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  • Philippine : émotion nationale, récupérations politiques, dysfonctionnements de l'État ?

    « Soyez donc les bienvenus vous tous, chrétiens ou non, habitués ou moins habitués des églises, qui venez entourer la famille de Philippine, manifester votre amitié et prier pour elle. Vous pressentez que c’est important d’être là, tels que vous êtes. Merci d’être venus, parfois de loin. » (Père Pierre-Hervé Grosjean, le 27 septembre 2024 à Versailles).



     

     
     


    À la découverte à la fois du corps inerte de Philippine Le Noir de Carlan et du profil de son meurtrier présumé deux jours plus tard, l'extrême droite a profité de l'occasion pour faire de la récupération politique. Oui, c'est sans doute vrai, mais l'émotion ne signifie pas toujours la récupération et c'était une grande émotion nationale qu'ont ressenti ce vendredi 27 septembre 2024 les près de 3 000 participants aux obsèques de Philippine à la cathédrale Saint-Louis de Versailles, dont 1 000 restés dehors, sur le parvis, faute de place, sous une pluie battante.

    Rappelons d'abord les faits : Philippine Le Noir de Carlan, jeune étudiante de l'Université Paris-Dauphine qui allait fêter son 20e anniversaire le 10 octobre prochain, a été déclarée disparue le vendredi 20 septembre 2024 dans la soirée. Sa dernière apparition remontait à 14 heures le même jour, à l'issue de son déjeuner. Elle devait retrouver ses parents dans les Yvelines pour le week-end. Hélas, très rapidement, on en est venu à chercher du côté du bois de Boulogne (proche de la Porte Dauphine), et le soir du samedi 21 septembre 2024, on a retrouvé son corps, enseveli sauf un bras. Une vague d'émotion a alors envahi le pays. Pourquoi ? Parce que, comme toujours avec ce genre de tragédie, on peut s'identifier à la victime. Une jeune étudiante, symbole de toutes les étudiantes, mais aussi les parents de jeunes filles peuvent s'identifier aussi (même la dernière fille du nouveau garde des sceaux a l'âge de Philippine).

    De nombreux étudiants, même ceux qui ne connaissaient pas Philippine, sont venus se recueillir le lundi 23 septembre 2024 dans le hall de l'Université Paris-Dauphine pour lui rendre hommage et honorer sa mémoire. Ce qui est arrivé à Philippine aurait pu arriver à n'importe quelle étudiante de cette université et sans doute n'a-t-elle a eu de chance d'avoir croisé son meurtrier.
     

     
     


    Beaucoup de détails peuvent contribuer à s'identifier à la victime. Ainsi, les lieux. Il y a une vingtaine d'années, je me rendais de temps en temps à cette université Paris-Dauphine parce que j'avais un groupe de travail avec des étudiants de cette université. Parfois, les réunions pouvaient finir tardivement dans la soirée ou en hiver, vers les 19-20 heures, il faisait nuit, et je me faisais la réflexion, lorsque je revenais seul reprendre mon véhicule stationné dans le bois de Boulogne, peu éclairé, que ce serait peut-être dangereux si j'avais été une jeune fille (j'avoue que je n'ai jamais eu peur personnellement d'être agressé, mais à tort, surtout par imprudence car nul n'est épargné ; la témérité était ma seule réponse à une impuissante fatalité). Je connais aussi bien Versailles, et Montigny-le-Bretonneux où Philippine vient d'être inhumée, ce qui renforce l'identification. J'imagine parfaitement son milieu.

    L'émotion suscitée par ce drame infini s'est renforcée par la colère. En effet, l'auteur présumé du meurtre a été arrêté à Genève le mardi 24 septembre 2024 (bravo la police !). Il s'agirait d'un Marocain de 22 ans venu illégalement en France en 2019, qui aurait commis un viol alors qu'il n'était pas encore majeur, aurait été condamné à sept ans de prison mais libéré au bout de cinq ans, en juin 2024. Il était condamné aussi à une obligation de quitter le territoire français (OQTF) d'une durée de dix ans. Il a été placé dans un centre de rétention administrative pendant un peu plus deux mois mais relâché quinze jours avant la tragédie.

    On le comprend, le sujet est ultrasensible : meurtre d'une jeune fille, fille croyante et pratiquante, immigration illégale, OQTF non exécutée, récidive. Chaque terme susciterait en lui-même des montagnes de récupérations politiques de l'extrême droite. Insistons sur le fait que si le RN avait été au pouvoir (il n'en était pas très loin au début de l'été), le meurtre aurait hélas été sans doute aussi commis.

    Restons encore brièvement dans la récupération politique... mais de l'extrême gauche, pas plus décente à cet égard pour la mémoire de Philippine, et même, pire. Ainsi, on peut lire dans les réseaux sociaux des messages franchement dégueulasses de personnes qui refusent la compassion pour Philippine sous prétexte qu'elle serait catholique pratiquante et que l'extrême droite aurait récupéré son assassinat. Du reste, des militantes d'extrême gauche ont arraché à Science Po les affiches rendant hommage à Philippine. On ne sait plus très bien si les plus dégénérés sont les meurtriers du type de celui de Philippine ou tous ces tordus qui ne voient plus l'humain au travers de leur prisme idéologique et de leurs puanteurs militantes.
     

     
     


    Le grand nombre de participants à l'enterrement à Versailles montre qu'on n'était pas obligé de connaître Philippine pour être touché dans ses tripes par son meurtre. Des gens qui ne se connaissaient se sont d'ailleurs serrés dans les bras pour exprimer cette émotion et se consoler. Elle ne vient pas de nulle part, elle rassure même, car tout drame mérite respect, émotion et réflexion. Cela s'est passé aussi pour d'autres drames, précédemment, trop nombreux hélas pour les énumérer simplement ici.

    Pour autant, la réflexion doit s'amorcer avec cette idée : le meurtre de Philippine pouvait-il être évité ? Et aussi : comment l'éviter dans l'avenir ? Car la première réflexion, logique, c'est de se dire : jamais Philippine n'aurait dû croiser sur son chemin ce jeune criminel marocain qui aurait dû être expulsé depuis plusieurs semaines. Et vient donc la question en d'autres termes : y a-t-il eu des dysfonctionnements dans l'État, c'est-à-dire, des décisions humaines qui, mal inspirées, ont engendré un tel crime ?
     

     
     


    Pour ma part, sans ôter la moindre responsabilité au moindre responsable, l'entière responsabilité du meurtre provient du meurtrier et de lui seul. Personne ne l'a forcé à tuer Philippine. Il est 100% responsable de son acte odieux.

    Il y a d'abord des amalgames à éviter, et à éviter des deux extrêmes. Extrême droite : les immigrés clandestins ne sont pas tous des tueurs. Heureusement. Réduire le meurtre de Philippine à des OQTF mal exécutées est, à mon sens, une erreur de raisonnement. Extrême gauche (chez certains écologistes) : on réfute l'idée que le tueur soit immigré pour qu'il tue, en disant qu'il a tué parce qu'il était un homme ! Là aussi, c'est tout aussi stupide intellectuellement. Dieu merci, les hommes ne sont pas tous des tueurs de jeunes filles (sinon, j'en viendrais à être honteux d'être ce que je suis, un homme).

    Premiers éléments de réflexion pour répondre à la question principale (le meurtre aurait-il pu être évité ?). D'après les informations dont je dispose, et donc, sous réserve qu'elles soient exactes et confirmées, j'ai compris que la remise de peine de deux ans est plutôt sévère pour une peine de sept ans. Rappelons aussi que le juge évite le plus possible la prison en temps long en raison des places qui manquent. Donc, le jeune Marocain est relâché et immédiatement placé en centre de rétention administrative pour rendre exécutable son OQTF.

    Qu'est-ce qu'on attendait ? Comme le futur expulsé n'a pas de passeport, il lui faut un sauf-conduit (je n'ai pas le terme exact) consulaire délivré par le pays qui l'accueille, à savoir ici le Maroc. Le problème, c'est que les pays de retour sont peu enthousiastes pour délivrer ce genre de papiers officiels. Il y aura bien un rapport de force diplomatique à mener entre les deux pays, mais c'est du long terme et très aléatoire, car concrètement, si le pays de retour ne fait rien, la France est bien ennuyée. Le pire, c'était que des candidats à l'expulsion pouvaient rester des mois voire des années dans des centres de rétention, qui n'est pas autre chose qu'une prison alors qu'on n'est pas condamné (je rappelle : les expulsés n'ont commis que la faute d'être entrés en France illégalement, mais n'ont pas forcément commis des crimes ou autres délits). Une loi a donc établi une durée maximale durant laquelle on pouvait être retenu dans un centre de rétention : 90 jours. Avec une décision de maintien du juge tous les quinze jours. Sur quoi se base le juge ? Sur la probabilité que le pays de retour délivre les documents consulaires avant les 90 jours de durée maximale.

    Pour le cas du meurtrier présumé de Philippine, la justice française avait abandonné tout espoir raisonnable que le Maroc fournisse ce document dans les temps, si bien qu'elle a considéré que le retenir plus longtemps n'avait aucune sorte d'utilité (au bout de 90 jours, il serait de toute façon relâché). Donc, à mon sens, blâmer le juge qui a signé sa sortie du centre de rétention est stupide car il n'a fait que son travail selon les critères que la loi lui a imposés. En revanche, l'auteur présumé aurait dû signaler régulièrement sa présence, ce qu'il n'a pas fait. Pourquoi n'a-t-on pas réagi ? (Là encore, regardons l'unité de temps : quinze jours, semble-t-il, entre sa sortie du centre de rétention et le meurtre ; la police n'allait pas réagir plus vite de toute façon).
     

     
     


    Pour autant, peut-on considérer que c'est satisfaisant ? Certainement pas. Absolument pas. Des vies humaines ont été perdues à cause d'un manque de réflexion. Il ne faut pas idéologiser l'immigration, mais réfléchir de manière pragmatique sur les raisons de non exécution des OQTF. La principale, c'est la mauvaise volonté des pays du retour. Quand la justice française connaît le pays du retour, car ce n'est pas toujours le cas.

    Je n'ai pas "la" solution, sinon, elle aurait déjà été trouvée et appliquée depuis longtemps, mais des pistes sur ce cas précis. Deux modestes pistes.

    La première est que la condamnation du jeune violeur était de la détention assortie d'une OQTF. On aurait donc pu rechercher les documents consulaires avant sa libération de prison, en vue de son expulsion immédiate dès sa sortie de prison. Après tout, condamné à sept ans de prison, cela laissait deux ans à l'administration française pour obtenir le papier consulaire auprès des autorités marocaines. Mieux que 90 jours. L'obtention de ce papier consulaire devrait même être une condition nécessaire à toute libération anticipée d'un condamné faisant l'objet d'une procédure d'expulsion.

    La seconde piste, c'est de différencier les candidats à l'expulsion, car il y en a de deux sortes : il y a la grande majorité d'étrangers clandestins qui doivent retourner chez eux et qui n'ont rien fait d'illégal autre que cette entrée du territoire français ; et puis il y a des gens comme ce violeur condamné qui est un criminel (rappelons que le viol est un crime) et on doit focaliser la surveillance des autorités françaises sur ces personnes sous OQTF tant qu'elles ne sont pas effectivement expulsées car elles sont susceptibles d'être (encore) des dangers pour la société (même si on ne peut pas préjugé d'un crime ou délit futur, "Minority report" n'est qu'une fiction, heureusement). Ou même permettre exceptionnellement le placement en centre de rétention le temps de pouvoir les expulser selon les règles.

    Invité de la matinale de France Inter ce vendredi 27 novembre 2024, le nouveau Ministre de la Justice Didier Migaud a manqué manifestement de dose de persuasion pour exprimer pourtant une évidence : « des situations tout à fait objectives, comme sur l'exécution des peines, qui a beaucoup progressé, comme le nombre de personnes qui aujourd'hui sont détenues en prison. Mais je sais que c'est inentendable pour le citoyen ! (…) Je souhaite convaincre les citoyens qu'il faut faire confiance à la justice. Et comme garde des sceaux, ce sera à moi de veiller à ce que la justice puisse avoir les moyens de fonctionner. Je serai toujours le défenseur de l'État de droit, toujours le défenseur de la justice, toujours le défenseur des magistrats, sans être complaisant vis-à-vis de manquements qui peuvent effectivement intervenir. ».
     

     
     


    Et de répondre aux critiques parce qu'il n'avait pas réagi au meurtre de Philippine : « Vous savez que le garde des sceaux ne peut pas intervenir dans le cadre d'une procédure individuelle. Ça ne m'empêche pas de ressentir aussi fortement que les citoyens l'émotion devant une telle situation. C'est une tragédie. Ma dernière fille, elle a l'âge de la victime ! Donc vous vous rendez compte que je peux imaginer le drame que ça peut représenter pour la famille, et je lui exprime bien évidemment toute ma sympathie. ». Sa mission : « Essayer de travailler pour voir si la réglementation, si la législation est adaptée en toutes circonstances, pour faire en sorte d'éviter ce type de situation et ce type de drame. Et là, je dois travailler avec le Ministre de l'Intérieur : c'est ce que nous efforçons de faire, d'ailleurs, depuis quelques jours pour faire face à cette situation. Mais je comprends que l'émotion est telle qu'elle submerge tous les discours objectifs. ».

