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  • François Bayrou sera-t-il censuré ?

    « Pas moins de 84% des Français jugent, paraît-il, que le gouvernement ne passera pas l’année. Il m’arrive même de me demander où les 16% restants puisent leur optimisme. » (François Bayrou, le 14 janvier 2025 dans l'hémicycle).




     

     
     


    Dès la nomination de François Bayrou à Matignon, le 13 décembre 2024, on se posait tous la question : son gouvernement durera-t-il plus longtemps que celui de Michel Barnier ? Sera-t-il censuré ? Et les plus pessimistes : quand sera-t-il censuré ?

    Le 14 janvier 2025, à l'issue de la déclaration de politique générale de François Bayrou et de la discussion parlementaire qui a suivi, le groupe des insoumis a déposé une motion de censure qui sera examinée ce jeudi 16 janvier 2025 (le même jour que la cérémonie d'hommage à Jean-Marie Le Pen à Paris !).

    Mais avant de m'appesantir sur la situation du gouvernement Bayrou, reprenons d'abord les fondamentaux de la Constitution. D'un point de vue théorique, le principe de la censure, c'est-à-dire de renversement d'un gouvernement par une motion de censure lorsqu'il y a une majorité absolue de députés qui le rejette, me paraît être un pilier essentiel de notre démocratie parlementaire et permet d'affirmer, même sans vote d'investiture (comme sous la Quatrième République), même sans vote de confiance (facultatif), que tous les gouvernements sont légitimes et démocratiques, car ils pourraient être renversés.

    La censure est l'une des deux armes des relations entre l'exécutif et le législatif. Avant 2024, elle n'a été utilisée qu'une seule fois en 1962 (dans des conditions bien particulières, je n'y reviens pas) sous la Cinquième République. L'autre arme, c'est la possibilité de réponse, par le Président de la République, d'une censure par l'Assemblée : sa dissolution. Les deux armes peuvent être utilisées bien sûr l'une indépendamment de l'autre. En 1962, la dissolution avait suivi immédiatement la censure du gouvernement de Georges Pompidou. Mais elle a été utilisée aussi de nombreuses fois, soit à la suite d'une élection présidentielle (1981 et 1988), soit pour répondre à des crises politiques (1962 et 1968), soit encore à froid (1997). Je laisse les historiens classer la dissolution de 2024 (crise ? à froid ?). Le jeu de la censure est donc un jeu d'équilibre de la terreur : les députés qui censurent risquent leur propre dissolution. Cela ne fonctionne plus en 2024, car l'Assemblée ne peut pas être dissoute avant une année pleine après les dernières élections anticipées.

    D'où la situation doublement nouvelle de la XVIIe législature, celle issue des urnes de l'été 2024 : non seulement l'Assemblée bénéficie d'une impossibilité (temporaire) d'être dissoute (un gros avantage pour les générateurs de chaos politique), mais aussi les électeurs (et eux seuls ! pas Emmanuel Macron, je précise !) ont élu une Assemblée éclatée en trois blocs incompatibles et équivalents, d'où l'impossibilité d'y trouver une majorité même relative. Dans cette situation inédite sous la Cinquième République, les groupes parlementaires devraient s'entendre sur un programme minimal pour permettre à la France d'être gouvernée. Aucun groupe ne peut prétendre avoir gagné et appliquer son programme politique. Une censure, dans ce contexte, est aussi improductive qu'inutile, voire génératrice de chaos.

    Et puis, il y a la pratique. La réalité, c'est que la censure du 4 décembre 2024 a été un choc politique très violent. Quasiment aussi violent pour les Français que le choc de la dissolution le 9 juin 2024. Un effet de sidération et des conséquences désastreuses malgré tous ces professionnels de la censure qui prétendaient à tort que cela n'aurait aucun impact. Bien sûr que si que l'instabilité politique de la France aurait un impact direct.

    D'abord sur les Français eux-mêmes qui perdent un temps fou pour avoir des solutions parfois consensuelles : les agriculteurs, les nouveaux emplois à pouvoir dans la fonction publique (gendarmes, juges, etc.) qui ne pourront pas être pourvus faute de vote budgétaire, les entreprises (qui attendent au lieu d'investir), les consommateurs (qui préfèrent épargner avant de savoir comment ils seront mangés) et même les contribuables dont certains, à bas revenus, seront nouvellement imposés à cause des barèmes 2024 qui ont été reconduits par la loi spéciale sans ajustement de l'inflation, etc.


    Ensuite, des conséquences extérieures, non seulement l'image de la France à l'étranger, mais surtout sa crédibilité financière, le risque d'augmentation des taux d'intérêt sur la dette (la France empruntera 350 milliards d'euros cette année 2025), car l'instabilité politique engendre systématiquement une instabilité économique et une incertitude fiscale et sociale, d'autant plus que la stabilité politique restait l'un des derniers atouts de la France par rapport à ses voisins européens.
     

     
     


    Je n'aurais pas imaginé une telle violence ressentie par la censure du 4 décembre 2024 qu'on pourrait comparer à Hiroshima et Nagasaki pour la dissuasion nucléaire. Si le RN et la nouvelle farce populaire (NFP) ont prouvé qu'ils étaient capables de s'allier pour jouer au chamboule-tout, leur collusion irresponsable n'a rien apporté à la France, n'a rien construit, n'a apporté aucune solution, aucun gouvernement, n'a en rien aidé les Français, y compris leurs propres électeurs.

    C'est dans ce contexte postapocalyptique dont a fait les frais le gouvernement Barnier que la question de la censure se pose pour son successeur. Le gouvernement Bayrou a ainsi deux avantages sur le gouvernement Barnier : celui de montrer qu'une censure n'est pas un acte à prendre à la légère et les électeurs seront très sévères face à l'irresponsabilité destructive des mouvements populistes (il faut lire les sondages actuels ou aller écouter les Français dans les multiples cérémonies des vœux dans tous les territoires) ; et la méthode qui a changé, ne serait-ce qu'en nommant un Ministre de l'Économie et des Finances compatible avec les socialistes, donc pas macroniste (en l'occurrence Éric Lombard est un grand ami d'Olivier Faure qui l'avait même proposé comme Premier Ministre en décembre dernier !).


     

     
     


    Il semble à peu près certain que François Bayrou ne doit pas craindre la motion de censure du 16 janvier 2025 car elle devrait être rejetée, le groupe RN ayant annoncé qu'il refuserait de censurer à froid le gouvernement. Mais la question se pose sur la décision du groupe socialiste car François Bayrou a noué des relations avec lui ces dernières semaines dans un cadre de non-censure : si François Bayrou veut pouvoir faire adopter les deux lois de finances 2025 (État et sécurité sociale), il lui faut absolument la neutralité bienveillante du PS pendant quelques mois au moins, puisque celle du RN n'est pas fiable.

    Or, le groupe PS est traversé par deux impératifs contradictoires : l'impératif électoral, qui nécessite une alliance avec les insoumis qui ne manqueraient pas de les traiter de traîtres et de présenter des candidats contre ceux qui ne voteraient pas la censure (d'où le retour à la niche de Jean-Luc Mélenchon des communistes et des écologistes, plus trouillards que les socialistes), et l'impératif de responsabilité, car le PS veut encore rester un parti gouvernemental avec un fort courant interne qui pourrait renverser Olivier Faure au prochain congrès du PS en cas de nouveau vote de censure.

    François Bayrou a bien compris la problématique et la question est de savoir s'il veut être sincère ou tromper les socialistes. Beaucoup de socialistes doutent et ils ont raison dans l'absolu, mais la sincérité de François Bayrou, ici, ne peut pas être mise en doute car l'ancien candidat avait déjà montré de signes de socialo-compatibilité assez nets, notamment à l'élection présidentielle de 2012 avec le soutien à François Hollande et dans certaines municipalités dès 2008, en particulier à Dijon.


     

     
     


    En clair, les socialistes ne veulent plus censurer le gouvernement car ils ne sont pas prêts pour une crise de régime qui pourrait aboutir à une élection présidentielle anticipée. Ils ont besoin d'un temps long, bien au-delà de l'été 2025, pour se crédibiliser politiquement hors d'une alliance avec l'extrême gauche. Ainsi, les dirigeants hésitent à franchir le pas, le pas de la non-censure. Dans la matinée juste avant la déclaration de politique générale, ils estimaient que le gouvernement les avait écoutés et qu'ils ne le censureraient pas. Mais après le grand oral, comme rien ne leur a été apparemment donné, pas de suspension de la réforme des retraites, ils reculaient et envisageaient sérieusement de revenir à la censure (du reste, comme la veille au soir). On leur a dit que la journée du mercredi 15 janvier 2025 pourrait leur apporter des garanties supplémentaires.

    En effet, à deux occasions, François Bayrou pouvait un peu évoluer sur la réforme des retraites : au débat de politique générale au Sénat, une sorte de redite de la veille à l'Assemblée, mais pas forcément identique, et juste avant, en début d'après-midi, une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée.

    Au Sénat, François Bayrou est intervenu trente minutes au lieu des quatre-vingt-dix minutes de la veille. Il a fait plus du commentaire que du déclaratif solennel. En revanche, à l'Assemblée, il a répondu clairement à une question du premier secrétaire du PS un peu ennuyé de ne pas avoir de prétexte clair vis-à-vis de leurs électeurs pour ne pas censurer le gouvernement.


    Olivier Faure a clairement indiqué son positionnement : « Nous sommes dans l’opposition mais nous avons fait un choix : celui de néanmoins rechercher un compromis. ».
     

     
     


    Et sa question a posé le problème tout aussi clairement : « Au cours de la semaine passée, nous avons beaucoup discuté avec vos ministres et avec vous-même et cherché à avancer sur nombre de questions qui touchent à la vie quotidienne des Français : la santé, le service public, les jours de carence… Autant de sujets qui les inquiètent et sur lesquels vous êtes en partie revenus hier, lors de votre déclaration de politique générale. Vous le savez : la clef de voûte de cette discussion est la réforme des retraites, cette réforme restée comme une blessure à la fois sociale et démocratique. Le départ à la retraite des Françaises et des Français va être progressivement reporté, jusqu’à l’âge de 64 ans. Ce sont les classes populaires, les femmes, les personnes avec des carrières longues, hachées, pénibles, qui seront les premiers pénalisés. Vous avez déclaré hier que cette réforme pouvait être "plus juste". Voilà un point d’accord entre nous car la réforme est selon nous terriblement injuste. Vous avez annoncé une conférence sociale ; c’est un premier pas. Cette conférence devra, en toute sincérité et transparence, tout mettre sur la table : l’âge légal de départ à la retraite, la durée de cotisation, la pénibilité du travail, les carrières des femmes, les sources de financement. Je vous le dis : elle ne pourra pas se clore par un retour à la réforme de 2023. Pour les socialistes, le statu quo n’est pas possible. Dans l’hypothèse où syndicats et patronat ne trouveraient pas d’accord, il reviendra à la démocratie parlementaire de s’exprimer. Dans ce cas, le Parlement doit avoir le dernier mot. Voilà notre position. Elle est claire. Elle est publique. À ce stade, le compte n’y est pas. Vous le savez : votre réponse à cette question conditionnera notre vote sur la motion de censure demain. ».

    La perspective d'un échec de la conférence sociale qui maintiendrait la réforme en l'état inquiète les socialistes. C'est toutefois ne pas croire aux négociations sociales alors que c'est le leitmotiv du PS depuis des décennies. François Bayrou a évolué depuis le début puisqu'il a proposé que cette conférence sociale se fasse immédiatement (dès vendredi 17 janvier 2025 à 11 heures, gare à ceux qui la censureraient la veille !) et rapidement (elle ne durerait que trois mois, sous forme d'un conclave : on boucle tout jusqu'à ce qu'il y a un accord ! pas exactement, mais c'est l'idée).
     

     
     


    La réponse de François Bayrou a été celle-ci : « S'agissant de la réforme des retraites, nous avons décidé de demander aux partenaires sociaux et au gouvernement, qui a la responsabilité de l’emploi public, de se réunir pour examiner les voies de progression identifiées après la réforme qu’Élisabeth Borne, après tant d’autres chefs du gouvernement, a conduite, je signale au passage que votre groupe ou votre courant de pensée, bien que s’étant opposé aux réformes précédentes, n’est jamais revenu dessus, car la réalité s’impose à nous tous. Je vais vous répondre clairement. Cette conférence sociale permettra, nous le croyons, de déboucher sur un accord. Nous le croyons parce que nous croyons, tout comme vous, j’imagine, à la capacité des partenaires sociaux à progresser. La démocratie sociale est un des piliers de la démocratie française et je peux attester, à la suite des conversations qu’ils ont eues avec moi, que les partenaires sociaux sont déterminés à avancer. Ils ont eux aussi identifié des marges de succès. ».

    Et le chef du gouvernement a essayé de se montrer pédagogue sur les possibles issues de cette conférence sociale : « Il y a donc trois possibilités. La première est qu’un accord se dégage. Il fera alors l’objet d’un texte soumis au Parlement. S’il n’y a aucune sorte d’accord, c’est la réforme précédente qui continuera à s’imposer. Excusez-moi mais c’est la moindre des choses ! Il peut néanmoins arriver, et c’est même probable, qu’on se trouve dans une situation où des marges de progression, des mouvements, des changements, des adaptations auront été identifiés sans qu’il y ait un accord général. Si c’est le cas, nous proposerons un texte qui reprendra ces adaptations et nous le soumettrons à l’Assemblée. Il n’y a rien de plus simple, de plus clair, de plus franc. Nous ne pouvons considérer à l’avance que les partenaires sociaux sont incapables de progression, je crois exactement le contraire. Je prends l’engagement devant vous que si nous identifions des possibilités de changements positifs, dans lesquels on discernerait des progrès, nous les présenterons au Parlement dans le cadre d’un projet de loi. ».

     

     
     


    Dans cette réponse, il y a à boire et à manger, et c'est sans doute la grande habileté de François Bayrou. Lui-même doit préserver la crédibilité financière de la France qu'il perdrait en cas de suspension ou d'abrogation de la réforme des retraites, ainsi que la crédibilité politique, éviter la perte d'un allié utile, LR, dont le principal ministre Bruno Retailleau est une pièce maîtresse dans son gouvernement.

    On pourrait penser que la conférence sociale se solderait soit par un succès (alors un projet de loi serait déposé pour appliquer l'accord) soit par un échec (alors ce serait le statu quo). Cette deuxième possibilité inquiète les socialistes car ils se disent que le Medef pourrait faire capoter la conférence sociale. Alors, François Bayrou casse cette dualité, cette bipolarité en proposant une troisième possibilité, une troisième voie, la plus probable : pas d'accord global mais quelques points d'accord sur des sujets particuliers, et dans ce cas-là aussi, le gouvernement déposerait un projet de loi.


    La probabilité qu'il puisse y avoir quelques points d'entente est quand même très élevée. Qu'importe lesquels, finalement, car pour les socialistes, l'élément majeur, c'est que le gouvernement puisse déposer un projet de loi qui amenderait la réforme des retraites. Car à partir de ce texte, tout serait possible à l'Assemblée en sachant qu'il y a une majorité absolue de députés favorables au retour à l'âge légal de 62 ans. C'est donc une grande concession pour François Bayrou qui, de son côté, lui permet de gagner du temps pour faire adopter le budget.

     

     
     


    Du côté des socialistes, on parle d'un réel changement, mais très petit changement, et pour certains, faisant le procès de l'hypocrisie, cela n'empêcherait quand même pas la censure. En fait, tout va dépendre du courage des dirigeants socialistes et de leur décision dépendra certainement leur avenir comme parti gouvernemental aux yeux des Français.

    Dans la soirée du mercredi 15 janvier 2025, les socialistes réunis en bureau n'ont pas réussi à adopter une position claire sur la motion de censure du lendemain : la voteront-ils, ne la voteront-ils pas ? La logique voudrait qu'une discipline de groupe soit appliquée dans cette décision, car la réponse collective éviterait de parler de "trahison" de quelques individus. Une nouvelle réunion est prévue jeudi matin. À court terme, François Bayrou ne risque pas grand-chose. Mais le risque est pour les semaines à venir et les prochaines discussions budgétaires. L'éthique de responsabilité est difficile à accoucher. Il faut souligner le courage des socialistes prêts à quitter le giron mélenchonien pour s'occuper réellement de l'intérêt des Français. Allez, encore un petit effort !


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (15 janvier 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    François Bayrou sera-t-il censuré ?
    Les conclaves du cardinal Bayrou.
    Déclaration de politique générale du Premier Ministre François Bayrou le 14 janvier 2025 au Palais-Bourbon (vidéo et texte intégral).
    François Bayrou au jour J.
    Édouard Philippe et sa partition particulière contre l'indolence.
    François Bayrou et le Chemin.
    Vœux 2025 d'Emmanuel Macron : aux Français de trancher ?
    Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron, le 31 décembre 2024 à Paris (texte intégral et vidéo).
    François Bayrou au travail !
    Gouvernement Bayrou : un choc d'autorité ?
    Composition du Gouvernement François Bayrou I nommé le 23 décembre 2024.
    Le difficile accouchement du gouvernement Bayrou.
    La méthode Bayrou réussira-t-elle ?
    Terre de désolation.
    La folle histoire de la nomination de François Bayrou.
    François Bayrou, le papa Macron !
    Le tour de François Bayrou !
    La polémique entre Maurice Druon et François Bayrou en juillet 2004.
    Le paysage politique français postcensure.
    Motion de sangsue : les conséquences économiques désastreuses de la censure.
    Philippe Vigier défend les Français face au renoncement national.
    Laurent Wauquiez met en garde contre l'instabilité institutionnelle.
    Emmanuel Macron face à ses choix.
    Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron le 5 décembre 2024 (texte intégral).
    La motion RNFP : Chassez le naturel, il revient au chaos !
    L'émotion de censure de Michel Barnier.
    La collusion des irresponsables.
    Gouvernement Barnier : les yeux du monde rivés sur la France.
    Risque de censure : Non, le RN n'est pas l'arbitre des élégances !
    Michel Barnier plaide pour la sobriété normative et procédurale !
    Discours du Premier Ministre Michel Barnier le 21 novembre 2024 à la Porte de Versailles (vidéo et texte intégral).
    Michel Barnier sur les pas de Pierre Mendès France.
    Discours du Premier Ministre Michel Barnier le 15 novembre 2024 à Angers (vidéo et texte intégral).
    PLF 2025 : la majorité de rejet !
    Michel Barnier : déjà deux mois !
    François Guizot à Matignon ?
    5 euros pour visiter Notre-Dame de Paris ?
    Achats dans la fonction publique : des économies à faire ?
    Doliprane : l'impéritie politique.
    Proche-Orient : l'incompréhension de Roger Karoutchi.
    Motion de censure : le quart d'heure de gloire d'Olivier Faure.
    Budget 2025 : l'impossible mission de Michel Barnier.
    Claude Malhuret : du vol des élections aux chefs d'escadrille...
    Les 3 lignes rouges de Marine Le Pen pour ne pas censurer le gouvernement Barnier.
    La quadrature du cercle de Michel Barnier.


