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  • Alain Delon soutenait Raymond Barre

    « Et j'en arrive à Raymond Barre : c'est pour moi l'homme le plus proche du Général De Gaulle, c'est un homme hors des partis, c'est un homme qui veut un État impartial au service du peuple et au service de la France, c'est un homme exceptionnel comme l'était le Général De Gaulle. » (Alain Delon, le 30 octobre 1988 sur TF1).



     

     
     


    L'enterrement a lieu ce samedi 24 août 2024 dans la chapelle de sa propriété à Douchy, et dans l'intimité familiale, comme on dit. Toute cette semaine, beaucoup de monde a parlé de l'acteur français Alain Delon, et notamment dans les réseaux sociaux, où les gens se lâchent, on a vu qu'une certaine gauche, la plus sectaire, était capable de continuer à détester un homme même mort. Simplement parce qu'il ne cachait pas ses convictions de droite. Et probablement aussi parce qu'il était très riche, mais d'une richesse qu'il a acquise par son travail et par son talent.

    On en profite d'ailleurs pour dire n'importe quoi, par exemple, qu'il soutenait électoralement Jean-Marie Le Pen et le Front national, que c'était un abominable extrémiste de droite. Alors, il faut rétablir un peu les choses.

    Alain Delon était un gaulliste et parce qu'il était un gaulliste, il avait soutenu très activement la candidature de Raymond Barre à l'élection présidentielle du printemps 1988. En particulier, il a assisté, parmi le public invité, à plusieurs émissions politiques de "L'Heure de Vérité" (animées sur Antenne 2 par François-Henri de Virieu) dont l'invité était Raymond Barre, en particulier le 7 janvier 1987 (à côté de Jean-Pierre Soisson et de Catherine Pironi), et aussi après l'élection présidentielle, le 7 novembre 1988 (il était à côté de l'épouse de l'homme politique, Eva Barre et de Gilberte Beaux). De plus, il était présent au grand meeting de campagne de Raymond Barre le 19 avril 1988 à Lyon (quelques jours avant le premier tour). Enfin, on l'a retrouvé naturellement aux obsèques de l'ancien Premier Ministre le 29 août 2007 à la chapelle de l'hôpital du Val-de-Grâce, à Paris, où il est mort, au milieu d'une classe politique assez secouée.

    En quelque sorte, le barrisme d'Alain Delon était incontestable et il n'a pas fait simplement qu'ajouter passivement une signature à une liste de comité de soutien, mais il était présent aux grands moments de la campagne présidentielle du futur maire de Lyon. En tant que barriste, je m'en réjouissais, même si je n'avais pas toujours les mêmes idées qu'Alain Delon, en particulier sur la peine de mort (voir plus loin). Et ça tombait bien, Alain Delon n'était pas un homme politique, donc, ses convictions ont eu peu d'influence sur le cours des événements (la construction de la loi). Comme lui, mon barrisme était du gaullisme moderne. Mais aucune personnalité n'est sacrée et toutes ont eu leur faille.

    Quant à Jean-Marie Le Pen, effectivement, Alain Delon le connaissait très bien, c'étaient même deux amis très proches depuis la fin des années 1960, Alain Delon le connaissait avant qu'il ne devînt président du FN et si pour l'acteur, l'amitié n'était pas un vain mot, il faisait la différence entre amitié et politique et il n'a pas soutenu politiquement Jean-Marie Le Pen, contrairement à ce qu'on voudrait nous faire croire.

    Dans le cadre de son hommage dominical, la chaîne LCI a eu la bonne idée de retransmettre le dimanche 18 août 2024 à 15 heures des extraits d'une émission politique importante du dimanche soir dont Alain Delon était l'invité, le fameux "7 sur 7" animé sur TF1 par la journaliste vedette Anne Sinclair. Elle était datée de "septembre 1988" mais renseignements pris, elle aurait été enregistrée et diffusée plutôt le 30 octobre 1988, donc non seulement après l'élection présidentielle mais aussi avant le référendum du 6 novembre 1988 sur les Accords de Matignon sur la Nouvelle-Calédonie : Alain Delon avait été invité à Matignon par le Premier Ministre Michel Rocard parce qu'il était de droite, avec un autre acteur, Michel Piccoli, qui lui était notoirement de gauche, pour qu'ils fissent campagne ensemble pour le "oui" de manière consensuelle. Alain Delon a répondu à cette demande en donnant les arguments pour le "oui", oui à la paix en Nouvelle-Calédonie et s'était un peu fâché, d'ailleurs, avec quelques leaders de droite qui, refusant d'aider politiquement François Mitterrand, avaient prôné une lâche abstention.