    La cérémonie religieuse a eu lieu à la cathédrale Saint-Louis de Versailles (où Philippine a fait sa confirmation) parce que l'église de sa paroisse, à Montigny, n'aurait pas été assez grande pour accueillir ces milliers de personnes venues communier à la mémoire de Philippine. La présidente du conseil régional d'Île-de-France Valérie Pécresse était présente, le président de l'Université Paris-Dauphine également. Beaucoup d'élus étaient présents. Une cagnotte mise en ligne pour soutenir financièrement la famille a déjà recueilli les dons de 3 500 généreuses personnes.

    Dans son homélie, le curé de la paroisse de Montigny-Voisins-le-Bretonneux, le Père Pierre-Hervé Grosjean, a évoqué trois temps : celui de la tristesse, celui de l'espérance, et celui de l'action.

    L'émotion : « Devant le mystère du mal, devant l’injustice insupportable et la violence qui s’est déchaînée, nous sommes sidérés, comme écrasés. Bien sûr, la justice des hommes sera nécessaire. Son temps viendra. Mais aujourd’hui, nous avons besoin de pleurer, de partager et de déposer ensemble notre douleur, notre colère, notre incompréhension. ».
     

     
     


    L'espérance : « Nous voulons nous accrocher à cette espérance que nous donne Jésus, comme on s’accroche à une ancre pour ne pas couler ou dériver. Oui, en priant pour toi, en te portant devant Dieu, Philippine, nous espérons et nous croyons que le Seigneur t’accueille dans sa paix, dans la joie du Ciel, qu’auprès de Lui tu ne souffres plus, et que tu connais ce bonheur parfait pour lequel nous avons été créés, ce bonheur qu’aucun mal ne pourra plus désormais atteindre ou abîmer, cette joie éternelle dont nous avons tous soif, dont tu avais soif et que les joies de ta vie annonçaient. Nous sommes là, nous accrochant à cette espérance qui nous promet aussi qu’il y aura un jour des retrouvailles. Nous te reverrons Philippine. Cette espérance n’empêche pas nos larmes, mais elle les éclaire. ».

    L'action : « Nous avons nous aussi en effet chacun une mission. Nous ne voulons pas que le mal ait le dernier mot. Nous voulons croire que Jésus a vaincu la mort, pour que ceux qui accueillent cet Amour victorieux puissent recevoir la vie éternelle. Mais dès maintenant, nous pouvons répondre à ce mal en le retournant contre lui-même. Comment ? En faisant de ce drame, de cette épreuve terrible, l’occasion d’un sursaut, l’occasion de grandir résolument, généreusement et courageusement dans notre vie, dans la façon de la vivre pleinement, de la donner, dans notre désir de servir et d’aimer. Nous voulons opposer au Mal, à sa violence et à sa laideur, la force de notre amour, de notre espérance, de notre foi, et la beauté de notre unité. Nous voulons répondre à l’horreur du mal par la force plus grande encore du bien, le bien que nous pouvons faire en nous engageant, chacun à notre façon, chacun selon notre vocation, pour servir. ».

    Et il a terminé en s'adressant directement à Philippine à propos de sa famille et de ses amis : « Tu es désormais leur grande sœur du Ciel. Encourage-les dans leurs joies, leurs peines et leurs combats. Donne à chacun de pouvoir servir, croire et aimer à son tour avec toute la générosité dont il ou elle est capable. Aide tous ces jeunes à découvrir combien ils sont aimés de Dieu, de façon inconditionnelle, quelle que soit leur histoire ou leurs fragilités. Parce que c’est quand on se sait aimé qu’on devient capable du meilleur ! ».


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (27 septembre 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Philippine : émotion nationale, récupérations politiques, dysfonctionnements de l'État ?
    Viols de Mazan : quelques réflexions sur Pélicot et compagnie...
    Violence scolaire : quand une enseignante s'y met...
    Création du délit d'homicide routier : seulement cosmétique ?
    La France criminelle ?
    La nuit bleue de Lina.
    La nuit de Célya.
    La nuit d'Émile Soleil.
    Affaire Grégory : la vérité sans la boue ?
    Alexandra Sonac et sa fille adolescente.
    Harcèlement scolaire et refus d'obtempérer.
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    À propos de la tragique disparition de Karine Esquivillon...
    Meurtre de Lola.
    Nos enseignants sont des héros.
    La sécurité des personnes face aux dangers.

     

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240927-philippine.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/societe/article/philippine-emotion-nationale-256968

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/09/27/article-sr-20240927-philippine.html



     

  • Viols de Mazan : quelques réflexions sur Pélicot et compagnie...

    « Depuis que je suis arrivée dans cette salle d'audience, je me sens humiliée. On me traite d'alcoolique. Je serais la complice de M. Pélicot. Il faut avoir un degré de patience pour supporter ce que j'ai pu entendre ! » (Gisèle Pélicot, le 17 septembre 2024 à Avignon).



     

     
     


    Ce qu'on appelle parfois l'affaire Pélicot mais que je préfère appeler l'affaire des viols de Mazan (car Pélicot est soit une victime soit un criminel, selon le prénom utilisé), est passée au-delà du simple fait-divers, c'est désormais un fait de société, tellement il peut donner un exemple éloquent et glauque de l'existence sociale et de l'organisation systémique de la violence conjugale. Depuis le 2 septembre 2024 devant la cour criminelle du Vaucluse, à Avignon, se déroute un long procès qui devrait s'achever le 20 décembre 2024.

    Je rappelle rapidement l'objet du procès : Dominique Pélicot, un homme de 71 ans, a non seulement violé sa femme Gisèle mais l'a fait violer par des dizaines voire des centaines d'hommes. 92 faits de viol ont été répertoriés par la justice, qui ont été commis entre le 23 juillet 2011 et le 23 octobre 2020, principalement à Mazan, dans le Vaucluse, au domicile du couple, dans la chambre conjugale. 83 violeurs potentiels ont été comptés, dont seulement 54 hommes identifiés, 51 (dont le mari) sont jugés au cours de ce procès, un est décédé et deux autres ont été relaxés faute de preuve.

    Jusqu'à cette affaire judiciaire, Gisèle trouvait son mari formidable, « bienveillant et attentionné », « un super mec ». Elle a dit à l'audience : « J'aurais mis mes deux mains à couper que je vivais avec un homme extraordinaire. La première trompée dans ce dossier, c'est moi et mes enfants. ».

    Le procédé était particulièrement odieux : le mari recrutait les violeurs sur un site Internet de rencontres à l'occasion d'échanges dans un forum privé (le forum s'intitulait "À son insu" laissant peu de doute sur la réalité des viols) avec un protocole bien précis et rigoureux (éviter d'être parfumé, rester silencieux, etc. pour ne pas réveiller l'épouse ni éveiller ses soupçons) car les viols étaient commis sans le consentement mais aussi sans la conscience de la victime qui était droguée préalablement au Temesta (un anxiolytique). Pendant tous ces viols, Gisèle Pélicot ne savait pas qu'elle était violée, mais elle souffrait de douleurs génitales, de pertes de mémoire pendant la journée, de grosse fatigue, etc. dont elle ne connaissait pas la cause (et elle a même chopé le papillomavirus ; heureusement, pas le sida alors qu'un des violeurs récidiviste était séropositif).

    Tout dans cette affaire est instructif, autant instructif que glauque, mais aussi tout ce qu'il y a autour. Avant tout, je souhaite saluer le courage, car c'est bien du courage, de la victime Gisèle Pélicot. Courage pour avoir enduré ce qu'elle a subi, mais aussi courage pour l'extérioriser, courage de s'afficher publiquement, sans anonymat, pour faire éclater la vérité (avec l'accord de sa fille Caroline) et aussi pour faire en sorte que cela ne puisse plus se reproduire. Créer un choc social, un avant et un après ce procès. Chaque fois qu'elle rentre au palais de justice, Gisèle est entourée d'une haie d'honneur qui l'encourage. Des manifestations ont eu lieu pour la soutenir, notamment le samedi 14 novembre 2024, pour soutenir aussi toutes les victimes de viol. Aux milliers de manifestants, Gisèle Pélicot a affirmé : « Grâce à vous, j'ai la force de poursuivre le combat jusqu’au bout. ». Le mérite de la victime, ce n'est pas d'avoir été une victime, d'avoir subi, mais d'avoir voulu médiatiser tout le système dont elle était la victime ignorante pour un combat plus général contre le viol et contre les violeurs.


    L'avocat général avait proposé un procès à huis-clos mais la victime a refusé et voulu faire de la publicité à cette affaire judiciaire : « Je n'ai pas à avoir honte ! ». La diffusion d'images pornographiques (scènes de viol, etc.) a cependant été faite dans le cadre d'un huis-clos partiel, le président de la cour ayant faire évacuer la salle de son public (y compris la presse). En raison de la publicité sur les coaccusés, certaines de leurs familles ont été menacées et ont déposé elles-mêmes plainte pour menaces.
     

     
     


    Il est difficile de savoir exactement quel est le sujet, si c'est le viol collectif, le viol sous soumission chimique, le viol conjugal (le mari peut être considéré comme avoir violé sa femme si les rapports ont lieu sans consentement), le recrutement des violeurs sur Internet, le principe même du procès, son déroulement qui peut aussi provoquer la douleur, la réalité des prédateurs sexuels qui sont souvent très subtils et manipulateurs (loin des dragueurs lourdingues qu'on voit venir à des kilomètres à la ronde), capables de se faire passer pour victimes au lieu de bourreaux, etc. Sans doute tous ces sujets à la fois.

    L'origine de l'affaire est aussi assez troublante car c'est par hasard qu'on a découvert ce système dégueulasse. Le mari a été pris le 12 septembre 2020 par un agent de sécurité d'un supermarché de Carpetras en train de filmer sous la jupe de plusieurs clientes du magasin. L'analyse de son ordinateur a montré des dizaines de vidéos et photos de viols de sa femme, ce qui a permis de remonter les dates et les violeurs. Du reste, Dominique Pélicot a avoué le 2 novembre 2020, laissant croire qu'il regrettait les faits. Son épouse a appris l'existence de ces viols le même jour, ce qui a dû provoquer en elle un choc psychologique monstrueux (comment n'ai-je pas pu ressentir de telles atteintes à mon corps pendant si longtemps ?). Elle a immédiatement demandé le divorce et l'a obtenu heureusement avant le début du procès, le 22 août 2024. Les 51 prévenus sont donc jugés pour viols avec circonstances aggravantes.

    La lecture des profils de ces 50 coaccusés auteurs de viols avec la complicité du mari semble montrer qu'ils seraient des hommes ordinaires de 26 à 73 ans, de grande diversité de profession, âge, etc. Mais étaient-ce des messieurs toutlemonde ? Pas forcément car certains avaient été déjà condamnés pour viols ou violence conjugale. Les féministes qui voudraient faire l'amalgame entre ces coaccusés et les hommes en général ne vont certainement pas faire avancer efficacement la cause de femmes : non ! tous les hommes ne sont pas comme ça, tous ne sont pas forcément des prédateurs sexuels, tous n'ont pas besoin de contraindre pour aimer, et même, ce qu'il y a de plus beau dans l'amour, c'est justement le consentement libre et réciproque, le sentiment d'être sur la même longueur d'onde.

    Après des reports d'audience en raison de l'état de santé du principal prévenu, Dominique Pélicot, hospitalisé pour une infection rénale, ce dernier a pris la parole au procès pour la première fois le 17 septembre 2024 pour reconnaître les faits mais aussi accuser ses complices : « Aujourd'hui, je maintiens : je suis un violeur comme tous ceux qui sont concernés dans cette salle. Ils savaient tous, ils ne peuvent pas dire le contraire. Elle ne méritait pas ça, je le reconnais. (…) Je regrette ce que j'ai fait, je demande pardon même si ce n'est pas pardonnable. ».

    Lui-même aurait été une victime de viols pendant son enfance, mais les analyses ADN ont révélé qu'il pourrait être coupable du meurtre ou du viol de Sophie Narme, une jeune fille de 23 ans en stage dans une agence immobilière, tuée en décembre 1991 à Paris. Il a été mis en examen le 14 octobre 2022 pour cette affaire parce que le schéma d'agression serait le même qu'une autre agression sexuelle sur une jeune agente immobilière de 19 ans le 11 mai 1999 à Villeparisis pour laquelle il a avoué après avoir nié (en raison de l'ADN retrouvée).

