessa Edberg, a mise en ligne ce lundi 9 septembre 2024 a provoqué consternation et malaise tant dans la classe politique que dans la communauté éducative. De quoi s'agit-il ? L'unité de lieu : une école maternelle dans le quinzième arrondissement de Paris. L'unité de temps : le jeudi 5 septembre 2024.

    Une fillette de 3 ans qui venait de rentrer pour la première fois à l'école (rappelons-nous que l'école est désormais obligatoire à partir de 3 ans) a été frappée par sa maîtresse et aspergée de liquide. En fait, dès le deuxième jour de la rentrée, la petite fille avait expliqué à sa maman que sa maîtresse lui avait donné des coups. C'est la mère d'une autre camarade de la classe, présente, qui, étonnée puis choquée par le comportement de l'institutrice vis-à-vis de ses écoliers, a filmé la scène (cette mère étant étrangère se demandait si c'était normal en France).

    Dans son message sur Twitter accompagnant la vidéo, l'avocate a écrit : « Une Maîtresse violente une petite fille de petite section et lui asperge un liquide sur la tête dans une école du 15ème arrondissement de Paris. Une plainte a été déposée. En tant qu’avocate je mènerai ce combat main dans la main avec la famille, en tant que maman mon cœur saigne. ». À la fin de la scène filmée de moins d'une minute, on entend l'enseignante dire à la fillette qui pleurait et criait : « Voilà, ça te fait du bien, là ? ».

    Selon la mère de l'enfant (qui a affirmé : « Au départ, je n'y ai pas cru ! »), sa fillette ne fait plus que pleurer à la maison. La famille est sous le choc, et le choc pour l'enfant est énorme car sa première expérience avec l'école, peut-être avec l'extérieur sans sa mère, est de la violence. Elle aura du mal à ne pas avoir peur d'un enseignant dans son avenir proche.

    Le parquet de Nanterre a ouvert le 10 septembre 2024 une enquête préliminaire confiée au commissariat d'Issy-les-Moulineaux à la suite de la plainte déposée le 5 septembre 2024 par la famille, pour des « faits qualifiés à ce stade de violence sur mineur de 15 ans sans incapacité ». Selon certains spécialistes, l'institutrice encourrait sept ans de prison en raison de trois circonstances aggravantes : cela se passe à l'école (lieu sanctuarisé pour l'enfant) ; sur une "mineure de 15 ans" (cela veut dire : enfant de moins de 15 ans) ; par une personne ayant autorité (enseignante). Le parquet de Nanterre devrait être rapidement dessaisi de l'affaire au profit du parquet de Paris où se trouve l'école.

    De même, le recteur de l'académie de Paris Bernard Beignier a pris immédiatement une mesure de suspension de l'enseignante, dans l'attente des conclusions de l'enquête, visant à mettre en sécurité tant la fillette et les autres écoliers, les collègues de l'institutrice qu'elle-même. : « L’arrêté de suspension de cette enseignante, ce qui n’est pas une sanction mais une mesure de protection et ensuite il y aura à la fois une enquête pénale puisqu’une plainte a été déposée et une enquête administrative qui pourra conduire très certainement à un conseil de discipline, voire des sanctions qui vont du blâme à la révocation. ».

    Le maire du quinzième arrondissement de Paris, Philippe Goujon (ancien député) a réagi sur BFMTV : « C’est tout à fait insoutenable, ce comportement est inqualifiable, venant d’une enseignante confirmée, qui était dans cette école depuis déjà une dizaine d’années. [Elle] connaît bien l’école, les parents, les élèves, et c’est une enseignante qui a une cinquantaine d’années (…), qui [ne] se laisse pas emporter normalement par ses émotions. ». Guislaine David, la secrétaire générale de la FSU-SNUIPP, principal syndicat des enseignants du premier degré, s'est déclarée choquée : « En tant qu’enseignants, nous devons assurer la sécurité physique et affective des élèves. ».

    De son côté, selon son avocat, l'enseignante suspendue a regretté ses gestes dus, selon elle, à un emportement : « L'institutrice est en état de choc. Elle regrette profondément ce qu'il s'est passé. ». On peut imaginer surtout le choc émotionnel sur les médias et les réseaux sociaux d'être montrée du doigt, mais il y a une part d'indécence à exprimer cet état de choc alors qu'elle est l'auteure de cette violence et que c'est sur la victime, la fillette et sa famille, elles aussi en état de choc, qu'il faut se concentrer, que la société doit se concentrer, du moins les pouvoirs publics.

    On pourra s'étonner sans doute de l'explosion médiatique de cette "affaire" alors que l'intérêt de tous les protagonistes (victime, famille, écoliers, établissement) serait plutôt de ne pas enflammer les passions publiques... sauf si c'est pour empêcher d'autres faits de violence à l'avenir, ce qui semblerait être l'objectif de l'avocate. En quelque sorte, le scandale est lui-même très instructif, car cela signifie que la société évolue. Il n'est plus possible de violenter les enfants sans créer un scandale, ce qui est relativement nouveau.

    Il y a cinq ans, les parlementaires avaient adopté la loi n°2019-721 du 10 juillet 2019 relative à l’interdiction des violences éducatives ordinaires. Elle signifiait, surtout aux parents, qu'on n'avait plus le droit de frapper physiquement ses enfants, ni gifles, ni fessées. Pour les "vieux" parmi lesquels je pourrais me compter, on a souvent estimé qu'une bonne claque pouvait être efficace et salutaire, déclencheur d'une maturité qui tardait à venir. La réalité, c'est qu'il y a des nourrissons qui meurent de la violence de leurs parents. Car il y a claque et claque, grosse claque qui blesse profondément le corps et petite tapette qui blesse surtout psychologiquement l'âme. Mais qui est le juge de paix de la pondération des claques ? Interdire sauve des enfants de la maltraitance, d'où cette loi.

    A fortiori, un enseignant a encore moins le droit de frapper un élève que ses parents. Selon certains témoignages, ce n'était pas la première fois que cette enseignante frappait, mais pourquoi est-ce seulement aujourd'hui qu'on le lui reproche ? Sans doute un élément simple : la vidéo. L'image est parlante et remplace tout jugement. Cela fait cinquante ans que nous sommes dans une société de l'image (avec la télévision, puis Internet), mais c'est très récemment (depuis une dizaine d'années) que n'importe qui peut diffuser à grande échelle des images (en l'occurrence, ici, une mère sur la violence d'une enseignante).


    Les réactions des internautes de Youtube à la vidéo de cette scène sont, elles aussi, instructives (et je soupçonne que ce sont issues de personnes plutôt âgées, en tout cas, qui ont le temps et l'oisiveté de se consacrer à réagir sur Internet). J'en ai pioché quelques-uns sur deux vidéos données. On voit à quel point le relativisme dénoncé par Édouard Philippe (voir au début de l'article) sévit et reste bien vivace.
     

     
     


    Majoritairement, beaucoup disent qu'il ne faudrait pas exagérer, qu'il n'y a pas mort d'homme, que c'est une petite violence, jusqu'à faire part de leur expérience (j'ai été frappé et tout va bien maintenant, je n'en suis pas mort), voire se retournent contre les parents en demandant ce qu'ils ont fait de leur éducation pour cette pauvre fillette (rappelons-le : c'était sa première rentrée scolaire). Heureusement, d'autres s'insurgent contre cette violence et s'imaginent les parents de cette fillette.
     

     
     


    Je ne doute pas que ces réactions d'hostilités vont perdurer parce qu'il y a toujours un fond de complotisme résiduel sur Internet et le complot, ici, ce serait de dire que la vidéo était un coup monté pour mettre en difficulté l'enseignante. Que celle-ci en soit consciente ou pas, taper des enfants de 3 ans ne sont pas des méthodes pédagogiques et si elle ne s'en sort pas avec ses élèves dans sa classe, il faudra penser sérieusement à évoluer vers un autre métier que l'enseignement. On s'étonnera aussi que personne, au rectorat, n'avait reçu auparavant de signalement sur cette violence dont serait coutumière cette enseignante.
     

     
     


    Mais celle-ci ne doit pas payer non plus pour les autres, pour la violence à l'école en général. Les faits sont tristes pour tout le monde. Je laisse la justice enquêter au-delà des apparences médiatiques et donner ses conclusions. Ce que je retiens, c'est que cette sortie médiatique est une bonne mesure préventive voire dissuasive pour les enseignants susceptibles de violenter leurs élèves, surtout s'ils sont en très bas âge, car finalement, un lynchage médiatique peut faire plus mal qu'une véritable condamnation judiciaire. Alors, restons modérés dans les réactions, c'est plusieurs vies qui sont en jeu dans cette triste affaire, et heureusement, toutes ne sont pas finies.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (10 septembre 2024)
    http://www.rakotoarison.eu

    Pour aller plus loin :
    Violence scolaire : quand une enseignante s'y met...
    Ni claque ni fessée aux enfants, ni violences conjugales !
    La foi de Sœur Marguerite contre l'exclusion scolaire.
    Il y a 40 ans, l'énorme manifestation pour l'école libre.
    Amélie Oudéa-Castéra.
    Journée de lutte contre le harcèlement scolaire : est-elle utile ?
    Harcèlement scolaire et refus d'obtempérer.
    L'assassinat de Dominique Bernard au lycée Gambetta d'Arras.
    G. Bruno.
    Gabriel Attal, nouveau ministre de l'éducation nationale.
    Pap Ndiaye.
    Les vacances scolaires sont-elles trop longues ?
    Nos enseignants sont des héros !
    Prime à l'assiduité : faut-il être choqué ?
    Violence contre une prof et vidéo dans les réseaux sociaux.
    Transgression à Marseille : recruter des profs plus "librement" ?
    Samuel Paty : faire des républicains.
    Samuel Paty : les enseignants sont nos héros.
    La sécurité des personnes.
    Lycée Toulouse-Lautrec.
    Transgression à Marseille : recruter des profs plus "librement" ?
    L’école publique gratuite de Jules Ferry.
    Alisha, victime d’un engrenage infernal.
    Genrer la part du Lyon ?
    Daniel Pennac, ministre de l'éducation nationale.
    René Haby.
    Le handicap et l'école.
    La féminisation des noms de métiers et de fonctions.
    Les écoles ne sont pas des casernes.
    La laïcité.
    La réforme du baccalauréat.
    Prime à l’assiduité.
    Notation des ministres.
    Les internats d’excellence.
    L’écriture inclusive.
    La réforme de l’orthographe.
    La dictée à  l’école.
    La réforme du collège.
    Le réforme des programmes scolaires.
    Le français et l’anglais.
    Le patriotisme français.
    Jean-Michel Blanquer.
    Jean Zay.
    Vincent Peillon.
    Alain Devaquet.
    Alain Savary.


     

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240910-violence-scolaire.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/societe/article/violence-scolaire-quand-une-256724

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/09/10/article-sr-20240910-violence-scolaire.html



     

  • La foi de Sœur Marguerite, qui déplace des montagnes contre l'exclusion scolaire

    « Elle a le visage d'un ange prêté pour trop peu de temps à la Terre. » (Jacques Séguéla, 2006).


     

     
     


    Ce dimanche 8 septembre 2024, je voudrais rendre hommage à une femme superbe, Sœur Marguerite, qui fête son 98e anniversaire. Tant d'années et autant de foi dans la vie, dans l'espérance d'un avenir meilleur, cela réconforte quand on lit tellement de mauvaises nouvelles, tellement de déclinisme, de pessimisme. Et puis, il est quand même quelques personnes charitables qui se sont engagées auprès de Dieu qui ne devraient pas décevoir, même après leur mort.

    Dans le petit monde des religieuses, il y a beaucoup de sœurs Marguerite. La Sœur Marguerite que je veux honorer ici s'appelle pour l'état-civil Marguerite Tiberghien, née le 8 septembre 1926 à Roubaix, dans le Nord. Elle s'est engagée en 1948 dans les ordres chez les Filles de la charité de saint Vincent de Paul. Après avoir enseigné dans l'agglomération de Lille, Sœur Marguerite est partie en 1972 au Congo-Brazzaville pour enseigner également (le régime de ce pays africain était communiste de 1969 à 1992). Elle avait alors 46 ans.

    Sa grande réalisation, ce fut d'avoir fondé l'École spéciale de Brazzaville en octobre 1975 qui permet de scolariser gratuitement les exclus, des enfants très pauvres ou en situation de handicap, des enfants déscolarisés, des adultes illettrés, etc. sur le programme de l'enseignement primaire en langue française. Elle y a enseigné la lecture et l'écriture pendant près de trente années, jusqu'en septembre 2004 où elle a pris sa retraite et est retournée vivre à Paris comme l'y conviait sa congrégation (elle avait 78 ans !). Cette école a essaimé et a fait des petites. En tout, 30 000 Congolais ont bénéficié de cette école très singulière et ont échappé à l'illettrisme. Sœur Marguerite a su trouver des financements tout au long de ces années, soit des pouvoirs publics (notamment congolais et français) soit d'origine privée (donateurs, etc.).

    Au-delà de l'enseignement primaire, cette école assure aussi une formation professionnelle (menuiserie, jardinage, couture) et des activités d'éveil pour les élèves (enfants et adultes) atteints d'un handicap mental. Ces derniers restent à la charge de leur famille mais avec cette formation, ils ont progressé dans leur ouverture au monde, ce qui a renforcé leur intégration sociale. Les effectifs de l'école sont passés de 80 en 1975 à 2 500 en 2011. À partir du début des années 2000, en effet, c'est tout un réseau d'écoles qui a été mis en place pour instruire les exclus.

    Toutes ces structures se basent sur les quatre principes suivants : accueil des exclus de l'école primaire, coexistence des trois sections pédagogiques (A : adultes de plus de 20 ans pour alphabétisation et préparation au CEP ; J pour enfants de moins de 14 ans pour atteindre le niveau CM2 ; T pour enfants de plus de 14 ans pour alphabétisation et préparation au CEP) et des ateliers professionnels ; gratuité avec participation financière libre des familles ; gestion d'un comité d'entraide.

    Le 6 octobre 2021 (dans un entretien accordé à Marie Alfred Ngoma pour l'Agence d'information d'Afrique centrale), Sœur Marguerite a raconté ses débuts : « Nous avons commencé dans une salle qui n’était pas une classe. (…) Notre travail était d’assurer l’apprentissage de la lecture par la méthode syllabique mimée avec des gestes. Nous avions, pour chaque lettre de l’alphabet, une histoire accolée. Par exemple, celle de la lettre A, c’est l’histoire d’une jeune fille qui s’appelle Anne qui s’émerveille et exprime sa joie avec un énorme sourire devant la robe achetée par sa mère. La classe s’interroge : pourquoi Anne est contente ? Elle est contente parce que sa mère lui a acheté une belle robe. S’en suit l’exclamation Ah ! ».

    Et de résumer l'essentiel pour les enfants congolais : « Tout comme les cinq doigts de la main : en premier, disposer d’un bon professeur ; ensuite, avoir le courage de travailler ; entretenir l’amitié dans la classe, éviter les moqueries ; veiller à la propreté dans l’école et enfin, lutter pour la vérité, admettre ses faiblesses au lieu de les cacher, pas d’évolution si on ne sait pas lire. (…) Plus, il y aura de femmes et d’hommes conscients de la richesse de la lecture, mieux ça ira ! C’est par l’apprentissage de la lecture pour tous que le Congo rendra la fierté aux populations, ôtant, au passage, le mépris de l’autre. ».

    Malgré la guerre civile qui a sévi au Congo-Brazzaville entre le 10 mai et le 25 octobre 1997 et qui a fini par le retour au pouvoir de l'ancien autocrate communiste Dens Sassou-Nguesso (toujours au pouvoir aujourd'hui), la religieuse a préféré restait courageusement sur place, malgré les dangers, pour continuer à mener sa lutte contre l'illettrisme, car ses élèves avaient besoin d'elle.