     

     
     


    Dès le début de l'émission, alors qu'Anne Sinclair parlait pour introduire longuement son émission et son illustre (et rare) invité, on pouvait voir Alain Delon, silencieux, l'écouter attentivement, le regard parfois dans le vide mais montrant surtout un charisme, une présence, même dans le silence ! On imaginait alors facilement, comme avec Yves Montand ou Vincent Lindon dans un autre registre, qu'Alain Delon aurait pu avoir une carrière politique, un peu à l'instar de la classe politique américaine, les acteurs professionnels étant les meilleurs pour convaincre les électeurs puisqu'ils jouent leur rôle bien mieux que des acteurs amateurs, à savoir des candidats technocrates qui lisent des discours que des collaborateurs leur auraient rédigés.

    Et puis très vite, Alain Delon expliquait qu'il ne pouvait pas être homme politique car il avait une très grande sensibilité. On pouvait aussi se dire : tout le monde a sa sensibilité. Mais quand Anne Sinclair lui a fait parler d'un fait-divers récent à l'époque, et atroce, le viol de petites filles, Alain Delon a montré qu'il valait mieux qu'il restât comédien et qu'il ne se risquât pas à aller sur le terrain de l'action politique.

     

     
     


    J'ai écrit que je n'avais les mêmes idées que lui sur la justice, en voici un exemple énorme, Alain Delon reconnaissant qu'il était entier et "un peu" excessif : « Moi, je suis pour la peine de mort, je l'ai toujours été, donc je le dis comme je le pense. Et en ce qui concerne les viols d'enfant, je suis carrément pour un tribunal d'exception et une justice expéditive. (…) Ces monstres-là, pour moi, n'ont pas le droit de vivre. (…) Ces êtres-là ne sont pas des êtres humains, ni des animaux. Pour moi, ce sont des monstres. (…) Si ces gens-là savaient que dans les quinze jours, une fois les aveux passés, les preuves faites, dans les quinze jours, ils allaient avoir le châtiment suprême, sentence exécutoire sur le champ, je vous promets qu'ils réfléchiraient, s'ils sont encore capables de réfléchir. Mais s'ils ne sont pas capables de réfléchir, vous savez, on va vous dire, ils n'ont pas demandé à naître, ils n'ont pas demandé à venir sur Terre. Le chardon non plus, entre la pelouse, il n'a pas demandé à venir sur Terre. Le charbon, chez moi, je l'arrache, et je le retire. C'est un phénomène de société, ces gens-là n'ont pas le droit de faire partie de notre société. Je suis peut-être un peu excessif, c'est mon sentiment, je ne le demande pas de le partager. Je n'excuse pas. ».

    Cela n'a pas empêché Alain Delon de voter Raymond Barre et pas Jean-Marie Le Pen. Un peu plus tard dans l'émission, il a tenté d'expliquer son barrisme par son gaullisme. Il a déclaré qu'à 21 ans, il avait manifesté pour demander le retour du Général De Gaulle. Pour lui qui était enfant sous l'Occupation, De Gaulle était un héros, le libérateur de la France (on fête les 80 ans de la Libération de Paris ce dimanche 25 août 2024).
     

     
     


    Et, sur le ton d'un vendeur de dentifrice, ou de maison individuelle, Alain Delon a expliqué rapidement (car l'émission se terminait) : « Vous savez, j'aime les hommes, les vrais hommes, sans que ce soit équivoque. Alors, les vrais hommes à commencer par le Général De Gaulle (…). Pourquoi le Général De Gaulle ? Simplement, et par le Général De Gaulle, vous comprendrez mieux Raymond Barre, parce qu'ils ont les mêmes vues sur ce que j'appelle la France, la même idée de la France. (…) Et j'en arrive à Raymond Barre : c'est pour moi l'homme le plus proche du Général De Gaulle, c'est un homme hors des partis, c'est un homme qui veut un État impartial au service du peuple et au service de la France, c'est un homme exceptionnel comme l'était le Général De Gaulle, on ne le comprend pas aujourd'hui, on le comprendra demain. Voilà pourquoi j'ai soutenu Raymond Barre, voilà pourquoi je continuerai à le soutenir. C'est un homme qui n'a aucun intérêt personnel, qui ne voit que les intérêts de la France et des Français, pour qui une seule chose compte, l'intérêt supérieur de la France, et il l'a dit lui-même quand on lui a reproché d'avoir été reçu par le Président Mitterrand ou d'avoir été reçu par le gouvernement en place aujourd'hui. Je ne vois pas le mal d'être reçu par un gouvernement légitime et par un Président légitime. Ce n'est pas un gouvernement d'occupation. Ça, c'est Raymond Barre, il n'y a pas de gauche, il n'y a pas de droite, il y a les intérêts de la France. ».