     

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250115-bayrou.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/francois-bayrou-sera-t-il-censure-258668

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/01/15/article-sr-20250115-bayrou.html




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  • Les conclaves du cardinal Bayrou

    « Cette œuvre de réconciliation à laquelle nous sommes appelés ne deviendra possible que si nous offrons une perspective à notre pays. Nos efforts doivent être tendus vers un but qui suppose la lucidité et le courage que je décrivais à l’instant : une nouvelle promesse française. » (François Bayrou, le 14 janvier 2025 dans l'hémicycle).



     

     
     


    Démarrage en fanfare pour le grand oral du Premier Ministre : « En vérité, contrairement à ce que beaucoup pensent, la situation de ce gouvernement présente un avantage considérable. Sur ces bancs, même parmi ceux qui sont violemment hostiles à ce que nous pensons ou à ce qu’ils croient que nous pensons, pas un ne trouve notre position enviable. Pas moins de 84% des Français jugent, paraît-il, que le gouvernement ne passera pas l’année. Il m’arrive même de me demander où les 16% restants puisent leur optimisme. Eh bien, au risque de vous surprendre, j’y vois un atout : quand tout va bien, on s’endort sur ses lauriers, mais quand tout paraît aller mal, on est contraint au courage. Le gouvernement dispose d’un deuxième atout décisif. C’est le besoin, l’exigence, l’injonction que le pays nous assigne : retrouver la stabilité. Tous les Français en ont besoin. Ils comprennent bien que nous ne sommes pas d’accord sur tout, mais ils nous enjoignent de joindre nos forces pour forcer les issues. ».

    Ce mardi 14 janvier 2025 à 15 heures, François Bayrou est donc venu devant les députés prononcer sa déclaration de politique générale (on peut lire ou écouter cette déclaration ici). Un discours de quatre-vingt-dix minutes. Pour le leader centriste, cette journée a été à son image. Un fond très travaillé, une aisance dans ses fonctions et dans son environnement, l'Assemblée, malgré un peu de désordre (mélange des feuilles de son discours), et quelques pincées d'humour, plus de l'autodérision (« Les pages de mon discours sont un peu mélangées, parce que je suis un néophyte. Je suis donc bien obligé d’apprendre ce métier. ») que l'ironie pince-sans-rire et grinçante de son prédécesseur Michel Barnier.

    Comme dans toute déclaration de politique générale, il y a une forte densité de fond, sans pour autant devenir un catalogue à la Prévert de mesures gouvernementales. Au contraire, à la fin, on lui a reproché d'être resté trop vague. Mais justement ! Lui ne vient pas en service commandé du Président de la République. Il ne vient pas en bénéficiant d'une majorité absolue à l'Assemblée. Il ne se dresse pas devant les députés en conquérant, en imperator. Au contraire ! Il arrive sur un terrain miné, sans majorité et avec un risque très fort de censure (comme son prédécesseur). Alors, il est venu avec quelques idées claires, mais sans apporter les solutions toutes faites. Ce sera au Parlement de préciser les choses. Ceux-là même qui critiquent l'autoritarisme du Président Emmanuel Macron reprochent à François Bayrou son manque de dirigisme gouvernemental, allez comprendre !

    Car la méthode Bayrou, ce n'est pas d'apporter des solutions toutes faites, déjà packagées, avec l'ultimatum, à prendre ou à laisser. L'ultimatum, dans une Assemblée sans majorité, est voué à l'échec rapide. François Bayrou préfère la méthode de la négociation et de la concertation.


     

     
     


    On ne s'étonnera donc pas qu'il ait commencé sa déclaration par l'importance de la dette publique. C'était son leitmotiv depuis la campagne présidentielle de 2002. À l'époque, toute le monde s'en moquait, on empruntait, on payait, on faisait du clientélisme, on empruntait, on s'endettait. Lui, François Bayrou, était le petit caillou de la chaussure, le sparadrap du capitaine Haddock, la mauvaise conscience : pensez à nos enfants ! On ne peut pas vivre à crédit et endetter notre jeunesse. Il l'a répété cette après-midi : « Jamais nous n’avons fait l’effort de partager avec les Français cette évidence que la dette contractée par notre pays concerne leurs propres enfants, nos propres enfants, que la charge que nous leur laissons sera trop lourde pour être supportée. (…) La dette est injuste et elle est insupportable si elle met à la charge de nos enfants nos dépenses courantes. ».

    Ce problème supplante toutes ses préoccupations de chef du gouvernement : « Les sujets d’inquiétude sont innombrables, mais il en est un, criant, qui émerge avec force : le surendettement du pays. Nos compatriotes, surtout les plus fragiles, savent ce qu’est (…) le surendettement et quelles incertitudes et difficultés il suscite. Depuis la guerre, la France n’a jamais été aussi endettée qu’elle l’est aujourd’hui. J’affirme qu’aucune politique de ressaisissement et de refondation ne pourra être conduite sans tenir compte de ce surendettement et sans se fixer pour objectif de le contenir et de le réduire. Pourquoi cette situation nous oblige-t-elle tous, collectivement ? C’est parce que tous les courants politiques dits de gouvernement y ont eu part. Quand François Mitterrand a été élu, en 1981, la France était l’un des pays les moins endettés du monde : sa dette s’élevait à peine à plus de 20% de la production nationale. En 1995, ce rapport était de 52% ; l’endettement a donc progressé de plus de 30 points en quatorze ans. À la fin des années 1990, la santé économique de la France, sur tous les points, était nettement supérieure à celle de l’Allemagne. Son commerce extérieur était largement excédentaire et son endettement inférieur à celui de ses voisins. Puis en 2000, sous le gouvernement de Lionel Jospin, les courbes se sont brutalement infléchies et ont commencé une descente que rien ne paraît pouvoir arrêter. Entre 2007 et 2012, sous Nicolas Sarkozy, l’endettement s’est accéléré, augmentant de 25 points de produit intérieur. Entre 2012 et 2017… Il y en aura pour tout le monde, je vous le promets ! Entre 2012 et 2017, sous François Hollande, l’endettement a augmenté de 10 points. Enfin, depuis 2017, sous Emmanuel Macron, il a augmenté de 12 points. Je n’en fais pas un motif d’accusation, car j’en connais les raisons. Quand François Mitterrand a été élu, en 1981, c’était l’alternance : il fallait que les Français, comme on disait à l’époque, y trouvent leur compte. Pour Nicolas Sarkozy, c’est la crise des subprimes. Emmanuel Macron a fait face, coup sur coup, à une cascade de crises jamais vue et jamais imaginée. En voici la liste : à partir de 2018, les gilets jaunes, puis le covid-19, qui a mis le pays à l’arrêt, puis la guerre en Ukraine, qui a provoqué l’inflation et l’explosion du prix de l’énergie. J’affirme donc que tous les partis de gouvernement, sans exception, ont une responsabilité dans la situation créée ces dernières décennies. J’affirme également que tous les partis d’opposition, en demandant sans cesse à cette tribune des dépenses supplémentaires, ont dansé aussi le tango fatal qui nous a conduits au bord de ce précipice. Cette dette est une épée de Damoclès au-dessus de notre pays et de notre modèle social. ».

    Le Premier Ministre a ensuite expliqué que le contexte international était mauvais, les États-Unis évoluant mal comme d'autres grands blocs comme la Russie, l'Iran, bref : « Nous avons basculé dans un monde nouveau et dangereux : nous sommes passés de la force de la loi à la loi de la force. ».

    D'où la nécessité de l'Europe pour garder une influence dans le monde : « Pour que la France fasse vivre son trésor de civilisation et continue de le partager avec le monde entier, l’Europe doit devenir une communauté stratégique, une puissance politique et de défense à la dimension de la puissance économique qu’elle devrait être. Une seule condition est pour cela nécessaire : nous devons accepter de nous définir et de nous affirmer ensemble. La construction d’une communauté politique pour faire vivre cette communauté de civilisation est la question qui domine notre vie publique depuis 1945. À cette construction ont contribué, chacun à leur manière, le Général De Gaulle, Jean Monnet, Robert Schuman, Valéry Giscard d’Estaing, François Mitterrand, Jacques Delors et Emmanuel Macron. Tous ont partagé la conviction selon laquelle l’indépendance de la France tient à celle de l’Europe et réciproquement. La prospérité de la France dépend de celle de l’Europe qui est capable, si elle le veut, de devenir le premier marché de la planète, de parler technologie, industrie, agriculture, à égalité avec les États-Unis et la Chine. C’est la raison pour laquelle nous soutenons de toutes nos forces le rapport présenté récemment par Mario Draghi, dont nous tirons la conclusion que nous devons nous battre tous ensemble pour un investissement à la hauteur de nos besoins. ».

    François Bayrou a articulé son action dans trois parties : « Nous devons en effet faire face à trois échéances. D’abord, nous devons répondre à l’urgence : il faut nous ressaisir pour adopter sans tarder les deux budgets, de l’État et de la sécurité sociale. En effet, nous payons tous au prix fort la précarité budgétaire, qui affecte aussi bien les entreprises et les investisseurs que les familles, les contribuables ou les emprunteurs. Nous devons relever un deuxième défi, celui de rétablir les conditions de la stabilité, qui impose de se réconcilier, ce dont le pays a tant besoin, et ce que ses citoyens ne cessent de réclamer. Enfin, le troisième défi s’inscrit dans le long terme : notre pays doit refonder son action publique, ce qui exige que nous nous attaquions sans tarder à tous les problèmes qui sont devant nous, et non à certains à l’exclusion des autres. ». En d'autres termes, le budget, une rénovation démocratique et une réforme de l'État pour restructurer en profondeur les dépenses publiques.


    Ce plan pourrait oublier beaucoup d'éléments. En fait, non, mais il répond d'abord à ce contexte spécial d'un mi-janvier encore sans vote du budget qui est sa première priorité absolue. Sans vote du budget, l'incertitude économique et sociale régnera et la France perdra beaucoup de crédit et d'argent à cause des taux d'intérêt qui monteront.

    Il a développé la méthode Bayrou comme procédé de déblocage : « Au cœur de ce blocage, il y a notre incapacité à vivre le pluralisme, à être en désaccord sans constamment nous menacer du pire. Les réquisitoires et les invectives minent la confiance des citoyens. Il est temps de changer de logiciel démocratique, donc de méthode, pour se confronter mais aussi se respecter et trouver des voies de passage, sans abdiquer ce que l’on est. Le lieu de la diversité où ces différences se transforment en capacité d’action, c’est le Parlement. C’est précisément sur ces bancs que, grâce à l’expression des différences, nous parvenons à dégager une volonté, une stratégie et des plans d’action pour le pays. ».

    Énumérons maintenant un certain nombre de sujets qui seront inscrits dans ses feuilles de route ministérielles (François Bayrou a aussi justifié le choix de ses ministres, ce qui est rare pour une déclaration de politique générale).

     

     
     


    Celui qui est sur toutes les lèvres depuis un mois, c'est la réforme des retraites. D'abord, un constat : « Le déséquilibre du financement du système de retraites et la dette massive qu’il a creusée ne peuvent être ignorés ou éludés. (…) Notre système de retraite verse chaque année quelque 380 milliards d’euros de pensions. (…) Or les employeurs et les salariés privés et publics versent à peu près 325 milliards par an. (…) Faites le calcul, restent 55 milliards, versés par le budget des collectivités publiques, au premier chef le budget de l’État, à hauteur de quelque 40 ou 45 milliards. Or, ces 40 ou 45 milliards annuels, nous n’en avons pas le premier centime. Chaque année, cette somme, le pays l’emprunte. Autrement dit, il a choisi de mettre à la charge des générations qui viennent ou qui viendront une partie du montant des pensions que nous versons aux retraités actuels. Les retraites représentent 50% des plus de 1 000 milliards de dette supplémentaires accumulés par notre pays ces dix dernières années. ».

    Puis, la proposition, celle de la "remise en chantier" (pas le mot "suspension") et d'un conclave : « Ce problème social et moral, le gouvernement n’entend pas le laisser sans réponse. La réforme des retraites est vitale pour notre pays et notre modèle social : bien des gouvernements successifs s’y sont engagés, depuis Michel Rocard jusqu’aux efforts courageux du gouvernement d’Élisabeth Borne. Je note dans ce débat passionnel un progrès considérable : plus personne ne nie qu’il existe un lourd problème de financement de notre système de retraites. En même temps, nombre de participants à ces discussions, notamment les organisations du dialogue social et les organisations syndicales, ont affirmé qu’il existait des voies de progrès et qu’on pouvait obtenir le même résultat par une réforme plus juste. Je choisis donc de remettre ce sujet en chantier, avec les partenaires sociaux, pour un temps bref et dans des conditions transparentes, selon une méthode inédite et quelque peu radicale. (…) La loi de 2023 a prévu que l’âge légal de départ passerait à 63 ans fin 2026. Une fenêtre de tir s’ouvre donc. Je souhaite fixer une échéance à plus court terme : celle de notre automne, où sera discutée la prochaine loi de financement de la sécurité sociale. J’ai la conviction que nous pouvons rechercher une voie de réforme nouvelle, sans aucun totem ni tabou, pas même l’âge de la retraite, à condition qu’elle réponde à l’exigence fixée : nous ne pouvons pas laisser dégrader l’équilibre financier que nous cherchons et sur lequel presque tout le monde s’accorde. Ce serait une faute impardonnable contre notre pays. Plusieurs partenaires sociaux ont indiqué qu’ils avaient identifié des pistes pour que la réforme soit socialement plus juste et cependant équilibrée. Ces pistes méritent toutes d’être explorées. Toutes les questions doivent pouvoir être posées. Chacun des partenaires sociaux aura le droit de faire inscrire à l’ordre du jour de ces discussions et négociations les questions qui le préoccupent : rien n’est fermé. (…) Je proposerai aux représentants de chaque organisation de travailler autour de la même table, de s’installer dans les mêmes bureaux, ensemble, pendant trois mois, à dater du rapport de la Cour des Comptes. Si, au cours de ce conclave, c’est ce qu’on dit quand on ferme les portes, cette délégation trouve un accord d’équilibre et de meilleure justice, nous l’adopterons. Le Parlement en sera saisi lors du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale, ou avant, et si nécessaire, par une loi. Je souhaite que cet accord soit trouvé, mais si les partenaires ne s’accordaient pas, c’est la réforme actuelle qui continuerait à s’appliquer. ».


     

     
     


    Sur le budget 2025, François Bayrou a fixé ses objectifs : 5,4% du PIB de déficit public (au lieu de 5,0%) avec une croissance revue à la baisse de 0,9% (au lieu de 1,1%). Mais l'objectif final de 3% en 2029 reste inchangé. Toutefois, les réductions des dépenses publiques sont restées vagues dans cette déclaration : « Des économies importantes seront proposées. Pour la suite, c’est un puissant mouvement de réforme de l’action publique qu’il faut conduire. Il faudra trouver des méthodes d’organisation de l’État qui ne requerront pas d’augmentation de nos dépenses publiques. Il nous faut repenser tous nos budgets, non pas à partir du prolongement de ce qui se faisait l’année précédente, augmenté d’un pourcentage d’inflation, mais de ce qu’exige le service ou l’action à conduire. Ces budgets redéfinis et repensés, je demanderai à tous les ministres de les préparer dès le printemps. C’est un effort dont personne ne devra s’exclure, chacun à sa manière, dans l’exercice quotidien de ses missions. Cet exercice devra interroger notre organisation. (…) Les parlementaires seront pleinement associés à cet effort d’organisation et de rationalisation. C’est la fonction du Parlement, qui s’exprimera à son degré le plus éminent : contrôler et évaluer. Cet effort devra être prolongé et inventif. Il devra être soutenu dans le temps, parce que souvent, la réforme prend du temps et, au début, coûte cher. ».

    Dans le deuxième chantier, celui de la réconciliation, François Bayrou a souhaité redonner plus de pouvoir d'initiative au Parlement (il a cité le projet de loi sur la fin de vie). Pour revivifier la démocratie, il veut favoriser le pluralisme politique en créant une banque de la démocratie chargée de financer les partis politiques et les campagnes électorales : « Je suis partisan, quand je vois l’état de la démocratie américaine, que nous échappions à cette contrainte : la vie politique tenue par l’argent. ».

    Il a promu également la proportionnelle comme mode de scrutin aux élections législatives supposé garantir le pluralisme politique (ce auquel je suis très fermement opposé, j'y reviendrai) : « Il faut également que chacun puisse trouver sa place au sein de la représentation nationale, à proportion des votes qu’il a reçus. C’est la seule règle qui permettra à chacun d’être lui-même, authentiquement, et non prisonnier d’alliances insincères. Je propose que nous avancions concernant la réforme du mode de scrutin législatif. Chacun exprimera alors sa position : il y a une option à prendre sur ce principe, une discussion à avoir sur ses modalités. On voit bien quels sont les principaux choix. C’est mon opinion que ce mode de scrutin doit rester enraciné dans les territoires, qu’il ne doit pas créer plusieurs catégories de citoyens ayant des droits différents. Cette adoption du principe proportionnel pour la représentation du peuple dans nos assemblées nous obligera en outre probablement, comme l’a dit le Président du Sénat, à reposer la question de l’exercice simultané d’une responsabilité locale et nationale. ».

    Un petit commentaire sur ce projet de proportionnelle : les députés LR seront très opposés à ce mode de scrutin (et ils auront raison), mais il est possible qu'il existe une majorité favorable dans l'Assemblée actuelle. Toutefois, associer ce mode de scrutin (apprécié des sondés) au cumul des mandats (très impopulaire dans les sondages), c'est le meilleur moyen de faire échouer une telle réforme (ce qui ne serait pas pour me déplaire !!).


    Intégrée dans cette partie, la réforme de l'audiovisuel public amorcée par Rachida Dati, à savoir la création d'une holding qui chapeauterait France Télévisions et Radio France, sera poursuivie : « La réforme de l’audiovisuel public, bien commun des Français, devra être conduite à son terme. ».

    Dans le troisième volet, il y a la réforme de l'État. François Bayrou a proposé que les collectivités territoriales fassent un effort de 2,2 milliards d'euros (au lieu de 5) pour contribuer au redressement des finances publiques : « J’ai tout à fait confiance dans la capacité des élus à mener cet effort. ». Lui-même sait de quoi il parlait puisqu'il est (encore) maire de Pau.