    En avril 2006, Sœur Marguerite a fait la connaissance du publicitaire Jacques Séguéla et ce fut le coup de foudre pour l'homme de communication qui l'a appelée Sœur Courage. Ce dernier lui a consacré un livre-interview où elle a nappé sa vie auprès des exclus. Un livre, publié en octobre 2006, dont les droits d'auteur ont été versés à l'Association des amis de l'École spéciale de Brazzaville.
     

     
     


    La notoriété de l'ancien conseiller en communication politique de François Mitterrand lui a permis également de créer, avec l'aide notamment du père Alain de La Morandais (qui avait fait connaître Sœur Marguerite à Jacques Séguéla), le Fonds de dotation Sœur Marguerite le 20 août 2010 pour financer toutes les initiatives locales visant à concrétiser la gratuité et l'universalité de l'enseignement primaire en langue française (apprendre à lire, écrire et compter). Ce fonds a été reconnu à l'UNESCO au cours d'une journée sous le haut patronage de Carla Bruni, épouse du Président de la République, le 12 avril 2011.

    Pierre Chausse, président de ce fonds, a expliqué : « [Ce fonds] a pour objet de pérenniser et de développer le modèle des Écoles Spéciales (qui combine enseignement primaire francophone pour tous et formations professionnelles) ainsi que de développer un réseau d’écoles dans le monde entier. En une décennie, l’action de soutien du Fonds de dotation en faveur de projets éducatifs s’est étendue auprès de nombreuses communautés francophones, qu’elles soient congolaises, indiennes ou libanaises. Aujourd’hui via ses partenariats avec d’autres ONG, les équipes enseignantes sur place et des acteurs locaux partageant ces mêmes valeurs d’universalité de l’éducation. Le Fonds de dotation réfléchit à différents projets d’infrastructures, notamment en faveur des personnes handicapées. ».


    Quant à la religieuse, voici ce qu'elle disait, le 13 février 2011 sur RFI, à la journaliste Geneviève Delrue (vice-présidente de l'Association des journalistes d'information religieuse) : « Cela me donne un grand bonheur, parce que je suis de plus en plus persuadée que les questions de sous-développement de pays en retard, c'est avant tout une question d'instruction. Alors, maintenant, il y a l'École spéciale à soutenir, mais il y aurait aussi l'ensemble des jeunes mal instruits ou pas scolarisés du tout. Mon idée-là, toujours dans la tête : pas savoir lire à 80 ans, ce n'est pas grave, parce qu'on a encore toute l'oralité avec les contes, les proverbes, enfin, toute la belle poésie de cette oralité. Pas savoir lire à 50 ans, ce n'est pas grave, il y a des écoles qui sont prévues pour ça. Mais pas savoir lire à 15 ans, c'est inacceptable ! Surtout à notre époque. Parce que les analphabètes qui n'ont que la force de leurs bras, et qui, ayant grandi dans des villes immenses, n'ont pas bénéficié de la culture orale de leurs ancêtres, on est devant un orphelinat mental. (…) Maintenant, avec les avancées techniques et les robots, les analphabètes qui n'ont que la force de leurs mains, petit à petit, on n'en a pas besoin, c'est grave ! Voyez les chantiers de construction, et j'ai vu de grandes grues, des grosses pelleteuses, mais il y a deux trois ouvriers, pas plus, ce n'est pas la peine, la machine est là. C'est vrai, il faut savoir la diriger la machine, donc, il faut avoir fait des études ».

    Effectivement, Sœur Marguerite a souvent parlé du « miracle de l'amitié » qui a sorti tant de ses élèves, enfants congolais, de « l'orphelinat mental ». Elle leur a souhaité joyeux Noël 2021 avec ces mots : « Qu’ils soient dans la posture où, avec peu, se multiplient les bonheurs à partager (…). [Je leur souhaite] d’avoir souvent l’occasion de dire, d’entendre : c’est bien, c’est bon, c’est beau ! ».
     

     
     


    Elle a décrit la honte de l'exclusion scolaire : « Le premier point commun, c'est une espèce de honte. L'analphabète de 15 ans a honte de ne pas savoir lire. Et l'écriture pour lui, c'est des dessins. (…) Ils savent qu'ils n'ont pas d'avenir. Alors, vous les retrouvez où ? Vous les retrouvez dans les bandes armées, soit simplement des bandits, soit des bandes armées des milices dont s'entoure chaque personnage important. ».

    Jusqu'au bout, jusqu'à son dernier souffle, Sœur Marguerite se consacrera donc à l'éducation, après avoir vu les massacres de la guerre civile en 1997 : « Au moins l'éducation primaire. D'abord, c'est marqué dans la Déclaration des droits de l'homme, article 26 : l'homme a droit à l'éducation gratuite, au moins la primaire. On ne peut pas se contenter de nourrir. On ne peut pas se contenter de vacciner. Ça va vite, un vaccin ; une minute, l'enfant est vacciné. Mais après ? Moi, je disais à un papa qui est tout fier d'aller annoncer à la mairie que sa femme lui a fait cadeau du plus beau bébé du monde, est-ce qu'il a pensé qu'il en avait jusqu'en 2030 à suivre la scolarité de son fils ? Maintenant, il faut compter vingt ans. Et là-bas, on trouve normal de les laisser comme ça parce que, c'est vrai, il y a un effort à faire. Quand je vois les belles écoles en France, et qu'on n'est pas contents, on a encore trop d'enfants qui arrivent en Sixième en ânonnant la lecture, bon, mais là-bas, chaque fois, je suis triste, je suis contente parce qu'on reçoit de bonnes aides des écoles françaises, ces jeunes sont généreux, les professeurs aussi, les directeurs sont très accueillants, mais chaque fois, quand je vois la différence avec les écoles du Congo que je connais (…), je dis : non, ça ne va pas, ils ne vont pas se rattraper. Et je supplie de tout mon cœur les chefs d'État de prendre ça en main. » (13 février 2011).

    Le 28 mars 2013, Sœur Marguerite a suggéré pour l'hebdomadaire chrétien "La Vie" que Dieu avait laissé quatre graines dans le cœur des humains, et des seuls humains, la bonté qu'il faut cultiver, la science et l'intelligence, la beauté, et ce grand appel de l'infini : « Qu'est-ce qu'il y aura après la mort ? L'éternité qui nous attend, c'est la grande question qui se pose. ». Et de conclure : « Dieu, on l'a vu. C'était un homme ! ». Très bon anniversaire, ma sœur !


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (08 septembre 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Jacques Séguéla.
    Les 98 ans de Sœur Marguerite.
    Le scandale bouleversant de l'abbé Pierre.
    Assomption : pourquoi le 15 août est-il férié ?
    Le pape François à Marseille (1) : ne pas légiférer sur l'euthanasie.
    Le voyage du pape François à Marseille (22 et 23 septembre 2023).
    Mgr Jacques Gaillot.
    Mgr Albert Decourtray.

    Maurice Bellet.
    Lucile Randon (Sœur André).
    François : les 10 ans de pontificat du pape du bout du monde.
    Santé et Amour.
    Le testament de Benoît XVI.
    Célébration des obsèques du pape émérite Benoît XVI le 5 janvier 2023 (vidéo).

    L’encyclique "Caritas in veritate" du 29 juin 2009.
    Sainte Jeanne d'Arc.
    Sainte Thérèse de Lisieux.
    Hommage au pape émérite Benoît XVI (1927-2022).
    Les 95 ans du pape émérite Benoît XVI.
    L’Église de Benoît XVI.
    Saint François de Sales.
    Le pape François et les étiquettes.
    Saint  Jean-Paul II.
    Pierre Teilhard de Chardin.
    La vérité nous rendra libres.
    Il est venu parmi les siens...
    Pourquoi m’as-tu abandonné ?
    Dis seulement une parole et je serai guéri.
    Le ralliement des catholiques français à la République.
    L’abbé Bernard Remy.







    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240908-soeur-marguerite.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/religions/article/la-foi-de-soeur-marguerite-qui-256608

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/09/08/article-sr-20240908-soeur-marguerite.html




     

  • "À vendre" Lucie Castets 9 000 €/mois !

    « Chère Madame, à force de vous [être] crue le centre du monde, vous vous êtes rendue inaudible. Votre logiciel n'est plus à jour, déficitaire, à l'image des finances de la ville de Paris, dont vous avez la charge. De grâce, épargnez-nous vos jérémiades ! » (Un internaute, le 6 septembre 2024 sur Youtube).




     

     
     


    Certains l'ont appelée une Élisabeth Borne de gauche, d'autres sont même allés jusqu'à y voir une nouvelle Ségolène Royal. Elle n'était qu'une baudruche manipulée par Jean-Luc Mélenchon.

    Depuis le 5 septembre 2024, Emmanuel Macron a tranché : pas de plan C, juste un plan B. Pas B comme Bernard (Cazeneuve), ni Bertrand, ni Beaudet, mais Barnier. Pas de Lucie Castets qui était supposée ne représenter que 193 députés à l'Assemblée Nationale alors que Michel Barnier représente au moins 213 députés. Pour Lucie Castets, cette fin d'été est assez terrible, il faut l'avouer : fin de l'été, fin des illusions, et même, fin du boulot à la mairie de Paris.

    Pour le boulot à la mairie de Paris (elle était directrice des finances et des achats de la ville hyperendettée de Paris, en CP du 23 juillet au 31 août, c'est sympa de pouvoir se mettre en congé pendant un mois et demi de suite quand on a de telles responsabilités), je ne me fais pas trop d'inquiétude pour elle : elle est énarque et le pire pour elle, c'est d'être haut fonctionnaire sans avoir de poste. Pour les Parisiens, en revanche, hyperimposés par la gestion calamiteuse de la maire PS Anne Hidalgo, c'est sans doute un plus puisque Lucie Castets était conseillère financière de la maire avant d'avoir pris son poste officiel au sein de l'organigramme avec toujours ce principe très cher pour les contribuables français : "pas grave de dépenser l'argent public, ce n'est pas le mien".

    Ce qui est terrible, c'est qu'elle reste toujours dans la réalité alternative alors qu'elle n'a pas vu que sa candeur et sa naïveté ont permis à Jean-Luc Mélenchon et Olivier Faure de la manipuler. Elle ose dire encore publiquement : « Nous censurerons Michel Barnier ! ». Assez de déni, il faut quand même que quelqu'un ose vous le dire, puisque les journalistes ne vous disent rien. Non, madame Castets, vous n'êtes pas Première Ministre de la France, vous n'êtes pas plus députée, vous n'êtes "rien" en politique, personne ne vous connaît, vous n'avez eu aucun mandat électif, aucune responsabilité politique, même François Asselineau a plus de légitimité que vous pour prétendre gouverner la France. Vous avez fait campagne après les élections, et pas avant ! C'est inédit dans l'histoire politique de la France ! Reprenez tout à l'endroit, vous en avez certainement la capacité, présentez-vous aux élections, faites campagne, soyez élue, et vous pourrez prétendre représenter des électeurs, des idées, un parti.

    Interrogée par Apolline de Malherbe à la matinale de BFMTV le jeudi 29 août 2024, alors qu'elle considérait que le meurtre du gendarme Éric Comyn n'était qu'un simple fait-divers, Lucie Castets évoquait la suite de son parcours professionnel dans ces termes : « Je ne démissionne pas de la fonction publique, Je suis extrêmement attachée à la fonction publique, je suis fonctionnaire et j'y accorde une très grande importance, donc je ne démissionne pas de la fonction publique. Je me retire de mon poste et les modalités pratiques sont encore en discussion avec mon employeur, je vous le dirai le moment venu quand ça sera précis, là je ne peux pas encore le dire parce que je ne sais pas exactement quelles sont les modalités, mais oui, j'envisage de me mettre en disponibilité. ».

    Résumons. D'une part, elle ne veut pas quitter la fonction publique, c'est très bien pour elle, mais j'ai connu des responsables politiques qui ont démissionné de la fonction publique pour leur engagement politique (Emmanuel Macron par exemple), elle, elle préfère ne prendre aucun risque et elle a raison, car la politique n'est peut-être pas la voie pour elle. D'autre part, elle propose de nous tenir au courant, de tenir au courant "les gens" de son statut administratif, des conditions de sa mise en disponibilité, mais il faut bien l'avouer, tout le monde s'en moque sauf ses proches. Enfin, je constate que dans l'un des postes les plus importants de la ville de Paris, on peut prendre six semaines de congés payés sans prévenir son employeur puis quitter le poste deux jours avant en principe son retour de congé. Je ne sais pas si c'est ordinaire dans une grande collectivité territoriale, mais je sais que c'est impossible, dans une grande entreprise privée, que des cadres supérieurs puissent avoir autant de flexibilité dans leur parcours de vie professionnelle !






    La question d'Apolline de Malherbe qui a suivi était très pertinente malgré tout, la question qui tue : « Pardon, question très pratique mais puisque vous nous révélez que vous ne retournerez pas effectivement à votre poste lundi, vous allez gagner votre vie comment ? ». Réponse : « C'est encore à déterminer, euh... Je, je... ».
    « Vous allez chercher un autre emploi ? ». Réponse : « Possiblement oui ! ». Ce "possiblement" restera certainement dans les annales du vocabulaire politique dans les prochaines années.
     

     
     


    Les journalistes de l'hebdomadaire "Marianne" ont voulu en savoir plus et leur enquête, publiée le 3 septembre 2024 sous la signature de Maël Jouan et Hadrien Mathoux, avec pour titre "51 000 euros mensuels pour le staff, 9 000 pour elle... le devis de l'équipe de Lucie Castets au NFP", a révélé qu'elle avait réclamé 9 000 euros par mois à la nouvelle farce populaire (NFP) pour ses prestations médiatiques. On comprend un peu mieux qu'elle ait accepté ce rôle de composition, et on comprend un peu moins bien comment des électeurs de gauche puissent avoir été autant abusés par l'hypocrisie vénale d'une telle personne (ou d'une telle secte car il s'agit bien d'une secte, le mélenchonisme au gourou bien connu).

    "Marianne" a ainsi affirmé mardi soir que Lucie Castets avait envoyé pour elle et "son équipe" un budget au NFP, un devis qui fait état d'un salaire de 9 000 euros mensuels pour Lucie Castets et de 51 000 euros mensuels pour le fonctionnement de "son cabinet" comprenant trois (ou quatre) personnes, et les trésoriers des partis du NFP (en particulier d'EELV), l'avaient validé. Néanmoins, l'hebdomadaire a bien précisé que finalement, cela ne s'est pas fait après avoir contacté "l'entourage de Lucie Castets" : « Aujourd’hui, l’entourage de Lucie Castets assure que ses demandes ne sont plus à l'ordre du jour. », terminant ainsi : « Finalement, l’opération a été avortée. ». Dans un communiqué sur Twitter, sans vraiment démentir les informations, Lucie Castets a affirmé qu'elle n'avait touché aucune rémunération du NFP cet été (surtout pour répondre à ses détracteurs qui imaginaient qu'elle était doublement rémunérée, par ses congés payés et par le NFP).


    Car une telle information a évidemment provoqué de nombreuses réactions plutôt hostiles dans les réseaux sociaux, d'opposants au NFP (c'est bien normal), mais aussi d'électeurs du NFP particulièrement déçus par la vénalité de la dame.

    Interrogée par Thomas Sotto dans la matinale de RTL ce vendredi 6 septembre 2024, Lucie Castets a voulu démentir l'article de "Marianne" : « C'est faux. Je suis abasourdie par cet article et du fait qu’il a été relayé tel quel par de nombreux médias (…). Je trouve ça incroyable que l’info ne soit pas vérifiée avant d’être publiée. ».





    Mais la rédaction de "Marianne" a persisté et signé, piquée au vif par ce procès en incompétence, avec un article publié le même jour (6 septembre), avec ces mots assez durs : « La candidate à Matignon du nouveau front populaire débute peut-être en politique mais sait mentir avec autant d'aplomb qu'un vieux routard. ». Et de démontrer alors en quoi ses informations étaient exactes et recoupées par plusieurs sources distinctes.