    En l'écoutant, on écoutait ainsi une déclaration d'amour pour Raymond Barre. Un barrisme de tripes et pas d'intellectuel qu'il n'a jamais été. Le barrisme d'un ancien combattant, pour qui l'amour de la France est intrinsèque à son enfance. Alors, bien sûr, avec le recul, on pourra toujours sourire dans sa barbe, penser que l'amour de la France pouvait aussi s'accommoder d'une belle optimisation fiscale à la suisse (il est mort en France selon ses vœux), on pourra aussi s'interroger sur le Raymond Barre qui n'a pas d'intérêt personnel et que l'intérêt national chevillé au corps, depuis qu'on a soupçonné l'ancien meilleur économiste de France d'avoir caché de l'argent au fisc (comme il est mort, il n'y a pas de procès et surtout, on ne connaît pas vraiment ce qui est vrai et ce qui est supposé). Il reste que Raymond Barre était aimé de ceux qui aimaient la France en dehors de tout esprit partisan, et c'était cela l'essentiel pour la politique.

    Ce n'était sans doute pas une bonne chose, pour les leaders du RPR, qu'Alain Delon fût dans leur camp car il se permettait beaucoup plus de liberté de ton que s'il n'en était pas. Ainsi, pour la campagne du référendum sur la Nouvelle-Calédonie, il a beaucoup blâmé Nicolas Sarkozy qui défendait l'abstention, mais, dans l'émission d'Anne Sinclair, un autre a été encore plus victime de sa sévère franchise. Il s'agit du futur Premier Ministre, à l'époque simple secrétaire général du RPR (ancien Ministre du Budget) Alain Juppé qui, dans l'émission "Questions à domicile" (sur TF1), a, selon l'acteur, exprimé des idées beaucoup trop compliquées qui ne s'adresseraient qu'au microcosme, ou alors, sur le référendum, qui a pris les Français pour des "débiles".

    Le mot est bien d'Alain Delon : « J'ai été frappé par ce qu'Alain Juppé, en tant que secrétaire général du plus grand parti d'opposition, (…) j'ai trouvé qu'il avait un langage (…), il s'est adressé à des débiles, il s'est adressé aux Français comme s'ils étaient des débiles. Les Français ont souvent des réactions d'imbéciles, moi le premier, mais c'est tout sauf des débiles, et je n'ai pas compris, si vous voulez, qu'un homme aussi éminent d'un parti aussi important s'adresse à des Français pour un sujet aussi important (…), on ne peut pas s'adresser pour une chose aussi importante à des Français en leur parlant comme à des débiles ! ».

     

     
     


    Cela ne l'a pas empêché, vingt-huit ans plus tard, de soutenir Alain Juppé en 2016 lors de la primaire LR pour trouver un candidat LR à l'élection présidentielle qui succéderait au déplorable François Hollande. Eh oui, Alain Delon a soutenu Alain Juppé, le candidat de "l'identité heureuse" tant chahuté par les militants du FN/RN jusqu'à se faire appeler Ali Juppé. Alors, les votes d'Alain Delon n'ont pas grand-chose à voir avec le supposé extrémiste de droite que certains, à gauche, sans doute aigris sinon jaloux, ont tant fustigé, même après sa mort, ou plutôt, surtout après sa mort.

    Samedi, c'est Mgr Jean-Michel Di Falco (82 ans) qui célèbre la messe d'enterrement d'Alain Delon, il avait déjà enterré la très chère Mireille Darc il y a sept ans, le 1er septembre 2017, et Alain Delon, au contraire de l'égoïsme qu'on lui a souvent collé à la peau, a été très généreux en faisant discrètement des dons pour la recherche sur les maladies cardiaques. De toute façon, quelqu'un (de riche), qui a acquis des tableaux de Pierre Soulages, de Nicolas de Staël, de Hans Hartung et de Zao Wou-Ki, ne peut pas être tout à fait mauvais...