    Dominique Pélicot a été confronté le 18 septembre 2024 à des images de sa fille nue endormie, mais il a nié avoir violé sa fille et même avoir pris ces clichés. Certains des coaccusés ont rejeté la réalité du viol dont ils sont accusés, si bien que le tribunal a fait diffuser dans une salle sans public et avec l'accord de la victime, la vidéo qui les incriminent le cas échéant dans toute leur crudité. Pour sa part, Gisèle Pélicot est pour l'étalement médiatique le plus large, selon son avocat : « Il faut qu’on ait le courage de se confronter à ce qu’est véritablement le viol, dans un dossier, justement, où il est exceptionnel d’avoir la représentation précise et réelle de ce qu’est un viol, et pas simplement une description sur un procès-verbal. ».

    On voit bien que cette affaire est très compliquée car il faut pouvoir décortiquer la responsabilité des uns et des autres et tous n'ont pas le même intérêt. Ainsi, en faisant embarquer tous les coaccusés dans une responsabilité collective, Dominique Pélicot est autant un accusé qu'un accusateur.

    Mais la stratégie de défense de certains des coaccusés est plutôt révoltante. Ainsi, ont été diffusées des images de Gisèle Pélicot dénudée avant ces viols (et même d'autres personnes qui n'ont rien à voir) en renversant le procès comme si c'était le procès de la victime ! Comme si le fait de faire du naturisme ou d'être plus ou moins audacieuse sur le plan moral justifierait le fait d'être violée ! Ce type de dénigrement de la victime est absolument abject et dans tous les cas, un viol reste un viol, quelle que soit la victime, quels que fussent ses faits et gestes avant, pendant, après le viol.

    De quoi mettre en colère la victime qui a protesté : « Les 50 [accusés] derrière ne se sont pas posés la question [du consentement]. C'est quoi, ces hommes, c'est des dégénérés ou quoi ? Pas à un moment ils se sont posé la question ! ». Le pire, c'est que la version de certains coaccusés ne serait peut-être pas incompatible avec la vérité, ce sera aux jurés d'en déterminer les exactes limites. En effet, certains coaccusés ont prétendu ne pas savoir qu'il n'y avait pas consentement de la part de Gisèle. Le mari leur aurait fourni le scénario précis de ces "jeux sexuels" et ils devaient trouver Gisèle endormie, comme si elle simulait un endormissement. Toutefois, comme ils ne se connaissaient pas, c'est difficile d'admettre que ces "libertins" n'ont pas cherché à savoir si madame Pélicot était réellement consentante, quels que soient les manipulations ou mensonges de son mari.

    Cette réécriture de l'histoire, ce relativisme d'oser dire qu'il y avait « viol et viol », sous prétexte que le violeur n'aurait pas eu conscience de violer, a profondément heurté Gisèle Pélicot : « Quand on voit une femme endormie sur leur lit, il n'y a pas un moment où on s'interroge ? Il n'y a pas quelque chose qui cloche ? (…) Un viol est un viol. Que ça soit trois minutes ou une heure. C'est absolument abject ! ».

    Un des coaccusés n'aurait pas violé Gisèle mais aurait obtenu de son mari le médicament incriminé pour endormir sa propre femme et la violer plusieurs fois. Son avocat a déclaré : « Mon client est le produit de la perversion de Pélicot. Je suis intimement persuadé que si X ne rencontre pas Pélicot, il ne se passe rien. ». On voit le niveau de glauque et de dégueulasserie qui va faire surface, avec plusieurs victimes qui ne se savaient pas victimes.

    Jouer au faux candide d'un côté, attaquer la victime de l'autre. Ce genre de défense risque fortement d'agacer les jurés qui devront pourtant tenter la neutralité, évacuer toute pression médiatique ou populaire, pour juger en leur âme et conscience sur les faits établis, les seuls faits établis. Mais sans préjuger du niveau de culpabilité, du niveau d'ignorance ou de connaissance, de complicité avec le mari, on peut quand même dire que tous ces coaccusés étaient avant tout de gros dégueulasses. Cela n'en fait pas une raison seule de les condamner, mais le contexte donne une tournure particulièrement grave de leurs dégueulasseries.

    Ce procès ne doit donc pas éveiller le combat des féministes contre les méchants hommes. Il est avant tout le combat de toute l'humanité contre les violences faites aux femmes, parmi lesquelles la manipulation et le mensonge sont des moteurs particulièrement efficaces.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (21 septembre 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Viols de Mazan : quelques réflexions sur Pélicot et compagnie...
    Violence scolaire : quand une enseignante s'y met...
    Création du délit d'homicide routier : seulement cosmétique ?
    La France criminelle ?
    La nuit bleue de Lina.
    La nuit de Célya.
    La nuit d'Émile Soleil.
    Affaire Grégory : la vérité sans la boue ?
    Alexandra Sonac et sa fille adolescente.
    Harcèlement scolaire et refus d'obtempérer.
    Alisha, victime d’un engrenage infernal.
    À propos de la tragique disparition de Karine Esquivillon...
    Meurtre de Lola.
    Nos enseignants sont des héros.
    La sécurité des personnes face aux dangers.

     

     
     



    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240921-pelicot.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/societe/article/viols-de-mazan-quelques-reflexions-256863

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/09/22/article-sr-20240921-pelicot.html




     

  • La France criminelle ?

    « La France a tué mon mari ! » (la veuve du gendarme Éric Comyn tué par un chauffard multirécidiviste, le 28 août 2024 à Mandelieu).



     

     
     


    Le lundi 26 août 2024 vers 20 heures 30, l'adjudant Éric Comyn a été mortellement blessé par un chauffard au cours d'un contrôle routier à Mougins, dans les Alpes-Maritimes, sur une bretelle de sortie de l'autoroute A8.

    Tristesse. C'est d'abord un immense drame humain. Le gendarme avait 54 ans, allait prendre sa retraite l'année prochaine, et laisse sur le carreau une famille effondrée, sa femme Harmonie et ses deux enfants, 17 ans et 12 ans. Colère. C'est ensuite une interrogation très lourde : l'auteur de l'homicide (du meurtre) était un chauffard multirécidiviste bien connu des services de la police. La justice avait fait son travail, le chauffard avait été condamné et avait fait ses peines.

    Malheureusement, ce genre de drame n'est pas le premier et on craint qu'il ne soit pas le dernier. Les refus d'obtempérer sont nombreux sur les routes de France (plusieurs dizaines de milliers par an) et l'issue reste souvent soit l'impunité, soit la victoire de la loi, mais parfois, il y a des drames, soit un membre des forces de l'ordre qui tire sur le fugitif, soit, au contraire, le délinquant qui fonce sur le membre des forces de l'ordre. L'un pouvant provoquer l'autre, d'ailleurs.

     

     
     


    Comme souvent, certains mouvements politiques tentent d'exploiter ce genre de drame humain et le font plus ou moins subtilement. En revanche, ce qui s'est passé deux jours plus tard, le mercredi 28 août 2024, à l'occasion d'un hommage rendu à Éric Comyn à Mandelieu, était assez exceptionnel. En effet, la veuve du gendarme, Harmonie Comyn a pris la parole en public, au cours ce cette cérémonie, et a chargé lourdement la France, la politique française depuis plus d'une quarantaine d'années, en fustigeant le laxisme des lois et des juges.

    Ses mots étaient très durs. Elle a répété cinq fois : « La France a tué mon mari ! », pour, chaque fois, évoquer une raison de son affirmation. Par exemple : « La France a tué mon mari par son insuffisance, son laxisme et son excès de tolérance. ». Les mots durs étaient très politiques mais apparemment pas téléphonés, pas manipulés, pas soufflés par des politiques. Elle a remis en cause la politique des socialistes des années 1980 : « 1981 n'aurait jamais dû exister. » a-t-il proclamé en pensant à l'abolition de la peine de mort. Dans la même journée, le maire de Cannes David Lisnard, potentiel candidat LR à Matignon, a également prononcé un discours assez dur et sécuritaire lors d'un autre hommage au gendarme devant la mairie de Cannes. Un hommage national lui sera aussi rendu lundi 2 septembre 2024 à Nice présidé par le Ministre de l'Intérieur et des Outre-mer démissionnaire Gérald Darmanin.

    Comment réagir face à un tel discours de la veuve d'une victime terrible du refus d'obtempérer ? Les partis d'extrême droite et de droite dure n'ont pas hésité : ils se sont engouffrés dans la brèche ouverte par cette femme en y allant avec leur populisme sécuritaire habituel dont c'est le fonds de commerce habituel. C'était prévisible et ils n'avaient du reste pas besoin de ce discours pour instrumentaliser cette tragédie comme tant d'autres (et c'est aussi l'effet de cumul qui donne aussi à penser qu'ils auraient raison alors que rien n'est simple).


    À gauche, ce n'est guère mieux, et j'aurais envie de penser que c'est même pire. Dans les réseaux sociaux, Harmonie a été insultée par de nombreux internautes de gauche ultra qui n'ont aucun respect pour la peine infinie qu'on lui a déjà infligée par ce deuil. On ménage les personnes endeuillées, en général. La palme du plus odieux doit sans doute être attribuée au journal communiste "L'Humanité" qui a eu l'horreur de titrer : « 203e morts au travail en France depuis le 1er janvier ». Quel cynisme de la rédaction communiste ! Il ne s'agit pas d'un accident du travail, il s'agit d'un crime commis en toute conscience par un chauffard de 39 ans condamné déjà dix fois !

     
     


    Ce dernier a été arrêté le soir même devant le commissariat de Cannes, testé positif pour son alcoolémie, et a prétendu qu'il avait fui par panique, qu'il n'avait pas vu le gendarme quand il l'a renversé, mais des vidéos montreraient le contraire. La justice devra dire si cet homicide a été commis délibérément, auquel cas il s'agit d'un véritable meurtre, ou si, effectivement, il n'avait pas aperçu le gendarme et qu'il l'a malheureusement heurté. Dans tous les cas, ce n'est pas un accident du travail, dû à pas d'chance ou à de mauvaises protections, mais bien d'un meurtre plus ou moins conscient par son auteur présumé.

    Le journaliste Patrick Cohen, dans sa chronique politique du 29 août 2024, s'est posé la question que je me suis aussi posée en écoutant le discours véhément d'Harmonie Comyn : que peut-on faire d'un tel discours ? Moi, j'aurais modestement tendance à dire : pas l'opposer à des arguments, mais prendre en compte sa a rage, comprendre sa rage. Ce discours ne doit pas être blâmé. Parce qu'il a été prononcé par une femme qui a perdu à la fois son compagnon et le père de ses enfants. On doit la respecter. Elle a exprimé sa colère en même temps que sa tristesse. Elle reste dans l'émotionnel et ils sont rares, les proches des victimes, capables de s'exprimer publiquement. Je le dis suffisamment à l'aise que moi-même qui voulais prononcer quelques mots à l'enterrement de mon père, j'en ai été incapable sur le moment, la voix m'avait manqué. Il faut du courage et de la force pour prononcer un discours lorsqu'on est si endeuillé.

    Ce qu'a convenu en tout cas l'éditorialiste de France Inter, c'est que toute réponse rationnelle est inutile. Inutile pour la personne qui a prononcé ces mots à la fois durs et injustes. Inutile car aucune réponse n'est audible quand on est dans un tel chagrin, meurtri par l'effondrement d'une vie commune qui a duré une trentaine d'années.


    Harmonie Comyn a formulé deux demandes au cours de son discours : que les médias ne se méprennent pas de ce qu'elle a déclaré, par exemple, elle a fustigé les récidivistes, pas les étrangers. La seconde demande, c'est qu'elle ne soit pas récupérée par les politiques (mais là, c'était déjà trop tard, l'extrême droite et les médias qui l'entourent n'ont pas hésité une seconde pour matraquer, c'était de toute façon couru d'avance).

    Patrick Cohen le dit clairement : « En pleurant son mari mort par la France, par la faute selon elle d’une société pas assez répressive, Harmonie Comyn nous interpelle, décideurs et citoyens, et nous force à réfléchir. Il ne faut ni silence, ni démagogie. ». Il croit alors utile de répondre par un discours rationnel, qui ne sera pas audible par la famille, mais par ceux qui ont entendu le discours injuste et excessif de cette veuve et mère de famille désespérée.
     

     
     


    Ainsi, le rétablissement de la peine de mort n'aurait pas empêché concrètement la mort du gendarme, car le chauffard, aussi délinquant fût-il, n'avait pas de quoi être condamné à mort même dans une société ultrapunitive, ultrarépressive. De plus, la peine de mort n'a jamais empêché les crimes d'être commis car les criminels sont dans un état second (une courte folie ?) qui les inhibe complètement de ces préventions sociales.

    La vengeance et la peine de mort n'ont jamais eu de valeur dissuasive. Patrick Cohen s'est souvenu d'une lecture qui l'avait marqué : « Arthur Koestler racontait comment, dans l’Angleterre du XVIIIe siècle qui condamnait à mort les voleurs de biens de plus de 40 shillings, les badauds qui assistaient aux pendaisons de pickpockets, se faisaient détrousser. Par d’autres pickpockets. ». C'est la même histoire cyclique que le bourreau qui se fait exécuter (selon Franquin).