    Le point de contestation n'était ni les montants en jeu, ni le fait que cela ne s'est pas fait finalement, mais l'origine du devis : qui a demandé à ce que Lucie Castets soit payée 9 000 euros par mois ? Pour "Marianne", c'est Lucie Castets elle-même qui a réclamé cette somme au NFP (après tout, pas très cher comme cachet d'actrice, même de série B, enfin, de série C). Pour Lucie Castets, au contraire, ce sont les dirigeants du NFP qui lui ont proposé une telle rémunération.
     

     
     


    "Marianne" n'en démord pas et précise (et publie même) « l'email écrit par son bras droit Arnaud Bontemps à la trésorière des écologistes, un devis de fonctionnement de l’équipe Castets. En bref : une enveloppe de 51 000 euros pour la rémunération de ses collaborateurs, les déplacements, la location d’un bureau… Et une possible rallonge de 9 000 euros à partir de septembre (date de la fin des congés de Lucie Castets) pour son salaire. Nous maintenons nos informations. Elles ont été scrupuleusement vérifiées et recoupées, notamment auprès des principaux intéressés : Arnaud Bontemps et la trésorière du parti Les Écologistes qui ont tous deux confirmé l’existence de ce mail et n'ont pas démenti les montants. (…) Ce que dit Lucie Castets est donc, pour la paraphraser, faux et nous serions abasourdis que sa parole, sur le sujet, puisse être relayée telle quelle à l'avenir par de nombreux médias. ».

    En clair, dès cet été, Lucie Castets avait demandé une rémunération de 9 000 euros mensuels pour elle à partir du 1er septembre 2024, ce qui confirme tout ce que les observateurs avaient compris depuis le 23 juillet 2024 avec cette insipide imposture : tout le monde, dirigeants du NFP et Lucie Castets, savait qu'elle ne serait jamais nommée Première Ministre, ni cet été, ni après l'été.

    ...Même si l'email publié par "Marianne" donnait quand même l'impression de quelques illusions dans la production de souvenirs communs avec Lucie Castets : « Enfin, plus ponctuellement, nous pourrions avoir besoin d'un appui en matériel ou en compétences (…).... Bref tout ce qui permettra de faire vivre la dynamique autour du nouveau front populaire en attendant que la gauche gouverne le pays : mais évidemment tout cela reste à suivre. » !
     

     
     


    Après ces informations, à mon sens, le plus choquant n'est pas le montant de la rémunération demandée. Il faut déjà rappeler qu'il s'agit d'un budget projeté, 9 000 euros par mois, ce devrait être a priori y compris les charges patronales et salariales, qui sont lourdes. Je n'ai pas le montant exact correspondant au salaire net, mais il doit être équivalent à un salaire de cadre supérieur ou de haute fonctionnaire, d'énarque. Ce qui peut être plus difficile à avaler, c'est lorsqu'on donne des leçons aux supposés riches et qu'on l'est soi-même (comme François Hollande qui considérait qu'on était riche à partir de 4 000 euros par mois).

    Ce qui est le plus choquant, c'est surtout qu'elle n'est pas capable d'assumer qu'elle a demandé une rétribution. La plupart des acteurs politiques ont des rémunérations d'une manière ou d'une autre, parce qu'ils sont élus (ministres, parlementaires, élus régionaux, départementaux voire maires lorsque la ville est importante), ou qu'ils sont collaborateurs parlementaires (on va voir le procès du FN à partir du 30 septembre) ou encore des permanents de parti politique (avec parfois certaines rémunérations vraiment élevées et scandaleuses mais rarement rendues publiques).

    Dans cette affaire, Lucie Castets a donc été le dindon de la farce du mélenchonisme : elle a quitté son boulot sans avoir quelque chose à la place. Aucun cadre n'agirait ainsi dans sa vie professionnelle. Elle a été particulièrement imprudente, même si la lumière qu'elle a attirée sur elle semble lui plaire. C'est sûr, elle est comme la grenouille qui voulait être plus grosse que le bœuf. Elle croyait qu'elle pourrait être nommée à Matignon. Enfin, elle y croyait modérément puisqu'elle demandait des garanties salariales à ses amis mélenchonistes après l'été. Aujourd'hui, alors que les élections sont finies, elle se retrouve sans rien. Alors, messieurs et mesdames les parlementaires de la nouvelle farce populaire, soyez utiles, faite une bonne œuvre, recrutez Lucie Castets comme collaboratrice parlementaire. Elle le vaut bien.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (07 septembre 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    "À vendre" Lucie Castets 9 000 €/mois !
    Lucie Castets noyée dans une réalité alternative !
    Le casse-tête de Lucie Castets.


     

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240906-lucie-castets.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/a-vendre-lucie-castets-9-000-eur-256679

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/09/05/article-sr-20240906-lucie-castets.html




     

  • 2e rentrée scolaire contre les papillomavirus humains : cancers et prévention

    « Cet après-midi à Jarnac, j'ai fait des annonces sur (…) le papillomavirus. Dès la rentrée prochaine, pour nos jeunes, il sera beaucoup plus facile de se faire vacciner. Nous allons organiser des campagnes de vaccination massives pour permettre à tous les élève de 5ème d'y avoir accès au collège. » (Emmanuel Macron, le 28 février 2023 sur Instagram).



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    C'est la deuxième rentrée scolaire qui s'attaque massivement à la prévention contre les papillomavirus humains. Cette politique sanitaire a été élaborée il y a un an et demi. Retour en arrière.

    En annonçant une campagne massive de vaccination contre les infections au papillomavirus dans les collèges de France pour les 800 000 élèves de Cinquième à partir de septembre 2023, le Président de la République Emmanuel Macron, qui visitait une classe de Troisième dans un collège de Jarnac, a pris une initiative que beaucoup de médecins attendaient en France.

    Car la France est très en retard dans cette politique de prévention des cancers qui correspond à plus de 6 400 cas par an en France (et pas seulement chez les femmes !). Je reviendrai plus loin sur la notion de "en retard" car l'importance n'est évidemment pas de se comparer aux autres pays mais de protéger la population.

    Si cette annonce a provoqué de monceaux d'immondices dans les réseaux sociaux par le courant antivax (il n'y a rien à faire, c'est irrécupérable, surtout depuis le covid-19), évacuons quelques critiques plus politiciennes que sanitaires de cette initiative. Si elle coûte cher (ce qui est très relatif : entre 95 et 110 euros par collégien ; cela devrait donc coûter autour de 80 millions d'euros chaque année), il faudra aussi calculer le coût réel, pour la collectivité, des soins d'un patient atteint d'un cancer, plus les coûts psychologiques pour lui et son entourage, sans compter l'éventuel coût humain, hélas, dans certains cas (encore très nombreux).

    Payer avant la maladie au lieu de soigner quand la maladie se déclare, c'est le principe même de la prévention et, fait notable, c'est la première fois que le Ministre de la Santé est également Ministre de la Prévention (il devrait être également Ministre des Sports et Ministre de l'Alimentation, mais j'en demande sûrement trop ; après tout, le Ministre de l'Écologie est maintenant le Ministre des Énergies).

    Ceux qui disent que ce n'est pas le rôle du Président de la République de promouvoir la prévention de la population, qu'il n'est pas médecin (tous ces antivax sont-ils médecins ?), qu'il a d'autres choses à se préoccuper... ont tort : dans le cadre d'une promotion, la parole d'un Président de la République est nettement plus efficace que celle d'un Ministre de la Santé, et encore plus que celle d'un directeur général de la Santé publique. Les interventions du chef de l'État ne peuvent pas être trop nombreuses, un ou deux sujets par jour, pour seulement 1 826 jours de mandats, finalement, pour un pays de 67 millions d'habitants, c'est peu de sujets traités publiquement au plus haut niveau de l'État. C'est donc, au contraire, un privilège de pouvoir atteindre ce niveau-là d'attention, c'est ce qu'on appelle les priorités de l'État. Protéger les citoyens est même l'une des premières obligations régaliennes d'un État.

    Bien sûr, Emmanuel Macron n'est pas médecin, mais ce n'est pas en cette qualité qu'il s'est exprimé, mais en qualité de représentant des pouvoirs publics et ceux qui l'ont élu (18,8 millions de Français quand même !), je ne pense pas qu'ils le souhaitaient inerte, inactif, invisible, passif, immobile. Quant aux autres sujets, depuis quand ne faudrait-il s'occuper que d'un seul sujet à la fois ? Un gouvernement responsable doit s'occuper de toutes les choses urgentes et prioritaires en même temps. C'est seulement quand il y a une guerre sur son sol, ou une pandémie, ou une catastrophe terrible (comme le séisme en Turquie et Syrie), que tous les efforts doivent être focalisés sur cet unique sujet.

    Après, on peut lui reprocher la manière dont il s'attaque au sujet, on peut surtout lui reprocher d'y venir peut-être beaucoup trop tardivement (cette campagne massive était très attendue, je le répète), mais on ne peut pas lui reprocher qu'il s'occupe du papillomavirus ni qu'il exprime sa volonté, reprise unanimement par tous les professionnels de la santé, de renforcer la politique de prévention.

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    Car, avant tout, qu'est-ce que le papillomavirus ? Il est souvent abrégé en HPV pour human papillomavirus (en anglais, donc). Je ne précise pas humain, mais je n'évoque que lui (il y en a d'autres), et au lieu de mettre au singulier, je serais bien inspiré de mettre au pluriel, car il y en a environ 200 génotypes différents chez l'homme (dont 20 provoquant des lésions précancéreuses et des cancers). Enfin, chez l'humain : chez l'homme et la femme.

    Et là, la première chose qu'il faut savoir, malgré tous les efforts de communication, c'est que le papillomavirus ne concerne pas seulement les femmes, également les hommes (plus de 4 cancers sur 10 provenant d'une infection au papillomavirus se développent chez l'homme). Sa présence est massive, à tel point qu'on considère que dans le monde, environ 80% de la population mondiale aura été en contact avec un papillomavirus au moins une fois dans son existence (selon l'OMS). Ces deux éléments font frémir : cela concerne les deux sexes et cela impacte la vie d'environ 80% des personnes !

    Rappelons déjà son étymologie : cela vient de deux mots latins, papillo (mamelon) et oma (tumeur). Les papillomavirus (55 nanomètres de diamètres ; le HIV fait plus de 130 nm de diamètre) sont des virus à ADN non enveloppés qui induisent des lésions exophytiques de la peau et des muqueuses (exophytique : se dit des lésions qui prolifèrent vers l'extérieur). Le découvreur de leurs effets est le virologue allemand Harald zur Hausen (87 ans le 11 mars) qui a reçu le Prix Nobel de Médecine en 2008, aux côtés de deux autres lauréats, eux Français, Françoise Barré-Sinoussi et Luc Montagnier, eux pour la découverte du virus du sida. Les travaux de Harald zur Hausen ont mis en évidence les effets pathogènes des papillomavirus humains.

    Avant d'évoquer les ravages de ce virus, on peut rapidement présenter comment on l'attrape : c'est la première des infections sexuellement transmissibles. Le moindre rapport sexuel peut contaminer, même sans pénétration ou avec un rapport bucco-génital. Le virus se transmet par la moindre écorchure ou coupure de la peau ou des muqueuses. Un simple contact de la peau suffit donc à le transmettre, une simple caresse (précisons, une caresse sexuelle : on ne peut pas l'attraper en seulement se serrant la main). Avec ce constat : la plupart des personnes contaminées le sont au tout début de leur activité sexuelle. Le préservatif ne protège pas de l'infection au papillomavirus. Il n'y a donc pas de prévention sauf à s'en protéger par le vaccin et à se faire régulièrement dépister pour les femmes (qui ont ainsi un petit avantage sur les hommes).

    Lors d'une contamination, le virus infecte la peau ou la muqueuse. Au bout de deux ans, dans 90% des cas, l'organisme réussit à évacuer naturellement le virus et tout va bien. Mais dans 10% des cas, le virus persiste et développe au bout de dix ans des lésions précancéreuses qu'on peut éliminer en chirurgie si on les détecte (mais la plupart sont asymptomatiques). Si ces lésions ne sont pas éliminées, elles peuvent évoluer vers un cancer invasif dans les dix à trente ans depuis le début de l'infection (pour 3 cas sur 1 000 environ).

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    Les papillomavirus humains sont responsables en France de plus de 6 400 nouveaux cancers chaque année (soit environ 2% de l'ensemble des cancers). Chez la femme : environ 3 000 cas de cancer du col de l'utérus (et 35 000 cas de lésions précancéreuses du col de l'utérus, dont le traitement peut avoir des conséquences sur la fertilité et augmenter le risque d'accouchement prématuré), 1 100 cas de cancer de l'anus, 380 cas de cancer des voies aéro-digestives supérieures (VADS), à savoir oropharynx, cavité buccale, larynx, et 190 cas de cancer de la vulve et du vagin. Chez l'homme : environ 1 300 cas de cancer VADS, 360 cas de cancer de l'anus et 90 cas de cancer du pénis. Précisons qu'avec 1 100 décès chaque année, la mortalité du cancer du col de l'utérus, c'est plus de 1 sur 3, c'est énorme ! Car il se développe chez des femmes encore jeunes : l'âge moyen au diagnostic en 2012 était de 51 ans (et l'âge moyen au décès à cause du cancer du col de l'utérus en 2012 était de 64 ans). En d'autres termes, en France, le taux de survie nette est de 66% à 5 ans (diagnostics portés entre 2005 et 2010) et de 59% à 10 ans (sur la période 1989-2010).

    À cela s'ajoutent aussi 50 000 de verrues dans les parties génitales pour l'homme, autant pour la femme. Donc 100 000 en tout, chaque année. Si elles ne sont pas cancéreuses, ces verrues génitales sont très inconfortables (et très inesthétiques : les photos qu'on peut trouver dans la littérature sont assez éloquentes...).

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    Donc, je le répète, les hommes sont aussi concernés que les femmes par le papillomavirus, pas seulement pour limiter sa transmission aux femmes, mais aussi pour prévenir des cancers, et, à la différence des femmes qui peuvent être dépistées par des frottis et tests HPV, les hommes n'ont aucun moyen d'être dépistés et c'est seulement lorsque le cancer est déclaré que le papillomavirus peut être détecté (donc bien plus tard).

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    Si on prend les statistiques dans l'autre sens, on observe que 91% des cancers de l'anus sont dus aux papillomavirus, 100% des cancers du col de l'utérus, 23% des cancers de la vulve ou du vagin, 27% des cancers du pénis, 4% à 34% des cancers VADS (rappel : VADS = bouche et gorge). À cela, il faut aussi voir les risques d'être touché par un second cancer augmentent beaucoup quand on a un premier cancer (cela dépend des types de cancer, les cancers VADS sont particulièrement récidivistes). Dans un guide sur le cancer publié par l'Institut national du cancer en avril 2016, le risque relatif (RR) est présenté en fonction des différents primocancers (RR=1,36 signifie par exemple que le sujet a 36% de risques supplémentaires d'avoir un autre cancer que la population générale d'avoir d'un cancer).

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    Pour la prévention, il n'y a pas trente-six mille solutions, comme je l'ai déjà évoqué. Il y a le test HPV à faire régulièrement (selon l'âge), à la suite d'un frottis cervico-utérin. Il y a bien sûr la communication, faire connaître les effets de ces papillomavirus, trop associés aux seuls cancers du col de l'utérus (alors que cela ne correspond qu'à un peu plus de la moitié du total). Et enfin, évidemment, il y a le vaccin.