    Friand de créativité et de nouvelles idées, François Bayrou a annoncé qu'il relirait les cahiers de doléances remis lors du grand débat des gilets jaunes, qu'on a négligés selon lui : « Il y a six ans, sur nos ronds-points, ils dénonçaient l’état de notre société, tel qu’ils le ressentaient : la division du pays entre ceux qui comptent et ceux qui ne comptent pas, ceux qui passent à la télévision et ceux qui regardent l’écran, ceux qui appartiennent aux milieux de pouvoir (…) et les autres qui se sentent oubliés, négligés.. ».

     

     
     


    François Bayrou a aussi évoqué le statut institutionnel de la Corse, de la Nouvelle-Calédonie, Mayotte, l'immigration et l'application des obligation de quitter le territoire français, les agriculteurs (« Aujourd’hui, on les accuse de nuire à la nature, et c’est une blessure profonde. Quand les inspecteurs de la biodiversité viennent inspecter les fossés ou les points d’eau avec une arme à la ceinture dans une ferme déjà mise à cran par la crise, c’est une humiliation ; c’est donc une faute. »), la transition écologique et l'adaptation au changement climatique, la culture, l'accès à la lecture autrement que sur des écrans, le sport, la solidarité pour les personnes en situation de handicap (« Je tiens à confirmer à l’Assemblée Nationale le remboursement intégral des fauteuils roulants dès 2025. »), le grand âge, la protection de l'enfance, le logement, etc.

    Le maire de Pau a fait une ode à l'esprit d'entreprise, en prenant la fable de la poule aux œufs d'or de La Fontaine : « Soutenir l’esprit d’entreprise, tel est le chantier suivant. Il existe chez nous un réflexe nuisible, déjà ancien : prendre pour cible, dans le débat, les entreprises, plus spécialement les entreprises françaises, et en particulier celles qui réussissent le mieux à l’exportation. Les entreprises que l’on dit multinationales sont en réalité celles qui, par leur savoir-faire, leur recherche, leur esprit de conquête, ont réussi à être sélectionnées pour la compétition mondiale. Elles font honneur à la France et contribuent à sa richesse. J’ai la conviction que, dans toutes les conditions fixées par la démocratie sociale, nous devons faciliter la tâche de nos entreprises. Elles doivent être prémunies contre des augmentations exponentielles d’impôts et de charges, sans quoi nous nous retrouverions dans la situation que décrit la fable de La Fontaine intitulée "La poule aux œufs d’or". Vous le savez, le propriétaire d’une poule qui pondait un œuf d’or chaque matin "crut que dans son corps elle avait un trésor. / Il la tua, l’ouvrit, et la trouva semblable / À celles dont les œufs ne lui rapportaient rien, / S’étant lui-même ôté le plus beau de son bien". L’entreprise produit les richesses et l’emploi, pour tout le pays, grâce à ses dirigeants, ses chercheurs, ses cadres, ses salariés ; mais si elle se voit surchargée de prélèvements et de normes, elle cesse de produire. Le trésor est dans l’activité, la créativité, la souplesse. ».

    Il a également longuement évoqué l'éducation, souhaitant en particulier que la sélection ne se fasse pas quand l'élève est trop jeune, prêt à revoir Parcoursup : « C’est pour moi le plus grand de nos échecs [les résultats médiocres de l'école], dont sont victimes en particulier les plus faibles. Car ceux qui sont issus des milieux qui n’ont pas les codes, ceux qui ne connaissent personne, comme on dit, et n’ont accès ni à l’influence, ni au pouvoir, se voient écartés sans recours, faute d’avoir les armes nécessaires pour affronter la traversée des formations supérieures. J’ajoute que l’obligation d’orientation précoce les perturbe et les met en danger. ». Puis est venue cette expression maladroite qui ne m'a pas paru très opportune : « Les enfants ne sont pas comme les poireaux : ils ne poussent pas tous à la même vitesse. ». Pour ajouter : « Vouloir sélectionner précocement, sans que l’esprit et les attentes aient mûri, est une erreur, ou en tout cas une faiblesse. Notre système scolaire et universitaire doit accepter, si ce n’est favoriser, les réorientations et les changements de formation. ».


    Ce sujet de l'éducation a été la seconde occasion pour louer l'action du Président de la République (la première occasion pour louer la parole haute de la France dans les relations internationales) : « Permettez-moi de rappeler l’intuition fondatrice que le Président de la République a présentée au pays en 2017 : combattre l’assignation de la naissance, du quartier, de la religion, de la consonance du nom, de l’accent, des difficultés nées de familles éclatées, de l’adolescence solitaire et offrir à tous ceux-là, tout au long de la vie, de nouvelles chances. ».
     

     
     


    François Bayrou a fait l'éloge du génie français dans la science et le développement : « Venons-en maintenant à la méthode que nous suivrons pour retrouver la production, l’innovation et l’industrie. On voudrait nous condamner au déclassement, alors que la Silicon Valley déroule ses tapis rouges à nos ingénieurs du numérique et de l’intelligence artificielle. Nous sommes, nous Français, des géants de la recherche informatique, algorithmique et automatique ; ne nous laissons pas devenir des nains de la nouvelle économie, qui sera précisément fondée sur le numérique. Il en est de même pour l’espace ou les énergies décarbonées. Le gouvernement est attaché à la trajectoire d’investissement dans la science définie par la loi de programmation de la recherche. Cette dernière se fait dans les universités et les laboratoires, mais aussi dans les entreprises. La stratégie nationale pour l’intelligence artificielle, dont je ne sais si elle est intelligente ni si elle est artificielle, mais elle est un changement d’être pour notre humanité, doit entrer dans sa troisième phase. Cette stratégie ambitieuse pour la diffusion de l’intelligence artificielle dans l’industrie, l’action publique, la formation et la recherche, s’appuie sur un programme d’investissement dans les infrastructures. Le sommet pour l’action sur l’intelligence artificielle, qui se tiendra à Paris en février, traduira cette ambition. Dans ces domaines, il nous faut définir des politiques de filière, produit par produit, en partant des faiblesses et des manques de notre balance commerciale. Chaque filière réunira les grandes entreprises, les sous-traitants, l’État et les régions autour d’un enjeu de production. Les géants mondiaux présents sur notre sol et qui ont des racines en France, Dassault Systèmes, Safran, Total, Airbus, Saint-Gobain ou Danone, ont un potentiel de partage des capacités de mise au point et de soutien à des entreprises nouvelles, notamment pour les produits et les secteurs dont nous sommes absents. ».

    Autre thème très important, la santé et l'hôpital : « Il faut aussi retravailler sur l’enjeu clef de la démographie médicale, en impliquant notamment les élus territoriaux et en menant de front le travail sur la question, jusqu’ici irrésolue, de la formation des soignants. Je confirme que la santé mentale sera la grande cause nationale en 2025, comme l’avait décidé mon prédécesseur Michel Barnier, je l’ai soutenu et lui adresse mon amitié. Dans ce cadre, pour faire face à l’enjeu de la soutenabilité de l’hôpital, le gouvernement proposera une hausse notable de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam), ce qui permettra d’améliorer les conditions de travail des soignants et de protéger les plus fragiles. À cette fin, la mesure de déremboursement de certains médicaments et consultations ne sera pas reprise. ».


    Comité interministériel de contrôle de l'immigration, comité interministériel des Outre-mer, comité interministériel du handicap, délégation permanente de la réforme des retraites, fonds spécial entièrement dédié à la réforme de l'État... autant de comités Théodule que le Premier Ministre veut créer ou réinstaurer, alors qu'il se demandait pourtant : « Est-il nécessaire que plus de 1 000 agences, organes ou opérateurs exercent l’action publique ? Nous connaissons le rôle précieux de plusieurs d’entre eux, comme France Travail, mais ces 1 000 agences ou organes, sans contrôle démocratique réel, constituent un labyrinthe dont un pays rigoureux et sérieux peut difficilement se satisfaire. Les parlementaires seront pleinement associés à cet effort d’organisation et de rationalisation. ».

    La conclusion de François Bayrou a fait la part belle à son lointain prédécesseur, investi par des députés très différents sous la Quatrième République, Pierre Mendès France, après avoir cité Marc Sangnier : « Nous n’allons pas vivre le grand soir. Mais, si nous parvenons à nous faire entendre de vous, élus de la nation, alors nous pourrons passer du découragement à un espoir ténu mais raisonnable. C’est ce projet que j’ai voulu présenter devant vous. Je connais tous les risques. Si nous nous trompons, nous corrigerons. Mais le risque, c’est la vie. Pierre Mendès France, la référence n’est pas choisie au hasard, aurait dit : "Il n’y a pas de politique sans risque, il n’y a que des politiques sans chance". Ce sont ces chances que nous voulons saisir. J’ai foi dans le peuple français et dans ses représentants. Je sais les ressources d’intelligence, de bravoure et de droiture de notre Nation lorsqu’elle choisit de surmonter l’épreuve. ».

     

     
     


    Dans sa longue réponse faite aux orateurs qui ont participé à la discussion générale dans l'hémicycle, François Bayrou a notamment confirmé qu'il était favorable à l'instauration d'une allocation sociale unique, comme l'a souhaité Laurent Wauquiez, mais sans y mettre un plafond qui serait profondément injuste pour certaines personnes.

    Une motion de censure, déposée par le groupe insoumis (Jean-Luc Mélenchon a assisté à la séance publique) sera examinée par l'Assemblée le jeudi 16 janvier 2025. En principe, les députés RN, quoique très remontés contre le gouvernement, ne devraient pas la voter. Les écologistes, eux, sont revenus à la niche mélenchoniste et voteront la censure. Et les socialistes s'interrogent encore.



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (14 janvier 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Les conclaves du cardinal Bayrou.
    Déclaration de politique générale du Premier Ministre François Bayrou le 14 janvier 2025 au Palais-Bourbon (vidéo et texte intégral).
    François Bayrou au jour J.
    Édouard Philippe et sa partition particulière contre l'indolence.
    François Bayrou et le Chemin.
    Vœux 2025 d'Emmanuel Macron : aux Français de trancher ?
    Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron, le 31 décembre 2024 à Paris (texte intégral et vidéo).
    François Bayrou au travail !
    Gouvernement Bayrou : un choc d'autorité ?
    Composition du Gouvernement François Bayrou I nommé le 23 décembre 2024.
    Le difficile accouchement du gouvernement Bayrou.
    La méthode Bayrou réussira-t-elle ?
    Terre de désolation.
    La folle histoire de la nomination de François Bayrou.
    François Bayrou, le papa Macron !
    Le tour de François Bayrou !
    La polémique entre Maurice Druon et François Bayrou en juillet 2004.
    Le paysage politique français postcensure.
    Motion de sangsue : les conséquences économiques désastreuses de la censure.
    Philippe Vigier défend les Français face au renoncement national.
    Laurent Wauquiez met en garde contre l'instabilité institutionnelle.
    Emmanuel Macron face à ses choix.
    Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron le 5 décembre 2024 (texte intégral).
    La motion RNFP : Chassez le naturel, il revient au chaos !
    L'émotion de censure de Michel Barnier.
    La collusion des irresponsables.
    Gouvernement Barnier : les yeux du monde rivés sur la France.
    Risque de censure : Non, le RN n'est pas l'arbitre des élégances !
    Michel Barnier plaide pour la sobriété normative et procédurale !
    Discours du Premier Ministre Michel Barnier le 21 novembre 2024 à la Porte de Versailles (vidéo et texte intégral).
    Michel Barnier sur les pas de Pierre Mendès France.
    Discours du Premier Ministre Michel Barnier le 15 novembre 2024 à Angers (vidéo et texte intégral).
    PLF 2025 : la majorité de rejet !
    Michel Barnier : déjà deux mois !
    François Guizot à Matignon ?
    5 euros pour visiter Notre-Dame de Paris ?
    Achats dans la fonction publique : des économies à faire ?
    Doliprane : l'impéritie politique.
    Proche-Orient : l'incompréhension de Roger Karoutchi.
    Motion de censure : le quart d'heure de gloire d'Olivier Faure.
    Budget 2025 : l'impossible mission de Michel Barnier.
    Claude Malhuret : du vol des élections aux chefs d'escadrille...
    Les 3 lignes rouges de Marine Le Pen pour ne pas censurer le gouvernement Barnier.
    La quadrature du cercle de Michel Barnier.


     

     
     



    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250114-bayrou.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/les-conclaves-du-cardinal-bayrou-258647

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/01/14/article-sr-20250114-bayrou.html




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  • François Bayrou au jour J

    « Nous attendons un mot très simple : suspension. Cela suppose qu'à un moment, on arrête de tous s'enrhumer quand Gérard Larcher tousse ! » (Olivier Faure, le 12 janvier 2025 sur BFMTV).




     

     
     


    Jour J pour le Premier Ministre François Bayrou : dans quelques heures, il va prononcer sa déclaration de politique générale. Ce n'est pas fréquent, dans une carrière politique, d'être nommé à Matignon, et donc, ce discours d'intronisation (informel, nous sommes sous la Cinquième République) est, en quelque sorte, l'un des moments culminants dans cette existence politique, et c'est le cas pour le maire de Pau et président du MoDem. Il a dû passer une nuit blanche.

    La motion de censure déposée par le groupe FI et examinée le surlendemain, 16 janvier 2025, sera très probablement rejetée. Ni le RN ni probablement le PS, entre autres, ne souhaitent une censure à froid. En revanche, François Bayrou va devoir annoncer ce qui fixera sa destinée lors de la discussion budgétaire et de la probable nouvelle motion de censure pour son adoption.


    Pour l'instant, François Bayrou a intégré l'enseignement du gouvernement de Michel Barnier : ne jamais faire confiance au RN pour la survie de son gouvernement, car ce groupe n'est pas fiable. En revanche, trouver des ponts avec le PS pour éviter une censure (le PS n'a aucun intérêt à une crise du régime) lui permettrait de durer. Encore ce lundi 13 janvier 2025 à 18 heures 30, une délégation du PS était reçue à Matignon. Des négociations au dernier moment. Pas forcément positives (le secrétaire général du PS Pierre Jouvet a dit sur BFMTV qu'il n'y avait pas eu « d'avancée significative dans les négociations »).

     

     
     


    Ainsi, l'histoire ne se répétera pas. Peut-être qu'elle sera aussi écourtée que celle du gouvernement Barnier, mais ce ne sera pas pour la même raison, par la même méthode. Pendant longtemps, les caciques de LR avaient reproché à François Bayrou quelques points communs avec les socialistes. Ces derniers, en tout cas, considèrent qu'il y a une réelle négociation, une réelle écoute, en comparaison avec son prédécesseur direct. Peut-être que le soutien public, au second tour, à François Hollande en 2012 aura-t-elle sa justification a posteriori ? En tout cas, au contraire d'un Michel Barnier bien ancré à droite, François Bayrou est sincère lorsqu'il souhaite assurer un minimum de ponts avec le PS.

    Le problème du PS (ainsi que des écologistes et des communistes), c'est que pour se différencier des insoumis, il leur faut une justification à la non-censure pour ne pas être traités de traîtres. Sans trophée, inutile d'envisager le temps long ou même demi-long. François Bayrou l'a bien compris et il est bien ennuyé, car le seul trophée qui vaille, c'est la réforme emblématique des retraites de 2023.

    Depuis deux semaines, l'avenir de cette réforme se joue ainsi. Pas question d'abrogation, mais au moins une "suspension", de six mois. D'un point de vue juridique, une suspension est une catastrophe pour juriste : comment arrêter tout en assurant qu'on continue ? Et surtout, comment ne pas empêcher ceux qui bénéficient de cette réforme de ne pas être pénalisés ? Et cela sans nouvelle loi.


    Comme avec Michel Barnier (c'était mon titre à sa déclaration de politique générale, prononcé le 1er octobre 2024), il s'agit d'une véritable quadrature du cercle. Comment rassembler deux aimants qui se repoussent ?

     

     
     


    À ma gauche, Olivier Faure, le premier secrétaire du PS, qui a réaffirmé sa position le dimanche 12 janvier 2025 sur BFMTV (lire en tête de l'article). Le sésame socialiste s'ouvrira avec le mot Suspension.

    Le problème, c'est qu'à ma droite, chez Les Républicains, le mot Suspension est synonyme de ligne rouge. Ainsi, dans "Le Parisien", le président du groupe LR à l'Assemblée Laurent Wauquiez a déclaré : « Suspendre la réforme sans scénario alternatif revient à sauter dans le vide sans parachute. Ce sera sans la droite républicaine ! ». Idem pour le Président du Sénat Gérard Larcher : « Le message st clair : ni suspension, ni abrogation ! ». Quant à la présidente LR du conseil régional d'Île-de-France Valérie Pécresse, elle a remis en cause, sur France Inter le 13 janvier 2025, la participation de LR au gouvernement en cas de suspension. Le principal concerné, le Ministre d'État, Ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, fervent partisan de la réforme de 2023, ne précise pas s'il partirait en cas de concession à suspension aux socialistes.

    Que me soit ici permis un petit commentaire acerbe envers les hiérarques de LR : ils ne manquent pas de culot alors qu'en 2023, ils s'étaient positionnés à l'Assemblée contre la réforme d'Élisabeth Borne. C'est justement parce que LR avait refusé de voter cette réforme que le gouvernement a dû brandir l'article 49 alinéa 3 de la Constitution, puis, plus généralement, par absence de majorité absolue, que le Président Emmanuel Macron a fini par dissoudre l'Assemblée l'année suivante. Où étaient-ils en 2023 ? Seul Bruno Retailleau et Gérard Larcher ont été cohérents dans cette affaire puisqu'ils avaient soutenu la réforme au Sénat.

     

     
     


    Au-delà du devenir de la réforme des retraites (ce n'est pas gentil, une si longue hésitation, pour les personnes concernées qui doivent quand même pouvoir avoir une idée de leur futur proche), François Bayrou devra aussi faire des réductions budgétaires, 50 milliards d'euros, peut-être plus si des concessions ont été données pour la suspension ? Et cela dans un contexte où son Ministre de la Justice réclame une augmentation drastique de son budget pour lutter plus efficacement contre les narco-trafiquants.

    François Bayrou a néanmoins une certitude : c'est qu'en tout état de cause, LR ne voterait pas de motion de censure contre son gouvernement. Mais ce n'empêche que si les ministres LR devaient le quitter, et sachant qu'il est hors de question d'intégrer des ministres du PS (le PS souhaite rester dans l'opposition ; ce qui se négocie, c'est juste la non-censure), cela réduirait énormément sa base gouvernementale.