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (20 août 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Alain Delon soutenait Raymond Barre.
    Le charisme d'Alain Delon : The Girl on a Motorcycle.
    Le grand Alain Delon
    Affaire Alain Delon : ce que cela nous dit de la fin de vie.
    Comment va Alain Delon ?

     

     
     





    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240820-alain-delon.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/alain-delon-soutenait-raymond-256386

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/08/18/article-sr-20240820-alain-delon.html



     

  • Élections européennes 2024 (2) : 37 listes et un bulletin de vote !

    « Et n'oublie pas : quand les autres s'abaissent, on s'élève ! » (Alafair Burke, 2018).



     

     
     


    Ce mardi 21 mai 2024 dans la soirée, sur la chaîne LCI, s'est tenu le premier débat dans lequel ont participé toutes les têtes de listes, du moins, celles des huit listes susceptibles d'obtenir des élus selon les sondages (avec une parité parfaite, quatre femmes et quatre hommes). L'émission, appelée "La grande confrontation" a obtenu 3,1% de part d'audience. Elle a duré près de trois heures dix (voir à la fin de l'article la vidéo). Un autre débat est prévu sur la chaîne concurrente BFMTV le lundi 27 mai 2024 à 20 heures 30.

    utant dire que le choix des invités était arbitraire puisque l'élection n'a pas encore eu lieu et que les sondages, par exemple, donnent autour de 2% d'intentions de vote la liste communiste menée par Léon Deffontaines, alors que la liste du parti animaliste menée par l'avocate Hélène Thouy avait obtenu 2,2% des voix en mai 2009 (c'était d'ailleurs une grande surprise) et cette liste se représente en 2024 et n'a pas eu droit à la parole. Notons d'ailleurs que les autres listes qui avaient obtenu au moins 2% des voix en 2019 et qui n'étaient pas représentées par les huit invités de ce mardi soir ne se présentent pas en 2024 : liste de Debout la France menée par Nicolas Dupont-Aignan (3,5%), liste de Générations menée par Benoît Hamon (3,3%) et liste Les Européens de l'UDI menée par Jean-Christophe Lagarde (2,5%). Pas sûr que si elles avaient été candidates, ces listes auraient été invitées au débat télévisé. Cette année, l'UDI fait cause commune avec la majorité présidentielle.

    Évoquons alors très rapidement ce très long débat. Finalement, celui qui l'a gagné n'est crédité que de 2% des intentions de vote : en effet, peu connu jusqu'alors, le candidat communiste Léon Deffontaines a surpris tout son monde. Le benjamin de l'étape (28 ans) a montré sa grande maîtrise de l'oral et son talent de débatteur, à l'aspect sympathique, lisse, propre sur lui, ce qui a amené l'éditorialiste Nicolas Domenach à en faire un "petit Bardella" pour le parti communiste. Même s'il n'est pas élu à ce scrutin, il aura probablement de l'avenir.

     

     
     


    Les autres participants : Valérie Hayer (majorité présidentielle), Jordan Bardella (RN), Raphaël Glucksmann (PS), François-Xavier Bellamy (LR), Marion Maréchal (Reconquête), Manon Aubry (FI) et Marie Toussaint (EELV) n'ont toutefois pas démérité, mais ils n'ont pas non plus surpris. Ils ont repris leurs arguments habituels de manière souvent talentueuse, comme le représentant de LR et le représentant du PS. Valérie Hayer a été plutôt bonne, mais elle est plus à l'aise dans l'exposé rationnel des arguments que dans l'exercice du débat où la passion peut convaincre. Elle a eu deux cibles, le RN et le PS, tandis que le candidat communiste attaquait surtout la représentante des insoumis qui ont le même cœur de cible (la gauche ultra).

    Jordan Bardella, le favori de ces élections, n'a pas fait de boulette malgré sa totale inconsistance intellectuelle, mais a montré une très grande arrogance (les sondages font gonfler les chevilles sinon la tête) qui inquiète jusqu'aux dirigeants du RN eux-mêmes. Mais il a eu l'habileté de désamorcer tous les sujets qui auraient pu le mettre en difficulté, le soutien à Vladimir Poutine (il a déclaré son soutien à l'Ukraine), la proximité avec une extrême droite européenne vraiment "craignos" (il a annoncé que les députés européens RN ne siégeraient plus dans le même groupe que ceux de l'AfD allemande), etc.