    La meilleure réponse à apporter est peut-être celle d'une victime d'un délit routier qui est membre de l'association Victimes Solidaires et qui veut sensibiliser les gens sur les risques qu'ils encourent à conduire n'importe comment (par exemple, en téléphonant, en étant imbibé d'alcool ou d'autres substances, etc.). Il réclame le droit d'assister voire de proposer des exposés aux stagiaires de la formation pour la récupération de points du permis de conduire. Ce qu'il constate, c'est que souvent, les présumés chauffards ne savaient pas qu'ils se mettaient autant en danger et qu'ils mettaient les autres usagers de la route autant en danger.


    Ce militant associatif parlait sur LCI du scandale des accidents de la route qui tuent encore environ 10 personnes par jour en France. Éric Comyn, gendarme, ne faisait que vouloir faire appliquer le code de la route. Il en est mort par un fou furieux de chauffard. J'espère que les juges seront sévères avec celui-ci, mais dans le cadre de nos lois et notre État de droit (le chauffard a le droit à une défense). Pas dans le cadre d'une justice expéditive proposée par feu Alain Delon.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (31 août 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Création du délit d'homicide routier : seulement cosmétique ?
    La France criminelle ?
    La nuit bleue de Lina.
    La nuit de Célya.
    La nuit d'Émile Soleil.
    Affaire Grégory : la vérité sans la boue ?
    Alexandra Sonac et sa fille adolescente.
    Harcèlement scolaire et refus d'obtempérer.
    Alisha, victime d’un engrenage infernal.
    À propos de la tragique disparition de Karine Esquivillon...
    Meurtre de Lola.
    Nos enseignants sont des héros.
    La sécurité des personnes face aux dangers.


     

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240828-comyn.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/citoyennete/article/la-france-criminelle-256542

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/08/30/article-sr-20240828-comyn.html


     

  • Bill Clinton le vieillard pas encore tout à fait vieux

    « Kamala Harris est la seule candidate à cette course qui a la vision, l'expérience, le tempérament, la volonté et, oui, la joie pure pour faire quelque chose. (…) Lorsque Kamala Harris sera Présidente, chaque jour commencera par vous, vous, vous, vous ! » (Bill Clinton, le 21 août 2024 à Chicago).



     

     
     


    La Convention nationale démocrate de Chicago s'est terminée en apothéose le 22 août 2024 avec le discours de la candidate et Vice-Présidente Kamala Harris qui a présenté son programme présidentiel. Elle a mangé son pain blanc dans cette campagne qui a démarré très fort et qui est très courte, mais il lui faudra tenir encore trois mois face aux républicains et aux partisans de Donald Trump un peu troublés dans leurs arguments de campagne.

    Dans les États clefs, les sondages restent incertains, les scores très serrés, et le ralliement de Robert J. Kennedy au trumpisme fera probablement peu évoluer les sondages. Kamala Harris devra se montrer combative face à Donald Trump dans le premier débat télévisé prévu le 10 septembre 2024, et surtout, elle devra être performante dans les interviews des grandes émissions politiques à la télévision, passages toujours éprouvants car les journalistes américains n'ont rien à voir avec les journalistes français souvent allégeants et ignorants qui ne font pas leur travail.

    La Convention démocrate a été surtout l'occasion d'unifier les démocrates autour d'un projet commun, défendre les classes moyennes, et ainsi, quitter la trop grande tendance du parti démocrate depuis une décennie de n'être qu'un syndicat des nombreuses minorités dont les intérêts ne représentent pas forcément l'intérêt général. En particulier, deux anciens Présidents des États-Unis ont mouillé la chemise pour soutenir Kamala Harris. Après celui de Barack Obama, je propose ici de revenir sur le grand discours de Bill Clinton prononcé le 21 août 2024 à l'United Center de Chicago. Sa femme Hillary Clinton avait déjà prononcé le sien le 19 août 2024, en ouverture de la Convention.
     

     
     


    Bill Clinton a trois caractéristiques personnelles intéressantes dans cette campagne. Le premier point est que son épouse Hillary Clinton a tenté de conquérir en 2016 la Maison-Blanche et elle était même la favorite face à Donald Trump, et en ce sens, elle a été la première femme à s'approcher de très près de la Présidence. Elle n'y est pas arrivée, bien qu'elle ait rassemblé plus de voix que Donald Trump (c'est le système fédéral américain qui veut cela et personne ne l'a remis en cause), mais l'idée qu'une femme puisse occuper la Maison-Blanche est désormais banale et ne constitue aujourd'hui ni un atout ni un handicap. De même, la couleur de la peau, caractéristique bien dérisoire quand on postule à une fonction aussi puissante que Président des États-Unis, n'est plus un facteur essentiel. Kamala Harris est d'ailleurs peu représentative de la population afro-américaine car elle est un savant mélange d'ethnies (encore plus que Barack Obama) puisqu'elle est originaire à la fois d'Inde, de Jamaïque et est avant tout américaine. Peut-être un candidat d'origine hispanique serait plus original dans ce genre de course électorale.

    Le deuxième point est qu'en tant qu'ancien Président démocrate, Bill Clinton a bien sûr son importance pour faire converger toutes les forces de ce parti derrière sa candidate. Quand on regarde en arrière, il ne reste plus beaucoup d'anciens Présidents des États-Unis encore en vie. Trois démocrates : Jimmy Carter (bientôt centenaire, dans un mois !), Bill Clinton et Barack Obama ; deux républicains : George W. Bush (fils) et Donald Trump (qui sollicite un nouveau mandat) ; reste aussi Joe Biden, démocrate, qui, dans tous les cas, finit son mandat le 20 janvier 2025.

    Enfin, Bill Clinton a un point commun avec son redoutable adversaire (Donald Trump) : ils ont le même âge. En effet, Bill Clinton venait d'avoir (l'avant-veille) 78 ans quand il a pris la parole à Chicago. Ses rides, sa allure un peu fatiguée alors qu'il était il y a trente ans le jeune Président aux allures de John Kennedy, sont patentes, même si de loin, on devine encore une silhouette de jeune homme ! Et non sans humour, il a déclaré : « Passons maintenant à l'essentiel. Je suis trop vieux pour "dorer le lys" [pour dorer la pilule, pour enjoliver]. Il y a deux jours, j'ai eu 78 ans. L'homme le plus âgé de ma famille depuis quatre générations. Et la seule vanité personnelle que je peux affirmer est que je suis encore plus jeune que Donald Trump ! (…) Nous avons une élection à gagner et rappelez-vous que nous avons un gars qui est plutôt doué. Ce qu'il fait, Donald Trump, est un modèle de cohérence. Il divise toujours. Il continue de râler. Il continue de rabaisser les autres. Il crée le chaos et ensuite, il l'organise comme s'il s'agissait d'un art précieux. Laissez-moi vous dire qu'il ne se passe pas un jour, même si je ne suis plus à la Maison-Blanche depuis plus de vingt-trois ans, il ne se passe pas un jour sans que je ne remercie le Seigneur pour la chance que j'ai eu de servir et pour ce que cela signifiait. Et une des raisons pour lesquelles j'aime tant ce travail, est que, dans les moments les plus difficiles, même dans les jours les plus sombres, si vous faites suffisamment d'efforts, vous pouvez toujours faire quelque chose de bien pour quelqu'un d'autre. Certains jours, ce n'est pas facile à faire. ».

     

     
     


    Mais ce petit témoignage personnel avait une finalité, pointer du doigt Donald Trump : « Lui, surtout, parle de lui-même. Alors, la prochaine que vous l'entendez, ne comptez pas les mensonges, comptez le nombre d'yeux ! En bonne santé, hein ? Ses vengeances, ses plaintes, ses complots. Il est comme un de ces ténors. Ouverture. Avant qu'il ne monte sur scène comme je l'ai fait (…), ses poumons s'ouvrent en chantant moi, moi, moi, moi, moi ! ». D'où le « vous vous vous vous » de sa concurrente démocrate !

    Passage obligé, l'hommage à Joe Biden : « Je veux dire un mot sur le Président Biden. Rappelez-vous qu'il y a eu une situation improbable qui l'a fait Président. Et nous étions au milieu d'une pandémie et d'un krach économique. Il a guéri nos malades et nous a remis au travail. Il a renforcé nos alliances. Avec l'Ukraine, il a défendu la paix et la sécurité. Il tente désespérément d'obtenir un cessez-le-feu au Moyen-Orient. ».
     

     
     


    Et de souligner un véritable courage personnel : « Et puis, il a fait quelque qui est vraiment difficile à faire pour un responsable politique. Il a volontairement renoncé au pouvoir politique. Et George Washington le savait, et il l'a fait. Et il a établi la norme de deux mandats avant que cela ne devienne obligatoire. Cela a aidé sa postérité. Et cela renforcera la postérité de Joe Biden. Et c'est un contraste saisissant à ce qui se passe dans l'autre parti. Je tiens donc à le remercier. Pour son courage, sa compassion. C'est la classe, son service, son sacrifice. Il a gardé la foi et il a contaminé beaucoup d'entre nous. ».

    Bien sûr, l'heure était au soutien du ticket Harris-Walz : « Hier soir, dans ce que je pense être une série d'épisodes très émouvants, nous avons nommé [candidats] Kamala Harris et Tim Walz. Et pensez-y. Deux leaders aux vies toutes américaines mais quand même improbables. Cela ne peut arriver qu'ici. Après tout, leur carrière a commencé dans les salles d'audiences et les salles de classe communautaires. Deux dirigeants qui ont passé leur vie à faire du bon travail. Alors, c'est une des choses que j'ai remarquées au cours de ma vie de plus en plus longue, c'est une élection qui est unique pour plusieurs raisons. Tout d'abord, c'est le meilleur entretien d'embauche pour le plus beau poste du monde. Deuxièmement, la Constitution dit que nous, le peuple, faisons le recrutement. Et la troisième chose est que tous les quatre ans, nous pouvons modifier les exigences du poste. Voici donc ce que je pense parce que j'essaie d'appliquer cela à chaque élection. Ce Président va-t-il nous faire reculer ou avancer ? Ce Président donnera-t-il à nos enfants un avenir meilleur ? Cela dépend. Ce Président va-t-il nous rassembler ou nous déchirer ? Ce Président augmentera-t-il la paix, la sécurité et la stabilité ? Et la liberté, dont nous profitons et l'étendons aux autres autant que nous le pouvons ? Nous, le peuple, devons prendre une décision à propos de ce genre de question. Et tous les quatre ans, c'est un peu différent parce que ce sont les gens qui présentent les candidats. Et vont voir les candidats et ils disent, comme ils le disent maintenant. Voici nos problèmes, résolvez-les ! Voici nos chances, saisissez-les ! Voici nos craintes, réduisez-les ! Voici nos rêves, aidez-nous à les réaliser ! Un Président peut répondre à cet appel en disant. Je ferai ma part, mais tu dois m'aider. Nous devons travailler ensemble. Ou vous pouvez éviter ce qui doit être fait en nous divisant, en nous distrayant et en nous dispersant. Donc, en 2024, nous avons un choix assez clair, il me semble. Kamala Harris pour le peuple et l'autre gars qui a prouvé, encore plus que la première fois, qui parle de moi, de moi-même et de moi-même ! Je sais lequel je préfère pour notre pays. Kamala Harris travaillera à résoudre nos problèmes, saisir nos chances, apaiser nos peurs, et assurer que chaque Américain, quelle que soit la manière dont il vote, ait une chance de poursuivre ses rêves. Vous savez, quand elle était jeune, elle travaillait chez MacDonald, et elle a salué chaque personne avec ce sourire mille fois radieux : comment puis-je vous aider ? Maintenant, elle est au sommet du pouvoir et elle demande toujours : comment puis-je vous aider ? Je serai si heureux quand elle entrera effectivement à la Maison-Blanche en tant que Présidente. Parce qu'elle battra mon record de Président ayant passé le plus de temps chez MacDonald ! ».
     

     
     


    Bill Clinton a rappelé aussi que la politique économique des démocrates a toujours été un succès depuis une trentaine d'années : « Depuis la fin de la guerre froide en 1989, l'Amérique a créé environ 51 millions de nouveaux emplois. Je vous jure que j'ai vérifié ça trois fois ; même moi, je n'arrivais pas à y croire ! Quel est le score ? Les démocrate en ont gagné cinquante contre un les républicains. ». Longs applaudissements. Il est loin le temps où les républicains, du temps de Ronald Reagan, écrasaient idéologiquement les démocrates.

    Les grands-messes que sont les conventions électorales aux États-Unis sont souvent l'occasion de revoir des anciens dirigeants sortis de leur retraite pour soutenir activement leur nouveau champion. Cette année, ce sera une championne, et elle tend à devenir la favorite. Kamala Harris est la nouvelle mode du pays, il ne dépend que d'elle qu'elle soit la nouvelle Présidente.