     

     
     


    C'est là qu'on attend la grande richesse de la fabrique de consensus de François Bayrou. Et elle semble se reposer sur un mot, le mot suspension. Alors, j'ai regardé les synonymes que Larousse proposait pour Suspension : abolition, accalmie, arrêt, cessation, fermeture, trêve, interruption, fin. Il y a parmi ces mots proposés des mots à collerette rouge à exclure à tout prix, comme abolition, arrêt, cessation, fermeture, fin. On pourrait garder "accalmie", accalmie dans la vie politique française. Ou encore "trêve". Ce ne sera plus la trêve des confiseurs, mais la trêve de la galette, la trêve des rois. Bref, la paix des braves ! (Mais ce n'est pas gagné).


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (13 janvier 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    François Bayrou au jour J.
    Édouard Philippe et sa partition particulière contre l'indolence.
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    Vœux 2025 d'Emmanuel Macron : aux Français de trancher ?
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    François Bayrou au travail !
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    Composition du Gouvernement François Bayrou I nommé le 23 décembre 2024.
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    Le paysage politique français postcensure.
    Motion de sangsue : les conséquences économiques désastreuses de la censure.
    Philippe Vigier défend les Français face au renoncement national.
    Laurent Wauquiez met en garde contre l'instabilité institutionnelle.
    Emmanuel Macron face à ses choix.
    Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron le 5 décembre 2024 (texte intégral).
    La motion RNFP : Chassez le naturel, il revient au chaos !
    L'émotion de censure de Michel Barnier.
    La collusion des irresponsables.
    Gouvernement Barnier : les yeux du monde rivés sur la France.
    Risque de censure : Non, le RN n'est pas l'arbitre des élégances !
    Michel Barnier plaide pour la sobriété normative et procédurale !
    Discours du Premier Ministre Michel Barnier le 21 novembre 2024 à la Porte de Versailles (vidéo et texte intégral).
    Michel Barnier sur les pas de Pierre Mendès France.
    Discours du Premier Ministre Michel Barnier le 15 novembre 2024 à Angers (vidéo et texte intégral).
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    5 euros pour visiter Notre-Dame de Paris ?
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    Doliprane : l'impéritie politique.
    Proche-Orient : l'incompréhension de Roger Karoutchi.
    Motion de censure : le quart d'heure de gloire d'Olivier Faure.
    Budget 2025 : l'impossible mission de Michel Barnier.
    Claude Malhuret : du vol des élections aux chefs d'escadrille...
    Les 3 lignes rouges de Marine Le Pen pour ne pas censurer le gouvernement Barnier.
    La quadrature du cercle de Michel Barnier.


     

     
     



    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250113-bayrou.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/francois-bayrou-au-jour-j-258628

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/01/13/article-sr-20250113-bayrou.html





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  • Méfiez-vous du chat qui dort à Noël !

    « La voix des angoras est douce et petite dans l'ordinaire de la vie, sans préjudice des temps amoureux où ils se changent en démons hurleurs. » (Colette).



     

     
     


    Attention aux chats ! J'adore les chats et je sais "m'en servir", c'est-à-dire que je connais leurs réactions, je connais leur mode de vie, etc., et pourtant, parfois, les chats sont imprévisibles, il faut toujours faire attention à leur caractéristique encore sauvage, même s'ils se sont pleinement humanisés au fil des siècles et des millénaires.

    Dans la rubrique des pas-chiens pas-écrasés, l'édition de Nancy de "L'Est républicain" a publié le mardi 31 décembre 2024 un article de Jean-Christophe Vincent qui fait le bilan des fêtes de Noël 2024 aux urgences. Eh oui ! La période des fêtes, comme la période des sports d'hiver dans les régions de montagne, est une période pendant laquelle les services des urgences des hôpitaux sont plus densément sollicités à cause des accidents domestiques provoqués par le contexte festif et (souvent) alcoolisé.

    Le quotidien nancéien s'est penché sur l'activité du Centre chirurgical Émile-Gallé de la rue Hermite, une antenne du CHRU de Nancy, le soir du 24 décembre 2024 et le jour de Noël. Son service d'urgence SOS Mains a accueilli une quarantaine de patients la veille et une trentaine de patients le jour même de Noël.

    Le chef du service de chirurgie de la main, le professeur François Dap, fort de ses quarante-cinq années d'expérience, en a vu de toutes les couleurs : « L’alcoolisation constitue un des grands dangers des fêtes de fin d’année. ». Ainsi, les accidents sont légions : chute avec un verre à la main qui se casse, ouverture d'huîtres avec couteau mal utilisé, découpage de la dinde aux marrons, voire bagarre. « Il arrive même que nous prenions en charge des patients qui se sont coupés après avoir donné un coup de poing dans une vitre. » a affirmé le médecin au journaliste de "L'Est républicain".

    Pourtant, depuis quelque temps, ces accidents domestiques, ordinaires, ne constituent pas la première cause des passages à SOS Mains : « Un tiers des patients que nous avons pris en charge au service SOS Mains ont été blessés par des griffures ou des morsures de chat. C’est un phénomène qui s’accentue depuis quelques années, alors que les blessures causées par un couteau à huîtres ne cessent de diminuer, au point d’être devenues moins nombreuses que celles engendrées par un félin. ».

    Il y a maintenant une bonne sensibilisation pour faire attention lorsqu'on ouvre des huîtres, avec le couteau à huîtres, les choses à ne pas faire pour éviter de se blesser, il y a même des vidéos pour expliquer comment faire. Les gens font donc plus attention aux huîtres, mais il manque sans doute une sensibilisation aux chats !

     

     
     


    Pour le spécialiste de la main, qui n'est pas un vétérinaire, cette engorgement des urgences en raison des morsures de chats a en effet une raison simple : il y a de plus en plus de chats domestiques (plus de 10 millions en France), plus que de chiens depuis une bonne décennie, et donc, chez les hôtes qui accueillent les invités pour Noël, il y a de plus en plus la présence de chats. Or, dans un contexte de changement d'habitude, présence des invités, déplacement de tables, chaises, canapés, bruit inhabituel, comportement inapproprié des invités avec eux, les chats peuvent réagir avec beaucoup de stress : « Lorsqu’il y a beaucoup de bruit et de convives, les chats ne sont pas forcément dans les meilleures dispositions pour recevoir des caresses. Ce qui est sûr, c’est qu’une griffure ou une morsure de chat peut avoir de graves conséquences. Si on ne soigne pas tout de suite la plaie causée par ce type de blessure, ça peut s’infecter rapidement et atteindre un tendon. ».

    Une morsure de chat ne doit pas être prise à la légère par la victime. Il y a bien sûr la plaie et les dégâts plus ou moins graves sur la chair voire plus (tendon, nerf, etc.), qui parfois nécessitent une opération chirurgicale, mais il y a aussi des risques de rage (selon la région et selon que l'animal est vacciné ou pas contre la rage, animal car cela concerne aussi bien le chien que le chat), les risques contre le tétanos (si la personne mordue n'est plus à jour de vaccination, il faut consulter un médecin avant quarante-huit heures), et enfin, il y a la possibilité d'une surinfection tant locale (abcès) que générale (fièvre, etc.).

    Le conseil d'Ameli, l'Assurance Maladie, est simple et clair : « Les morsures doivent être soignées immédiatement pour éviter les risques d’infection. Si vous avez été mordu par un chat ou un chien, nettoyez la plaie et selon la gravité de la blessure, consultez un médecin ou appelez les urgences. ».

    En effet, le risque infectieux est très important pour une morsure de chat (on s'en rend compte avec des gonflements, de la fièvre, un état général affaibli, etc. au bout de quelques heures) car il provient de la présence de différentes bactéries dans la salive du chat : le Pasturella, responsable de la pasteurellose qui se présente généralement sous forme d'œdème ; le streptocoque qui peut provoquer fièvre et douleurs musculaires ; le staphylocoque ; enfin, le Bartonella henselae à l'origine de la maladie des griffes du chat. Toutes ces bactéries peuvent être traitées par des antibiotiques prescrits par un médecin, mais il fait agir dans les douze à vingt-quatre heures. Le risque est encore plus grand bien sûr lorsque la victime est immunodéprimée ou a des pathologies particulières comme le diabète, etc.

    Au réveillon du Nouvel an, les passages aux urgences des mains à Nancy ont donc été tout aussi à base de chats que d'alcool et de blessures par couteau, verre, etc., avec une cause supplémentaire, une main blessée par un pétard, heureusement, en nette diminution au fil des années.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (04 janvier 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Méfiez-vous du chat qui dort à Noël !
    Et Dieu créa les animaux...
    Le Bébé de Stéphanie de Monaco.
    Népal : on abat au cas où.
    Jacques-Yves Cousteau.
    Big Tim et ses défenses géantes : l’extinction des espèces sous nos yeux…
    Rapport de l’ONU (IPBES) sur la biodiversité publié le 6 mai 2019 (à télécharger).
    Le cœlacanthe : un rival pour Darwin ?
    Erectus.
    Demain les chats.
    Les chats à Dutronc.
    La Belle et les Bêtes.
    L'amie des animaux.
    Un panda diplomatique.
    Les animaux ont-ils une âme ?
    La sensibilité des animaux reconnue par le code civil.
    Les chasseurs…
    La vie dans tous ses états.

     

     
     





    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20241231-chats-noel.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/societe/article/mefiez-vous-du-chat-qui-dort-a-258454

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/01/01/article-sr-20241231-chats-noel.html


     

  • Édouard Philippe et sa partition particulière contre l'indolence

    « Pour moi, le budget intelligent, c'est d'avoir un budget qui remet la France dans le bon sens. Le bon sens, c'est interrompre cette courbe, que je crois mortifère pour le pays, d'un endettement qui s'accroît d'année après année et d'un déficit budgétaire qui n'est pas contenu. » (Édouard Philippe, le 8 janvier 2025 sur France 5).




     

     
     


    L'ancien Premier Ministre Édouard Philippe a fait sa rentrée politique ce mercredi 8 janvier 2025 sur France 5, dans l'émission "C à vous". Avec lui, la parole est rare, peut-être trop rare alors que le pays vit une crise politique majeure. Il fait partie des personnalités politiques les plus appréciées, mais il n'est pas dupe, il connaît la musique, lorsqu'on n'est plus au pouvoir, on est toujours populaire, cela ne donne pas forcément le ticket d'entrée pour l'Élysée. En revanche, il se distingue des autres candidats potentiels à l'élection présidentielle de 2027 par ce fait rare : il est le seul à avoir déjà déclaré officiellement sa candidature, c'était le 3 septembre 2024.

    Son look a encore changé depuis quelques mois. Presque moins chauve car il a laissé repousser quelques cheveux, et des lunettes plus discrètes. J'étais tenté de titrer cet article "Le Retour du Grand Chauve" mais c'était trop insister sur le physique. C'est vrai que je ne devrais pas me pencher sur l'image, mais en fait, l'image d'un candidat à l'élection présidentielle est essentielle, entre le père, le frère, le gendre, l'oncle de province, etc., les Français aiment bien se situer par rapport à celui (ou celle) pour qui ils vont voter. Au moins, on parle du look d'un monsieur, alors qu'en général, on n'en parlait que pour les femmes politiques. Valéry Giscard d'Estaing se trouvait trop grand et (donc) trop éloigné des Français. De Gaulle aussi trouvait son corps encombrant alors qu'au contraire, cela l'a aidé à incarner la France au point que certains aimeraient bien l'imiter.

    En ce moment, deux anciens Premiers Ministres étaient particulièrement absents de l'actualité politique depuis la censure du gouvernement de Michel Barnier : Gabriel Attal et Édouard Philippe. Ce dernier est donc sorti de son silence et a réfuté l'idée qu'il voudrait s'éloigner du débat politique. Il n'est pas au-dessus de la mêlée ; il est juste ailleurs. D'une part, il continue comme maire du Havre (et c'est une fonction à plein temps). D'autre part, il poursuit sa rencontre avec les Français et les forces vives du pays en visitant tout le territoire, à la mode de Jacques Chirac, en bas signal, sans caméra mais cela lui permet de mieux comprendre le pays et de façonner son futur projet présidentiel (comme l'avait fait François Fillon entre 2013 et 2017).


    À la question : il y a déjà Élisabeth Borne et Manuel Valls, pourquoi ne participez-vous pas au gouvernement comme ancien Premier Ministre ?, il a répondu qu'on ne l'y avait pas invité, et que si on le lui avait proposé, il aurait certainement refusé. Ce qui me gêne un peu, c'est qu'il n'a pas eu vraiment une seule parole de soutien au Premier Ministre actuel François Bayrou, sinon des choses convenues. Comme s'ils n'avaient pas une certaine complicité car ils sont tous les deux chefs de parti, alliés du Président Emmanuel Macron et en même temps, des personnalités indépendantes. Édouard Philippe l'a répété : il suit son chemin et l'avis des autres ne le fera pas changer de route. En d'autres termes, il pense par lui-même. Une pensée propre, c'est finalement assez rare, cela change des éléments de langage envoyés à tout le monde.

    Je suis aussi gêné par une autre chose. Oui, c'est vrai que la situation financière de la France n'est pas souriante, le déficit sera de 6,1% du PIB pour l'année 2024, et les perspectives sont moroses à la fois financièrement et politiquement puisque le budget de 2025 n'est toujours pas adopté. Ma gêne, c'est que, oui, il faut faire quelque chose financièrement, mais il le dit comme s'il n'avait pas participé à la majorité entre 2017 et 2024, et même comme s'il n'avait pas dirigé le gouvernement entre 2017 et 2020. Il y avait des raisons au "quoi qu'il en coûte" qui a été décidé quand il était encore Premier Ministre, dès avril 2020. Alors, pourquoi ne pas rappeler que le choix était le débordement déficitaire ou l'envolée du chômage ? J'ai peut-être ma réponse : les Français ne veulent voir que l'avenir et se moquent de l'analyse du passé, d'autant plus que l'élection présidentielle de 2022, avec la réélection d'Emmanuel Macron, a finalement donné quitus, qu'on le veuille ou pas, sur la période covid. D'ailleurs, la justice est sur le point de le relaxer sur la gestion de la crise sanitaire, ce qui est heureux au nom de la séparation des pouvoirs (la justice n'est pas compétente pour juger de la pertinence ou pas d'une politique publique, c'est le rôle du seul peuple qui jugera aux élections suivantes).

    Sur le déficit à 6,1%, l'ancien Premier Ministre n'a pas mâché ses mots : « Moi, je crois que c'est très inquiétant. Je pense que la situation financière du pays est très inquiétante. Je pense que nous sommes en train, par notre incapacité à régler quelques problèmes, de placer la France de demain, mais pas de demain dans trente ans, la France des dix ans qui viennent dans une situation de contrainte absolue. ». Cette contrainte absolue, ce n'est pas les gros yeux de la Commission Européenne, c'est le risque de l'augmentation des taux d'intérêt qui salera bien plus durement la note : les 50 milliards d'euros d'intérêt de la dette payés chaque année, la France ne les utilisera pas pour les écoles, les hôpitaux, la justice, la police, etc.


    Mais le gouvernement Bayrou est confronté à cette "porte étroite" de devoir bâtir un budget qui puisse reprendre une trajectoire pour atteindre un déficit à 3% du PIB en 2029 et, en même temps, de survivre aussi, car si une motion de censure était votée, il n'y aurait encore pas de budget et cela deviendrait très grave pour les Français (ce l'est déjà pour les agriculteurs, les Français non-imposés qui vont devenir imposés à cause du barème, etc.).

     

     
     


    Ce qui conduit Édouard Philippe à renoncer aux 5% de déficit pour 2025 prévu par Michel Barnier pour avoir un peu plus de marge de négociation avec 5,4 ou 5,5% : « Moi, je suis très attaché au retour dans le bon ordre des finances publiques, mais je pense que la stabilité politique est précieuse en ce moment. Et donc, si le gouvernement dit 5,4 et pas 5, s'il s'y prend bien, je peux concevoir qu'il y a un intérêt, un avantage et un intérêt pour le pays à conserver cette stabilité politique et à ne pas avoir une deuxième motion de censure sur un deuxième projet de loi de finances. ».

    Malgré tout, réduire de 6,1% à 5,4% restera un effort financier considérable et s'il y arrive, ce sera la prouesse de François Bayrou. Michel Barnier a échoué, en tout cas.

    La question que se posait franchement le maire du Havre est donc : « Comment est-ce qu'on y arrive ? Alors, vous avez d'un côté ceux qui disent pas de nouvel impôt. Quand on dit pas de nouvel impôt, ça veut dire qu'on peut bouger le taux des impôts qui existent en général, vous voyez ? (…) Vous avez ceux qui disent beaucoup de justice fiscale. Alors, en général en France, plus de justice fiscale, c'est toujours plus d'impôts. (…) Moi, mon objectif, c'est d'essayer de convaincre le gouvernement que l'intérêt du pays, c'est de baisser les dépenses publiques, et donc d'atteindre cet objectif de 5,4 et peut-être même de 5,5[% du PIB de déficit public] par la baisse de la dépense. C'est plus difficile ; je pense que c'est ce qu'il faut faire. ».

    Le problème, c'est que tout le monde, à part la gauche radicalisée, est favorable à cette idée de ne pas augmenter les impôts ou les taxes, cotisations, qui sont déjà énormes (la France championne du monde !), et donc, de réduire la dépense publique, mais personne n'est capable de dire quoi, où, quand et combien ! Ainsi, Édouard Philippe n'a pas dérogé à cette règle : il n'a donné aucune indication concrète pour aider le gouvernement dans sa mission quasi-impossible. C'est évidemment plus facile de penser à augmenter les impôts de 65 milliards d'euros, comme l'ont proposé les insoumis lors du premier débat budgétaire en novembre 2024. À part plomber l'activité économique, et donc, les recettes fiscales, cette hausse ne tiendra pas ses promesses de réduire le déficit car tout est un équilibre très fragile. Emmanuel Macron a réussi de rendre la France très attractive pour les investisseurs et cette réussite doit être rappelée : nous avons toutes les capacités à redémarrer financièrement si nous ne tombons pas dans le "tout fiscal".

    Par certains côtés, le discours de rigueur d'Édouard Philippe sur les finances publiques me fait penser à celui de Raymond Barre qui n'hésitait pas à dire publiquement, devant le Conseil Économique et Social, quelques mois avant l'élection présidentielle de 1981 (au grand dam de VGE !), que les Français verraient leur pouvoir d'achat impacté par les mesures de rigueur budgétaire. On était loin du populisme ambiant d'aujourd'hui !