    Insistons quand même sur le fait que ce débat, difficile car à huit (long et personne n'a pu vraiment se faire entendre), a été de bonne tenue, et surtout, faisait participer des candidats têtes de liste jeunes, au point que le doyen d'âge, le plus vieux, était Raphaël Glucksmann (44 ans) ! Ce coup de jeune n'est cependant pas un coup de renouvellement puisque quatre des huit têtes de liste présentes étaient déjà têtes de liste aux élections européennes de 2019 (Jordan Bardella, François-Xavier Bellamy, Raphaël Glucksmann et Manon Aubry). C'est Valérie Hayer qui a la fonction plus influente au sein de l'Union Européenne, puisqu'elle est la présidente du groupe Renew sans lequel aucune majorité n'est possible dans l'hémicycle de Strasbourg.

     

     
     


    Abandonnons le débat et revenons aux listes. Le Ministère de l'Intérieur a publié le 17 mai 2024 la liste des listes officiellement candidates : il y en a trente-sept ! [Le Conseil d'État a validé in extremis le 23 mai 2024 une trente-huitième liste]. C'est un record historique pour un scrutin en France (en 2019, il n'y en avait que trente-quatre). Avec 81 candidats pour chaque liste, cela fait 2 997 candidats dont 1 505 hommes et 1 492 femmes (la différence de parité provient du nombre impair de candidats dans chaque liste : il y a plus de têtes de liste hommes que de têtes de liste femmes, 25 contre 12, d'où les 13 de différence). La liste de tous les candidats a été publiée le 18 mai 2024.

    Certaines listes ne se sont pas constituées, principalement faute de moyens ou faute de candidats. En effet, réunir autour de soi quatre-vingts autres personnes n'est pas évident, au niveau national, autour d'un projet commun (à définir), d'autant plus que les règles de la parité imposent quarante hommes et quarante femmes. Cela suppose une organisation très structurée sur le territoire (c'est le cas de la Fédération nationale des chasseurs, de Lutte ouvrière, etc.), ce qui peut être difficile pour des candidats à la seule promotion publicitaire personnelle. Ainsi, Debout la France (Nicolas Dupont-Aignan), Générations (Benoît Hamon), l'Alliance royale, le Mouvement écologiste indépendant (MEI), le Parti fédéraliste, l'Alliance centriste (Philippe Folliot) et Territoire en mouvement (Jean-Christophe Fromantin), etc. n'ont finalement pas déposé de candidature cette année pour diverses raisons (la principale étant le manque de financement).

    Avant de scruter la composition des huit listes principales (celles qui ont débattu le 21 mai 2024 sur LCI), regardons quelles sont donc les vingt-neuf autres listes (je ne comptabilise donc pas les huit principales listes).

    Il y a d'abord beaucoup de listes d'extrême gauche : dix dont celle de Free Palestine (Nagib Azergui), du Parti pirate (Caroline Zorn), de Lutte ouvrière (menée par Nathalie Arthaud et Jean-Pierre Mercier, et en queue de liste, Arlette Laguiller), celle de Georges Kuzmanovic (avec le prince Joachim Charles Napoléon Murat !), du NPA, du Parti des travailleurs (avec Daniel Gluckstein en sixième place), celle du militant communautariste Hadama Traoré.

    Il y a ensuite des listes souverainistes ou d'extrême droite : six dont celle de François Asselineau (UPR), celle de Florian Philippot (Les Patriotes) à laquelle s'est joint Jean-Frédéric Poisson (Via), celle d'Édouard Husson, celle des artistes antisionistes Francis Lalanne et Dieudonné.

    Il y a aussi quelques listes revendiquant l'écologie politique, quatre : Équinoxe de la souriante Marine Cholley, la liste de Yann Wehrling (ancien EELV, ancien MoDem et actuel vice-président du conseil région d'Île-de-France) qui rassemble entre autres Cap21 (le mouvement de Corinne Lepage), le mouvement pour les animaux, le parti nationaliste basque, etc. (et qui est soutenue par l'ancien ministre Jean-Jacques Aillagon, placé en fin de liste), la liste de la Ruche citoyenne, la liste de Jean-Marc Governatori (Écologie au centre).