    Le vaccin HPV a été développé à partir de 1995 à la suite des travaux de Harald zur Hausen et mis sur le marché au début des années 2000 (avec une méthode classique : fragment de virus qui stimule les anticorps). Ce qui fait déjà une longue période qui permet d'affirmer qu'il ne provoque aucun effet secondaire (avec un recul de 500 millions de doses injectées depuis quinze ans).

    Trois vaccins sont commercialisés protégeant de certains génotypes : Gardasil, Cervarix, Gardasil 9 (ce dernier, développé en 2015, protège de neuf génotypes). Les trois protègent des génotypes 16 et 18 principalement en cause dans le cancer du col de l'utérus. Le vaccin HPV est prophylactique, c'est-à-dire qu'il n'élimine pas les infections déjà présentes dans l'organisme au moment de la vaccination.

    Comme je l'écrivais au début, la France est en retard dans la prévention de ces cancers, au même titre que les États-Unis et l'Allemagne. En effet, en 2021, il y avait deux types de pays. Ceux qui ont commencé à vacciner tôt contre les papillomavirus en organisant des campagnes de vaccination, avec un taux de couverture actuel très large : 90% en Belgique flamande, 86% au Royaume-Uni, 80% en Suède et en Australie, 73% en Espagne et au Canada. L'Islande, la Finlande, la Norvège et la Nouvelle-Zélande ont, eux aussi, un taux supérieur à 70%. Et ceux qui laissent à leurs citoyens l'initiative de la vaccination : 50% en Italie, 43% en Allemagne et aux États-Unis, 25% en France. Et encore, le taux en France (toujours en 2021) est la synthèse d'une forte disparité : seulement 45% des filles et 6% des garçons âgés de 15 ans ont reçu une dose de vaccin. L'objectif du gouvernement est que la couverture soit de 80% d'ici à 2030.

    Cette vaccination est très efficace : en Australie, qui a assuré massivement la vaccination depuis 2007 (80% de la population), les lésions précancéreuses du col de l'utérus ont diminué de près de 50%. Le cancer du col de l'utérus devrait y être éradiqué dans quinze ans. Une étude publiée le 7 février 2018 dans "The Journal of Infectious Diseases" a étudié la prévalence du papillomavirus sur une cohorte de 1 500 jeunes femmes australiennes âgées de 17 à 35 ans pendant neuf ans. Cette prévalence est passée, pendant cette période, grâce à la vaccination, de 22,7% à 1,1% chez les jeunes femmes âgées de 17 à 25 ans et de 11,8% à 1,1% chez les jeunes femmes de 25 à 35 ans.

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    Dans les pays au taux de couverture vaccinale élevée, la protection du vaccin assure non seulement une protection individuelle mais aussi une protection collective (immunité de groupe, comme dans le cas de la rougeole, coqueluche, diphtérie, etc.). En effet, dans l'étude citée de 2018, parmi la cohorte des 1 500 femmes, il y avait 15% de femmes non vaccinées. Et malgré cette non-vaccination, la prévalence a baissé de la même manière qu'avec des femmes vaccinées en raison de l'immunité de groupe. Une autre étude publiée le 26 juin 2019 dans "The Lancet", qui a fait une méta-analyse sur les informations publiées par 65 articles de revues scientifiques entre février 2014 et octobre 2018, a confirmé la réduction de la prévalence du cancer du col de l'utérus et l'immunité de groupe par la vaccination anti-HPV.

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    À ce jour, c'est une enquête suédoise publiée le 1er octobre 2020 dans "The New England Journal of Medicine" ("HPV Vaccination and the Risk of Invasive Cervical Cancer") qui a apporté la preuve scientifique la plus complète sur l'efficacité du vaccin anti-HPV en prenant des cohortes de 518 319 sujets vaccinés (ayant reçu au moins une dose) et de 528 347 sujets non-vaccinés sur une période s'étendant de janvier 2006 à décembre 2017. Elle a démontré que le taux d'incidence du cancer du col de l'utérus était de 5,27 pour 100 000 chez les femmes non-vaccinées et 0,73 pour 100 000 chez les femmes vaccinées. Plus intéressant, l'étude a précisé aussi une nettement plus grande efficacité chez les jeunes femmes vaccinées avant l'âge de 17 ans (taux de 0,10 pour 100 000) par rapport à celles qui ont été vaccinées à un âge plus élevé (3,02 pour 100 000). Celles qui ont été vaccinées à un âge compris entre 20 et 30 ans se retrouvent, avec un taux de 5,16 pour 100 000, aussi exposées au cancer que les femmes non-vaccinées. Il est donc vraiment indispensable d'être vacciné avant les premières relations sexuelles.

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    Concrètement, le vaccin, qui n'est pas obligatoire mais fortement recommandé en France, est destiné aux garçons et filles entre 11 et 14 ans avec deux injections espacées de six mois. Entre 15 et 19 ans, il faut trois injections. Quant aux hommes qui ont des relations avec d'autres hommes, ils peuvent se faire vacciner jusqu'à 26 ans. Il est remboursé par la Sécurité sociale (65%) et les mutuelles et est gratuit dans les centres de vaccination. Médecins, pharmaciens et infirmiers peuvent vacciner sur prescription. Pour les jeunes femmes de plus de 20 ans, le vaccin n'est plus remboursé parce que son efficacité, comme l'étude suédoise l'a montré, est quasiment nulle.

    La décision du Président Emmanuel Macron d'organiser la campagne de vaccination dans les collèges permet donc de redonner l'initiative aux pouvoirs publics et pas aux familles. Je rappelle que ce vaccin n'est pas obligatoire mais il est utile à l'ensemble des adolescents qui commencent leur vie sexuelle. Pourquoi dans les écoles ? Parce que justement, c'est le meilleur moyen de démocratiser la vaccination. Les familles les plus pauvres vont plus rarement chez le médecin et n'iraient pas forcément spécifiquement pour la vaccination contre les papillomavirus. Dans le milieu scolaire, tous les jeunes Français se retrouvent avec une égalité des chances à se prémunir contre ces infections qui tuent plusieurs milliers de personnes par an.

    Quant à l'argument que les papillomavirus représentent peu de cancers (2% de ceux qui se déclarent au total), c'est quand même énorme : plus de 6 400 personnes chaque années sont concernées. Et surtout, ce sont les seuls cancers qu'on est capable de prévenir de manière à peu près efficace (à 90%) : ne rien faire serait criminel ! Cela vaut donc le coup de faire vacciner massivement les jeunes avant leurs premiers émois sexuels pour stopper définitivement ce type d'infections.

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    Ce raisonnement national est encore plus pertinent au niveau mondial. Dans une note de l'OMS du 22 février 2022, il est indiqué que le seul cancer du col de l'utérus est le quatrième cancer le plus courant au monde chez les femmes, estimé à 604 000 nouveaux cas en 2020 et à 342 000 décès la même année, en 2020. Et cette évidence : « Environ 90% des nouveaux cas et des décès dans le monde en 2020 sont survenus dans des pays à revenu faible ou intermédiaire. ». De plus, ce qui renforce le handicap des pays les plus pauvres : « Les femmes vivant avec le VIH sont exposées à un risque six fois plus élevé de contracter un cancer du col de l’utérus que les femmes séronégatives. ».

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    Pour compléter cet article, je recommande vivement l'écoute de l'émission "Le Téléphone Sonne" diffusée le 3 mars 2023 sur France Inter sur ce thème (qu'on peut télécharger ici), ainsi que la vidéo proposée en fin d'article, l'échange qu'a eu Emmanuel Macron (venu accompagné des ministres Pap Ndiaye et François Braun) avec les élèves de Troisième du collège de Jarnac (on remarquera que l'enseignante a encouragé discrètement ses élèves à honorer le chef de l'État en se levant à son arrivée, ce qui ne leur semblait pas une évidence).



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (02 septembre 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    2e rentrée scolaire contre les papillomavirus humains.
    Variole du singe (mpox) : "ils" nous refont le coup ?
    Covid : attention au flirt !
    Papillomavirus humains, cancers et prévention.
    Publications sur le papillomavirus, le cancer du col de l'utérus et l'effet de la vaccination anti-HPV (à télécharger).
    Émission "Le Téléphone Sonne" sur la vaccination contre les papillomavirus, sur France Inter le 3 mars 2023 (à télécharger).
    Le cancer sans tabou.
    Qu'est-ce qu'un AVC ?
    Lulu la Pilule.
    La victoire des impressionnistes.
    Science et beauté : des aurores boréales en France !
    Le Tunnel sous la Manche.
    Peter Higgs.
    Georges Charpak.
    Gustave Eiffel.
    Prix Nobel de Chimie 2023 : la boîte quantique ...et encore la France !
    Katalin Kariko et Drew Weissman Prix Nobel de Médecine 2023 : le vaccin à ARN messager récompensé !
    Covid : la contre-offensive du variant Eris.
    Hubert Reeves.
    Prix Nobel de Physique 2023 : les lasers ultrarapides, la physique attoseconde... et la France récompensée !
    Des essais cliniques sauvages ?
    John Wheeler.
    La Science, la Recherche et le Doute.
    L'espoir nouveau de guérir du sida...
    Louis Pasteur.
    Howard Carter.
    Alain Aspect.
    Svante Pääbo.
    Frank Drake.
    Roland Omnès.
    Marie Curie.








    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240902-papillomavirus.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/sante/article/2e-rentree-scolaire-contre-les-247122

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/09/04/article-sr-20240902-papillomavirus.html



  • Législatives 2024 (45) : Michel Barnier, le choix de l'apaisement

    « Ne sois jamais sectaire ! Le sectarisme est une preuve de faiblesse. Quand on est sectaire, c'est qu'on n'est pas sûr de ses idées. » (Michel Barnier, le 5 septembre 2024 à Matignon).



     

     
     


    Cette parole, elle n'est pas du nouveau chef du gouvernement, mais de sa mère lorsqu'elle a assisté à sa première réunion politique, au tout début des années 1970. Il la garde au fond du cœur comme une sorte de devise personnelle. Ça y est, enfin ! Le Président Emmanuel Macron a nommé Michel Barnier Premier Ministre ce jeudi 5 septembre 2024.

    Au bout de 51 jours de vide gouvernemental, Michel Barnier a été nommé, cumulant 51 années d'expérience politique ! À 73 ans, il entre à Matignon avec le plus grand âge de la Quatrième et de la Cinquième Républiques réunies (le précédent record était 66 ans avec Pierre Bérégovoy). Pas de la Troisième République car on peut "se souvenir" (façon d'écrire !) que Clemenceau est revenu au pouvoir à l'âge de 76 ans. Et Michel Barnier a succédé au plus jeune chef de gouvernement de toutes les républiques, Gabriel Attal (34 ans à sa nomination).

    Je suis ravi de la nomination de Michel Barnier car je crois vraiment que c'est le choix de l'apaisement. Michel Barnier est incontestablement un acteur de "l'ancien monde" dans le sens macronien du terme. Il a commencé son militantisme à l'âge de 15 ans sous les couleurs de l'UJP qui rassemblait les jeunes gaullistes. De la même promotion à Sup de Co Paris que Jean-Pierre Raffarin, il a travaillé très vite pour la politique, membre du cabinet du premier Ministre de l'Environnement Robert Poujade de 1973 à 1974, ce qui pourrait expliquer son attention portée à l'environnement qui fut son premier ministère en 1993. Il a travaillé aussi dans les cabinets des ministres Pierre Mazeaud (Jeunesse et Sports) puis Antoine Rufenacht (Commerce et Artisanat) de 1974 à 1978.

    À 22 ans, en 1973, il a conquis son premier mandat électoral, conseiller général de Bourg-Saint-Maurice, qu'il a conservé jusqu'en 1999. De mars 1982 à septembre 1999, il a présidé le conseil général de Savoie (à partir de 31 ans, plus jeune président du conseil général, département qu'il a repris à la gauche) avec un projet ambitieux, l'organisation des Jeux olympiques d'hiver en 1992 à Albertville, avec Jean-Claude Killy. Auparavant, il s'est fait élire député RPR de Savoie, en mars 1978, il était alors le plus jeune député de France, à 27 ans, après avoir été le plus jeune conseiller général.

    S'il a voté contre la dépénalisation de l'homosexualité (particulièrement anachronique) en décembre 1981 (comme beaucoup de députés de droite), il a voté pour l'abolition de la peine de mort en septembre 1981. La grande réussite des JO d'Albertville l'a propulsé sur la scène nationale. Ou plutôt, l'a conforté sur la scène nationale car dès le printemps 1989, il faisait partie des Douze Rénovateurs de l'opposition, des trentenaires et des quadragénaires voulant prendre le pouvoir sur les plus âgés. L'initiative a foiré, elle n'a duré que quelques mois (un printemps) et n'a pas eu de suite, mais elle a été une bonne école de concertation entre UDF et RPR, avec des personnalités à fort caractère : François Bayrou, Philippe Séguin, Dominique Baudis, Michel Noir, Philippe de Villiers, Charles Millon, Bernard Bosson, François Fillon et quelques autres dont Alain Carignon, le voisin, qui a conquis la mairie de Grenoble et la présidence du conseil général de l'Isère à la gauche (Hubert Dubedout et Louis Mermaz) à la même époque.


    La deuxième cohabitation l'a propulsé au gouvernement. De 1992 à 2021, Michel Barnier a eu une carrière ministérielle un peu en dents de scie, alternant mandats parlementaires (député, sénateur, député européen) et responsabilités ministérielles (Environnement, Affaires européennes, Affaires étrangères, Agriculture et Pêche) et européennes deux fois nommé commissaire européen (politique des régions, puis marché intérieur et services). Pour son second mandat, il avait rang de Vice-Président de la Commission Européenne et a tenté en 2014 et en 2019 de se présenter à la Présidence de la Commission Européenne sous l'étiquette du PPE (démocrate chrétien, parti européen de centre droit dominé par la CDU allemande). Il a eu également pour mission de négocier la sortie du Royaume-Uni de l'Union Européenne après le Brexit, d'octobre 2016 à mars 2021, où il a montré fermeté et souplesse dans les discussions (particulièrement compliquées d'un point de vue juridique).

    Dernière démarche politique de Michel Barnier, c'était sa candidature à la primaire LR de décembre 2021 : candidat le mieux placé dans les sondages, mais piètre débatteur, il s'est retrouvé à la troisième place derrière Valérie Pécresse et Éric Ciotti. C'était l'occasion de montrer sa détermination mais aussi son opposition à Emmanuel Macron à qui il voulait succéder en 2022. Pour cette élection interne, il a fait des propositions très droitières en demandant un moratoire sur l'immigration ainsi qu'un référendum et le désengagement de la France de la Cour de justice de l'Union Européenne (ce qui a beaucoup surpris les pro-Européens).

    Michel Barnier est d'abord un homme d'écoute, de dialogue, de synthèse, mais il peut être parfois dur. Par courtoisie, politesse, respect surtout, il n'a jamais insulté un seul adversaire de toute sa carrière, ce qui fait qu'il a peu d'ennemis personnels malgré sa très grande longévité politique. Il a toujours été fidèle, loyal, fiable, il est toujours resté dans son parti d'origine malgré les très nombreuses évolutions (UDR, RPR, UMP, LR). Il a su garder une neutralité dans les grandes rivalités internes. Il était très proche de Philippe Séguin et de son "gaullisme social", mais s'en est éloigné lors du référendum de Maastricht car il a fait campagne pour le oui.

    Lorsqu'il arrive à Matignon, Michel Barnier n'est pas un débauché du macronisme, comme cela a été le cas d'un autre grand élu local LR, Édouard Philippe. Il est LR et reste LR et tous les dirigeants LR ont salué sa nomination (de Laurent Wauquiez à Xavier Bertrand en passant même par Éric Ciotti). À l'évidence, Michel Barnier ne sera pas un supplétif d'Emmanuel Macron et il le montrera sans doute très rapidement avec la composition de son gouvernement.