    Édouard Philippe a semblé regretter que les Français ne prennent pas conscience de la situation budgétaire dans laquelle ils se trouvent, alors que les pays qui ont le même modèle social, le même niveau de vie, ont compris qu'il fallait réagir pour continuer à le financer (notamment sur l'âge de la retraite) : « Je n'ai pas des obsessions de comptable. J'ai des obsessions de souveraineté, d'autorité de l'État et d'indépendance de la France. Et lorsqu'on laisse les comptes partir comme nous les avons laissés partir, nous nous plaçons mécaniquement dans la main des prêteurs, c'est-à-dire de gens qui acceptent de nous prêter de l'argent, ça, c'est sûr, mais contre paiement, avec des taux d'intérêt qui sont en train de monter. (…) C'est quelque chose qui va ralentir la construction de logements. C'est quelque chose qui va ralentir les investissements. Et nous sommes en train de nous placer, par notre indolence parfois, par notre souci du confort immédiat, par notre refus de regarder la réalité en face, dans une situation dangereuse pour le pays. ».

    Un petit commentaire sur le mot "indolence" qu'il a choisi après hésitation. Édouard Philippe a la caractéristique, même à l'improviste, d'être très rigoureux dans le choix des mots. Je rappelle les deux définitions du mot "indolence". Il y a un sens ancien (peu utilisé) qui est : "insensibilité à la souffrance" (du genre : mon déficit est à 6,1%, même pas mal !) ; mais pour comprendre Édouard Philippe, il serait plus adéquat de prendre le second sens, littéraire, "disposition à éviter l'effort physique ou moral". Dans notre cas, ce serait donc plutôt "disposition à éviter l'effort financier". Cela dure depuis l'institution des budgets chroniquement déficitaires en 1981 par François Mitterrand pour qui l'argent public était gratuit.

    Il est temps, malheureusement, d'en finir avec ces générations qui ont vécu à un niveau que leurs petits-enfants et arrière-petits-enfants vont sévèrement payer. Nous vivons très largement au-dessus de nos moyens et il faut avoir la lucidité de nous en rendre compte : les personnes surendettées ont rapidement un banquier qui leur signale que cela ne va pas. L'État est à la fois le surendetté et le contrôleur. Les personnalités politiques responsables le signalent, et François Bayrou avait été le précurseur en la matière.


    Pour trouver une solution budgétaire satisfaisante à long terme qui ne provoquera pas une explosion sociale, il faudra écouter la France et être imaginatif et créatif. Pour le premier point, Édouard Philippe semble en bonne voie (j'allais écrire : en bonne voix !) dans son tour de France, qui ne peut qu'être enrichissant. Pour le côté créatif, il faudra encore le prouver.
     

     
     


    Édouard Philippe a aussi été interrogé sur d'autres sujets. J'en retiendrai deux autres. Le premier sur l'immigration et la laïcité et les positions du Ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau. S'il est d'accord avec lui pour remettre en cause le traité avec l'Algérie, Édouard Philippe s'est dit opposé à l'interdiction du voile pour les mères accompagnatrices des sorties scolaires scolaires comme pour les usagers des universités, car cela contreviendrait à la loi du 9 décembre 1905 qui garantit la liberté du culte. Si on a interdit les signes ostensibles de religion à l'école, c'est justement parce que les élèves sont mineurs et ne sont pas encore des citoyens capables de choisir leur croyance et autre. Édouard Philippe est également opposé à la suppression de la circulaire Valls qui permet de régulariser des étrangers en situation irrégulière sur notre territoire, dès lors que ce n'est pas un droit et que le gouvernement estime que cette régularisation apporte un intérêt à la France.

    L'autre sujet que j'ai retenu, c'est sur la parole du Président de la République pendant ses vœux : « C’est pour cela qu’en 2025, nous continuerons de décider et je vous demanderai aussi de trancher certains de ces sujets déterminants. ». Édouard Philippe a montré que, dans ce domaine, il était original.

    Ainsi, il a proposé au Premier Ministre de réunir les groupes parlementaires et de leur demander quoi faire trancher selon l'article 11 de la Constitution (tout n'est pas possible). Ainsi, la période actuelle, qui risque d'être paralysante avec l'absence de majorité, pourrait être menée à profit par des référendums très précis. Il propose aussi des grandes conférences sociales pour mettre au point des réformes de grande envergure pour équilibrer financièrement le modèle social, et ainsi, poser le résultat de ces conférences sociales lors de la prochaine campagne nationale, élection présidentielle ou, en cas de nouvelle dissolution, élections législatives. Ainsi, chaque candidat se positionnera sur ce genre de dossier. Et le peuple votera en conscience.


    Peut-être Édouard Philippe convaincra-t-il Emmanuel Macron de faire un référendum pour en finir avec l'indolence des Français ? Le bloc central a besoin de s'organiser et surtout, de désigner un seul candidat pour l'élection présidentielle de 2027 : la multiplicité des candidatures équivaudrait à un terrible second tour entre Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon. C'est pourquoi Édouard Philippe s'est déjà avancé : il ne faut pas laisser le terrain vide.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (08 janvier 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Édouard Philippe et sa partition particulière contre l'indolence.
    Édouard Philippe massivement candidat à la succession d'Emmanuel Macron !
    Édouard Philippe prêt à décoller.
    De nouveaux Horizons.






    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250108-edouard-philippe.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/edouard-philippe-et-sa-partition-258567

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/01/08/article-sr-20250108-edouard-philippe.html



     

  • Jean-Marie Le Pen : extrême droite tenace et gauche débile...

    « Au-delà des polémiques qui étaient son arme préférée et des affrontements nécessaires sur le fond, Jean-Marie Le Pen aura été une figure de la vie politique française. On savait, en le combattant, quel combattant il était. » (François Bayrou, le 7 janvier 2025 sur Twitter).




     

     
     


    Quand la mort d'une personnalité publique devient-elle un événement à part entière ? Je parle bien sûr d'une mort non-violente puisque les morts violentes (attentats, meurtres, accidents, catastrophes, etc.) sont en elles-mêmes, par définition, des événements. Il y a bien sûr la mort de chefs d'État ou de gouvernement, ou spirituels, comme Georges Pompidou ou les papes (excepté Benoît XVI), dont le besoin de remplacement est un événement en lui-même. Mais au-delà de l'émotion, c'est très rare : la mort de Newton, la mort de Voltaire, la mort de Victor Hugo, la mort aussi de De Gaulle, peut-être oserais-je aussi citer Johnny Hallyday ? Peut-être aussi François Mitterrand et Jacques Chirac ? (Pas Valéry Giscard d'Estaing, parti discrètement). Même les grandes stars, les grands personnages de l'État, les grands écrivains disparaissent en général dans une extinction calme, discrète et simplement émue. Faut-il rajouter à cette courte liste le "Menhir", pas pour le chagrin légitime que sa mort a provoqué pour sa famille, politique et sa famille tout court, mais au contraire pour les cris de joie qu'on a entendus Place de la République à Paris durant la nuit ? Peut-on vraiment danser sur un cadavre encore chaud et se croire sincèrement humaniste ?

    Le "rappel à Dieu" du vieux leader de l'extrême droite Jean-Marie Le Pen (dans une maison médicalisée à Garches) ce mardi 7 janvier 2025 a suscité beaucoup de réactions (et de non-réactions !). Celui qui a été élu député pour la première fois il y a soixante-neuf ans a en effet provoqué tout au long de sa vie passions, combats, polémiques et scandales et n'a laissé quasiment personne indifférent. La réaction très sobre du Premier Ministre François Bayrou était normale puisqu'au-delà du respect dû aux disparus, il doit aussi ménager Marine Le Pen à l'Assemblée Nationale et donc, évidemment, respecter son deuil.


     

     
     


    Même sobriété pour le Président de la République Emmanuel Macron : « Figure historique de l'extrême droite, il a ainsi joué un rôle dans la vie publique de notre pays pendant près de soixante-dix ans, qui relève désormais du jugement de l'Histoire. Le Président de la République exprime ses condoléances à sa famille et ses proches. ».

    Les deux têtes de l'Exécutif n'ont aucune raison de mettre dans l'huile dans des braises et provoquer une polémique supplémentaire sur Jean-Marie Le Pen alors que le gouvernement doit vivre son heure de vérité dans quelques jours. Pour les socialistes, leur réaction n'est pas sur l'événement lui-même mais sur la réaction du Premier Ministre. Quand est-ce que ces socialistes vont penser enfin par eux-mêmes ?


    Même Jean-Luc Mélenchon a été assez sobre, faisant la part de l'homme qui est parti et de ses idées qu'il veut (et doit) combattre : « Le respect de la dignité des morts et du chagrin de leurs proches n'efface pas le droit de juger leurs actes. Ceux de Jean-Marie Le Pen restent insupportables. Le combat contre l'homme est fini. Celui contre la haine, le racisme, l'islamophobie et l'antisémitisme qu'il a répandus continue. ».
     

     
     


    Mais alors, que s'est-il passé Place de la République ? Des centaines de personnes (ou des milliers ?) se sont réunies plus ou moins spontanément (merci les réseaux sociaux) pour "fêter" la mort de Jean-Marie Le Pen. Oui, Jean-Marie Le Pen a fait beaucoup de mal à son pays, mais seulement de façon tribunitienne, il a été un aiguillon malsain, mais il n'est pas un dictateur, ce n'est pas Kadhafi ni Ceausescu. On a dit qu'il avait torturé, peut-être, et si c'est le cas, c'est un scandale, mais je ne suis pas juge et cela n'a jamais été formellement établi et je suppose en plus que c'était avec la bénédiction du gouvernement socialiste de l'époque. Ces rassemblements (car il y en a aussi en province) ont été organisés par le NPA qui, insistons !, fait partie de la nouvelle farce populaire (NFP) et ont été approuvés par des responsables des insoumis (comme Mathilde Panot qui a pensé que c'était "normal").

    Quelle honte que ces gens-là ! Qui sont-ils ? Apparemment, surtout des jeunes, donc pas les jeunes en masse qui ont voté Jacques Chirac en 2002 (ils ont maintenant vingt-trois ans de plus, au mieux des quadragénaires !). Des jeunes sans respect, sans repère, sans référence, qui pensent lutter contre l'extrême droite en l'aidant à se victimiser. Car c'est bien cela, la gauche la plus débile du monde, c'est de croire qu'on peut lutter contre la haine par la haine elle-même. Un discours, des actes complètement contre-productifs !

     

     
     


    Le Ministre d'État, Ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau l'a bien compris d'ailleurs, en réagissant en début de soirée par ces mots forts : « Rien, absolument rien ne justifie qu'on danse sur un cadavre ». Fêter la mort d'un vieillard qui, depuis au moins 2015, n'a plus participé au débat national, quelle preuve de courage, quelle victoire ! Ont-ils compris que le danger, si danger il y a (ce que je crois), ne vient plus de Jean-Marie Le Pen, un presque centenaire qui ne pouvait plus se déplacer facilement et placé en maison médicalisée depuis plusieurs mois ? Pensent-ils que l'efficacité des comités "Ras le front" dans les années 1990-2000, c'était d'attendre tranquillement la mort naturelle du leader charismatique de tout ce qu'ils détestent ? Où est la victoire politique ? Quel aveu d'impuissance, surtout !

    Il y a une violence effroyable à s'en prendre à un mort. Il n'y a que les terroristes du Hamas qui refusent de redonner les corps de leurs victimes à leur famille. C'est, avec la libération des otages, l'une des revendications de l'État d'Israël pour arrêter la guerre contre ce groupe terroriste à Gaza. Tous les modérés de droite, du centre et de gauche, sont ulcérés de voir ces agissements qui ne sont pas dignes d'un pays civilisé et cultivé, ou tout simplement, qui ne sont pas dignes d'être humain. Plus cette gauche débile montre son irrespect des valeurs fondamentales, plus elle place l'extrême droite dans la position de garante de ces valeurs fondamentales, ce qui me désole.


     

     
     


    À l'annonce du décès, Marion Maréchal (la petite-fille), Marie-Caroline et Yann (les deux filles aînées), individuellement, se sont rendues auprès de leur grand-père et père à Garches dans un établissement protégé par la police. On imagine qu'il faudra mobiliser beaucoup de forces de police samedi 11 janvier 2025 pour l'enterrement à la Trinité-sur-mer et éviter tous les dérapages possible de la gauche débile sans valeurs.

    Quant à Marine Le Pen, elle revenait de Mayotte et a appris la nouvelle à une escale à Nairobi. Malgré les désaccords stratégiques graves qu'elle a eus avec son père au point de le virer du parti qu'il a fondé (elle a tué, politiquement, le père pour de bon), mais après aussi une réconciliation il y a trois ans, on imagine la perte d'un père. Elle a juste tweeté le 8 janvier 2025 : « Un âge vénérable avait pris le guerrier mais nous avait rendu notre père. La mort est venue nous le reprendre. Beaucoup de gens qu'il aime l'attendent là-haut. Beaucoup de gens qui l'aiment le pleurent ici-bas. Bon vent, bonne mer Papa ! ». À votre avis, qui de la fille ou de ces militants irrespectueux de la Place de la République vont susciter de la sympathie aux Français ? La réponse est évidente.

    Gauche débile, mais extrême droite tenace aussi. Le politiquement correct d'un RN aseptisé et délepénisé n'a pas tenu longtemps si l'on lit le tweet complet de Jordan Bardella : « Jean-Marie Le Pen est mort. Engagé sous l'uniforme de l'armée française en Indochine et en Algérie, tribun du peuple à l'Assemblée Nationale et au Parlement Européen, il a toujours servi la France, défendu son identité et sa souveraineté. Je pense aujourd'hui avec tristesse à sa famille, à ses proches, et bien sûr à Marine Le Pen dont le deuil doit être respecté. ». La filiation du FN/RN avec son fondateur est clairement assumée. Même idées, même programme, même si c'est emballé de manière plus subtile et trompeuse. Du home-staging en quelque sorte.

    Les chaînes d'info continue avaient prévu de parler des dix ans des attentats de "Charlie Hebdo" et voici qu'en milieu de journée, la disparition de Jean-Marie Le Pen est arrivée, plongeant les rédactions dans la stupeur. Dans le meilleur rôle, CNews avait évidemment quelques longueurs d'avance dans ce rayon. Son invité du soir, Bruno Gollnisch, ancien numéro deux du FN et probable Premier Ministre en cas de victoire électorale en 2002, a assuré que Jean-Marie Le Pen voulait le pouvoir. Qu'il s'agissait d'une rumeur urbaine de croire qu'il a tout fait pour ne pas avoir le pouvoir. Il lui disait ainsi qu'on laissait croire qu'on lui avait proposé le pouvoir et qu'il l'avait refusé, mais ce n'était pas ça, il n'a simplement pas réussi à la conquérir. De plus, son désaccord avec sa fille était sur la méthode : il pensait que la "dédiabolisation" se ferait naturellement au fur et à mesure que l'audience électorale du parti d'extrême droite grandirait, sans changer ni édulcorer ses positions.


     

     
     


    On disait bien avant la mort de Georges Marchais que son remplaçant dans le style "grande gueule politique" était Jean-Marie Le Pen. Depuis une dizaine d'années (au moins), on peut dire sans hésitation que le remplaçant de Jean-Marie Le Pen est Jean-Luc Mélenchon avec quatre signes qui ne trompent pas : dire n'importe quoi, avec un grand talent, avec beaucoup d'écho médiatique et susceptible d'influencer beaucoup de monde ! Quand au fond intellectuel, on pense bien sûr à Éric Zemmour, mais la personnalité sanguine n'a rien à voir avec cet éditocrate cérébral.

     

     
     


    Si l'on prend l'homme qu'était Jean-Marie Le Pen, on pouvait sans doute s'agacer des propos volontiers sexistes, machistes qu'il tenait en privé, mais il avait aussi beaucoup d'humour, riait voire chantait (comme un légionnaire), il était bon vivant, a su entraîner beaucoup d'adhésion, d'espérance (lui-même parlait pour sa propre mort d'un « espoir d'espérance »). Une petite preuve de son humour avec cette émission en direct du fameux "Tribunal des flagrant délire" avec Claude Villers pour juge, Pierre Desproges pour procureur et Luis Rego pour avocat du prévenu... Jean-Marie Le Pen lors de l'audience du 28 septembre 1982 (l'une des rares émissions filmées) à une époque où il n'était pas encore un danger (mais avait déjà largement exprimé ses positions d'extrême droite : ses interlocuteurs rieurs ne pouvaient pas être taxés d'amis politiques).

    Au fond, quand on parle de "grande gueule politique", d'influencer, de dire n'importe quoi, de provoquer, cela ne vous rappelle-t-il pas quelqu'un ? Bien sûr, Donald Trump, qui se réinstallera à la Maison-Blanche dans moins de deux semaines, qui fait partie de ce même bois, insubmersible (et peut-être aussi durable).

    Indépendamment de la personnalité politique qui pouvait manier la mauvaise foi et l'insulte, Jean-Marie Le Pen, par sa bonne connaissance de la vie politique française, était capable d'excellentes analyses politiques avec des perspectives historiques, comme c'est souvent le cas pour des militants d'extrême droite (je pense à Patrick Buisson).

    Alors non ! Il ne faut pas danser sur un cadavre chaud, d'autant plus qu'il n'était plus depuis longtemps une menace pour la France. Mais ses idées sont toujours là, ont fleuri, se sont consolidées. Le meilleur moyen de les combattre, c'est d'abord de respecter le deuil des proches, c'est la moindre des choses, et ensuite de rappeler ce qu'est être français par Manuel Valls le 9 janvier 2016 : « Être français, ce n’est pas renoncer à ses origines, ce n’est pas renoncer à son identité, c’est les verser au pot commun. C’est une citoyenneté qui n’est pas petite, qui n’est pas réduite à l’origine de chacun, du sang, du sol ou par naturalisation, mais qui est grande, ouverte, fondée sur la volonté de construire l’avenir ensemble ! C’est ce nouveau patriotisme que j’appelle de mes vœux ! » (au fait, ne vous ai-je pas dit que je ne me lasserais jamais de citer ces paroles ?).



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (08 janvier 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Jean-Marie Le Pen : extrême droite tenace et gauche débile...
    Mort de Jean-Marie Le Pen : la part de l'héritage.
    Procès de Marine Le Pen : surprise de gazelles et cynisme de vieux loups.
    Les 3 lignes rouges de Marine Le Pen pour ne pas censurer le gouvernement Barnier.
    Législatives 2024 (18) : la fin du cauchemar Bardella (pour le moment).
    Fake news : la scandaleuse manipulation politique du RN.
    Législatives 2024 (12) : un isoloir, ce n'est pas un cabine d'essayage !
    Législatives 2024 (11) : front, rassemblement, union nationale, barrage, consignes de vote...
    Législatives 2024 (10) : il était une fois Jordan Bardella, Gabriel Attal et Manuel Bompard.
    Législatives 2024 (9) : Emmanuel Macron et son n'ayez-pas-peur !
    Jean-Marie Le Pen, retour aux sources du RN.
    Législatives 2024 (2) : clarification ou chaos ?
    Législatives 2024 (1) : vaudeville chez Les Républicains.
    Élections européennes 2024 (4) : la surprise du chef !
    Le débat Gabriel Attal vs Jordan Bardella du 23 mai 2024.
    Débat Valérie Hayer vs Jordan Bardella : l'imposture démasquée de Coquille vide.
    Ukraine : Claude Malhuret se gausse de Jordan Selfie !
    Ukraine : Gabriel Attal attaque durement le RN et Marine Le Pen !
    Sondage secret : en cas de législatives anticipées, une victoire du RN ?
    FN/RN : fais-moi peur ! (27 octobre 2015).
    Marine Le Pen en tête dans un sondage : attention au buzz !
    Christine Boutin.
    André Figueras.
    Patrick Buisson.