    Il y a des listes qui ont une revendication particulière, et celle des animalistes d'Hélène Thouy (déjà citée) n'est pas la moins légitime puisqu'elle avait obtenu en 2019 plus de 2% des voix. Il y a aussi les défenseurs de l'esperanto avec Laure Patas d'Illiers, des droits des parents et de la protection de l'enfance avec Gaël Coste-Meunier, la défense de la ruralité avec l'inimitable Jean Lassalle (associé à Willy Schraen, président de la Fédération nationale des chasseurs !), et la défense de la démocratie directe avec Philippe Ponge.

    Il y a aussi des listes de petits partis politiques qui n'ont pas voulu se mettre ou remettre avec des grands partis, quatre : celle de Guillaume Lacroix (Parti radical de gauche), avec l'ancienne ministre Juliette Méadel en quatrième position, celle de Pierre Larrouturou (Nouvelle donne), pourtant député européen sortant de la liste socialiste en 2019, celle de Jean-Marc Fortané (Nous Citoyens), enfin, celle d'Audric Alexandre (Parti des citoyens européens, de tendance social-libérale).

    Si je compte bien, cela fait donc vingt-neuf listes, plus les huit principales, ce qui donne trente-sept, le compte est bon ! (ouf).

     

     
     


    Voyons maintenant les listes principales qui ont toutes concouru en 2019 à l'exception de la liste Reconquête dont le parti n'existait pas à l'époque. Le nombre entre parenthèse suivant le nom d'un candidat correspond à son ordre dans la liste, le n°81 étant le dernier. Il est de coutume de mettre en fin de liste des personnes honorifiques pour "pousser" la liste, c'est le cas du RN, de la majorité présidentielle, de FI, du PCF, (aussi de LO), entre autres. J'indique ainsi les candidats remarquables pour chacune de ces listes.

    Liste du RN : Jordan Bardella (1), Malika Sorel (2), Fabrice Leggeri (3), Jean-Paul Garraud (5), Matthieu Valet (7), Thierry Mariani (9), Philippe Olivier (11), Alexandre Varaut (13), Julien Sanchez (17), Marie Dauchy (22), Andréa Kotarac (35), Marine Le Pen (80, Louis Aliot (81). Commentaire : Malika Sorel a "harcelé" Emmanuel Macron encore en janvier 2024 pour être nommée Ministre de l'Éducation nationale, ce qui donne une idée de son arrivisme. Ancien directeur de Frontex, Fabrice Leggeri est accusé par la Ligue des droits de l'homme de crime contre l'humanité et complicité de crime de torture pour avoir refusé de secourir des réfugiés. Philippe Olivier est le mari de Marie-Caroline Le Pen et à ce titre, le beau-frère de Marine Le Pen (rappelons aussi que la compagne de Jordan Bardella est Nolwenn Olivier, fille de Philippe Olivier qui est donc le beau-père de la tête de liste ; auparavant, Jordan Bardella était en relation avec Kerridwen Chatillon, la fille de Frédéric Chatillon, selon Wikipédia).

    Liste de la majorité présidentielle (Renaissance, MoDem, Parti radical et Horizons) et de l'UDI : Valérie Hayer (1), Bernard Guetta (2), Marie-Pierre Vedrenne (3), Pascal Canfin (4), Nathalie Loiseau (5), Sandro Gozi (6), Fabienne Keller (7), Laurence Farreng (9), Gilles Boyer (10), Valérie Devaux (11), Christophe Grudler (12), Jérémy Decerle (14), Laurent Hénart (16), Bérangère Abba (17), Max Orville (18), Ambroise Méjean (20), Rachel-Flore Pardo (21), Catherine Amalric (27), James Chéron (28), Pierre Karlesking (30), Pierre Jakubowicz (64), Jean Veil (74), Violette Spillebout (75), Édouard Philippe (76), François Bayrou (78), Stéphane Séjourné (80), Élisabeth Borne (81). Commentaire : en fin de liste, la majorité a mobilisé deux anciens Premiers Ministres, un fils de Simone Veil et le président du MoDem habitué à mener des listes aux européennes.

    Liste du PS : Raphaël Glucksmann (1), Pierre Jouvet (3), Aurore Lalucq (4), Christophe Clergeau (5), Jean-Marc Germain (7), Chloé Ridel (10), François Kalfon (13). Commentaire : Pierre Jouvet a été celui qui a négocié avec Jean-Luc Mélenchon pour fonder la Nupes. Contrairement à ce que déclare Raphaël Glucksmann, ce dernier reste donc toujours dans une optique d'union avec le leader des insoumis pour 2027.