     

     
     


    Les discours de passation des pouvoirs à Matignon ont déjà donné un aperçu. Michel Barnier a pris la parole en demandant s'il pouvait dire deux mots après le long discours de politique générale de Gabriel Attal qui voulait prendre date. Michel Barnier a aussi ironisé sur les "conseils" de son prédécesseur (qui pourrait être son fils ; ce n'est pas à un vieux singe qu'on apprend à faire des grimaces, dit le proverbe). Michel Barnier est aimable, courtois, mais n'hésite pas à montrer sa détermination. Il a été un négociateur très rude face aux Britanniques, ce qui a été favorable aux Européens que nous sommes.

    Bien entendu, sa très grande expérience européenne est un atout pour redresser les comptes publics et convaincre la Commission Européenne que la France va se remettre sur les rails du désendettement. Il connaît tous les chefs d'État et de gouvernement. Il n'a pas à se faire connaître, il est immédiatement opérationnel.

    D'ailleurs, il a annoncé qu'il allait recevoir tous les groupes politiques dès ce jeudi soir, y compris le RN et les insoumis. Respecter, cela veut dire pour lui écouter. Cela n'engage à rien, et sans doute que son premier exploit sera de faire un budget qui puisse recueillir une majorité ou, au moins, puisse ne pas recevoir de majorité contre.
     

     
     


    C'est pour Michel Barnier une opération suicide : pour combien de temps sera-t-il à Matignon ? Tout le monde l'ignore. C'est un défi particulièrement motivant. Et puis, il n'a rien à perdre. Il n'envisageait pas de candidature à l'élection présidentielle de 2027 (il aurait 76 ans). Il est complètement libre, et son autorité, il la doit à lui seul, à son expérience, à ses réseaux, à son bilan, à ses réussites.

    Dans les réactions, celles du RN ont été étonnantes. Au début de la matinée, avant la nomination, des députés RN ont particulièrement chargé Michel Barnier (j'y reviendrai peut-être), mais vite stoppés par Marine Le Pen qui a préféré le bénéfice du doute. Sa réaction officielle : « Il semble répondre au premier critère : c'est un homme respectueux des forces politiques. (…) Sur les sujets de fonds, nous attendrons de voir quel est le discours de politique générale de Monsieur Barnier. (…) Nous serons attentifs au projet qu'il portera. (…) Les sujets de fond qui nous intéressent (…) [sont] l'immigration, la sécurité et le pouvoir d'achat des Français. (…) Nous ne participerons pas à un gouvernement de Michel Barnier. ».

    En revanche, son rival d'extrême droite, Éric Zemmour, n'a pas arrêté les hostilités : « Macron vient de remplacer un Macron avec 10 ans de moins par un Macron avec 30 de plus ». Pas très constructif !

    Dans le camp présidentiel, c'est contrasté. Certains ont applaudi rapidement comme Édouard Philippe et Yaël Braun-Pivet qui a demandé l'ouverture d'une session extraordinaire. D'autres sont plus prudents et veulent connaître la feuille de route du nouveau Premier Ministre.

    C'est à gauche que la situation est complètement ubuesque, par les déclarations notamment de Jean-Luc Mélenchon, Marine Tondelier et la palme revient à Olivier Faure. Tous ces irresponsables politiques ont parlé d'un déni démocratique, croyant encore à leur fable qu'à 193 députés sur 577, ils avaient gagné les élections. Une affirmation totalement stupide puisque aujourd'hui a été confirmée une coalition entre le camp présidentiel et LR, ce qui fait 213 députés (sans compter LIOT), confirmés déjà lors du vote pour le perchoir.

    On peut comprendre la déception des électeurs de gauche mais certainement pas les vociférations des mélenchonistes et mélenchonés. Olivier Faure a regretté l'absence d'un Premier Ministre de gauche. Mais il avait pourtant la possibilité avec Bernard Cazeneuve : Emmanuel Macron était prêt à le nommer à Matignon, mais c'est le PS qui a refusé d'apporter un soutien ou même une neutralité bienveillante à son ancien membre (le dernier Premier Ministre socialiste actuellement). C'est donc bien à cause des socialistes qu'Emmanuel Macron a été obligé de se tourner vers sa droite.

    De toute façon, il n'y avait pas trente-six possibilités : trois blocs à peu près égaux. Donc, forcément, dans la coalition, il y a le bloc central. La volonté d'Emmanuel Macron et aussi de Gabriel Attal, était de nommer un Premier Ministre de centre gauche, et Bernard Cazeneuve répondait à toutes les exigences. Il a été hué par son propre camp. Avec l'assurance d'être censuré immédiatement. Comme il n'était pas possible de nommer à Matignon un responsable du camp présidentiel, il ne restait plus qu'un membre de LR. Michel Barnier est un point d'équilibre dans une coalition vers la droite, mais du simple fait stupide de la posture jusqu'au-boutiste des socialistes qui ont refusé de négocier sur le projet de gouvernement (qui devait rester le programme de la nouvelle farce populaire). Marine Tondelier a eu des propos absolument choquants sur LCI, insultant le Président de la République de pervers, refusant de voir la réalité arithmétique de l'Assemblée.

    Michel Barnier ne renoncera cependant pas à trouver un terrain d'entente avec les socialistes sur le budget et sur des textes bien précis, mais cela reste encore dans l'ordre de la mission impossible. La véhémence des réactions de la gauche ultradicaliée est peut-être à la mesure de la croyance qu'elle a apportée à ses propres illusions : non, vous n'avez pas gagné les élections ! Et cette nomination à Matignon sonne la fin de la récréation. Socialistes, si vous êtes dans l'opposition, c'est simplement par votre propre et seule faute !


    Pour Les Républicains, c'est évidemment une renaissance miraculeuse après une élection présidentielle, des élections européennes et des élections législatives désastreuses. La seule différence avec le PS, c'est que les dirigeants de LR ont pris (enfin) leurs responsabilités et ont commencé à agir pour l'intérêt national et pas l'intérêt partisan. Par effet miroir, cela ancre également le parti présidentiel dans le camp de la droite modérée.

    En revanche, les allusions à une sorte de collusion entre le macronisme et le RN sont parfaitement ridicules. Simplement, à quelques semaines d'un procès pas particulièrement flatteurs, les dirigeants du RN préfèrent temporairement fermer cette période de crise et attendre des jours meilleurs avant de précipiter le cas échéant une élection présidentielle.

    L'histoire ne dit pas encore l'avenir du gouvernement Barnier. Mais il est certain déjà que la désignation de Michel Barnier était l'un des meilleurs choix possibles pour sortir de l'impasse politique. Les gens de gauche, méfiez-vous : le peuple pourrait apprécier ! Michel Barnier sera le Premier Ministre de l'apaisement, et après deux campagnes électorales très stressantes, c'était ce que le peuple voulait avec la trêve estivale et olympique. Michel Barnier est en capacité d'apporter cet apaisement... et rien ne dit qu'il ne sera pas populaire dans les prochains jours.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (05 septembre 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Législatives 2024 (45) : Michel Barnier, le choix de l'apaisement.
    Législatives 2024 (44) : l'introuvable Premier Ministre.
    Édouard Philippe massivement candidat.
    Législatives 2024 (43) : Haro sur le Beaudet !
    Législatives 2024 (42) : Bernard Cazeneuve et le retour à la case départ ?
    Législatives 2024 (41) : intérêt national et mode de scrutin.
    Législatives 2024 (40) : Patrick Cohen a raison !
    Législatives 2024 (39) : Consultations et mains tendues !
    Législatives 2024 (38) : la coconstruction du Premier Ministre.
    Législatives 2024 (37) : stupide chantage à la destitution !
    Législatives 2024 (36) : Gérald Darmanin plaide pour un Premier Ministre non macroniste !
    François Hollande sera-t-il le Premier Ministre de son ancien Ministre de l'Économie ?
    Législatives 2024 (35) : Vers une cohabitation du troisième type ?
    Législatives 2024 (34) : Lucie Castets noyée dans une réalité alternative !
    Législatives 2024 (33) : Le grain de sel du Sénat !
    Législatives 2024 (32) : Le casse-tête de Lucie Castets.
    Législatives 2024 (31) : Emmanuel Macron et les joyeux JO.
    Interview du Président Emmanuel Macron le 23 juillet 2024 sur France 2 (vidéo intégrale).
    Claude Malhuret au Sénat : le spectacle continue !
    Législatives 2024 (30) : coalition ou pacte ?
    Législatives 2024 (29) : le staff de l'Assemblée Nationale.
    Législatives 2024 (28) : la stratégie du chaos institutionnel de Jean-Luc Mélenchon.
    Législatives 2024 (27) : l'émotion de Yaël Braun-Pivet.
    Législatives 2024 (26) : les larmes de Marine Tondelier.
    Législatives 2024 (25) : faut-il ostraciser le RN à l'Assemblée Nationale ?
    Législatives 2024 (24) : Huguette Bello, mélenchonette en peau de lapin.
    Législatives 2024 (23) : grand pays recherche son gouvernement.
    Législatives 2024 (22) : qui au perchoir ?
    Législatives 2024 (21) : marche sur Matignon ?
    Lettre aux Français par Emmanuel Macron le 10 juillet 2024 (texte intégral).
    Législatives 2024 (20) : le poison du scrutin proportionnel.
    Législatives 2024 (19) : quel possible Premier Ministre pour une impossible majorité ?
    Législatives 2024 (18) : la fin du cauchemar Bardella (pour le moment).
    Résultats du second tour des élections législatives du 7 juillet 2024.
    Fake news : la scandaleuse manipulation politique du RN.
    Législatives 2024 (17) : rien n'est joué dimanche prochain !
    Législatives 2024 (16) : la question de dimanche prochain.
    Législatives 2024 (15) : les promesses n'engagent que ceux qui y croient !
    Législatives 2024 (14) : la revanche des gilets jaunes ?
    Législatives 2024 (13) : fortes mobilisations au premier tour.
    Résultats du premier tour des élections législatives du 30 juin 2024.
    Appel aux sociaux-démocrates.
    Éric Le Boucher : la France va plutôt bien (27 juin 2024).
    Législatives 2024 (12) : un isoloir, ce n'est pas un cabine d'essayage !
    Législatives 2024 (11) : front, rassemblement, union nationale, barrage, consignes de vote...
    Législatives 2024 (10) : il était une fois Jordan Bardella, Gabriel Attal et Manuel Bompard.
    Législatives 2024 (9) : Emmanuel Macron et son n'ayez-pas-peur !
    Interview d'Emmanuel Macron à Génération Do It Yourself le 24 juin 2024 (podcast intégral).
    Lettre aux Français d'Emmanuel Macron le 23 juin 2024 (texte intégral).
    Législatives 2024 (8) : la bataille de Matignon.
    Le programme aux élections législatives du 30 juin 2024 d'Ensemble pour la République (document à télécharger).
    Législatives 2024 (7) : Ensemble pour la République.
    Législatives 2024 (6) : Nicolas Sarkozy et François Fillon bougent encore !
    Législatives 2024 (5) : le trouble de Lionel Jospin.
    Législatives 2024 (4) : l'angoisse de Manuel Valls.
    Législatives 2024 (3) : François Hollande dans l'irresponsabilité totale !
    Législatives 2024 (2) : clarification ou chaos ?
    Législatives 2024 (1) : vaudeville chez Les Républicains.
    Sidération institutionnelle.
    Élections européennes 2024 (4) : la surprise du chef !
    Résultats des élections européennes du dimanche 9 juin 2024.






    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240905-barnier.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/legislatives-2024-45-michel-256643

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/09/05/article-sr-20240905-barnier.html




     

  • Législatives 2024 (44) : l'introuvable Premier Ministre

    « J'ai surtout vu le caractère ingouvernable d'une Assemblée sans aucune majorité nette. Le RN est le premier parti, mais le bloc le moins important ; le NFP rassemble 193 députés ; et entre le NFP et le RN, il y a un bloc central de 235 députés en incluant l'ex-majorité, les LIOT et la Droite républicaine (…) Le bloc du NFP est plus restreint que le bloc central. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle le NFP n'a pas réussi à faire élire monsieur Chassaigne à la Présidence de l'Assemblée. » (Édouard Philippe, le 3 septembre 2024 dans "Le Point").



     

     
     


    Si on devait refaire le film, aucun doute que le meilleur scénario aurait été, pour le Président de la République, de nommer immédiatement un Premier Ministre, juste après le scrutin du 7 juillet 2024, le lundi ou le mardi qui suivaient. Bernard Cazeneuve aurait fait l'affaire. Certes, à l'époque, les mélenchonistes et toute la gauche mélenchonisée (appelée la nouvelle farce populaire) aurait déjà agité leurs chiffons rouges en disant, tel Sisyphe, "On a gagné ! On a gagné" (comme aussi la peluche singe mécanique qui sur une cymbale grâce à une pile), laissant comprendre qu'une partie de la classe politique, apparemment autiste, était hébergée en HP, mais l'avantage de l'Élysée était qu'à l'époque, le NFP n'avait pas encore "choisi" son champion, en l'occurrence, sa championne.

    Même après "l'épisode" Lucie Castets, Emmanuel Macron aurait pu proposer Bernard Cazeneuve dans l'objectif d'avoir un Premier Ministre qui ne soit pas immédiatement censuré par l'Assemblée. Il aurait donc pu, dès la fin de juillet, le nommer avec moins de risque qu'aujourd'hui. En effet, à l'époque, si le RN avait rejeté en bloc tout Premier Ministre émanant du NFP, il avait laissé entendre que Bernard Cazeneuve était un homme d'État et qu'il se prononcerait sur les textes qu'il proposerait à l'Assemblée et pas a priori.

    Parallèlement, Bernard Cazeneuve n'était pas vraiment demandeur, mais sait "prendre ses responsabilités", comme on dit. Dans ce cas, alors que son nom était hué par la gauche ultradicalisée, il devait donner des garanties à cette gauche-ci, ou du moins, au PS mélenchonisé par Olivier Faure (vendu aux insoumis à faible prix). Otage du NFP ? Sans doute. La nomination aurait pu intervenir le week-end dernier. Mais hélas (pour lui, peut-être pas pour la France), ce week-end-là, justement, il s'est fait huer par les propres troupes du PS à Blois, à l'instigation d'une invitée ex-communiste, ex-insoumise et désormais écologiste Clémentine Autain. Le résultat du bureau national du PS qui a suivi le 3 septembre 2024 (très divisé) a définitivement écarté la solution Cazeneuve par 38 voix contre 33 (voyez à quoi ça tient). De toute façon, l'Élysée était déjà passé à une autre hypothèse.

    Le 2 septembre 2024, ce fut la brève hypothèse Thierry Beaudet dont l'appartenance à la gauche a été de plus en plus décrite, aussi pour des proximités moins fréquentables, pour aussi d'autres éléments de sa biographie plus ou moins vérifiés, mais la première raison de l'échec de l'hypothèse, c'est qu'il mettait un consensus sur sa non-désignation, même dans les rangs du camp présidentiel, car il faut absolument à Matignon une personnalité expérimentée en politique et aussi aux joutes parlementaires. Avant même que cette hypothèse n'explosât définitivement, Xavier Bertrand est revenu sur le tapis.

    Dès lors que le Président de la République ne peut attendre aucun soutien par défaut (par non-censure) des députés PS, autant revenir vers le centre droit dont le bloc comporte le plus grand nombre de députés, comme l'a rappelé Édouard Philippe le 3 septembre 2024. Xavier Bertrand coche toutes les cases, l'origine à droite, la capacité de nouer des alliances à gauche (au conseil régional des Hauts-de-France qu'il préside), on parle d'un supposé "gaullisme social" (expression qui ne veut rien dire en fait), ancien disciple de Philippe Séguin, il a beaucoup d'expérience politique (maire de Saint-Quentin, député, ministre, président du conseil régional, secrétaire général de l'UMP, etc.)... sauf une case !