    Rassemblement national : objectif 2027... ou avant !
    Jordan Bardella.
    Le nouveau JDD et la récupération des Enzo...
    Geoffroy Lejeune.
    Attention, un train de violence peut en cacher un autre...
    Éric Caliméro Zemmour.
    Jean-Marie Le Pen et sa marque dans l'histoire.
    La tactique politicienne du RN.
    La sanction disciplinaire la plus lourde de la Cinquième.

    Louis Aliot.
    Le congrès du RN.
    Grégoire de Fournas.
    Incident raciste : 89 nuances de haine à la veille du congrès du RN ?

    Le Front national des Le Pen, 50 ans plus tard...

     

     
     



    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250108-jean-marie-le-pen.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/jean-marie-le-pen-extreme-droite-258554

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/01/08/article-sr-20250108-jean-marie-le-pen.html



     

  • Mort de Jean-Marie Le Pen : la part de l'héritage

    « Je me pose un certain nombre de questions. Je ne dis pas que les chambres à gaz n’ont pas existé. Je n'ai pas étudié spécialement la question, mais je crois que c'est un point de détail de l'histoire de la Deuxième Guerre mondiale. » (Jean-Marie Le Pen, le 13 septembre 1987 sur RTL).



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    Sa famille a annoncé la mort de Jean-Marie Le Pen ce mardi 7 janvier 2025 à midi à Garches, dans les Hauts-de-Seine. Il était dans sa 97e année et devait être jugé en même temps que sa fille Marine Le Pen pour l'affaire des assistants parlementaires. C'est un peu par hasard qu'il a cofondé le Front national en 1972 qui allait devenir le Rassemblement national.

    J'aurai du mal à verser une larme sur ce dinosaure de la vie politique française, qui a survécu à la "Bande des Quatre" qu'il a tant fustigée dans les années 1980 (François Mitterrand, Valéry Giscard d'Estaing, Jacques Chirac et Georges Marchais). Mais je lui reconnais le talent politique que sa fille est loin d'avoir hérité : Jean-Marie Le Pen était un homme qui a dit n'importe quoi, qui a fait dans la provocation, qui s'est laissé aller dans ses déclarations parce que son ego l'encourageait à ne pas ménager le système médiatico-politique, mais il avait une grande connaissance de la France politique d'après-guerre (il était député sous la Quatrième République !). Marine Le Pen serait plutôt une imposture puisqu'elle essaie de gommer tout ce qui, au contraire, pourrait provoquer de l'indignation afin d'appâter un électorat raisonnable (au moins, avec son procès, c'est clair, le RN fait partie du système politique tant dénoncé par son père !). Mais c'est le même parti, c'est le même nom, c'est la même famille, et surtout, ce sont les mêmes idées. Jean-Marie Le Pen avait au moins une grande culture politique, on était loin de la tiktokisation de vie politique par bardellisation sociétale.

    Avec Jean-Marie Le Pen se tourne donc une page de l'histoire politique de la France. Certains étaient moins clairvoyants que d'autres. François Mitterrand, c'est désormais prouvé, a délibérément favorisé à la télévision (qui n'était que publique), en 1984, l'ascension médiatique de Jean-Marie Le Pen et comme celui-ci avait du talent, celui d'orateur, il a saisi sa chance et l'a beaucoup trop bien fait fructifier pour les socialistes puisque ceux-ci ont été privés de second tour présidentiel en 2002 à cause de ce monstre qu'ils avaient eux-mêmes créé. Exit Lionel Jospin.


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    Jean-Marie Le Pen a toutefois utile à la vie politique car il a démontré l'excellence démocratique de la Cinquième République puisqu'un parti ne valant que 0,7% des voix en 1974 pouvait atteindre les sommets qu'on connaît depuis une vingtaine d'années. Emmanuel Macron a prouvé aussi qu'un nouveau parti politique pouvait obtenir la majorité absolue à l'Assemblée Nationale dès lors qu'il était capable de provoquer suffisamment d'échos médiatiques.

    Au moins, l'inspiration du RN n'est plus cachée : Jordan Bardella a émis une vibrant hommage à celui qu'on pourrait appeler son beau-grand-père. Faut-il rappeler l'idéologie de ce parti ? Jean-Marie Le Pen avait bien précisé, à la fin de sa vie, encore l'année dernière, que ses provocations verbales n'étaient pas des dérapages et qu'il pensait vraiment ce qu'il disait.

    "Le Monde" a fait un petit résumé il y a dix ans, à l'époque où justement Marine Le Pen, par ambition, s'est sentie obligée d'exclure son père pour rester politiquement correcte (Albert Camus avait plus le sens de la famille). Comparez avec les petites phrases reprochées à Emmanuel Macron depuis dix ans.


     


    Toute la classe politique n'avait pas compris exactement le phénomène Le Pen. Par exemple, en 1984, Jacques Chirac avait pensé que ce ne serait qu'un épiphénomène provisoire, motivé par la gauche au pouvoir et l'exacerbation de l'opposition de droite, et que dès 1986, tout rentrerait dans l'ordre. C'était évidemment une erreur, et on peut saluer le courage de Jacques Chirac, pourtant assez changeant dans ses convictions, par ses valeurs républicaines qui ont fait qu'en tant que président du RPR, il a été intraitable pour rejeter tout soupçon d'alliance avec le FN. Rappelons qu'à l'époque, François Mitterrand encourageait le FN (accès aux médias, proportionnelle qui a fait élire 36 députés FN, etc.).

    Pas étonnant que l'adversaire politique le plus grand de Jean-Marie Le Pen était, selon ce dernier, Jacques Chirac (et pas un responsable de gauche). Le combat final entre les deux hommes, le seul d'ailleurs, cela a été au second tour de l'élection présidentielle de 2002 et s'est terminé sans appel : 82,2% pour le Président gaulliste sortant, 17,8% pour le candidat de l'extrême droite. On rêve sans doute de cette époque, pas si lointaine (vingt-trois ans, une génération quand même), car cet écart s'est dangereusement rétréci, avec l'absence de la gauche au second tour, puisque Marine Le Pen a atteint 41,4% face à Emmanuel Macron 58,6%.

    Alors, en ce jour où le relativisme politique sera à fond avec certains hommages indécents à Jean-Marie Le Pen, je rappellerai simplement quelques phrases du Président Jacques Chirac à la fin de son second mandat le 11 mars 2007, sa dernière allocution télévisée, aussi sa dernière occasion de s'exprimer aux Français : « Au nom de la confiance que vous m'avez témoignée, je voudrais vous adresser plusieurs messages. D'abord, ne composez jamais avec l'extrémisme, le racisme, l'antisémitisme ou le rejet de l'autre. Dans notre histoire, l'extrémisme a déjà failli nous conduire à l'abîme. C'est un poison. Il divise. Il pervertit, il détruit. Tout dans l'âme de la France dit non à l'extrémisme. Le vrai combat de la France, le beau combat de la France, c'est celui de l'unité, c'est celui de la cohésion. Oui, nos valeurs ont un sens ! Oui, la France est riche de sa diversité ! Oui, l'honneur de la politique, c'est d'agir d'abord pour l'égalité des chances ! C'est de permettre à chacun, à chaque jeune, d'avoir sa chance. Ce combat, malgré tous les obstacles, et même si je mesure le chemin qui reste à parcourir, il est désormais bien engagé. Il doit nous unir dans la durée. C'est l'une des clefs de notre avenir. ».

    Pour l'heure, la panthéonisation de Jean-Marie Le Pen est exclue ! Mais sait-on jamais...



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (07 janvier 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Mort de Jean-Marie Le Pen : la part de l'héritage.
    Procès de Marine Le Pen : surprise de gazelles et cynisme de vieux loups.
    Les 3 lignes rouges de Marine Le Pen pour ne pas censurer le gouvernement Barnier.
    Législatives 2024 (18) : la fin du cauchemar Bardella (pour le moment).
    Fake news : la scandaleuse manipulation politique du RN.
    Législatives 2024 (12) : un isoloir, ce n'est pas un cabine d'essayage !
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    Législatives 2024 (10) : il était une fois Jordan Bardella, Gabriel Attal et Manuel Bompard.
    Législatives 2024 (9) : Emmanuel Macron et son n'ayez-pas-peur !
    Jean-Marie Le Pen, retour aux sources du RN.
    Législatives 2024 (2) : clarification ou chaos ?
    Législatives 2024 (1) : vaudeville chez Les Républicains.
    Élections européennes 2024 (4) : la surprise du chef !
    Le débat Gabriel Attal vs Jordan Bardella du 23 mai 2024.
    Débat Valérie Hayer vs Jordan Bardella : l'imposture démasquée de Coquille vide.
    Ukraine : Claude Malhuret se gausse de Jordan Selfie !
    Ukraine : Gabriel Attal attaque durement le RN et Marine Le Pen !
    Sondage secret : en cas de législatives anticipées, une victoire du RN ?
    FN/RN : fais-moi peur ! (27 octobre 2015).
    Marine Le Pen en tête dans un sondage : attention au buzz !
    Christine Boutin.
    André Figueras.
    Patrick Buisson.

    Rassemblement national : objectif 2027... ou avant !
    Jordan Bardella.
    Le nouveau JDD et la récupération des Enzo...
    Geoffroy Lejeune.
    Attention, un train de violence peut en cacher un autre...
    Éric Caliméro Zemmour.
    Jean-Marie Le Pen et sa marque dans l'histoire.
    La tactique politicienne du RN.
    La sanction disciplinaire la plus lourde de la Cinquième.

    Louis Aliot.
    Le congrès du RN.
    Grégoire de Fournas.
    Incident raciste : 89 nuances de haine à la veille du congrès du RN ?

    Le Front national des Le Pen, 50 ans plus tard...

     

     

     

     
     



    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250107-jean-marie-le-pen.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/mort-de-jean-marie-le-pen-la-part-258538

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  • Philippe Val et la promesse d'autres tragédies

    « Un bon Arabe doit être musulman, sa femme doit être voilée, il doit détester la France et admirer le Hamas et le Hezbollah. Cette assignation des Arabes par les autorités morales est un racisme réel drapé dans un antiracisme autoproclamé. Un tel déni de réalité, dix ans après les attentats de 2015, est la promesse d'autres tragédies. » (Philippe Val, le 6 janvier 2025 sur Europe 1).




     

     
     


    Personnalité du monde médiatique et intellectuel un peu touche-à-tout, Philippe Val (72 ans) est tout à la fois humoriste, journaliste, écrivain, chroniqueur et même patron de presse. Sa consécration a sans doute été sa nomination comme directeur général de l'importante station de radio publique France Inter de 2009 à 2014, mais ses fonctions pendant dix-sept ans à la tête de "Charlie Hebdo" de 1992 à 2009, comme rédacteur en chef puis comme directeur de publication, sont sans doute ce qui a eu le plus d'importance à ses yeux.

    Et il se place bien entendu sur le devant de scène des commémorations des attentats de janvier 2015 pour une raison simple : c'est lui, comme directeur de publication de "Charlie Hebdo", qui a pris la responsabilité (qu'il n'a jamais regretté) de publier les caricatures de Mahomet, celles publiées par le quotidien danois "Jyllands-Posten" le 30 septembre 2005. Leur publication a eu lieu dans le numéro de "Charlie Hebdo" du 3 février 2006, complétées par des caricatures maison. L'hebdomadaire satirique a été quasiment le seul périodique français à avoir eu le courage de les publier (avec "France-Soir" et "Libération") en raison des nombreuses pressions faites sur les rédactions.


     

     
     


    Depuis cette date, Philippe Val est sous protection policière matin midi et soir (et nuit), et vit avec l'angoisse de l'assassinat. On peut dire que son angoisse était justifiée puisque cinq dessinateurs, deux journalistes et deux chroniqueurs (entre autres) ont été assassinés il y a dix ans, le 7 janvier 2015.
     

     
     


    J'apprécie beaucoup Philippe Val car il porte finalement une parole très rare dans le monde médiatique, il veut rappeler sans cesse qu'il faut combattre l'islamisme et, bien que de gauche, il bouscule la pensée prémâchée de l'islamogauchisme. Trouille ou militantisme politique, on ne sait pas trop bien ce qui motive beaucoup de nos intellectuels français en-dessous de tout, et en particulier d'une pensée claire sur la liberté et sur la laïcité. Philippe Val est, avec quelques autres petites lumières médiatiques comme Caroline Fourest, Tristane Banon, Sophia Aram (actuellement salement harcelée par cette gauche extrémiste), l'un des rares "prescripteurs d'opinion" à rappeler toute l'horreur de l'islam politique et la nécessité de s'y opposer fermement, quelle que soit sa foi ou sa non-foi.

    Dans sa chronique du lundi 6 janvier 2025 qu'il a faite sur la station Europe 1, le journaliste est sévère contre ses collègues qui n'ont jamais rappelé que les caricatures qui avaient mis le monde musulman en colère en 2005 et 2006 n'étaient pas celles publiées par le journal danois mais d'autres, falsifiées pour manipulation par un imam qui l'a reconnu par la suite. Comme pour l'assassinat de Samuel Paty, victime lui aussi d'une manipulation mensongère sur les réseaux asociaux, la désinformation a tué beaucoup trop pour ne pas alerter les journalistes pendant qu'il est encore temps.

    Philippe Val a aussi rappelé que l'écrivain franco-algérien Boualem Sansal, qui, à 75 ans, est très malade et n'est toujours pas soigné, alors qu'il a été jeté en prison injustement en Algérie il y a deux mois, est trop peu soutenu par les moralistes professionnels en France et mériterait leur soutien avec un écho médiatique qui puisse faire pression sur le gouvernement algérien.


     

     
     


    Dans cette chronique, Philippe Val a d'abord fustigé ce qu'il a appelé la "bienveillance" de nombreux "intellectuels" envers l'islamisme : « On va parler de ce qui n'a pas changé, voire de ce qui a empiré : la bienveillance d'une partie du monde intellectuel, politique et médiatique français pour les acteurs d'un phénomène religieux, l'islam, dans sa version la plus hostile à notre civilisation, la plus puritaine et la plus dangereuse. On l'a vu lors du stupéfiant soutien au Hamas par La France insoumise et le journal "Le Monde" après le 7 octobre 2023 et par les non-moins stupéfiants ralliements et accords électoraux qui s'ensuivirent de la part de partis comme le parti socialiste ou de personnalités comme François Hollande. ».

    "Le Monde" a contribué à ce climat malsain qui, de fait, promeut l'antisionisme : « Je ne souhaite nullement la disparition du "Monde" dont j'admire et respecte nombre de ses journalistes, mais son statut de journal de référence n'est plus supportable. Ce n'est pas plus une référence que Mediapart ou "Valeurs actuelles". C'est un journal d'opinion et c'est son droit. Mais ce statut ne lui permet d'exercer aucun magistère moral. Qu'il soit lu comme une bible par les enseignants, les intellectuels, les politiques, est une des causes de la maladie de la démocratie française. Au lendemain des attentats, il y a dix ans, "Le Monde" avait déjà choisi de donner une large audience à Emmanuel Todd qui prétendait que les 4 millions de manifestants du 11 janvier n'étaient que des petits bourgeois catholiques qui avaient besoin d'avoir peur de l'islam pour se tenir chaud ensemble. ».

     

     
     


    Le point de référence de l'ancien directeur de "Charlie Hebdo", c'est le massacre antisémite du 7 octobre 2023 dans la continuité des réactions aux caricatures de 2005-2006 : « On l'a vu après le massacre du 7 octobre. Dans les heures qui ont suivi, ce n'est pas l'horreur du massacre qui a été mise en avant, mais le scandale de la réplique israélienne. Il y a une continuité dans la volonté de nier la réalité. Par exemple, en 2006, les caricatures qui ont mis le feu au Moyen-Orient et monde arabe ne sont pas celles qu'ont publiées le "Jyllands-Posten" et "Charlie Hebdo". On sait que ce sont des caricatures détournées et diffusées par un imam danois intégriste. Bien que l'information ait parfaitement circulé dans les rédactions, et que depuis, l'imam repenti ait avoué sa manipulation, l'info n'intéressait pratiquement personne. Il est évident que les caricatures publiées étaient anodines et que leur censure était insupportable dans n'importe quel régime de liberté. Personne n'a voulu retenir cette information pourtant capitale. Eh bien, c'est un cas d'école pour journalistes : une info reste-t-elle vraie quand personne n'a envie d'y croire ? (…) Ce qui démontre aussi que notre métier de journaliste et d'intellectuel est de dire la réalité au plus près. Et que c'est une question de vie ou de mort. La réalité se venge toujours quand elle est repoussée, elle revient sous une forme monstrueuse. En ce qui nous concerne, elle est revenue sous la forme des attentats qui ont endeuillé notre pays. ».

    Si le monde journalistique a compris la nature de l'islamisme, il y a encore beaucoup à faire pour préserver une parole sensée en France : « Il s'est passé quelque chose. La plupart des grands journaux et des chaînes d'info, radios, ont désormais des positions sans ambiguïté sur l'islam politique et l'antisémitisme, et il faut s'en réjouir. Mais une partie du monde intellectuel et journalistique n'a encore rien compris. La campagne de haine que subit aujourd'hui l'humoriste Sophia Aram et l'indifférence méprisante dont Boualem Sansal fait l'objet montrent à quel point leur magistère moral est une imposture. Boualem Sansal et Sophia Aram ont en commun une tare majeure aux yeux de nos moralistes antiracistes : ce sont de mauvais Arabes ! Un bon Arabe doit être musulman, sa femme doit être voilée, il doit détester la France et admirer le Hamas et le Hezbollah. Cette assignation des Arabes par les autorités morales est un racisme réel drapé dans un antiracisme autoproclamé. Un tel déni de réalité, dix ans après les attentats de 2015, est la promesse d'autres tragédies. ».