    Liste de LR : François-Xavier Bellamy (1), Céline Imart (2), Christophe Gomart (3), Isabelle Le Callennec (4), Nadine Morano (6), Brice Hortefeux (7), Nathalie Colin-Oesterlé (8), Geoffroy Didier (11), Emmanuelle Mignon (12), Frédéric Nihous (13), Valérie Boyer (14), Pascale Bories (28), Vincent Jeanbrun (81). Commentaire : la présence, en position éligible, des indéboulonnables Nadine Morano et Brice Hortefeux a provoqué beaucoup de protestation au sein de LR. Notons qu'Emmanuelle Mignon était la directrice de cabinet de Nicolas Sarkozy à l'Élysée. Pour terminer la liste, le maire de L'Haÿ-les-Roses, qui fut attaqué par des émeutiers l'été dernier (proche de Valérie Pécresse, il a été vice-président du conseil régional d'Île-de-France).

    Liste de FI : Manon Aubry (1), Leïla Chaibi (5), Rima Hassan (7), Damien Carême (8), Jean-Luc Mélenchon (80). Commentaire : Rima Hassan est une militante pro-palestinienne qui a importé le conflit israélo-palestinien dans les thèmes de campagne.

    Liste de Reconquête : Marion Maréchal (1), Guillaume Peltier (2), Sarah Knafo (3), Nicolas Bay (4), Laurence Trochu (5), Stanislas Rigault (6), Jean Messiha (7), Damien Rieu (12), Éric Zemmour (80). Commentaire : Sarah Knafo est la proche collaboratrice d'Éric Zemmour.

    Liste des écologistes : Marie Toussaint (1), David Cormand (2), Benoît Biteau (6), Caroline Roose (7), Priscillia Ludosky (9), Maël Rannou (54), Cédric Villani (76), Mélanie Vogel (77), Noël Mamère (78), Eva Joly (79), Yannick Jadot (80), Marine Tondelier (81). Commentaire : EELV a mis le paquet sur les soutiens en queue de liste (il ne manque plus que Dominique Voynet et Cécile Duflot !). Priscillia Ludoksy est l'une des leaders du mouvement des gilets jaunes.

    Liste du PCF : Léon Deffontaines (1), Emmanuel Maurel (3), André Chassaigne (5), Cécile Cukierman (80, Fabien Roussel (81). Commentaire : poussée par Fabien Roussel, la liste a intégré Emmanuel Maurel, ancien du PS et élu député européen en 2019 sur la liste des insoumis.



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (22 mai 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Élections européennes 2024 (2) : 37 listes et un bulletin de vote !
    Le souverainisme européen selon Emmanuel Macron : puissance, prospérité et humanisme.
    L'hymne à l'Europe.
    Fête de l'Europe, joies et fiertés françaises.
    Le Tunnel sous la Manche.
    Les 120 ans de l'Entente cordiale.
    Eurovision 2024.
    La vision européenne d'Édouard Balladur.
    Débat Valérie Hayer vs Jordan Bardella : l'imposture démasquée de Coquille vide.
    Il y a 20 ans, l'élargissement de l'Union Européenne.
    La convergence des centres ?
    Élections européennes 2024 (1) : cote d'alerte pour Renaissance.
    Valérie Hayer, tête de la liste Renaissance.
    Charles Michel et Viktor Orban : l'Europe victime d'une histoire belge !
    Jacques Delors : il nous a juste passé le relais !
    Il y a 15 ans : Nicolas Sarkozy, l'Europe et les crises (déjà).
    La Méditerranée, mère de désolation et cimetière de nos valeurs ?
    Le 8 mai, l'émotion et la politique.
    Ukraine, un an après : "Chaque jour de guerre est le choix de Poutine".
    Le 60e anniversaire du Traité de l'Élysée le 22 janvier 2023.
    De Gaulle, l’Europe et le volapük intégré.
    L’inlassable pèlerin européen Emmanuel Macron.
    Valéry Giscard d’Estaing, le rêveur d’Europe.
    Enfin, une vision européenne !
    Relance européenne : le 21 juillet 2020, une étape historique !






    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240521-europeennes.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/europe/article/elections-europeennes-2-37-listes-254785

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/05/21/article-sr-20240521-europeennes.html