    Cette case, c'est l'indulgence du groupe RN. Comme le PS ne fera pas de cadeau au futur Premier Ministre (comprendre, votera une motion de censure dès sa nomination), il faut la neutralité du RN. Mais le RN n'a pas la volonté politique d'accepter la désignation à Matignon de Xavier Bertrand car il est l'un des pires adversaire du RN dans les Hauts-de-France, battant deux fois le RN aux élections régionales, dont Marine Le Pen en décembre 2015, et se déclarant le meilleur rempart contre le RN version nordiste (en PACA, c'est une autre affaire). L'opposition du RN à Xavier Bertrand était prévisible, mais par ricochet, le RN ne pouvait plus accepter Bernard Cazeneuve non plus sans rendre incompréhensible ses postures politiques auprès de ses électeurs. Plus fumeux, le petit groupe des 16 députés ciottistes (vendus au RN à faible prix) a aussi annoncé qu'il censurerait Xavier Bertrand le cas échéant. Il faut toutefois rappeler que Xavier Bertrand et Éric Ciotti ont été dans le même parti pendant plusieurs décennies ! Ambiance.

    Alors que la journée du mercredi 4 septembre 2024 aurait dû être consacrée par la nomination de Xavier Bertrand (qui, affirme-t-il, n'a pas à commenter les réflexions présidentielles), l'hypothèse a été balayée par les déclarations des députés RN qui ont montré qu'ils avaient de l'influence même s'ils ne peuvent pas et ne veulent pas participer au prochain gouvernement. La tentative de mettre David Lisnard, le très ambitieux maire de Cannes, n'a pas duré plus de quelques heures en raison de ses positions très droitières et de l'opposition de certains députés macronistes eux-mêmes.

    Car il ne faut pas oublier, c'est un "jeu" (pas très ludique) à trois. Il y a les exigences du NFP (et en particulier du PS qui, détaché du NFP, pourrait faire majorité avec le bloc central), il y a les exigences du RN, mais il ne faut pas oublier que le camp présidentiel a tout autant la légitimité et le droit d'avoir aussi ses exigences dont la principale est de ne pas abroger la réforme des retraites et de ne pas saborder la politique réussie d'attractivité économique de la France.

     

     
     


    Dans la soirée du 4 septembre 2024, on s'est retrouvé, à l'Élysée, de nouveau à la case départ. "Pas de nomination ce soir" ont pu annoncé fiévreusement les journalistes impatients qui étaient allés aux nouvelles au château. Le résultat, c'est que d'autres noms sont donc encore "en cours d'évaluation". Donc, les consultations ont repris.

    Et qui ? On parle de Michel Barnier. Il a 73 ans, même génération que François Bayrou et Jean-Luc Mélenchon. Lui aussi, de centre droit, il est un petit génie de la politique et jouit d'une très grande expérience politique (président de conseil général à 31 ans, député à 27 ans, sénateur, ministre, commissaire européen). Il a été en particulier Ministre des Affaires étrangères, Ministre de l'Agriculture, Ministre de l'Environnement, commissaire européen pendant une dizaine d'années. Son point d'expérience le plus fort est certainement sa désignation comme Négociateur en chef chargé du Brexit, et défendant avec beaucoup de fermeté les intérêts des pays européens (en particulier la France) face au Royaume-Uni du 1er octobre 2016 au 31 mars 2021. Trentenaire ambitieux, Michel Barnier a fait partie des (brefs) Douze Rénovateurs au printemps 1989, aux côtés notamment de Philippe Séguin, Michel Noir, Dominique Baudis, François Bayrou, François Fillon, Bernard Bosson, etc.

    Par ailleurs, Michel Barnier a tenté de conquérir la Présidence de la Commission Européenne en 2019 (sans succès en raison de l'hégémonie des députés PPE allemands) et a participé à la primaire LR de décembre 2021, placé le 2 décembre 2021 en troisième position ...devant Xavier Bertrand ! Il bénéficie du soutien de tous les pro-Européens, notamment au sein du bloc central, mais aussi, peut-être, d'un soutien aux partisans de thèses plus droitières car durant sa campagne à la primaire LR, il a développé, surprenant de nombreux observateurs (dont moi-même), des thèmes très droitiers, proposant un référendum sur l'immigration ou encore voulant se désengager de la Cour Européenne des Droits de l'Homme (CEDH), ce qui pourrait entraîner une neutralité bienveillante du groupe RN (je m'avance certainement un peu trop vite : le RN semble aussi choisir une autre voie, celle de l'obstruction systématique pour pousser Emmanuel Macron à la démission).

    Une autre personnalité pourrait aussi être étudiée pour Matignon, il s'agit de Valérie Pécresse (57 ans), propulsée par Jacques Chirac, ancienne ministre, ancienne députée, actuelle présidente du conseil régional d'Île-de-France (depuis 2015) et aussi ancienne candidate à l'élection présidentielle de 2022, choisie le 4 décembre 2021 par les adhérents de LR face à Éric Ciotti, Michel Barnier et Xavier Bertrand et crédité, à ce moment-là, jusqu'à 15% d'intentions de vote avant de s'écrouler sous la barre des 5%. L'atout tant de Michel Barnier que de Valérie Pécresse, c'est qu'ils ne seront sans doute pas candidats à la prochaine élection présidentielle.

    La position psychorigide irresponsable des socialistes sous influence de Jean-Luc Mélenchon n'a finalement qu'une seule conséquence concrète : il donne au groupe RN un énorme pouvoir d'influence sur le choix du prochain Premier Ministre ou la continuité de la vie politique en général. Drôle d'effet pour des partisans du front républicain.



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (04 septembre 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Législatives 2024 (44) : l'introuvable Premier Ministre.
    Édouard Philippe massivement candidat.
    Législatives 2024 (43) : Haro sur le Beaudet !
    Législatives 2024 (42) : Bernard Cazeneuve et le retour à la case départ ?
    Législatives 2024 (41) : intérêt national et mode de scrutin.
    Législatives 2024 (40) : Patrick Cohen a raison !
    Législatives 2024 (39) : Consultations et mains tendues !
    Législatives 2024 (38) : la coconstruction du Premier Ministre.
    Législatives 2024 (37) : stupide chantage à la destitution !
    Législatives 2024 (36) : Gérald Darmanin plaide pour un Premier Ministre non macroniste !
    François Hollande sera-t-il le Premier Ministre de son ancien Ministre de l'Économie ?
    Législatives 2024 (35) : Vers une cohabitation du troisième type ?
    Législatives 2024 (34) : Lucie Castets noyée dans une réalité alternative !
    Législatives 2024 (33) : Le grain de sel du Sénat !
    Législatives 2024 (32) : Le casse-tête de Lucie Castets.
    Législatives 2024 (31) : Emmanuel Macron et les joyeux JO.
    Interview du Président Emmanuel Macron le 23 juillet 2024 sur France 2 (vidéo intégrale).
    Claude Malhuret au Sénat : le spectacle continue !
    Législatives 2024 (30) : coalition ou pacte ?
    Législatives 2024 (29) : le staff de l'Assemblée Nationale.
    Législatives 2024 (28) : la stratégie du chaos institutionnel de Jean-Luc Mélenchon.
    Législatives 2024 (27) : l'émotion de Yaël Braun-Pivet.
    Législatives 2024 (26) : les larmes de Marine Tondelier.
    Législatives 2024 (25) : faut-il ostraciser le RN à l'Assemblée Nationale ?
    Législatives 2024 (24) : Huguette Bello, mélenchonette en peau de lapin.
    Législatives 2024 (23) : grand pays recherche son gouvernement.
    Législatives 2024 (22) : qui au perchoir ?
    Législatives 2024 (21) : marche sur Matignon ?
    Lettre aux Français par Emmanuel Macron le 10 juillet 2024 (texte intégral).
    Législatives 2024 (20) : le poison du scrutin proportionnel.
    Législatives 2024 (19) : quel possible Premier Ministre pour une impossible majorité ?
    Législatives 2024 (18) : la fin du cauchemar Bardella (pour le moment).
    Résultats du second tour des élections législatives du 7 juillet 2024.
    Fake news : la scandaleuse manipulation politique du RN.
    Législatives 2024 (17) : rien n'est joué dimanche prochain !
    Législatives 2024 (16) : la question de dimanche prochain.
    Législatives 2024 (15) : les promesses n'engagent que ceux qui y croient !
    Législatives 2024 (14) : la revanche des gilets jaunes ?
    Législatives 2024 (13) : fortes mobilisations au premier tour.
    Résultats du premier tour des élections législatives du 30 juin 2024.
    Appel aux sociaux-démocrates.
    Éric Le Boucher : la France va plutôt bien (27 juin 2024).
    Législatives 2024 (12) : un isoloir, ce n'est pas un cabine d'essayage !
    Législatives 2024 (11) : front, rassemblement, union nationale, barrage, consignes de vote...
    Législatives 2024 (10) : il était une fois Jordan Bardella, Gabriel Attal et Manuel Bompard.
    Législatives 2024 (9) : Emmanuel Macron et son n'ayez-pas-peur !
    Interview d'Emmanuel Macron à Génération Do It Yourself le 24 juin 2024 (podcast intégral).
    Lettre aux Français d'Emmanuel Macron le 23 juin 2024 (texte intégral).
    Législatives 2024 (8) : la bataille de Matignon.
    Le programme aux élections législatives du 30 juin 2024 d'Ensemble pour la République (document à télécharger).
    Législatives 2024 (7) : Ensemble pour la République.
    Législatives 2024 (6) : Nicolas Sarkozy et François Fillon bougent encore !
    Législatives 2024 (5) : le trouble de Lionel Jospin.
    Législatives 2024 (4) : l'angoisse de Manuel Valls.
    Législatives 2024 (3) : François Hollande dans l'irresponsabilité totale !
    Législatives 2024 (2) : clarification ou chaos ?
    Législatives 2024 (1) : vaudeville chez Les Républicains.
    Sidération institutionnelle.
    Élections européennes 2024 (4) : la surprise du chef !
    Résultats des élections européennes du dimanche 9 juin 2024.

     

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240904-introuvable-premier-ministre.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/legislatives-2024-44-l-introuvable-256620

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/09/04/article-sr-20240904-introuvable-premier-ministre.html



     

  • Édouard Philippe massivement candidat à la succession d'Emmanuel Macron !

    « Il ne faut jamais désespérer de notre pays, nous avons des ressources, des talents, des énergies, des compétences ! Je pense sincèrement que si nous cessons de nous bercer d'illusions et si nous nous rassemblons, nous pouvons construire une France plus prospère, plus juste, plus forte et plus libre. » (Édouard Philippe, "Le Point", le 3 septembre 2024).


     

     
     


    L'ancien Premier Ministre Édouard Philippe a annoncé très clairement et très officiellement sa candidature à la prochaine élection présidentielle dans une interview publiée ce mardi 3 septembre 2024 dans la soirée (peu avant 20 heures) dans l'hebdomadaire "Le Point" : « Je serai candidat à la prochaine élection présidentielle. (…) J'ai créé un parti politique, Horizons, pour continuer à être un acteur de la vie politique nationale. (…) On dit souvent que pour une présidentielle il ne faut avoir envie de rien d'autre. J'y souscris. ».

    Il est même allé plus loin, puisqu'à la dernière question des journalistes Mathilde Siraud et Valérie Toranian qui l'ont interviewé, à savoir : « Vous êtes prêt ? Y compris en cas de présidentielle anticipée ? », le maire du Havre a répondu sobrement : « Je vous le confirme ! ».

    Édouard Philippe a une image publique très singulière : barbu avec encore quelques cheveux foncés et sans lunettes à Matignon, le voici, pour cause de maladie, imberbe, quasi-chauve (pas tout à fait, et ce qui reste de cheveux est blanc), presque à la manière d'un Edgar Faure (mais en longiligne), sans sourcils mais lunettes à grosse monture noire qu'il a troquée pour une fine monture, comme l'ont décrit les deux journalistes qui l'ont rencontré à son bureau de la mairie du Havre : « On le retrouve fidèle à lui-même, teint hâlé et fine monture de lunettes, boutons de manchette en forme de sablier, toujours prêt à faire montre de ses épatants talents d'imitateur. ».

    Je dois avouer que j'apprécie beaucoup Édouard Philippe, tant lorsqu'il a été Premier Ministre que comme responsable politique en général, la personnalité comme son positionnement politique, son souci de la rigueur dans l'expression, sa grande intelligence, sa prudence, sa compréhension de la France des territoires que le Président de la République a toujours eu du mal à comprendre, et même son autodérision... mais depuis 2022, je peine à bien comprendre ses initiatives ou non initiatives.


    Qu'il ait fondé son propre parti Horizons pour garder son autonomie politique vis-à-vis du camp présidentiel était tout à fait justifié, et il a fait ce que François Bayrou avait fait bien avant Emmanuel Macron avec le MoDem. En revanche, j'ai été très étonné de la grande passivité d'Édouard Philippe lors de la campagne présidentielle de 2022 car il n'a pris quasiment aucune part active audible dans le soutien à Emmanuel Macron.

    J'ai également été très étonné par son attitude lors de la dissolution du 9 juin 2024. Certes, comme tous les autres responsables de la majorité présidentielle, il a été ulcéré par cette décision troublante, et il a aussi expliqué au début de la campagne des élections législatives anticipées qu'il ne fallait pas disserter sur les raisons de la dissolution mais qu'il fallait aller au combat pour faire gagner son camp, comme il l'a affirmé entre autres le 17 juin 2024 sur BFMTV.





    Mais j'ai été étonné qu'il ne fût pas candidat lui-même aux élections législatives alors que le centre de gravité de la vie politique française allait se situer, au moins pour un an, dans l'hémicycle du Palais-Bourbon, et d'ailleurs, d'autres responsables politiques l'ont bien compris, de Marine Le Pen à Laurent Wauquiez, et évidemment Gabriel Attal, Gérald Darmanin et Élisabeth Borne. Non seulement il n'a pas voulu redevenir député, mais il a parfois présenté des candidats Horizons contre des candidats de la majorité présidentielle à un moment particulier de la vie politique où le RN était en possibilité favorable d'emporter une majorité absolue à l'Assemblée.

    Alors, je m'étonne ce mardi soir de cette annonce de candidature à la prochaine élection présidentielle, alors que le nouveau Premier Ministre n'est toujours pas désigné après presque deux mois du second tour des élections législatives. Nous sommes, qu'on le veuille ou pas, dans une crise politique puisqu'on n'a pas de gouvernement, et Édouard Philippe se permet de penser au temps t+1 voire t+2. Car la situation politique à la prochaine élection présidentielle aura assurément beaucoup évolué depuis cette fin d'été.


    D'ailleurs, des adversaires politiques l'ont bien compris comme cela. Ainsi Olivier Faure, l'insipide premier secrétaire du PS, a considéré que cette annonce montrait à quel point Édouard Philippe ne croyait plus à la seconde moitié du second quinquennat d'Emmanuel Macron puisqu'il souhaite passer tout de suite à la séquence suivante.

    Ce qui est très étrange, c'est qu'Édouard Philippe a fait dans la même interview ce qu'il reprochait tant à Laurent Wauquiez qu'à Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon et quelques autres, se préoccuper de la future élection présidentielle et oublier l'intérêt national et le pays qui doit être gouverné d'ici là, en l'exprimant dès le début de l'entretien : « Quand il s'agit de la France, je recommande vivement de n'être ni aveuglé par le passé, ni obsédé par le futur. ».

     

     
     


    Édouard Philippe a démarré l'interview avec une charge singulière contre Emmanuel Macron : « J'ai déjà eu l'occasion de dire tout le mal que je pensais de la façon dont cette décision de dissoudre avait été pensée et exécutée. Mais avant la décision de dissoudre, il y a eu, en janvier, la décision de changer de Premier Ministre. J'avais recommandé au Président de la République de conserver Élisabeth Borne, qui me paraissait accomplir sa mission avec loyauté et abnégation, jusqu'aux européennes. Après le 9 juin, il aurait pu, s'il l'estimait nécessaire, changer de Premier Ministre pour changer de politique. Ce ne fut pas la décision du Président de la République. ».