     

     
     


    Cette chronique du 6 janvier 2025 de Philippe Val est excellente car elle est un condensé d'une parole qui est rare et pourtant essentielle en France, celle d'une gauche républicaine qui est aujourd'hui étouffée par la nouvelle farce populaire (NFP). Cette gauche républicaine (dont je ne suis pas) est aujourd'hui la mieux représentée politiquement par un quasi-homonyme, l'ancien Premier Ministre et l'actuel Ministre d'État Manuel Valls, qui a su exprimer en 2015 et 2016 ce qu'était l'esprit républicain et que je ne me lasserai jamais de répéter : « Être français, ce n’est pas renoncer à ses origines, ce n’est pas renoncer à son identité, c’est les verser au pot commun. C’est une citoyenneté qui n’est pas petite, qui n’est pas réduite à l’origine de chacun, du sang, du sol ou par naturalisation, mais qui est grande, ouverte, fondée sur la volonté de construire l’avenir ensemble ! C’est ce nouveau patriotisme que j’appelle de mes vœux ! ».


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (06 janvier 2025)
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    Pour aller plus loin :
    Philippe Val et la promesse d'autres tragédies.
    7 janvier 2025 : êtes-vous toujours Charlie ?
    L’esprit républicain.
    Fête nationale : cinq ans plus tard…







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    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/01/06/article-sr-20250106-philippe-val.html




     

  • Anne-Marie Comparini, l'esprit de Barre à Lyon

    ​« Aussi intransigeante sur les valeurs de la République qu’inlassablement engagée pour bâtir et transmettre, elle sut par la force de ses combats gagner une autorité morale et une affection qui dépassaient les clivages. (…) Ses qualités, sa personnalité qui savait tisser des ponts au-delà des partis, lui firent prendre une ampleur nationale. Son intransigeance dans la défense de ses convictions, aussi. » (Communiqué de l'Élysée, 5 janvier 2025).



     

     
     


    J'ai appris avec émotion ce dimanche 5 janvier 2025 la mort de l'ancienne députée UDF du Rhône Anne-Marie Comparini à l'âge de 77 ans (elle est née le 11 juillet 1947). Elle s'est éteinte à 2 heures du matin à l'hôpital Édouard-Herriot de Lyon où elle avait été admise le 31 décembre 2024. En fait, en commençant ainsi, on situe assez mal cette personnalité si précieuse que la France a eue à son service. Si elle était peu connue du grand-public aujourd'hui, elle était bien connue des Lyonnais, des Rhônalpins ...et des centristes. Pour moi, elle était d'abord une fidélité, celle à l'ancien Premier Ministre Raymond Barre pour qui elle a travaillé alors qu'il était encore à Matignon.

    À l'origine, Anne-Marie Comparini était juriste de droit social, administratrice à l'ORTF (Office de radiodiffusion et télévision française) puis à l'INA (Institut national de l'audiovisuel). Dès mars 1978, elle s'est mise au service de Raymond Barre comme collaboratrice parlementaire jusqu'en mars 2001. En mars 1986, Anne-Marie Comparini s'est fait élire conseillère régionale de Rhône-Alpes représentant le Rhône. Chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche à la région, elle fut réélue en mars 1992, mars 1998 et mars 2004, jusqu'à mars 2010. Ce sera probablement le mandat le plus important pour Anne-Marie Comparini même si elle en a eu deux autres importants.

    Le premier, c'est d'avoir été élue dans la foulée de Raymond Barre aux élections municipales de Lyon en juin 1995 : entre juin 1995 et mars 2001, Anne-Marie Comparini a été adjointe au maire chargée de la politique de la ville et des universités tandis que Raymond Barre devenait maire de Lyon pour un mandat unique. Le second, c'est d'avoir été élue députée de Lyon de 2002 à 2007.
     

     
     


    C'est au titre de cette expérience lyonnaise que le successeur de Raymond Barre, le socialiste Gérard Collomb a songé à elle pour qu'elle fût la présidente du Conseil de développement de la métropole de Lyon de 2015 à 2021 (si mes souvenirs sont exacts, Raymond Barre avait été lui-même le président du conseil du développement extérieur de Lyon lorsque Michel Noir dirigeait la municipalité de Lyon de 1989 à 1995, ses réseaux internationaux ayant permis à l'agglomération de s'ouvrir au monde extérieur). Du reste, le 19 février 2014, peu avant sa réélection comme maire de Lyon pour un troisième mandat, Gérard Collomb a invité tout spécialement Anne-Marie Comparini, Michel Mercier (ancien président du conseil général du Rhône et ancien Ministre de la Justice) et d'autres élus ou anciens élus centristes et de centre droit pour inaugurer un nouveau pont à Lyon (premier nouveau pont depuis 1982), le pont Raymond-Barre, histoire de célébrer l'héritage barriste et séduire l'électorat modéré : « Nous venions de rives différentes mais nous avions un point commun, l'envie de servir notre ville. ».

     

     
     


    Barriste fidèle, Anne-Marie Comparini comptait au Centre des démocrates sociaux (CDS) puis à l'UDF après 1995. Son destin s'est offert en 1998-1999 sur une intransigeance et une incompréhension. Sur Twitter, François Bayrou a annoncé la triste nouvelle ainsi : « Aussi intransigeante sur les valeurs de la République qu’inlassablement engagée pour bâtir et transmettre, elle sut par la force de ses combats gagner une autorité morale et une affection qui dépassaient les clivages. ». Car qui aurait pensé qu'elle serait élue présidente de région ?

    À l'époque, le scrutin des élections régionales était la proportionnelle intégrale dans des circonscriptions départementales. Or, depuis mars 1992, avec l'irruption tant des écologistes (dans une moindre mesure) que du FN (qui faisait le plein de ses élus à ces scrutins), le centre droit UDF-RPR et la gauche traditionnelle PS-PCF n'étaient plus en capacité de diriger seuls les régions. La tentation était forte d'une alliance entre le président sortant du conseil régional, sa majorité (souvent de centre droit), et les élus du FN, alliance certes implicite mais bien réelle. Il y a déjà eu des précédents en mars 1992 avec (pourtant) deux ministres d'ouverture du gouvernement socialiste : Jean-Marie Rausch en Lorraine et Jean-Pierre Soisson en Bourgogne.

    En 1998, la situation était encore plus éclatée dans certains conseils régionaux. Des présidents sortants n'hésitaient donc pas à quémander la bienveillance des élus FN, comme Charles Baur en Picardie et Jacques Blanc en Languedoc-Rousillon. De manière extraordinaire, Charles Millon a été réélu, lui aussi, avec les voix des élus FN. J'écris extraordinaire car lorsque j'étais à Grenoble, j'ai eu l'occasion de connaître Charles Millon qui a eu une grande importance tant régionale que nationale : député de l'Ain depuis mars 1978 (jusqu'en 2001), président du groupe UDF à l'Assemblée de 1989 à 1995, Ministre de la Défense de mai 1995 à juin 1997 (il avait refusé le Ministère de l'Agriculture en 1993 dans le gouvernement dirigé par Édouard Balladur car il soutenait Jacques Chirac en 1995). J'avais eu l'occasion de vérifier qu'il avait des convictions politiques très affirmées et celles-ci étaient à l'opposé des idées du FN. En effet, il était particulièrement vigilant pour éviter toute alliance locale entre un élu UDF-RPR et un candidat FN. Par ailleurs, entre 1985 et 1988, Charles Millon était l'animateur des réseaux barristes REEL, noyau dur de la campagne présidentielle de Raymond Barre (après l'échec de Raymond Barre, il est resté en politique alors qu'on lui proposait des ponts d'or dans le privé).

    Charles Millon avait réussi à se faire élire président du conseil régional de Rhône-Alpes le 27 octobre 1988 à la mort de son prédécesseur, l'ancien résistant Charles Béraudier (c'est ce dernier qui a fait élire le centriste Francisque Collomb à la mairie de Lyon à la mort de Louis Pradel, en décembre 1976, préféré à Jacques Soustelle dont il était pourtant le suppléant au début des années 1960).

    Charles Millon s'était fait réélire le 23 mars 1992. À l'élection du 20 mars 1998, la situation était impossible. Les résultats des élections régionales du 15 mars 1998 avaient donné un hémicycle ingouvernable : 60 élus UDF-RPR, 60 élus PS et alliés (PCF, Verts), 35 élus FN, 1 CPNT (Chasse pêche nature et traditions) et 1 régionaliste (Patrice Abeille, de la Ligue savoisienne, ralliant la gauche). Une majorité relative suffit au troisième tour, mais les deux camps auraient été à égalité : centre droit 61 et gauche et alliés 61. Dans ce cas, des deux candidats qui se présentaient, le plus âgé aurait été élu : à droite, Charles Millon né le 12 novembre 1945, à gauche, Jean-Jack Queyranne (par ailleurs ministre du gouvernement de Lionel Jospin), né le 2 novembre 1945, dix jours de plus qui lui auraient permis de remporter la présidence du conseil régional.

    Mais c'était sans compter avec la volonté de rester à son siège quoi qu'il en coûtât : Charles Millon a donc remporté l'élection au second tour grâce aux élus FN dirigés par Bruno Gollnisch, numéro deux du FN. Mais cette élection a choqué sa propre majorité, en particulier les conseillers UDF absolument hostiles à toute alliance, implicite ou explicite, avec le FN. Charles Millon a toujours réfuté tout accord avec le FN mais il a quand même accepté l'élection de treize vice-présidents de commission FN, notamment celle de la culture.


    Cette élection a eu pour conséquence une division du camp centriste avec l'exclusion de l'UDF de Charles Millon, Charles Baur et Jacques Blanc, mais ceux-ci étaient accueillis à bras ouverts par Alain Madelin qui a quitté lui aussi l'UDF pour créer Démocratie libérale (DL), plus "souple" dans ses alliances. Charles Millon refusa d'adhérer à DL et a créé un microparti qui n'a jamais décollé, La Droite puis La Droite chrétienne.

    Toutefois, la "morale" allait être sauve ! Sur une requête en annulation du conseiller régional UDF Étienne Tête, enregistrée le 30 mars 1998, le Conseil d'État a annulé le 9 décembre 1998 l'élection de Charles Millon à la présidence du conseil régional de Rhône-Alpes pour une raison précise. La loi du 7 mars 1998 a rajouté à l'article L.4133-1 du code général des collectivités territoriales, les conditions d'une telle élection : « Cette élection ne donne lieu à aucun débat. ». Or le doyen d'âge qui présidait la séance, avant de passer au vote du second tour, a demandé s'il y avait « quelque chose à ajouter ». Alors, le candidat FN Bruno Gollnisch a demandé à Charles Millon une précision sur son programme, ce dernier lui a répondu et à la suite, le candidat FN a retiré sa candidature et a donné la consigne aux élus FN de voter pour Charles Millon. Or, cette question-réponse était interdite dans la loi et cette irrégularité a eu une influence certaine sur le résultat de l'élection, d'où l'annulation.


    Pour cette raison, le 9 janvier 1999, une nouvelle élection du président du conseil régional de Rhône-Alpes a eu lieu. Mais dans un tout autre contexte : les élus UDF ont refusé de se joindre aux membres de la majorité régionale pour voter de nouveau pour Charles Millon. La gauche a compris que pour faire battre Charles Millon, il fallait voter pour un candidat UDF, en l'occurrence, une candidate UDF, à savoir Anne-Marie Comparini. Elle a donc été élue (à 51 ans) présidente du conseil régional de Rhône-Alpes, la première femme à ce poste (mais pas la première en France, d'autres femmes présidente de conseil régional avaient déjà été élues avant elle). Mais c'est surtout la première (et seule) élection avec une majorité de toute la gauche plus l'UDF. On a vu qu'en Allemagne, certains coalitions étaient d'abord testées dans les Länder avant d'être testées grandeur nature, et finalement, on peut dire que c'est ce que recherche aujourd'hui François Bayrou avec une Assemblée aussi éclatée que ne l'était le conseil régional de Rhône-Alpes en 1998.
     

     
     


    Pendant plus de cinq ans (1999 à 2004), Anne-Marie Comparini a présidé le conseil régional de Rhône-Alpes avec une majorité centriste et de gauche, très appréciée pour son sens de l'intérêt général. Elle a porté ses actions sur le développement économique de la région, son ancrage européen, et la mise en œuvre de la ligne TGV Lyon-Turin (devenue Arlésienne).

    En mars 2001, aux élections municipales à Lyon, Raymond Barre, à 76 ans, ne se représentait pas. Une liste UDF-RPR s'est présentée, menée par le député RPR Jean-Michel Dubernard (après le ralliement du centriste Michel Mercier), opposée à la liste de gauche menée par Gérard Collomb, perdant perpétuel (jusque là). Mais Charles Millon a également présenté ses propres listes, faisant 25%. Lyon, la catholique conservatrice représentait un bon électorat pour Charles Millon. Au second tour, Gérard Collomb et la gauche ont gagné à cause de la division du centre droit et de la droite (très peu de fusions de listes au second tour), et de la bienveillance du maire sortant Raymond Barre.

    Aux élections législatives de juin 2002, Charles Millon n'a cependant pas réussi sa mue lyonnaise : quittant sa circonscription de l'Ain (il était maire de Belley de 1977 à 2001) pour une circonscription lyonnaise, il a échoué face au député sortant Jean-Jack Queyranne. En revanche, la présidente du conseil régionale Anne-Marie Comparini a été élue députée du Rhône sur une autre circonscription (centriste) de juin 2002 à juin 2007 avec 55,5% au second tour (contre le socialiste Jean-Louis Touraine). La députée sortante était l'UDF Bernadette Isaac-Sibille, qui s'était tout de même représentée à 72 ans, celle-ci n'a obtenu que 12,1% au premier tour (Anne-Marie Comparini avait l'investiture UMP et a eu 32,1% au premier tour). Bernadette Isaac-Sibille avait gagné la circonscription en juin 1988, en mars 1993 et juin 1997 face à Gérard Collomb (sauf en 1993).

    En mars 2004, Anne-Marie Comparini est repartie en campagne pour les régionales, tête de liste commune UDF-UMP contre la liste de gauche menée par Jean-Jack Queyranne. Le millonisme électoral avait déjà disparu en 2004 (bien que Charles Millon soit resté à présider le groupe milloniste à la mairie de Lyon jusqu'en 2008 ; ce dernier a été nommé ambassadeur de France de 2003 à 2007). Un changement de scrutin aux élections régionales rendait plus facile l'obtention d'une majorité avec deux tours de proportionnelle et une prime majoritaire (un peu à l'instar des élections municipales). La gauche l'a emporté au second tour avec 46,5% des voix et 94 sièges sur 157 au total. La liste Comparini n'a obtenu que 38,2% et 45 sièges, et la liste Gollnisch 15,3% et 18 sièges. La région est redevenue majoritaire, mais au profit de la gauche et de Jean-Jack Queyranne (jusqu'en décembre 2015).
     

     
     


    Députée UDF et membre de la commission des lois, Anne-Marie Comparini a soutenu fidèlement la candidature de François Bayrou tant en 2002, 2007 qu'en 2012. Investie par le MoDem, elle a échoué à se faire réélire députée en juin 2007, battue dès le premier tour avec seulement 17,4% des voix (le candidat UMP a été élu au second tour). François Bayrou aurait toutefois souhaité qu'Anne-Marie Comparini fût la candidate du MoDem à la mairie de Lyon en mars 2008 mais en septembre 2007, elle s'est retiré de la vie politique, conservant seulement son dernier mandat de conseillère régionale jusqu'en mars 2010. La circonscription d'Anne-Marie Comparini, après avoir été gagnée par le candidat UMP, a été occupée par un député radical de gauche de 2012 à 2017, puis un député macroniste de 2017 à 2024, et depuis 2024, une candidate insoumise l'a remportée.

    Son retrait de la vie politique ne signifiait pas son silence. Anne-Marie Comparini a ainsi apporté son soutien à Emmanuel Macron aux élections présidentielles de 2017 et de 2022 (elle a présidé le comité de soutien lyonnais à Emmanuel Macron en 2022). Avant de s'en aller, elle aura eu la joie et l'émotion de voir François Bayrou accéder à Matignon. De Raymond Barre à François Bayrou. Condoléances à sa famille.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (05 janvier 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Anne-Marie Comparini.
    François Bayrou.
    Philippe Vigier.
    Jean-Marie Daillet.
    La loi Veil.

    Claude Malhuret.
    Jacques Duhamel.
    Didier Borotra.
    La convergence des centres aux européennes.
    Raymond Barre.
    Gilberte Beaux.
    Christine Boutin.
    Dominique Baudis.
    Valérie Hayer.
    Henri Grouès.
    Jean-Jacques Servan-Schreiber.
    Jean-Marie Rausch.
    René Monory.
    René Pleven.
    Simone Veil.
    Bruno Millienne.
    Jean-Louis Bourlanges.
    Jean Faure.
    Joseph Fontanet.
    Marc Sangnier.
    Bernard Stasi.
    Jean-Louis Borloo.
    Sylvie Goulard.
    André Rossinot.
    Laurent Hénart.
    Hervé Morin.
    Olivier Stirn.
    Marielle de Sarnez.

     
     



    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250105-anne-marie-comparini.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/anne-marie-comparini-l-esprit-de-258509

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/01/05/article-sr-20250105-anne-marie-comparini.html


     

  • 7 janvier 2025 : êtes-vous toujours Charlie ?

    « Cette France qui s’est retrouvée dans l’épreuve, ce moment où le monde entier est venu à elle, car le monde sait lui aussi la grandeur de la France et ce qu’elle incarne d’universel. La France, c’est l’esprit des Lumières. La France, c’est l’élément démocratique. La France, c’est la République chevillée au corps. La France, c’est une liberté farouche. La France, c’est la conquête de l’égalité. La France, c’est la soif de fraternité. Et la France, c’est aussi ce mélange si singulier de dignité, d’insolence, et d’élégance. » (Manuel Valls, le 13 janvier 2015 dans l'hémicycle).




     

     
     


    J'ai eu une "chance", il y a dix ans. Je n'étais pas chez moi mais en déplacement. Cela signifie : pas de journal, pas de télévision, pas de radio. J'ai évité (involontairement) d'être submergé par le flot des informations continues d'urgence. Mais j'avais quand même Internet et c'est ainsi que j'ai appris la mort de l'innocent, du tendre Cabu par balles ! Voir plus bas. Difficile de comprendre le monde contemporain. Pour la (très) petite histoire, je n'étais pas à Paris il y a dix ans, mais j'étais à Nice où le soleil brillait à 20°C...

    Sinistre commémoration, donc. Mardi, le dixième anniversaire de l'attentat de "Charlie Hebdo" qui s'est déroulé le mercredi 7 janvier 2015 sera l'occasion, pour la France, de faire un petit retour sur son passé récent. Toute la semaine sera commémorative, car le 8 janvier 2015 et le 9 janvier 2015, d'autres victimes ont péri dans cette série d'attentats de début 2015. On peut comprendre pourquoi François Bayrou n'a pas voulu faire sa déclaration de politique générale cette semaine et attendre la semaine suivante.