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (24 août 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Bill Clinton.
    Vera Miles.
    Les Yes-She-Can de Barack Obama !
    Kamala Harris sera-t-elle la première femme Présidente des États-Unis ?
    USA 2024 : Joe Biden se retire et soutient Kamala Harris !
    Donald Trump victime d'une tentative d'assassinat.
    Les 80 ans du Débarquement en Normandie.
    Ronald Reagan.
    Triste Trump (hic) !
    Paul Auster.
    Standard & Poor's.
    Moody's et Fitch.
    Les 75 ans de l'OTAN.
    Lee Marvin.
    Les 20 ans de Facebook.
    Bernard Madoff.
    La crise financière mondiale de 2008.

    La boîte quantique.
    Maria Callas.
    Henry Kissinger.
    Alexander Haig.
    Katalin Kariko et Drew Weissman.
    Rosalynn Carter.
    Walter Mondale.
    Marathonman.
    Bob Kennedy.







    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240821-bill-clinton.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/international/article/bill-clinton-le-vieillard-pas-256443

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/08/22/article-sr-20240821-bill-clinton.html



     

  • Les Yes-She-Can de Barack Obama !

    « Nous avons la chance d'élire quelqu'un qui a passé sa vie à essayer de donner aux gens les mêmes chances que l'Amérique lui a données, quelqu'un qui vous voit et qui vous entend, et qui se lèvera et se battra chaque jour pour vous, la prochaine Présidente des États-Unis, Kamala Harris ! » (Barack Obama, le 20 août 2024 à Chicago).



     

     
     


    Depuis un mois, depuis le 21 juillet 2024, il existe aux États-Unis une véritable kamalamania. Depuis l'abandon de la candidature du Président Joe Biden (81 ans), la campagne présidentielle aux États-Unis (les élections auront lieu le 5 novembre 2024) a pris un véritable nouveau cours. Jusque-là, Donald Trump (78 ans) était en tête des sondages d'intentions de vote parce qu'il bénéficiait de l'âge et des gaffes de son adversaire déclaré, Joe Biden. L'attentat du 13 juillet 2024 qui a manqué de très peu de l'atteindre a renforcé son avance dans les sondages, quoi que, finalement, il n'y a pas eu vraiment de variation dans l'opinion publique américaine, seulement des arguments de campagne en plus pour les trumpistes : difficile de menacer la démocratie quand on est soi-même victime d'un attentat.

    Et puis est arrivée Kamala Harris (59 ans), ancienne procureure générale de Californie (2011-2017) puis sénatrice (2017-2021), et surtout, actuelle Vice-Présidente des États-Unis depuis le 20 janvier 2021, et en particulier, la première femme à ce poste très important. Dans l'ombre de Joe Biden, elle n'avait pas vraiment ébloui le peuple américain et le dossier chaud que le Président lui a sournoisement confié, l'immigration, n'a pas été vraiment traité de manière convaincante (c'est le moins qu'on puisse dire), mais sa candidature, évidente, après le désistement de Joe Biden, a fait monter une sauce médiatique qui a fait jusqu'à oublier l'attentat contre Donald Trump : la vague qui porte aujourd'hui Kamala Harris est très forte même si elle reste fragile.

    Dès le 23 juillet 2024, Kamala Harris a annoncé avoir le soutien de la majorité des délégués du parti démocrate, officiellement confirmé par le parti démocrate lui-même le 2 août 2024. Donc, aucun suspense dans cette course interne. Quelques jours plus tard, le 6 août 2024 à Philadelphie, Kamala Harris a annoncé qu'elle a choisi pour colistier (candidat à la Vice-Présidence) son contraire, Tim Walz (60 ans), gouverneur du Minnesota depuis 2019, ancien député (membre de la Chambre des représentants) de 2007 à 2019, ancien professeur de géographie et membre de la Garde nationale.


    La grande fête d'investiture a lieu en ce moment, au cours de la Convention nationale démocrate de Chicago qui se déroule du 19 au 22 août 2024 à l'United Center, dans la banlieue ouest de Chicago. Comme prévu, cet événement est l'occasion de parfaire les thèmes de campagne et d'avoir des soutiens essentiels. Le premier soir, le 19 août 2024 a eu lieu le discours du Président Joe Biden, qui a été particulièrement ovationné par les participants, comme si c'était son discours d'adieu. Il faut remarquer que c'est la première fois qu'un candidat à un mois de la Convention renonce à sa candidature et il lui a fallu beaucoup de courage pour déclarer forfait.

    Mais grâce à lui, les choses vont différemment : le vieux candidat, ce n'est plus le candidat démocrate mais le candidat républicain. Il ne s'agit plus de se défendre des bourdes et autres maladresses que l'âge ou simplement la distraction ont provoquées chez Joe Biden, mais d'avoir une campagne offensive pour remobiliser tous les laissés pour compte du parti démocrate.
     

     
     


    La journée du mardi 20 août 2024 était la journée Obama : deux grands discours, d'abord Michelle Obama (60 ans), l'ancienne première dame des États-Unis, puis Barack Obama (63 ans), l'ancien Président des États-Unis (2009-2017).

    Deux discours qui ont été très applaudis par la salle. Michelle Obama a sans doute eu le plus d'ovations, elle semble être très appréciée des militants démocrates, et elle vend même plus de bouquins que son mari. Sa grande popularité, elle la doit aussi parce qu'elle a été très claire : elle n'a aucune intention de faire de la politique (au contraire de l'ancienne première dame Hillary Clinton) et se sent donc complètement libre.

    Quand elle a donné la parole à son époux, Barack Obama a reconnu que ce n'était pas facile de lui succéder à la tribune. Très étrange Barack Obama qui semblait un peu à bout de souffle, fatigué, vieilli, comme si l'exercice du pouvoir l'avait épuisé. Il a pourtant à peu près le même âge que les candidats d'aujourd'hui, et s'il a apporté un soutien fort et total à Kamala Harris, c'était aussi pour se faire pardonner de ses réticences du mois dernier, il voulait une vraie compétition pour la candidature démocrate et ne lui avait pas apporté tout de suite son soutien.

     

     
     


    De son âge, d'ailleurs, il en a plaisanté : « Cela fait seize ans que j'ai eu l'honneur d'accepter la nomination de ce parti à la Présidence, et je sais que c'est difficile à croire parce que je n'ai pas vieilli du tout, mais c'est vrai ! Et avec le recul, je peux vous dire sans aucun doute que ma première grande décision en tant que candidat s'est avérée être l'une de mes meilleures, et c'était de demander à Joe Biden de servir à mes côtés en tant que Vice-Président. ».

    Dans la première partie de son discours, Barack Obama a ainsi rendu hommage à Joe Biden avec qui il a travaillé huit ans à la Maison-Blanche : « Ce que j'en suis venu à admirer le plus chez Joe, ce n'était pas juste son intelligence, son expérience, c'était son empathie, sa décence et sa résilience durement gagnée, sa conviction inébranlable que tout le monde dans ce pays mérite une chance équitable. ».

    Il a poursuivi ainsi : « À une époque où l'autre parti [républicain] était devenu un culte de la personnalité, nous avions besoin d'un leader stable, qui rassemble les gens et qui soit suffisamment altruiste pour faire la chose la plus rare en politique, mettant son ambition de côté pour le bien du pays. L'histoire se souviendra de Joe Biden comme d'un Président exceptionnel qui a défendu la démocratie à un moment de grand danger, et je suis fier de l'appeler mon Président mais je suis encore plus fier de l'appeler mon ami ! ».

    Barack Obama a mis en garde sur le fait que l'élection serait très serrée et que les démocrates devraient mettre toute leur énergie dans cette bataille, car le pays est très divisé, « un pays où trop d'Américains sont encore en difficulté, où beaucoup d'Américains ne croient pas que le gouvernement puisse les aider ». Ajoutant : « Les gens qui décideront de cette élection posent une question très simple : qui se battra pour moi ? qui pensera à mon avenir, à l'avenir de mes enfants, à notre avenir tout ensemble ? ».

    Et d'embrayer contre Donald Trump : « Une chose est sûre, c'est que Donald Trump ne perd pas le sommeil à cause de cette question. Voici un milliardaire de 78 ans qui n'a pas arrêté de se plaindre de ses problèmes depuis qu'il est descendu de son grand escalator il y a neuf ans [Donald Trump a annoncé sa candidature le 16 juin 2015 en descendant de l'escalator d'honneur de la Trump Tower]. Il y a eu un flux constant de plaintes et de griefs qui ont en fait empiré maintenant qu'il a peur de perdre contre Kam. Il y a les surnoms enfantins, les théories du complot folles, cette obsession étrange avec la taille de la foule (assistant à ses meetings) ! » en mimant avec ses mains la taille petite implicitement du sexe de son adversaire. Les discours électoraux aux États-Unis, même prononcés par des intellos, sont toujours du registre de la cour de récréation... Du moins, les plus efficaces.
     

     
     


    Il a continué : « La vérité est que Donald Trump ne voit le pouvoir que comme un moyen d'atteindre ses objectifs. Il veut que la classe moyenne paie le prix d'une nouvelle énorme réduction d'impôts qui l'aiderait principalement lui, et ses riches amis. Il a tué un accord bipartisan sur l'immigration rédigé en partie par les républicains les plus conservateurs du Congrès qui aurait contribué à sécuriser notre Mur du Sud, parce qu'il pensait qu'essayer de résoudre réellement le problème nuirait à sa campagne. (…) Et surtout, Donald Trump veut nous faire croire que ce pays est désespérément divisé entre "nous" et "eux", entre les vrais Américains, ceux qui le soutiennent bien sûr, et les étrangers qui ne le soutiennent pas. Et il veut que vous pensiez que vous serez plus riche et plus en sécurité si vous lui donnez simplement le pouvoir de remettre ces autres personnes à leur place. C'est l'un des plus vieux trucs en politique (…). Nous n'avons pas besoin de quatre années supplémentaires de fanfaronnades, de maladresses et de chaos. Nous avons déjà vu ce film et nous savons tous que la suite est généralement pire. ».

    Est arrivée enfin la partie sur Kamala Harris : « L'Amérique est prête pour un nouveau chapitre. L'Amérique est prête pour une meilleure histoire. Nous sommes prêts pour la Présidente Kamala Harris, et Kamala Harris est prête pour le job ! (…) Kamala n'est pas née dans un privilège, elle a dû travailler pour ce qu'elle est et elle se soucie vraiment de ce que les autres vivent. (…) Kamala Harris ne se concentrera pas sur ses problèmes, elle se concentrera sur les vôtres. ».

    Il a balayé beaucoup de sujets de préoccupation comme le logement : « Nous devons tracer une nouvelle voie pour relever les défis d'aujourd'hui, et Kamala comprend cela, elle sait par exemple que si nous voulons rendre les choses plus faciles pour que plus de jeunes puissent acheter une maison, nous devons construire plus d'unités et éliminer certaines des lois et réglementations obsolètes qui rendent plus difficile la construction de logements pour les travailleurs dans ce pays. Ceci est une priorité et elle a présenté un nouveau plan audacieux. ». Il a aussi affirmé que les travailleurs des emplois ingrats devraient négocier avec Kamala Harris des salaires plus décents, les aide-soignantes, les balayeurs de rues, etc.
     

     
     


    « Yes, she can ! » [Oui, elle peut le faire !]. Reprenant son ancien slogan très porteur (Yes We Can), Barack Obama a placé la candidature de Kamala Harris dans la continuité de la sienne en 2008. « Kamala et Tim [Walz] comprennent que lorsque tout le monde a une chance équitable, nous sommes tous mieux lotis. Ils comprennent que lorsque chaque enfant reçoit une bonne éducation, l'économie entière devient plus forte. Lorsque les femmes sont payées le même salaire que les hommes pour faire le même travail, toutes les familles en bénéficient. Ils comprennent que nous pouvons sécuriser nos frontières sans arracher les enfants à leurs parents, tout comme nous pouvons assurer la sécurité dans nos rues tout en renforçant la confiance entre les forces de l'ordre et les communautés qu'elles servent et tout en éliminant les préjugés, ce qui améliorera la situation pour tout le monde. (…) L'Amérique à laquelle croient Kamala Harris et Tim Walz, est une Amérique où nous, le peuple, incluons tout le monde, parce que c'est la seule voie pour cette expérience américaine. ».

    Barack Obama a donc beaucoup parlé de classes populaires et de classes moyennes, celles qui avait été convaincues par Donald Trump en novembre 2016. Car pour lui, il ne faut pas que la kamalamania soit juste le phénomène d'une élite boboïsante, mais bien celui de tout un peuple. Il faut donc s'adresser aux "petites gens" que représente bien Tim Walz simple prof de géo, dont les vêtements, selon Barack Obama, ne sont pas le résultat de conseillers en communication mais viennent simplement de son placard !

    Barack Obama a aussi opposé la liberté des gros industriels à polluer l'air et à infester les rivières à la liberté des gens à respirer de l'air pur et à boire de l'eau propre, qu'il a considérée comme une liberté encore plus importante. En somme, la liberté des gros face à la liberté des petits.