    Édouard Philippe fait partie des quelques personnalités politiques qui sont aujourd'hui populaires dans les sondages de popularité. Mais il ne l'avait pas été lorsqu'il était à Matignon. Grand connaisseur de notre histoire politique, l'ancien Premier Ministre devrait savoir qu'une forte popularité ne signifie pas forcément, pour ne pas dire jamais, à une élection à la Présidence de la République : avant lui, nombreux candidats l'ont compris à leurs dépens, Raymond Barre en 1988, Édouard Balladur en 1995, Lionel Jospin en 2002, François Bayrou en 2007, Ségolène Royal en 2007, Alain Juppé en 2016, Manuel Valls en 2017, etc. Car souvent, la popularité tient à ce que des sondés du camp adverse trouvent le personnage sympathique mais pour qui, dans l'isoloir, il ne serait pas question de voter.

    Sa lecture des élections législatives est la suivante : « Trois sentiments ont prévalu : la déception des électeurs RN, le soulagement dans le bloc central (…), et l'enthousiasme de la gauche, qui prétend avoir gagné. Pour ma part, j'ai surtout vu le caractère ingouvernable d'une Assemblée sans aucune majorité nette. Le RN est le premier parti, mais le bloc le moins important ; le NFP rassemble 193 députés ; et entre le NFP et le RN, il y a un bloc central de 235 députés en incluant l'ex-majorité, les LIOT et la Droite républicaine, dont 47 députés LR qui affirment ne pas vouloir participer à ce bloc, mais qui votent avec lui… ». Et de le répéter plus tard : « Je redis que le bloc du NFP est plus restreint que le bloc central. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle le NFP n'a pas réussi à faire élire monsieur Chassaigne à la Présidence de l'Assemblée. ».


    Pour Édouard Philippe, la situation est dangereuse car il y a de nombreux dangers dont le premier est le sentiment de s'être fait voler l'élection avec la frustration des électeurs du RN qui n'ont pas gagné ces élections, mais aussi celle des électeurs de gauche qui croient, avec plus ou moins de bonne foi, qu'ils les ont gagnées. L'autre risque est bien sûr ce qu'il a appelé « le péril budgétaire que je crois sous-estimé » avec une absence grandissante de crédibilité de la parole de la France : « Mon sentiment c'est que nous sommes au bord de la falaise. Que l'instabilité politique perdure, ou qu'un gouvernement prenne des mesures directement contraires à nos engagements, et nous risquons l'accident majeur. ». Le troisième danger est l'immobilisme : « On ne parle plus des sujets importants qui ne se régleront pas si nous ne faisons rien : l'Éducation devrait être notre priorité et on n'en parle plus ; l'Écologie devrait nous obnubiler, plus personne n'en parle. C'est désastreux. Nous vivons une crise terrible du logement, qui limite les perspectives d'un grand nombre de nos concitoyens. (…) L'immobilisme a un coût considérable sur ces sujets notamment. ». Enfin, le quatrième danger est l'ordre public, la sécurité et la justice (il est notamment favorable aux peines planchers en matière de récidive).
     

     
     


    Malgré ces quatre dangers, Édouard Philippe reste très optimiste pour l'avenir de la France : « Très souvent, quand je suis à Paris, je m'inquiète. Et quand je suis dans le pays, je me rassure. Je vois partout des initiatives incroyables dans une multitude de domaines. J'ai l'impression que, partout où je vais en France, je suis à 15 kilomètres d'une pépite. ». Sans oublier les Jeux olympiques et paralympiques : « Qu'est-ce qu'on a entendu avant ! La vérité, c'est que les organisateurs ont fait un travail remarquable, que les pouvoirs publics ont été à la hauteur, que les athlètes nous ont fait rêver et que l'ambiance était exceptionnelle. Et je dois dire que dans un pays qui doute, cela a fait du bien ! Qu'en restera-t-il ? J'espère un peu plus d'humilité pour ceux qui critiquent toujours tout avant… ».

    Par ailleurs, le Normand est résolument opposé au scrutin proportionnel : « Je suis très attaché au scrutin majoritaire. Notamment parce qu'il impose un lien entre un député et les électeurs d'un territoire. Je me demande parfois si on ne devrait pas, pour les élections législatives, instituer la même règle que pour l'élection présidentielle, c'est-à-dire qu'au deuxième tour restent seulement les deux premiers. ». Et d'ajouter : « Méfions-nous d'un mode de scrutin qui laisserait la possibilité aux états-majors de partis politiques parisiens de construire des listes de candidats sans aucun lien avec les réalités politiques locales. ».

    Dans les discussions actuelles pour la formation du gouvernement, Édouard Philippe a confirmé son désaccord avec Laurent Wauquiez : « La droite doit s'engager ! En refusant de participer à ce bloc central, elle précipite l'ensemble vers la gauche. J'observe d'ailleurs qu'il y a un certain nombre de gens, au sein de cette Droite républicaine, qui seraient prêts à prendre leurs responsabilités, parce qu'ils pensent que c'est nécessaire pour le pays. J'en connais ! Tous les partis de gouvernement devraient avoir pour objectif principal de favoriser la stabilisation de la vie politique. ».


    D'ailleurs, sa logique actuelle est claire : « Je soutiendrai tout Premier Ministre choisi dans un espace politique qui va de la droite conservatrice à la social-démocratie et qui inscrira son action dans cet espace politique en construisant les compromis pour avancer. ». C'est valable notamment pour Bernard Cazeneuve, autre Normand, auquel il a succédé à Matignon en 2017 : « Entre des maires de grandes villes portuaires normandes, il y a toujours une amitié qui fait fi des logiques partisanes. Et je ne suis pas non plus insensible à son sens de la fidélité, de la nuance et de l'humour, qualités rares par les temps qui courent. ». Et pour Xavier Bertrand : « Nous partageons la même culture d'élu local de territoires populaires et ouvriers, le même engagement contre les extrêmes. ».

    Il n'en reste pas moins que l'esprit d'Édouard Philippe est ailleurs, dans la future campagne présidentielle : « Je me prépare pour proposer des choses aux Français. Ce que je proposerai sera massif. Les Français décideront. ». En quelque sorte, ses déclarations du 3 septembre 2024 sont la déclaration de Rome [17 janvier 1969] de l'ancien Premier Ministre. Mais n'est pas Georges Pompidou forcément qui veut...



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (03 septembre 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Édouard Philippe massivement candidat à la succession d'Emmanuel Macron !
    Édouard Philippe prêt à décoller.
    De nouveaux Horizons.

     

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240903-edouard-philippe.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/edouard-philippe-massivement-256609

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/09/03/article-sr-20240903-edouard-philippe.html


     

  • Législatives 2024 (43) : Haro sur le Beaudet !

    « Les résultats des élections législatives redessinent largement le paysage politique de notre pays. Une nouvelle fois, ces élections ont révélé les fractures profondes qui traversent notre société. Elles ne peuvent être ignorées plus longtemps. (…) Comme Chambre de la République et conseil des institutions qui élaborent la loi, le CESE portera la voix des organisations de la société civile, leurs expériences concrètes et leurs solutions pour répondre aux besoins de nos concitoyens. » (Thierry Beaudet, le 24 juillet 2024).



     

     
     


    Oui, j'avoue, mon titre est assez facile, mais mon envie de le mettre était irrépressible. Chaque fois que le nom d'un éventuel futur Premier Ministre est donné en pâture aux médias et à la classe politique, c'est comme si on le jetait dans une mare à piranhas, et généralement, il est immédiatement déchiqueté, il ne dure pas vingt-quatre heures (le "on", en l'occurrence, semble être l'Élysée lui-même). Ce lundi 2 septembre 2024, jour de la rentrée scolaire, c'était le jour de Thierry Beaudet.

    Pourtant, cette journée du lundi était effectivement bien consacrée à de nouvelles consultations du chef de l'État, mais uniquement des politiques : Emmanuel Macron a rencontré Bernard Cazeneuve, François Hollande, Xavier Bertrand, Nicolas Sarkozy, François Bayrou et Gabriel Attal. Le nom des visiteurs n'est pas anodin : Bernard Cazeneuve, à gauche, et Xavier Bertrand, à droite, sont régulièrement évoqués depuis le second tour des élections législatives du 7 juillet 2024.

    L'hypothèse Bernard Cazeneuve semble avoir du plomb dans l'aile après avoir été hué à Blois par les militants socialistes, à l'initiative d'une invitée, Clémentine Autain, et sans réaction des dirigeants du PS. Le risque pour Emmanuel Macron, d'ailleurs, serait qu'un Premier Ministre Bernard Cazeneuve, qui demanderait l'ensemble des pouvoirs de chef du gouvernement, soit l'otage de la gauche et se sente obligé de proposer des mesures emblématiques très à gauche (comme l'abrogation de la réforme des retraites ou le rétablissement de l'ISF) pour préserver la tolérance des députés de la nouvelle farce populaire (NFP).

    L'hypothèse Xavier Bertrand semble aussi avoir du plomb dans l'aile depuis la venue de Marine Le Pen à l'Élysée le 26 août 2024 : la présidente du groupe RN à l'Assemblée avait alors assuré que le groupe RN voterait la censure dès l'éventuelle nomination de Xavier Bertrand, fer de lance de la lutte anti-RN qui avait affronté (et battu) Marine Le Pen elle-même aux élections régionales des Hauts-de-France en décembre 2015.

    Pour Emmanuel Macron, le retour à l'hypothèse d'un Premier Ministre "technicien" a repris de la crédibilité avec cette idée : puisque la classe politique est incapable de s'entendre pour me proposer le nom d'une personnalité susceptible de ne pas être immédiatement censurée, trouvons-la en-dehors du sérail.


    D'où l'hypothèse, pas dénuée de signification, d'une désignation de Thierry Beaudet (62 ans), Président du Conseil Économique, Social et Environnemental (CESE) depuis le 18 mai 2021. On sait à quel point Emmanuel Macron "aime bien" le CESE au point de vouloir en faire la troisième chambre du Parlement (ce qu'il n'est absolument pas : le Parlement est une représentation démocratique, aucun membre du CESE n'émane de la démocratie représentative, mais seulement participative), en raison probablement de la très forte influence qu'a eue Jean-Paul Delevoye (ancien Président du CESE du 16 octobre 2010 au 1er décembre 2015) sur Emmanuel Macron pendant la campagne présidentielle de 2017.

    Incontestablement de gauche (reconnu comme tel par les gens de gauche), Thierry Beaudet a commencé sa vie active comme instituteur en Normandie. Il a toutefois rapidement changé de voie en prenant des responsabilités dans sa mutuelle, au point de devenir le président la MGEN (Mutuelle générale de l'Éducation nationale) du 8 juillet 2009 au 11 juillet 2017, puis président de VYV (premier groupe mutualiste de santé et de protection sociale de France : 10 millions d'assurés, 35 000 employés et 9 milliards de chiffre d'affaires) du 13 septembre 2017 au 8 juin 2021. Par ailleurs, il a été élu président de la Fédération nationale de la mutualité française du 23 juin 2016 au 5 octobre 2021. Thierry Beaudet a aussi présidé la MFPASS, l'union mutualiste qui gère les établissements sanitaires et médico-sociaux créés par les mutuelles de la fonction publique, de 2012 à 2016.





    Thierry Beaudet a été désigné membre du CESE en janvier 2021. Sa consécration, il l'a due à Laurent Berger (lui aussi cité pour Matignon), alors secrétaire général de la CFDT, qui l'a aidé à se faire élire Président du CESE le 18 mai 2021, avec 163 voix sur 172, poste qu'il assume de manière particulièrement volontariste en ayant l'intention de faire de cette chambre placard pour recalés de la politique (disons les choses clairement) une chambre utile où pourraient s'exprimer des citoyens tirés au sort pour venir en complément des parlementaires. Après la Convention citoyenne pour le climat (qui a fini ses travaux avant son accession à la présidence, le 21 juin 2020), il a organisé la Convention citoyenne sur la fin de vie dont la conclusion (exprimée le 3s avril 2023) favorable à l'euthanasie n'était pas étonnante puisque lui-même y était favorable (déclaration du 18 janvier 2020), ce qui remet d'ailleurs en cause l'utilité de ces conventions citoyennes qui prennent toujours la même position que leurs "encadrants sachants" et cela sans représentation populaire.

     

     
     


    Ce n'était pas la seule prise de position publique de Thierry Beaudet puisque le 26 juin 2024, il avait aussi mis en garde contre la victoire du RN aux élections législatives anticipées (dans une interview à "La Tribune"), et bien auparavant, le 21 janvier 2024, il avait manifesté au Trocadéro contre la loi Immigration. Homme d'équilibre, fin négociateur, gros travailleur, réformateur et innovateur, Thierry Beaudet a su montrer, tout au long de sa carrière professionnelle un comportement consensuel prêt aux synthèses. Il comptait solliciter un deuxième mandat de cinq ans à la tête du CESE en 2026.

    Voici comment il a exprimé son inquiétude de voir arriver le RN au pouvoir : « L'extrême droite est aux portes du pouvoir. Historiquement, elle a combattu la démocratie parlementaire, entretenu le racisme, l'antisémitisme, le sexisme, la haine de l'autre, pourchassé les contre-pouvoirs, les droits fondamentaux et l'État de droit. D'aucuns affirment que son visage contemporain serait réellement différent de ce sombre tableau ; mais je ne veux pas que nous prenions le risque de le tester grandeur nature. La société m'apparaît traversée par des ambitions qui cherchent à exploiter le sentiment d'une partie des Français de ne pas être assez entendus et considérés. Ces ambitions s'emploient à électriser la société plutôt qu'à la réconcilier, dans un intérêt électoraliste selon moi pyromane et irresponsable. Il est évident que les 40% de Français qui lors des européennes ont porté leur suffrage dans l'escarcelle du RN et de Reconquête ne sont pas tous des racistes anti-système eurosceptiques et russophiles. Nombre d'entre eux ont simplement exprimé leur découragement et leur désillusion devant un cénacle politique qu'ils jugent sourd ou méprisant vis-à-vis de leurs malaises et de leurs espérances. (…) Ce qui est nouveau, c'est que ces électeurs désemparés estiment avoir vraiment tout tenté : gauche, droite, centre, et même macronisme en faveur desquels ils ont souvent oscillé d'une élection à l'autre. Ils ont le sentiment que grâce au RN ils seront enfin entendus, considérés. C'est un leurre, peut-on leur démontrer ; mais leur réponse est invariable : "Possible. Mais qu'a-t-on à perdre ? Au moins on aura essayé, et de toute façon il ne peut pas faire pire". Si, malheureusement... » ("La Tribune", le 26 juin 2024).


    Le profil de Thierry Beaudet est donc très intéressant, notamment comme le leader du front républicain qui a, seul, gagné ce second tour des législatives, même s'il n'a jamais eu personnellement d'expérience élective. C'est son plus gros point faible, comme l'a souligné, un peu énervé, le maire LR de Meaux Jean-François Copé ce mardi 3 septembre 2024 sur TF1 : « Où est-il écrit dans la Constitution, dans l'histoire politique de notre pays, qu'il fallait choisir à la tête du gouvernement quelqu'un de neutre qui n'a pas d'expérience politique (…). Nous avons besoin d'un professionnel (…). Le programme de la gauche est totalement celui de Mélenchon (…). C'est comme si nous, on avait fait alliance avec l'extrême droite (…). Le programme de l'extrême gauche qui est celui que le PS revendique tout autant est un programme suicidaire pour le pays. ».

    En effet, le Premier Ministre désigné devra connaître très bien les procédures parlementaires car les extrêmes n'hésiteraient pas à le faire tomber dans mille et un pièges. Mais cela s'apprend. On a vu qu'une ministre très technicienne (néanmoins politique) était capable de diriger un gouvernement très politique dans une Assemblée très difficile (Élisabeth Borne).