    Il y a eu une sorte de sidération, et malheureusement, on allait être presque habitués par cette sidération, tant les attentats islamistes se sont succédé en France, le 13 novembre 2015, le 14 juillet 2016, etc. Si l'attentat de La Nouvelle-Orléans a autant ému les Français, c'est parce que, en plus d'avoir touché le quartier français de cette ville américaine, il y avait deux faits qui, inévitablement, refaisaient penser aux attentats en France : l'attaque à la voiture-bélier, comme à Nice, et l'attaque contre un mode de vie, contre des personnes réunies pour s'amuser, pour faire la fête, Nouvel an comme bientôt carnaval, comme le 13 novembre 2015, contre de malheureux clients qui discutaient sur les douces terrasses de cafés parisiens un vendredi soir.

    Il y a eu deux incompréhensions dans l'état de sidération dans lequel nous nous trouvions. La première, c'était de croire que ces terroristes islamiques en voulaient à notre liberté d'expression et de dessin. En fait, c'est beaucoup plus vaste, contre notre mode de vie, contre notre existence : liberté d'expression, mais aussi liberté de célébration, liberté d'enseignement, liberté d'amusement, de distraction, d'écouter un concert, d'assister à une messe, etc. Bref, il n'y avait plus à donner des arguments, la cause est entendue, c'est celle des guerres : les terroristes sont nos ennemis et c'est eux ou nous. La seconde incompréhension, c'était de croire que cela avait commencé avec "Charlie Hebdo" en janvier 2015. En fait, cela avait commencé dès mars 2012 à Montauban et à Toulouse, avec les abominables assassinats de Merah, dont de trois enfants en bas âge dans une école juive. C'est là que tout a commencé, mais c'était difficile de comprendre sans le recul nécessaire.

    Cette violence est d'autant plus sidérante qu'elle s'est appliquée à des êtres par définition doux, des tendres, des non-violents, des intellectuels, des écrivains, des économistes, des psychiatres, des dessinateurs... Pas des miliciens, pas des légionnaires, pas des activistes.


    Le bilan humain est encore aujourd'hui très émouvant car certains étaient très connus et appréciés. Cela reste encore aujourd'hui incompréhensible. On a tiré à la kalachnikov sur la rédaction de "Charlie Hebdo". Douze sont morts le 7 janvier 2015 : cinq dessinateurs "historiques" du journal, Cabu (76 ans), Wolinski (80 ans), Charb (47 ans), Tignous (57 ans) et Honoré (73 ans), l’économiste Bernard Maris (68 ans), la psychiatre Elsa Cayat (54 ans), les journalistes Michel Renaud (69 ans) et Mustapha Ourrad (60 ans), les policiers Ahmed Merabet (42 ans) et Franck Brinsolaro (49 ans), qui assurait la protection de Charb, et l’agent de maintenance Frédéric Boisseau (42 ans).

    Charb, du haut des cieux, rappelle désormais aux passants, devant les lieux de la tragédie, ce qu'il écrivait en 2012 et qui est désormais inscrit en bas de la grande fresque de la rue Nicolas-Appert, "inventeur de la conserve alimentaire" (voir illustration) : « Je n'ai pas peur des représailles, je n'ai pas de gosses, pas de femme, pas de voiture, pas de crédit. C'est peut-être pompeux ce qui je vais dire, mais je préfère mourir debout que vivre à genoux. ».

     

     
     


    Il faut absolument en rajouter un treizième, que les autorités ne compteront jamais parmi les victimes, mais c'en est une : Simon Fieschi, le webmaster du journal. Il a été gravement blessé, touché à la colonne vertébrale, entraînant des handicaps à vie (hospitalisé neuf mois, perdant l'usage de ses jambes et de ses bras mais réussissant finalement à marcher). On l'a retrouvé mort dans une chambre d'hôtel à Paris le 17 octobre 2024, quelques jours avant son 41e anniversaire. Il s'est probablement suicidé, traumatisé à la suite de cet attentat.

    D'autres victimes présentes sur place ont survécu, traumatisées à vie et parfois, blessées à vie. Onze personnes ont été blessées dont quatre grièvement. Outre Simon Fieschi, deux journalistes ont été très gravement touchés, Philippe Lançon (qui a raconté son après-attentat dans un livre au titre emblématique, "Le Lambeau", éd. Gallimard en avril 2018) et Fabrice Nicolino, déjà victime d'un premier attentat en 1985 (j'ai cité ce journaliste pour évoquer Claude Allègre). Le dessinateur et directeur de la rédaction Riss a été touché à l'épaule, et un second agent de maintenance aussi.

    Il y a eu les rescapés qui miraculeusement n'ont pas été touchés, présents pendant le carnage : la dessinatrice Coco, les journalistes Sigolène Vinson, Luce Lapin et Laurent Léger, aussi Gérard Gaillard qui accompagnait Michel Renaud, invité exceptionnel de la rédaction, le directeur financier Éric Portheault. Sigolène Vinson a été visée par l'un des terroristes qui l'a finalement épargnée : « Je ne te tuerai pas. Tu es une femme. On ne tue pas les femmes. Mais réfléchis à ce que tu fais. Ce que tu fais est mal. Je t’épargne, et puisque je t’épargne, tu liras le Coran. (…) On ne tue pas les femmes ! On ne tue pas les femmes ! On ne tue pas les femmes ! »... après avoir pourtant assassiné Elsa Cayat, chargée d'une chronique dans l'hebdomadaire.


    Et puis, il y a eu ceux qui auraient dû ou pu se trouver dans la salle de rédaction pendant l'attentat et qui ne s'y trouvaient pas pour une raison ou une autre, en particulier l'urgentiste Patrick Pelloux, les dessinateurs Catherine Meurisse, Luz et Willem, le critique cinéma Jean-Baptiste Thoret, le rédacteur en chef (en vacances à Londres) Gérard Biard, les journalistes Zineb El Rhazoui (elle en vacances au Maroc) et Antonio Fischetti, et l'humoriste Mathieu Madénian.

    On imagine l'effroyable traumatisme à vie de ces rescapés, blessés, intacts et absents, qui ont vu la mort de leurs amis de très près. Certains n'ont pas renoncé leur expression corrosive, prêts à critiquer la réaction des autorités. Ainsi, Zineb El Rhazoui : « J'aurais aimé que ceux qui sont morts bénéficient d'un tel soutien de leur vivant. Et ce n'était pas du tout le cas. "Charlie Hebdo" est un journal qui a été conspué par tout le monde. ». Puis : « Nos collègues ont réussi à faire marcher Abbas et Netanyahou. On aurait voulu que les nôtres, qui sont morts, puissent voir tous ces gens. ». Gérard Biard : « Ils ont fait sonner les cloches de Notre-Dame pour Charlie, non mais on rêve ! ». Willem (qui n'a pas participé à la grande marche du 11 janvier) : « Nous avons beaucoup de nouveaux amis, comme le pape, la reine Élisabeth ou Poutine : ça me fait bien rire ! ». Luz : « On parle de la mémoire de Charb, Tignous, Cabu, Honoré, Wolinski : ils auraient conchié ce genre d'attitude. (…) Au final, la charge symbolique actuelle est tout ce contre quoi Charlie a toujours travaillé : détruire les symboles, faire tomber les tabous, mettre à plat les fantasmes. Le symbolisme au sens large, tout le monde peut en faire n’importe quoi. Même Poutine pourrait être d’accord avec une colombe de la paix ! ».

    La fuite des deux assaillants ainsi que d'un troisième terroriste (j'éviterai de dire leur nom) a été une course folle durant trois jours qui a fait encore beaucoup de dégâts humains. Le 8 janvier 2015 au matin, à Montrouge, une jeune stagiaire de la police municipale Clarissa Jean-Philippe (26 ans) est morte dans une fusillade, près d'une école juive. Quatre autres personnes ont été assassinées le 9 janvier 2015 dans l'après-midi, prises en otages puis tuées dans l'épicerie Hyper Casher de la Porte de Vincennes : Yohan Cohen (20 ans), Yoav Hattab (21 ans), Philippe Braham (45 ans) et François-Michel Saada (63 ans). Les trois terroristes ont été tués dans des fusillades, les deux auteurs de la tuerie à "Charlie Hebdo" dans une imprimerie où ils s'étaient réfugiés, le troisième preneur d'otages à l'Hyper Casher. Il faut souligner l'acte de bravoure de Yoav Hattab qui s'est emparé d'une arme du terroriste, ce qui lui a valu la mort.

     

     
     


    Tous les Français ont été choqués, ou du moins, quasiment tous (il y a eu malheureusement quelques cris de joie dans certains endroits de France), et parmi eux, l'un particulièrement choqué parce qu'il a perdu un ami cher le 7 janvier 2015, en la personne de Bernard Maris, c'était en même temps la date de sortie de son roman "Soumission", un roman de fiction politique qui imaginait la victoire des "musulmans modérés" en 2022 avec la nomination de François Bayrou à Matignon (toute ressemblance avec des faits réels n'est que pure coïncidence !). Je parle bien sûr de Michel Houellebecq qui, traumatisé par les attentats, a lâché le 13 janvier 2015 : « Rien ne sera plus comme avant (…). Oui [j’ai peur], même si c’est difficile de se rendre complètement compte de la situation. (…) Moi, je me sens toujours irresponsable et je le revendique, sinon je ne pourrais pas continuer à écrire. Mon rôle n’est pas d’aider à la cohésion sociale. Je ne suis ni instrumentalisable, ni responsable. ».

    Le week-end qui a suivi ces attentats, les 10 et 11 janvier 2015, les Français ont manifesté leur émotion et leur indignation très largement, rejoints par des dizaines de chefs d'État et de gouvernement qui ont exprimé leur solidarité avec le peuple français. Émotion mondiale.


    Ce qui est inquiétant, c'est que, depuis dix ans, les attentats ont continué, de nombreux ont heureusement échoué grâce au travail minutieux des forces de l'ordre, mais certains terroristes sont quand même passés à l'acte en particulier le 13 novembre 2015 et le 14 juillet 2016. L'inquiétant, c'est que rien n'indique que ce cauchemar ne se renouvellera pas à courte échéance et l'attentat de La Nouvelle-Orléans le montre bien.

    Je voudrais profiter de cet hommage aux disparus par es déclarations de deux hommes. Je terminerai par Cabu qui nous manque beaucoup. Mais avant lui, je voudrais reparler du Premier Ministre de l'époque, Manuel Valls, qui, de retour au gouvernement ces derniers jours, essuie injustement des insultes dans les réseaux sociaux. Car si Manuel Valls doit être considéré comme un homme d'État, qu'on l'aime ou qu'on le déteste, c'est bien par son comportement exemplaire lors des attentats de 2015 : Manuel Valls a incarné les valeurs républicaines au moment où la France en avait le plus besoin, merci à lui.

    Je propose ainsi de citer les extraits de ses deux discours majeurs (historiques, on peut dire) à la suite des attentats de 2015, celui du 13 janvier 2015 et celui du 9 janvier 2016. Peut-être parce qu'il est le seul Premier Ministre français à ne pas être né français, son appartenance à la France s'est incarnée avec plus de conscience et plus de détermination qu'un Français de naissance. Il reste que la République française ne fait justement pas de différence entre les Français, quelle que soit la manière d'être ou de devenir Français.


    Le 13 janvier 2015 : « La République et ses valeurs. (…) La laïcité, elle s’apprend bien sûr à l’école, qui en est un des bastions. C’est là, peu importe les croyances, les origines, que tous les enfants de la République ont accès à l’éducation, au savoir, à la connaissance. (…) La République n’est pas possible sans école, et l’école n’est pas possible sans République. Et on a laissé passer trop de choses (…) dans l’école. La laïcité, oui la laïcité, la possibilité de croire, de ne pas croire. L’éducation a des valeurs fondamentales, doit plus que jamais (…) être le combat de la France face à l’attaque que nous avons connue. Et arborons fièrement ce principe puisqu’on nous attaque à cause de la laïcité, à cause des lois que nous avons votées ici interdisant les signes religieux à l’école, prohibant le voile intégral, revendiquons-les, parce que c’est ça qui doit nous aider à être encore davantage forts. ».

    Et le message adressé tant aux Juifs qu'aux musulmans en France : « La France est en guerre contre le jihadisme, contre l’islamisme radical. Mais elle n’est pas en guerre contre une religion. Pas en guerre contre l’islam et les musulmans. (…) L’islam a toute sa place en France. (…) Je ne veux pas qu’en France des juifs aient peur. Et je ne veux pas que des musulmans aient honte. ».

    Le 9 janvier 2016, un an plus tard : « Le symbole d’un pays qui ne se perd pas dans la haine de l’autre, mais qui trouve en lui la force d’être ce peuple fier de ce qu’il est, qui dit non au racisme, non à l’antisémitisme, non au rejet et au repli. Être français, ce n’est pas renoncer à ses origines, ce n’est pas renoncer à son identité, c’est les verser au pot commun. C’est une citoyenneté qui n’est pas petite, qui n’est pas réduite à l’origine de chacun, du sang, du sol ou par naturalisation, mais qui est grande, ouverte, fondée sur la volonté de construire l’avenir ensemble ! C’est ce nouveau patriotisme que j’appelle de mes vœux ! ».

    L'éditorialiste politique Patrick Cohen se demandait d'ailleurs le 3 janvier 2025 sur France Inter les raisons de l'impopularité actuelle de Manuel Valls (« dont on a oublié qu’il fut un Premier Ministre populaire, près de 60% de bonnes opinions début 2015 ») : « On aimerait être certain que ces torrents de haine ne sont dus qu’à la loi travail, puis à son ralliement à Emmanuel Macron en 2017 -trahison de sa parole socialiste. Qu’à son opportunisme, son escapade espagnole, son retour piteux de Barcelone, et autres zigzags ou dérapages. On aimerait. Mais il est plus que probable que cette détestation trouve aussi racine dans ses combats contre Dieudonné et Tariq Ramadan, contre l’antisémitisme. Dans sa défense de la laïcité sans adjectif. Dans sa façon de rompre avec le mythe unitaire de la gauche, en faisant le constat de "deux gauches irréconciliables". ».

     

     
     


    Terminons par Cabu. Je n'ai pas retrouvé la date exacte de l'interview sur Europe 1 de l'ami Cabu qui passe en boucle dans les réseaux sociaux, je pense qu'elle doit dater de 2008. Cabu ne comprenait pas qu'on puisse imaginer tuer quelqu'un pour ses dessins, il trouvait cela stupide ! Et pourtant, quelle émotion de l'écouter ! S'il avait su la suite...

    Quelle émotion d'entendre cet éclat de rire : « Au moment du procès des caricatures danoises, vous savez, qu'on a publiées, j'étais protégé par la police. [Éclat de rire] Oui, ça fait rire, oui... (…) Ça a duré trois semaines seulement. Mais actuellement, je peux vous dire que Riss, Charb et Luz sont toujours protégés par deux policiers chacun. Il y a toujours des menaces de mort pour un dessin, vous vous rendez compte ? (…) Ce n'est pas signé, mais on sait d'où ça vient quand même. (…) On n'a aucune nouvelle de l'enquête. On sait seulement qu'il y a toujours des menaces. Pourquoi les policiers sont chargés de la protection des trois dessinateurs de Charlie ? C'est quand même triste, quoi ! (…) C'est notre boulot, quand même, de maintenir une charge contre toutes les idéologies, parce qu'on prend ces religions comme des idéologies. On doit pouvoir critiquer toutes les idéologies. Donc, je pense qu'on continue à le faire, évidemment, mais on ne va pas se prendre pour des héros non plus. On essaie de faire rire, d'abord, voilà. On est toujours étonnés parce qu'on veut faire rire et on nous menace de mort. C'est quand même incroyable ! (…) Je pense qu'en France, on peut encore rire de tout. On n'es pas en Iran, on n'est pas en Corée du Nord, vous voyez, il faut maintenir ce niveau d'esprit critique. ».

     




    J'ai encore du mal à imaginer que Cabu a été assassiné à la kalachnikov (et pas tout seul) et que dix ans plus tard, la gauche actuelle s'enfonce dans le "oui mais", hésitant entre Cabu et ses assassins, voulant ménager la chèvre et le chou. Aujourd'hui, c'est Sophia Aram qui se fait harceler par les islamogauchistes parce qu'elle est libre d'exprimer ce qu'elle veut. Répétons avec Cabu : il faut maintenir ce niveau d'esprit critique !

    Alors, êtes-vous toujours Charlie ? Moi, oui, plus que jamais ! Plus que jamais je suis français, plus que jamais je suis patriote, plus que jamais les valeurs républicaines sont notre ciment le plus efficace, plus que jamais je sais que le peuple français triomphera des fanatismes et des populismes car nous sommes, dans l'adversité, toujours unis. Râleurs, mais unis !



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (04 janvier 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    50 ans après Charlie Hebdo.
    Manuel Valls et l’esprit républicain.
    7 janvier 2025 : êtes-vous toujours Charlie ?
    Attentat à La Nouvelle-Orléans le 1er janvier 2025.
    Marché de Noël de Magdebourg : l'attentat du 20 décembre 2024.
    Pogrom à Amsterdam du 7 novembre 2024 : toujours la même musique...
    7 octobre 2023 : un an qu'Israël se bat pour sa survie.
    7 octobre 2023 : l'hommage aux victimes françaises.
    L'avenir de la France se joue aussi à Gaza !
    Le rappel très ferme d'Emmanuel Macron contre l'antisémitisme.
    L'attentat islamiste du Crocus City Hall de Moscou (22 mars 2024).
    Conflit israélo-palestinien : la France est-elle concernée ?
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    Émotion, compassion et soutien aux victimes du criminel d'Annecy.
    Les attentats de Merah.
    L'attentat contre Salman Rushdie.
    L’attentat de la basilique Notre-Dame de Nice le 29 octobre 2020.
    Samuel Paty : faire des républicains.
    Les attentats du 11 septembre 2001 et la naissance du complotisme 2.0.
    Les attentats du 11 septembre 2001.
    Complot vs chaos : vers une nouvelle religion ?
    Nouveau monde.
    Qu’aviez-vous fait le 11 septembre 2001 ?
    11 septembre, complot ?
    Les théories du complot décortiquées sur Internet.
    Ben Laden, DSK, même complot ?
    L'attentat de Kaboul du 26 août 2021.
    Jacques Hamel, martyr de la République autant que de l’Église.
    Fête nationale : cinq ans plus tard…

     

     

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250107-attentat-charlie-hebdo.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/citoyennete/article/7-janvier-2025-etes-vous-toujours-258429

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/01/04/article-sr-20250107-attentat-charlie-hebdo.html