    Et l'ancien Président a beaucoup insisté pour faire une démocratie très vivante, faite d'égalité et de liberté : « La démocratie n'est pas seulement un tas de principes abstraits et de lois poussiéreuses dans un livre quelque part, ce sont les valeurs avec lesquelles nous vivons, la façon dont nous nous traitons les uns les autres, y compris ceux qui ne nous ressemblent pas, ne prient pas comme nous, et ne voient pas le monde comme nous. Ce sentiment de respect mutuel doit faire partie de notre message. Nos politiques sont devenues tellement polarisées ces jours-ci que nous tous, quel que soit le spectre politique, semblons si rapides à supposer le pire chez les autres, à moins qu'ils ne soient d'accord avec nous sur chaque question, nous commençons à penser que la seule façon de gagner est de blâmer, de faire honte et de crier de l'autre côté, et après un certain temps, les gens ordinaires se déconnectent ou ne se soucient plus de voter. ».

    En écoutant ce discours, où l'intelligence et le charisme étaient au rendez-vous, on se surprend à penser que les États-Unis, ce ne sont pas seulement des cow-boys qui réagissent un peu simplement au quart de tour en tirant dans le tas, il y a aussi des gens sophistiqués, qui ont une pensée cohérente (j'allais écrire complexe) et aboutie et surtout, qui développent beaucoup d'empathie.

    Proche de l'aile centriste du parti démocrate, ce qui pourrait séduire les électeurs républicains hésitants pour Donald Trump, Kamala Harris, dont le parcours professionnel et personnel californien est le résultat flamboyant du rêve américain, ce qu'on appellerait en France du mérite républicain, pourrait tomber dans le piège de ne s'adresser qu'aux élites hollywoodiennes et washingtoniennes. Barack Obama lui a rappelé qu'il faut s'adresser avant tout à ceux qui n'ont rien et qui feront la différence le soir du vote, soit par leur participation soit par leur adhésion au camp démocrate. Fort de ce constat d'un pays profondément divisé, l'ancien Président des États-Unis a donné un mode d'emploi pour le vivre ensemble, après le risque Trump.

    Le lendemain, c'était au tour de l'ancien Bill Clinton d'apporter son onction à Kamala Harris.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (21 août 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :

    Kamala Harris sera-t-elle la première femme Présidente des États-Unis ?
    USA 2024 : Joe Biden se retire et soutient Kamala Harris !
    Donald Trump victime d'une tentative d'assassinat.
    Les 80 ans du Débarquement en Normandie.
    Ronald Reagan.
    Triste Trump (hic) !
    Paul Auster.
    Standard & Poor's.
    Moody's et Fitch.
    Les 75 ans de l'OTAN.
    Lee Marvin.
    Les 20 ans de Facebook.
    Bernard Madoff.
    La crise financière mondiale de 2008.

    La boîte quantique.
    Maria Callas.
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    Katalin Kariko et Drew Weissman.
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    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240820-obama.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/international/article/les-yes-she-can-de-barack-obama-256431

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/08/21/article-sr-20240820-obama.html




     

  • La nuit bleue de Lina

    « Ça donne un peu d’espoir pour retrouver une trace. Est-ce qu’elle est vivante ? On l’espère tous... » (un habitant de Plaine, le 27 juillet 2024 sur France Info).


     

     
     


    Lina Delsarte a été, avec Émile Soleil, l'une de des enfants disparus de l'année 2023, en période estivale (ou quasi-estivale). Les deux disparitions étaient très différentes, l'une concernant un petit bout de chou de 2 ans, disparu le 8 juillet 2023, l'autre une adolescente déjà grande de 15 ans, disparue le 23 septembre 2023. Mais elles avaient un point commun.

    Les deux enquêtes étaient telles, dans leur incapacité à privilégier une piste ou l'autre, avec même parfois des fausses pistes, qu'à la fin de l'année 2023, il y avait une quasi-certitude que la disparition de ces deux enfants resterait un mystère complet. Pendant longtemps, les enquêtes ont pédalé dans la semoule, les recherches pourtant très élaborées n'ont abouti à rien, aucun indice, aucune piste sérieuse.

    Lina a disparu sur le chemin entre chez elle et la gare pour prendre le train pour Strasbourg et rejoindre son petit ami de 19 ans, le samedi 23 septembre 2023 en fin de matinée. La dernière géolocalisation de son smartphone a été enregistrée à 11 heures 22, ce qui correspond aussi à l'heure où des témoins l'ont aperçue. C'est le petit ami qui l'attendait à la gare de Strasbourg qui a alerté la mère de Lina de son absence, et les caméras de surveillance n'ont pas vu Lina embarquer dans le train prévu. La gendarmerie a publié un avis de disparition inquiétante dès l'après-midi du samedi. Plusieurs opérations de ratissage ont eu lieu les jours qui ont suivi, sans résultat. Le petit ami a été menacé plusieurs fois par des accusateurs qui le considéraient comme responsable de la disparition.

    Grâce à l'ADN, les enquêtes ont cependant pu avancer d'un bond. Hélas, pas pour de bonnes nouvelles. Le corps d'Émile a été retrouvé dans une forêt, ses ossements, identifiés par une analyse génétique, ont été retrouvés par une randonneuse et, si on ne sait pas ce qui est réellement arrivé au malheureux Émile, on sait, trois fois hélas, qu'il n'est plus de ce monde depuis longtemps.
     

     
     


    Pour Lina, qui a disparu à Plaine, dans le Bas-Rhin, la situation reste encore très mystérieuse même si l'enquête a beaucoup avancé grâce à son ADN, le premier indice de cette enquête, qu'on a retrouvé dans une voiture volée qui se trouvait pas loin de lieu de disparition de l'adolescente le jour de sa disparition et qui a été retrouvée dans le Languedoc-Roussillon fin mai et début juin 2024 (cette information a été communiquée par la justice le 26 juillet 2024). La procureure de Strasbourg a annoncé le 30 juillet 2024 que le véhicule volé incriminé a été saisi et son propriétaire, après avoir été entendu par la police pour le vol de son véhicule, s'est suicidé peu de temps après, le 10 juillet 2024 à Besançon, en laissant une lettre à ses deux enfants disant ses regrets et sa honte, sans évoquer Lina.

    De nouvelles fouilles ont été effectuées du 30 juillet au 2 août 2024, en Alsace et dans les Vosges, sans résultat non plus, malgré la géolocalisation de la voiture dans cette zone au moment de la disparition de Lina (le conducteur y aurait fait un arrêt d'une heure trente).

    Le principal suspect, le propriétaire de la voiture qui aurait transporté Lina le jour de sa disparition, est mort sans avoir indiqué s'il était le responsable de la disparition voire de la mort de Lina et sans avoir indiqué le cas échéant où elle se trouvait, elle ou son corps.

    La presse a évoqué largement le profil chaotique de ce suspect, un quadragénaire qui a eu de lourds antécédents de drogue, de bipolarité, de problèmes psychiques, et aussi de vols, d'enlèvements de jeunes filles, etc. Il était très dépressif et connu de la justice. Ce qui est notable également, c'est que, contrairement à un assassin d'enfants comme Michel Fourniret, dont le visage et la silhouette laissent deviner une personne inquiétante, le suspect n'effrayait pas physiquement, semblait tout à fait normal, sans allure inquiétante, avec du reste un nom et une apparence bien français (je le précise car il est souvent de bon ton de répéter, à tort, que les auteurs de meurtres seraient souvent issus de l'immigration, pour rester soft).

    La justice a communiqué avec parcimonie et retard ces nouveaux éléments de l'enquête, probablement avec un objectif précis. Peut-être envisage-t-elle une autre personne impliquée ? Les chances de revoir Lina sourire à nouveau, bien vivante, se réduisent malheureusement depuis ces nouveaux faits.

    Ce qui est troublant aussi, c'est que deux autres affaires, qui n'ont en principe rien à voir avec sa disparition, ont eu lieu : la mort de son premier petit ami (à 22 ans) le 1er octobre 2023 d'un accident de voiture (il roulait trop vite et a été flashé à 185 kilomètres par heure ; l'enquête a conclu qu'il ne s'agissait pas d'un suicide). En outre, Lina avait déposé plainte en juin 2022 car victime d'un viol en réunion (elle avait 13 ans), plainte initialement classée sans suite mais reprise par l'ouverture d'une information judiciaire en février 2024, là aussi sans rapport avec sa disparition.

    Lina avait obtenu le brevet des collèges en juin 2023 et préparait un CAP Aide à la personne. Elle aurait dû fêter son 16e anniversaire ce samedi 10 août 2024. Un anniversaire de larmes.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (03 août 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    La nuit bleue de Lina.
    La nuit de Célya.
    La nuit d'Émile Soleil.
    Affaire Grégory : la vérité sans la boue ?
    Alexandra Sonac et sa fille adolescente.
    Harcèlement scolaire et refus d'obtempérer.
    Alisha, victime d’un engrenage infernal.
    À propos de la tragique disparition de Karine Esquivillon...
    Meurtre de Lola.
    Nos enseignants sont des héros.
    La sécurité des personnes face aux dangers.


     

     
     





    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240730-lina.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/societe/article/la-nuit-bleue-de-lina-256111

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/07/30/article-sr-20240730-lina.html




     

  • Kamala Harris sera-t-elle la première femme Présidente des États-Unis ?

    « Nous sommes à 107 jours de l'élection. Ensemble, nous nous battrons, ensemble nous gagnerons. (…) Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour unir le parti démocrate, notre nation et battre Donald Trump. » (Kamala Harris, le 21 juillet 2024).




     

     
     


    Le retrait du Président Joe Biden de la course présidentielle ce dimanche 21 juillet 2024 est un événement majeur de cette campagne présidentielle, huit jours après la tentative d'assassinat contre Donald Trump et quelques jours après la désignation triomphale de ce dernier à Milkauwee comme candidat du parti républicain. On a reproché à Joe Biden d'avoir mis une petite demi-heure avant de proposer de soutenir Kamala Harris, l'actuelle Vice-Président des États-Unis. Mais le fait, c'est qu'il la soutient.

    Amusant de voir qu'au lendemain de ce retrait, il existe des journalistes français à passer encore du temps à se demander : pourquoi Joe Biden s'est-il retiré ? La réponse paraît en effet assez évidente, mais cela fait penser aussi à la question que tous les Français (moins un) se posent depuis le 9 juin : pourquoi Emmanuel Macron a-t-il dissous l'Assemblée Nationale ? On pourrait d'ailleurs titrer : Joe Biden s'est auto-dissous ! Ou proposer à Jean-Luc Mélenchon de faire comme Joe Biden, se retirer de la vie politique (après tout, la retraite à 73 ans, ce n'est pas trop tôt) et laisser les générations à venir s'occuper du pays.
     

     
     


    Ce qui est étrange, c'est que dans les récents sondages, réalisés après l'attentat de Butler, Joe Biden n'était pas si loin de Donald Trump en intentions de vote. Ce qui va surtout changer, avec le départ de Joe Biden de la course présidentielle, c'est que l'argument de l'âge va pouvoir être retourné à l'envoyeur en rappelant ainsi que Donald Trump devient le candidat à l'élection présidentielle le plus vieux de l'histoire des États-Unis (Joe Biden était plus jeune que lui en 2020). Certains observateurs affirmaient même que ce serait le parti qui renverrait le premier son candidat âgé qui gagnerait l'élection. Donald Trump sera, lui, bien candidat, rescapé de l'attentat et toujours bien vivant. À la combativité presque insolente.

    Bien sûr, connaître le pourquoi du comment du renoncement est toujours intéressant, mais c'est aux historiens et aux politologues que la question échoie, avec le recul du temps. Dans l'immédiateté de la vie politique, que ce soit pour une campagne législative en France ou une campagne présidentielle aux États-Unis, ces deux actes, provoqués par le Président respectivement des deux nations, ont bouleversé considérablement le cours des événements politiques et la question serait plutôt ce que cela va entraîner.

    Pour le camp des démocrates, assurément, il leur faudra désigner leur nouveau candidat, d'ici à leur Convention à Chicago (du 19 au 22 août 2024), dans le meilleur des cas le plus rapidement possible car il ne reste pas beaucoup de temps avec l'élection du 5 novembre 2024. Joe Biden a annoncé son soutien assez clair à Kamala Harris, ainsi que le couple Bill Clinton et Hillary Clinton, cette dernière adversaire malheureuse de Donald Trump en 2016 : « Nous sommes fiers de nous joindre au Président pour soutenir la Vice-Présidente Harris et nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour la soutenir. ».

    En revanche, Nancy Pelosi, ancienne Présidente de la Chambre des représentants et figure très influente du parti démocrate (bien qu'âgée de 84 ans), n'a pas mentionné le premier jour le nom de la Vice-Présidente et souhaiterait une désignation transparente : « Le Président Joe Biden est un patriote américain qui a toujours donné la priorité à notre pays. Son héritage de vision, de valeurs et de leadership fait de lui l'un des Présidents les plus influents de l'histoire américaine. ». Toutefois, Nancy Pelosi a apporté son soutien à Kamala Harris le lendemain (22 juillet).