    D'après des "journalistes bien informés" (comme on dit), Thierry Beaudet aurait été reçu par Emmanuel Macron le jeudi 29 juin 2024 pour lui soumettre le projet de le nommer à Matignon, projet qu'il aurait accepté. Cette information a été révélée ce lundi 2 septembre 2024 en début de matinée juste avant les consultations politiques à l'Élysée (une fuite organisée, apparemment, et peut-être pour mettre la pression sur les partis politiques, en l'occurrence le PS et LR).


    Mais la révélation s'est faite avec une autre information qui a pourtant le don de le griller sur le champ sur l'autel des Premiers Ministres morts nés : en effet, l'Élysée aurait fait savoir que son directeur de cabinet aurait été déjà identifié (le dircab d'un Premier Ministre de cohabitation est un rouage technique et politique crucial). Il s'agirait de l'actuel préfet de la région Hauts-de-France Bertrand Gaume (49 ans), ancien préfet de l'Essonne et du Vaucluse, ancien de la DGSE, grand ami de l'ancien candidat socialiste Benoît Hamon (dont il a été le dircab en 2012 au Ministère délégué à l'Économie sociale et solidaire), déjà pressenti pour diriger le cabinet d'Élisabeth Borne à Matignon en juillet 2023 après le départ d'Aurélien Rousseau (devenu ministre ; aujourd'hui, ce dernier est député NFP).

    Or, un Premier Ministre novice en politique qui se voit imposer son dircab par l'Élysée, comment pourrait-il être un Premier Ministre de cohabitation totalement autonome politiquement, prêt à affronter le Président de la République sur des sujets de fond le cas échéant ? Ce n'est pas très crédible sauf à comprendre que le Président de la République, malgré le désaveu électoral qu'a subi son camp, veuille toujours garder l'initiative du pouvoir. C'est là le problème, d'autant plus que Thierry Beaudet n'a pas hésité à tresser quelques lauriers à Emmanuel Macron (le 26 juin 2024 dans "La Tribune") : « Je ne ferai pas le "procès démocratique" d'Emmanuel Macron pour une raison en particulier. Qui s'est montré sensible à la nécessité de revitaliser la démocratie délibérative, participative, en créant les Conventions citoyennes ? Qui a lancé le Grand Débat ou réuni les corps intermédiaires autour de Conseils nationaux de la refondation (CNR) ? Ses prédécesseurs Nicolas Sarkozy ou François Hollande ? Non. Le soi-disant "Président jupitérien". ».

    De toute façon, la roue tourne encore ! Pour l'heure, matin du mardi 3 septembre 2024, l'hypothèse Xavier Bertrand serait de nouveau privilégiée par le chef de l'État...



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (03 septembre 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Législatives 2024 (43) : Haro sur le Beaudet !
    Législatives 2024 (42) : Bernard Cazeneuve et le retour à la case départ ?
    Législatives 2024 (41) : intérêt national et mode de scrutin.
    Législatives 2024 (40) : Patrick Cohen a raison !
    Législatives 2024 (39) : Consultations et mains tendues !
    Législatives 2024 (38) : la coconstruction du Premier Ministre.
    Législatives 2024 (37) : stupide chantage à la destitution !
    Législatives 2024 (36) : Gérald Darmanin plaide pour un Premier Ministre non macroniste !
    François Hollande sera-t-il le Premier Ministre de son ancien Ministre de l'Économie ?
    Législatives 2024 (35) : Vers une cohabitation du troisième type ?
    Législatives 2024 (34) : Lucie Castets noyée dans une réalité alternative !
    Législatives 2024 (33) : Le grain de sel du Sénat !
    Législatives 2024 (32) : Le casse-tête de Lucie Castets.
    Législatives 2024 (31) : Emmanuel Macron et les joyeux JO.
    Interview du Président Emmanuel Macron le 23 juillet 2024 sur France 2 (vidéo intégrale).
    Claude Malhuret au Sénat : le spectacle continue !
    Législatives 2024 (30) : coalition ou pacte ?
    Législatives 2024 (29) : le staff de l'Assemblée Nationale.
    Législatives 2024 (28) : la stratégie du chaos institutionnel de Jean-Luc Mélenchon.
    Législatives 2024 (27) : l'émotion de Yaël Braun-Pivet.
    Législatives 2024 (26) : les larmes de Marine Tondelier.
    Législatives 2024 (25) : faut-il ostraciser le RN à l'Assemblée Nationale ?
    Législatives 2024 (24) : Huguette Bello, mélenchonette en peau de lapin.
    Législatives 2024 (23) : grand pays recherche son gouvernement.
    Législatives 2024 (22) : qui au perchoir ?
    Législatives 2024 (21) : marche sur Matignon ?
    Lettre aux Français par Emmanuel Macron le 10 juillet 2024 (texte intégral).
    Législatives 2024 (20) : le poison du scrutin proportionnel.
    Législatives 2024 (19) : quel possible Premier Ministre pour une impossible majorité ?
    Législatives 2024 (18) : la fin du cauchemar Bardella (pour le moment).
    Résultats du second tour des élections législatives du 7 juillet 2024.
    Fake news : la scandaleuse manipulation politique du RN.
    Législatives 2024 (17) : rien n'est joué dimanche prochain !
    Législatives 2024 (16) : la question de dimanche prochain.
    Législatives 2024 (15) : les promesses n'engagent que ceux qui y croient !
    Législatives 2024 (14) : la revanche des gilets jaunes ?
    Législatives 2024 (13) : fortes mobilisations au premier tour.
    Résultats du premier tour des élections législatives du 30 juin 2024.
    Appel aux sociaux-démocrates.
    Éric Le Boucher : la France va plutôt bien (27 juin 2024).
    Législatives 2024 (12) : un isoloir, ce n'est pas un cabine d'essayage !
    Législatives 2024 (11) : front, rassemblement, union nationale, barrage, consignes de vote...
    Législatives 2024 (10) : il était une fois Jordan Bardella, Gabriel Attal et Manuel Bompard.
    Législatives 2024 (9) : Emmanuel Macron et son n'ayez-pas-peur !
    Interview d'Emmanuel Macron à Génération Do It Yourself le 24 juin 2024 (podcast intégral).
    Lettre aux Français d'Emmanuel Macron le 23 juin 2024 (texte intégral).
    Législatives 2024 (8) : la bataille de Matignon.
    Le programme aux élections législatives du 30 juin 2024 d'Ensemble pour la République (document à télécharger).
    Législatives 2024 (7) : Ensemble pour la République.
    Législatives 2024 (6) : Nicolas Sarkozy et François Fillon bougent encore !
    Législatives 2024 (5) : le trouble de Lionel Jospin.
    Législatives 2024 (4) : l'angoisse de Manuel Valls.
    Législatives 2024 (3) : François Hollande dans l'irresponsabilité totale !
    Législatives 2024 (2) : clarification ou chaos ?
    Législatives 2024 (1) : vaudeville chez Les Républicains.
    Sidération institutionnelle.
    Élections européennes 2024 (4) : la surprise du chef !
    Résultats des élections européennes du dimanche 9 juin 2024.


     

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240902-thierry-beaudet.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/legislatives-2024-43-haro-sur-le-256594

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  • Didier Guillaume Premier Ministre !

    Didier Guillaume dirige le nouveau gouvernement depuis ce lundi.


     

     
     


    Ce lundi 2 septembre 2024, ce n'est pas seulement la rentrée des classes pour 12 millions d'élèves en France. C'est aussi la rentrée de Didier Guillaume. Qui est Didier Guillaume ? Mais si, rappelez-vous ! Il était le Ministre de l'Agriculture et de l'Alimentation du 16 octobre 2018 au 6 juillet 2020 dans le second gouvernement d'Édouard Philippe.

    Didier Guillaume (65 ans) était à l'origine un élu local du parti socialiste. Fils d'un éleveur de brebis, né le 11 mai 1959 à Bourg-de-Péage dans la Drôme, il était un agent du Trésor public parallèlement à ses débuts en politique au sein des jeunes socialistes. Profession qu'il a quittée assez vite pour se consacrer totalement à la politique en tant que directeur de cabinet du président du conseil général de la Drôme Rodolphe Pesce (également député-maire de Valence) de 1990 à 1992, puis membre du cabinet du Ministre de l'Agriculture et de la Pêche Jean Glavany de 1998 à 2002.

    Soutien de François Mitterrand en 1981, il a rapidement multiplié les mandats locaux : élu conseiller municipal de Bourg-de-Péage depuis mars 1983 (dans l'opposition), il a conquis la mairie en 1995, élu maire de Bourg-de-Péage de juin 1995 à mars 2004. En outre, il a été élu conseiller régional de Rhône-Alpes de mars 1992 à mars 1998, puis il a été élu conseiller général de la Drôme de mars 1998 à mars 2015 (sur le canton de son rival de droite Henri Durand, à qui il avait succédé à la mairie), et une fois de département conquis sur Jean Mouton, Didier Guillaume a repris la présidence du conseil général de la Drôme, élu de mars 2004 à mars 2015 (qu'il a abandonnée au profit de son adversaire Patrick Labaune), tandis qu'il est devenu premier adjoint à Bourg-de-Péage (de mars 2004 à mars 2008) en raison du cumul.

    Il a été par ailleurs le président de l'association des maires de la Drôme de 2001 à 2004, mandat stratégique (avec celui de président du conseil général) pour se faire élire sénateur. Ce qui a été effectivement le cas : Didier Guillaume a été élu sénateur de la Drôme en septembre 2008, réélu en septembre 2014 pour un second mandat de six ans. Il a été élu peu avant le moment rare (2011-2014) où le Sénat était majoritairement de gauche. Ainsi, Didier Guillaume était le premier vice-président du Sénat du 5 octobre 2011 au 15 avril 2014, puis élu président du groupe socialiste au Sénat du 15 avril 2014 au 22 janvier 2018 (succédant à François Rebsamen nommé ministre).

    En tant que chef des socialistes au Sénat, il s'est présenté deux fois à la Présidence du Sénat contre Gérard Larcher, qui l'a battu, le 1er octobre 2014 (au second tour, 124 voix sur 337 contre 194) et le 2 octobre 2017 (au premier tour, 79 voix sur 317 contre 223). Toutefois, son autorité au sein des sénateurs socialistes était remise en cause en raison de sa proximité avec le Président Emmanuel Macron : directeur de campagne de Manuel Valls pour la primaire socialiste de janvier 2017, Didier Guillaume a en effet été contesté à la présidence du groupe socialiste par Laurence Rossignol et Martial Bourquin et n'a été réélu en octobre 2017 qu'avec 36 voix sur 70.

    2018 fut l'année des hésitations : Didier Guillaume a démissionné de sa présidence du groupe socialiste le 22 janvier 2018 (au profit de l'ancien ministre Patrick Kanner), et comptait démissionner de tous ses mandats électifs. Il envisageait de prendre la direction de la Coupe du monde de rugby 2023 (organisée en France) mais il s'est finalement ravisé et est resté sénateur, changeant de groupe vers un groupe plus macron-compatible, le groupe RDSE (radical de gauche).

    Quelques mois plus tard, ce fut la consécration avec sa nomination de Ministre de l'Agriculture et de l'Alimentation du 16 octobre 2018 au 6 juillet 2020, où il a tenté de pacifier son ministère (son prédécesseur d'origine également socialiste, Stéphane Travert, ayant été très contesté par sa supposée trop grande proximité des groupes agro-alimentaires). Au début de la crise sanitaire due à la pandémie de covid-19, Didier Guillaume a fait un appel le 24 mars 2020 pour encourager les volontaires à venir travailler avec les agriculteurs pour produire de la nourriture saine et locale (50 000 personnes ont répondu à cet appel). Quelques mois auparavant, le 17 novembre 2019, il avait annoncé qu'il était partisan de l'interdiction totale de l'alcool au volant.

     

     
     


    Très étrangement, Didier Guillaume et Jean-Baptiste Lemoyne, deux ministres et anciens sénateurs (respectivement de la Drôme et de l'Yonne), voulaient s'affronter à l'occasion des élections municipales de 2020 à Biarritz. Finalement, les deux ministres ont renoncé à cette bataille. Lors de la nomination du gouvernement de Jean Castex, Didier Guillaume n'a pas été reconduit et a été remplacé par un proche du Président de la République, Julien Denormandie.

    Depuis l'été 2020, Didier Guillaume a quitté la vie politique française. Il a démissionné de son mandat de sénateur (qu'il a retrouvé à la sortie du gouvernement), et a eu un moment (en mars 2021) l'ambition de présider la Ligue nationale de rugby.

    Aujourd'hui, sa rentrée est réelle. En effet, Didier Guillaume a été désigné le 10 juin 2024 par le prince de Monaco Albert II pour devenir ce lundi 2 septembre 2024 "Ministre d'État", ce qui signifie, à Monaco, chef du gouvernement de la principauté. Il succède à Pierre Dartout, ancien préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur (2017-2020). C'est courant que des Français occupent ce poste, avant eux, des hauts fonctionnaires ou des hommes politiques français aussi l'ont occupé. En particulier, Paul Dijoud (1994-1997), Émile Pelletier (1953-1959) et Jacques Rueff (1949-1950)
    . Il a fallu l'accord de l'Élysée pour cette nomination, et les premières rumeurs couraient dès le mois de février 2024.

    Il est donc bien le premier des ministres, mais de Monaco. Ce bout de rocher comporte à peine 40 000 habitants, moins que des villes comme Montélimar, Gap, Draguignan, Compiègne ou Poissy, à peu près au même niveau que Bagnolet ou Marq-en-Barœul. En revanche, le niveau de richesse n'est pas équivalent !

    Le Ministre d'État (dans beaucoup de petit pays, c'est le terme adopté pour désigner le chef du gouvernement) est l'homme le plus important après le prince dans l'administration de Monaco. Selon la Constitution de la principauté de Monaco du 17 décembre 1962 : « Le gouvernement est exercé, sous la haute autorité du Prince, par un Ministre d'État, assisté d'un Conseil de Gouvernement. Le Ministre d'État représente le Prince. Il exerce la direction des services exécutifs. Il dispose de la force publique. Il préside, avec voix prépondérante, le Conseil de Gouvernement. ». Il commande également la police et présente au prince les projets de loi adoptés par le Conseil de Gouvernement (6 membres nommés par le prince) qui seront votés ensuite par Conseil national (équivalent de la chambre des députés, composé de 24 membres élus par le peuple).


    Didier Guillaume est donc maintenant l'homme du prince qui nous gouverne. Enfin, pas nous, les Monégasques !


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (01er septembre 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Didier Guillaume.
    Gérald Darmanin.
    Yaël Braun-Pivet.
    Paul Midy.
    Manuel Valls.
    Jean-Pierre Chevènement.
    Valérie Hayer.
    Olivier Dussopt.
    Emmanuel Macron.

    Gabriel Attal.
    Rachida Dati.
    Amélie Oudéa-Castéra.
    Le gouvernement de Gabriel Attal.
    Élisabeth Borne.
    François Bayrou.
    Édouard Philippe.
    Éric Dupond-Moretti.
    Bruno Le Maire.
    Brigitte Macron.
    Gérard Collomb.
    François Léotard.
    Pap Ndiaye.
    Robert Badinter.
    Bruno Millienne.
    Jean-Louis Bourlanges.
    Claude Malhuret.
    Olivier Véran.
    Aurore Bergé.
    Pierre Moscovici.
    Rima Abdul-Malak.
    Vincent Lindon.
    Caroline Cayeux.
    Christophe Béchu.
    Agnès Pannier-Runacher.
    Sacha Houlié.
    François Braun.
    Jean-Yves Le Drian.


     

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240902-didier-guillaume.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/didier-guillaume-premier-ministre-256592

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