    De son côté, l'ancien Président Barack Obama a salué le courage et l'abnégation de Joe Biden, mais sans évoquer sa Vice-Présidente : « Nous allons naviguer dans des eaux inconnues dans les jours à venir. Mais j'ai une confiance extraordinaire dans la capacité des dirigeants de notre parti à créer un processus qui permettra de désigner un candidat exceptionnel. ». Certains murmurent que son épouse Michelle Obama pourrait être intéressée par une candidature, mais au contraire d'Hillary Clinton, qui a été élue sénatrice et qui a eu des fonctions d'État (Secrétaire d'État), Michelle Obama n'a joué aucun rôle officiel à ce jour. D'autres expliquent que Barack Obama souhaite dans le parti démocrate des débats et de la démocratie.

    Avant d'évoquer le parcours de la future candidate ainsi que la polémique que les trumpistes ont voulu créer dès le retrait de Joe Biden, il faut donc rappeler quelques règles du parti démocrate, car on ne désigne pas un candidat à l'élection présidentielle sur le coup d'un claquement de doigts, ou à la lecture des sondages, ou encore dans une obscure salle de comité central.

    Ah, tiens, à propos de comité central, tentons encore le parallèle avec la nouvelle farce populaire (NFP) : depuis seize jours, ces supposés vainqueurs des élections législatives (à cent sièges près !) peinent à choisir un Premier Ministre (la candidate du PS Laurence Tubiana, 74 ans, a renoncé le 22 juillet 2024, après l'abandon d'Huguette Bello le 14 juillet 2024) qu'ils reprochent au Président Macron de ne pas avoir nommé ! Faut-il l'unanimité, comme veulent l'imposer les apparatchiks des insoumis, ou un vote des groupes parlementaires, comme le suggèrent les socialistes qui jouissent d'un avantage numérique au Parlement avec son groupe sénatorial ? L'unanimité semble pourtant nécessaire, car chaque vote à l'Assemblée sera capital. Et dans ce cas, mission impossible.

     

     
     


    Chez les démocrates américains, c'est différent. Au lendemain de l'abandon de Joe Biden, il n'y a pas beaucoup de suspense sur le nom du candidat, de la candidate : Kamala Harris a démarré avec beaucoup d'élan et de dynamisme sa campagne présidentielle. Dès les premières heures, elle a su récolter sur son nom ce que les donateurs hésitaient à donner à un vieillard trop peu dynamique pour vaincre Donald Trump : « À 21h, les sympathisants de la base ont récolté 46,7 millions de dollars via ActBlue après le lancement de la campagne de la Vice-Présidente Kamala Harris. Il s'agit de la journée de collecte de fonds la plus importante du cycle 2024. Les petits donateurs sont motivés et prêts à affronter cette élection. » (selon un tweet de ActBlue du 21 juillet 2024). Au bout de 24 heures, ce sont 81 millions de dollars qui ont été collectés pour la campagne de Kamala Harris. C'est beaucoup. Cela ne réhaussera pas forcément le niveau (très bas) de la campagne, mais cela va rééquilibrer les spots politiques en faveur des démocrates.

    Mais il faut rester dans la forme. Nancy Pelosi et d'autres grands démocrates veulent rester irréprochables sur la désignation de leur candidat, pour défendre les institutions face à un adversaire qui s'assied allègrement sur celles-ci, Congrès, justice, etc. quand cela l'arrange. En principe, le candidat démocrate est désigné à l'issue des primaires du parti démocrate qui se sont déroulées du 23 janvier au 8 juin 2024 et Joe Biden a obtenu 3 905 délégués alors que 1 975 sont suffisants pour être désigné (ce qui correspond à 14,5 millions de voix, soit 87,1%). Les autres candidats aux primaires démocrates étaient Dean Philips avec 4 délégués (3,2% des voix), Jason Palmer 3 délégués (0,1% des voix) et Marianne Williamson 0 délégué (2,9% des voix).

    Le problème, c'est que les délégués qui ont été élus pendant ces primaires ont un mandat impératif (ce qui fait que la démocratie amércaine est complètement différente de la démocratie française). C'est-à-dire que les délégués de Joe Biden ont été élus pour apporter leur suffrage à Joe Biden, à lui seul et à personne d'autre, le 19 août 2024 lors de la Convention. Dès lors que Joe Biden n'est plus candidat, ces délégués retrouvent leur liberté de choix, car il est bien entendu hors de question de redésigner de nouveaux délégués (cela prendrait au moins cinq mois).

     

     
     


    C'est donc le choix personnel de ces 3 949 délégués qui va désigner le candidat démocrate. La question reste toutefois : comment feront-ils connaître leur choix ? Beaucoup souhaitent qu'ils fassent leur choix de manière électronique avant la Convention pour que celle-ci, comme c'est le cas d'habitude, soit le moment festif de lancement de la candidature officielle. D'autres, au contraire, en particulier Nancy Pelosi, voudraient plus de transparence et que le vote intervienne au début de la Convention, le 19 août, ce qui, à mon sens, sera probablement retenu car c'est le moyen le plus transparent.

    Tout cela n'est qu'un problème de forme, car pour le fond, la candidature de Kamala Harris est lancée avec force et dynamisme. Soutenue notamment par six gouverneurs dont l'ancien maire de San Francisco et actuel gouverneur de Californie Gavin Newsom, Kamala Harris aurait déjà gagné la confiance au moins de 1 208 délégués en un jour. Aucun candidat démocrate ne semble en mesure de lui disputer sérieusement la candidature. La vraie question sera quel sera son colistier, forcément un homme, probablement dans un État "partagé" ou "tangent" (un "swing state").

    La polémique créée par les républicains quelques heures après son annonce de retrait, c'est de dire : si Joe Biden n'est plus capable d'être candidat, alors il n'est plus capable d'être Président, il faut qu'il s'en aille. Mais le raisonnement est particulièrement stupide pour les républicains, car si Joe Biden quittait la Maison-Blanche, ce serait Kamala Harris qui deviendrait tout de suite Présidente des États-Unis, la première femme à la Maison-Blanche. Et elle démontrerait alors qu'elle est présidentiable.

    Cela n'a pas empêché les instituts de sondage de sonder le peuple sur ce thème : Joe Biden doit-il quitter la Maison-Blanche ? Dans le sondage publié le 21 juillet 2024 par YouGouv, une large majorité des sondés (56%) souhaiterait que Joe Biden termine son mandat dans tous les cas. Le peuple américain est parfois sage (mais pas toujours).

     
     


    Qui est Kamala Harris ? C'est une femme de presque 60 ans (elle les aura le 20 octobre) qui, par son histoire, fait partie du rêve américain. Fille d'un économiste d'origine jamaïcaine et d'une cancérologue spécialiste du cancer du sein d'origine indienne, elle est devenue avocate au barreau de San Francisco. Ses parents s'étaient rencontrés à l'Université de Californie à Berkeley où chacun préparait un doctorat (l'un en économie, l'autre en médecine). Il se sont quittés quand Kamala avait 7 ans.

    Kamala Harris a fait toute sa carrière en Californie : procureure de San Francisco de 2004 à 2011, puis première femme procureure générale de Californie de 2011 à 2017, elle a acquis une réputation de progressiste (pour être procureur, il faut être élu). Au lendemain de la victoire de Donald Trump à la Présidence des États-Unis le 8 novembre 2016, et alors que les dirigeants démocrates étaient sonnés par leur défaite, Kamala Harris, nouvellement élue sénatrice des États-Unis en Californie, a prononcé une discours de combat où elle disait qu'elle se battrait de toutes ses forces contre Donald Trump, contre ses idées. Et effectivement, elle s'est lancée le 21 janvier 2019 dans la bataille des primaires démocrates pour l'élection présidentielle de 2020.

    Si, avant l'été 2019, elle talonnait Joe Biden dans les sondages pour les primaires démocrates, elle s'est écroulée à la fin de l'automne et a jeté l'éponge le 3 décembre 2019, par manque de moyens. Repêchée par Joe Biden qui en a fait, le 11 août 2020, sa colistière, Kamala Harris a été élue Vice-Présidente des États-Unis le 3 novembre 2020, première femme à occuper ce poste, qui plus est, une femme de couloir (mais qui n'a rien à voir avec les Afro-américains).

    Être Vice-Président des États-Unis est toujours ingrat. Son principal rôle est de présider le Sénat, ce qui peut être déterminant lorsque le Sénat est partagé. Et le Président peut lui confier des missions. En mars 2021, encore en pleine crise du covic-19, Joe Biden a confié à Kamala Harris la gestion de la grave crise migratoire : beaucoup de ressortissants des pays d'Amérique latin sont entrés illégalement aux États-Unis. Le sujet est très difficile à traiter. En raison de la sensibilité de ce thème, repris autant par les populistes américains dans leur pays que les populistes français en France, Kamala Harris n'a pu que se prendre des coups : fustigée par les républicains en raison de l'arrivée massive des migrants, elle a été aussi très critiquée par l'aile gauche du parti démocrate car elle est allée dans tous les pays d'Amérique latine pour négocier la réduction des flux migratoires. Si elle a déçu les démocrates pendant ce mandat, elle est cependant une battante, capable de visiter tout le pays pour expliquer les lois et apporter de la compréhension aux citoyens.

    La voici aux portes du pouvoir. Contrairement à ce qu'affirme Donald Trump qui n'en finit pas de se dire miraculé et qui n'en finit pas de débiter des grossièretés et des insultes sans argumentation politique, l'élection du 5 novembre 2024 va être très serrée. Kamala Harris a un potentiel encore intact et dès le premier jour de sa campagne, déjà dans les réseaux sociaux, son visage a remplacé celui de Barack Obama dans la célèbre affiche, y ajoutant un jeu de mot : Yes, We Kam ! Le moment Trump est en train de s'évaporer. Place au moment Kamala.



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    Sylvain Rakotoarison (22 juillet 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


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    Les 20 ans de Facebook.
    Bernard Madoff.
    La crise financière mondiale de 2008.

    La boîte quantique.
    Maria Callas.
    Henry Kissinger.
    Alexander Haig.
    Katalin Kariko et Drew Weissman.
    Rosalynn Carter.
    Walter Mondale.
    Marathonman.
    Bob Kennedy.

     

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240722-kamala-harris.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/international/article/kamala-harris-sera-t-elle-la-255973

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/07/22/article-sr-20240722-kamala-harris.html


     

  • USA 2024 : Joe Biden se retire et soutient Kamala Harris !

    « Je crois qu'il est dans l'intérêt de mon parti et de mon pays de me retirer et de me concentrer uniquement sur l'exercice de mes fonctions de Président jusqu'à la fin de mon mandat. » (Joe Biden, le 21 juillet 2024 sur Twitter).


     

     
     


    Apparemment, ce dimanche 21 juillet 2024 à 19 heures 46, heure de Paris, le Seigneur tout-puissant est descendu à la Maison-Blanche et a dit au Président des États-Unis : « Joe, retire-toi de la course ! ». C'est du moins ce que Joe Biden avait donné comme condition au début du mois de juillet 2024 pour expliquer l'hypothèse improbable de son retrait de la course présidentielle. Il est toujours question de Dieu avec les Américains.

    Depuis son premier débat télévisé face à Donald Trump le 27 juin 2024 sur CNN, beaucoup de ses amis démocrates lui ont demandé de se retirer. Pas facile d'entendre le directeur du "New York Times", George Clooney, Nancy Pelosi, ancienne Présidente de la Chambre des représentants, ou encore Chuck Schumer, chef de la majorité démocrate au Sénat, lui dire : Joe, il va falloir t'arrêter, il va falloir passer le flambeau. Alors, invoquer Dieu, cela permet de transcender la vie politique américaine. Et ses propres failles.

    Il faut dire que Joe Biden n'a pas eu beaucoup de chance. Ses bourdes, ses gaffes, ses lapsus, c'est sa marque de fabrique, même jeune... mais en faire autant en si peu de temps, cela devenait inquiétant pour ce vieillard de 81 ans. Au Sommet de l'OTAN le 11 juillet 2024 à Washington, Joe Biden avait appelé à la tribune le Président... Poutine pour dire Zelensky, et s'il avait su se rattraper habilement, il a laissé courir l'autre lapsus du jour, en parlant de son Vice-Président... Trump !

     

     
     


    Déjà qu'on ne savait plus trop bien dans quelle époque il vivait, du temps de François Mitterrand ou de Georges Pompidou, le coup de grâce a été la tentative d'assassinat de son adversaire, Donald Trump, le 13 juillet 2024 à Butler, en Pennsylvanie. À quelques millimètres, il serait mort et la balle ne lui a écorché qu'un bout d'oreille. Au-delà de la chance phénoménale (Donald Trump a assuré que Dieu l'avait protégé), c'est surtout son dynamisme qui a étonné, Donald Trump a levé le point et a réussi à faire scander la foule avec ces mots : fight ! fight ! avant d'être exfiltré par les services de sécurité. Quelle forme alors qu'on a failli le tuer, alors que Joe Biden se présente comme un mort vivant, une sorte de momie robotisée aux gestes très lents et maladroits. On tire sur Trump et Biden est touché !

    Autre coup de grâce, Joe Biden a attrapé le 17 juillet 2024 pour la troisième fois le covid-19, et a dû interrompre sa campagne (annuler son meeting à Las Vegas) et s'isoler. Encore une fois, ce n'était pas de chance tandis que Donald Trump pouvait fanfaronner : j'ai failli mourir, j'ai vaincu une balle de fusil mitrailleur, tandis que mon adversaire est vaincu par un petit virus !

    Pourtant, Joe Biden avait bien manœuvré en réaction à l'attentat de Butler. Prônant la non-violence politique, il avait des mots rassembleurs pour se resserrer derrière l'idée de démocratie américaine. Toutefois, l'argumentation des démocrates contre Donald Trump tombait naturellement : ils disaient que Trump était une menace pour la démocratie, et le voici victime de la violence. La menace, ce n'est plus Trump ; Trump, c'est le héros de la démocratie, au contraire. On aura beau rappeler les multicondamnations, la grossièreté, les mensonges, etc. Il reste, Donald Trump, l'exemple typique du cow-boy américain qui veut être libre, tranquille et qui ne supporte pas les lois, les règlements, les normes. Et le clip où des démocrates affirmaient vouloir "cibler" Trump a vite disparu des écrans...

     

     
     


    Depuis quelque temps, les donateurs se faisaient de plus en plus rares pour le camp démocrate (et l'argent est le nerf de la démocratie aux États-Unis) et surtout, les parlementaires (qui sont renouvelés en même temps que l'élection présidentielle) craignaient un désastre électoral et une vague républicaine. La Convention nationale des Républicains du 15 au 18 juillet 2024 à Milkauwee, dans le Wisconsin, a été un triomphe pour Donald Trump, formellement désigné candidat des républicains le 15 juillet 2024 avec pour colistier à la Vice-Présidence James D. Vance.

    L'échéance électorale est le mardi 5 novembre 2024, dans trois mois et demi, et la Convention nationale des Démocrates devra désigner formellement son candidat entre le 19 et le 22 août 2024 à Chicago. Dans tous les cas, cela va faire court pour le candidat ou plutôt la candidate démocrate.

    Décidément, la campagne présidentielle américaine 2024 est, à tout point de vue, personnalités en cause et déroulement, exceptionnelle et historique, avec deux faits majeurs et historiques : la tentative d'assassinat contre Donald Trump qui l'a placé dans une sorte de héros présidentiel à l'image de Lincoln, John Kennedy ou Ronald Reagan, et, ensuite, le retrait de la candidature du candidat le plus vieux de l'histoire américaine à quelques mois de l'élection.

    En choisissant la sagesse, ce qui était très difficile pour son ego, Joe Biden va satisfaire près des deux tiers des électeurs démocrates que les sondages disaient partisans de son retrait.

     

     
     


    Une demi-heure après l'annonce de son retrait, Joe Biden, par un second tweet daté du 21 juillet 2024 à 20 heures 13, heure de Paris, a annoncé qu'il soutenait sa Vice-Présidente Kamala Harris : « Ma toute première décision en tant que candidat du parti en 2020 a été de choisir Kamala Harris comme Vice-Présidente. Et c’est la meilleure décision que j’ai prise. Aujourd’hui, je souhaite offrir mon plein soutien et mon approbation à Kamala pour qu’elle soit la candidate de notre parti cette année. Démocrates, il est temps de s’unir et de battre Trump. Faisons cela. ».

    La bataille va donc complètement changer d'allure pour Donald Trump. Avec Kamala Harris, le vieux, le machiste, le grossier personnage sera plus facilement montré du doigt. Mais il reste à la Vice-Présidente encore beaucoup de chemin à parcourir pour pouvoir convaincre les indécis et les centristes de l'électorat, tandis que le candidat républicain a pris une très grande longueur d'avance avec sa désormais légende nationale. Nous vivons une époque formidable.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (21 juillet 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    USA 2024 : Joe Biden se retire et soutient Kamala Harris !
    Donald Trump victime d'une tentative d'assassinat.
    Les 80 ans du Débarquement en Normandie.
    Ronald Reagan.
    Triste Trump (hic) !
    Paul Auster.
    Standard & Poor's.
    Moody's et Fitch.
    Les 75 ans de l'OTAN.
    Lee Marvin.
    Les 20 ans de Facebook.
    Bernard Madoff.
    La crise financière mondiale de 2008.

    La boîte quantique.
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    Bob Kennedy.

     

     
     







    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240721-biden.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/international/article/usa-2024-joe-biden-se-retire-et-255964

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/07/21/article-sr-20240721-biden.html





     

  • Donald Trump victime d'une tentative d'assassinat

    « J’ai tout de suite su que quelque chose n’allait pas quand j’ai entendu un bruit strident, des tirs, et immédiatement senti la balle me traverser la peau. » (Donald Trump, le 14 juillet 2024).



     

     
     


    Ciel bleu, visage ensanglanté, poing tendu, sur fond de drapeau américain. Donald Trump, qui a été victime d'une tentative d'assassinat lors de son meeting électoral à Butler, en Pennsylvanie, ce samedi 13 juillet 2024 à 18 heures 11 (heure locale, un peu plus de minuit à Paris), a donné aux Américains l'image américaine du tableau de la Liberté guidant le peuple de Delacroix. Un participant au meeting en est mort, deux autres gravement blessés, l'auteur de l'attentat tué à la nuque par les services de sécurité, tandis que l'ancien Président des États-Unis a été blessé à l'oreille droite.

    On peut dire qu'il a eu de la chance, il sera Reagan, pas Kennedy ni Lincoln. Situation étrange où même les plus féroces adversaires politiques de Donald Trump lui ont adressé des messages de sympathie : Joe Biden (qui était dans le Delaware, son État), Kamala Harris, Barack Obama, Nancy Pelosi, pour n'en citer que quatre. Cette dernière, ancienne Présidente de la Chambre des Représentants, est bien consciente de l'état de violence de la société américaine et de la vie politique américaine puisque son mari avait été agressé à coups de marteau en 2022.
     

     
     


    Tous, dans la classe politique américaine mais aussi les actuels ou anciens chefs d'État ou de gouvernement à l'étranger, qui furent les anciens interlocuteurs de Donald Trump lorsqu'il était à la Maison-Blanche (ou pas), en particulier Benjamin Netanyahou, Emmanuel Macron, Keir Starmer, Javier Milei, Jair Bolsonaro, Justin Trudeau, Volodymyr Zelenski, etc., ainsi que le Secrétaire Général de l'ONU Antonio Guterres, ont bien évidemment condamné cet attentat et apporté leur soutien et sympathie au candidat à l'élection présidentielle américaine.

    On pourrait, de manière un peu trop simpliste, dire comme Salomon : tu es puni par là où tu as péché, et répéter que la violence même verbale sécrète toujours la violence alors que le rôle des acteurs publics, des responsables politiques, c'est au contraire d'apaiser, de rassembler, d'apporter un peu de cohésion sociale et de réconfort moral. La justice américaine qui a reconnu le 31 mai 2024 la culpabilité de l'ancien Président américain dans diverses affaires (trente-quatre chefs d'accusation !), a décidé de ne pas le poursuivre dans l'invasion du Capitole le 6 janvier 2021 car, encore Président des États-Unis, il jouissait encore de l'immunité présidentielle.
     

     
     


    En tête dans les sondages pour la course présidentielle, Donald Trump a annoncé qu'il serait bien présent à la Convention nationale des Républicains qui se tiendra du 15 au 18 juillet 2024 à Milwaukee, dans le Wisconsin, pour désigner formellement le candidat républicain à l'élection présidentielle du 5 novembre 2024. Sa désignation ne fait aucune doute puisque ses adversaires Ron DeSantis et Nikki Haley avaient assez rapidement déclaré forfait, respectivement le 21 janvier 2024 et 6 mars 2024.

    Pour le Parti démocrate qui tiendra sa Convention nationale à Chicago du 19 au 22 août 2024, la situation est moins évidente. Certes, le Président en exercice Joe Biden a annoncé depuis longtemps sa volonté de battre une nouvelle fois Donald Trump, il s'est déclaré le seul à l'avoir fait (en 2020) et le seul à pouvoir encore le faire, mais les sondages lui donnent actuellement un retard non négligeable et ses dernières bourdes ont encouragé certains parlementaires ou responsables démocrates (et aussi financiers) à vouloir choisir un autre candidat.
     

     
     


    En particulier, son premier débat face à Donald Trump le 27 juin 2024 sur CNN a été catastrophique sur sa capacité à présider encore à 81 ans alors que son adversaire a menti 50 fois en 90 minutes ! Selon CBS News, Joe Biden a eu « une voix rauque, des expressions faciales béantes, des réponses confuses sur des questions clefs et un manque perçu de réfutation des mensonges de l'ancien Président Donald Trump ».

    De plus, au Sommet de l'OTAN à Washington le 11 juillet 2024, Joe Biden a confondu Volodymyr Zelensky avec Vladimir Poutine, puis Kamala Harris avec Donald Trump (ce dernier lui a répondu : Good job, Joe !). Même si le Président a toujours eu l'habitude de faire des bourdes depuis toujours (et même jeune), cela lui donne une mauvaise image de "présidentialité" même si l'âge de son adversaire, 78 ans, n'est pas non plus sans problème (Donald Trump aussi avait des absences lors de son procès au printemps). Pour autant, lors de son discours très combatif à Détroit le 12 juillet 2024, Joe Biden a réaffirmé son intention d'aller jusqu'au bout de son combat électoral et a assuré qu'il gagnerait : « Je suis candidat et nous allons gagner ! ».

    Ce qui est clair, c'est que Donald Trump a montré un certain courage physique au moment de l'attentat qui l'a blessé, s'est inquiété de l'état des deux personnes blessées, a présenté ses condoléances pour le participant qui est mort, et va bénéficier très logiquement d'un courant de sympathie pour ce qu'il a subi. Ce qui ne fait pas vraiment les affaires des démocrates.



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (14 juillet 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Donald Trump victime d'une tentative d'assassinat.
    Les 80 ans du Débarquement en Normandie.
    Ronald Reagan.
    Triste Trump (hic) !
    Paul Auster.
    Standard & Poor's.
    Moody's et Fitch.
    Les 75 ans de l'OTAN.
    Lee Marvin.
    Les 20 ans de Facebook.
    Bernard Madoff.
    La crise financière mondiale de 2008.

    La boîte quantique.
    Maria Callas.
    Henry Kissinger.
    Alexander Haig.
    Katalin Kariko et Drew Weissman.
    Rosalynn Carter.
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    Marathonman.
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    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240713-trump.html

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  • La nuit de Célya

    Tristesse infinie. Petite pitchounette meurtrie. Dont on a ôté la vie.


     

     
     


    Les téléspectateurs de ce vendredi 12 juillet 2024, dans la soirée, ont pu apprendre la nouvelle : une alerte enlèvement. Le nom de l'enfant disparu, Célya, son âge, 6 ans, ses vêtements, les lieux où elle pourrait être, etc. Et une photo. Rien n'est inutile pour retrouver un enfant. On sait bien que c'est aux premières heures qu'on peut retrouver un enfant et plus le temps s'allonge, plus la probabilité des retrouvailles s'écroule.

    Dans une sorte d'insensé espoir, on se dit que c'est une erreur, l'enfant s'est perdue, on va vite la retrouver et on en sera pour une bonne peur, qu'on racontera plus tard, comme souvenir d'un été particulièrement stressant. Peut-être en rigolant. Et puis l'optimisme s'écroule, s'effondre, lorsqu'on lit un macabre communiqué, comme un couperet de guillotine, cette nuit, du parquet de Rouen : « Le corps sans vie de Célya a été retrouvé. ».

    Des dizaines, peut-être des centaines de personnes ont communié à cette disparition, ont aidé, ont cherché à s'informer, à avoir des nouvelles de la petite, se sont mis à la place de sa mère, se sont inquiétés pour elle. Incontestablement, même si c'est très anecdotique, il y a encore des pistes de progression pour le Ministère de la Justice dans la communication avec le grand public. Sans ménagement. Sans ambages, on apprend que le pire est arrivé. Effondrement infini.

    Un peu plus tard, on apprend que l'alerte enlèvement a été très utile, et il faut s'en féliciter car la procédure est maintenant bien rodée et peut sauver des vies. Hélas, ici, cela n'a pas suffi. Un témoin a pu informer la police qu'il avait vu le véhicule du beau-père de Célya.
     

     
     


    C'est à partir de cette information que la brigade des recherches de la gendarmerie nationale d'Yvetot, en Seine-Maritime, a pu faire des investigations dans les environs et a trouvé le corps sans vie de Célya dans un bois, pas loin du véhicule. Le propriétaire du véhicule et auteur présumé du meurtre de la petite fille de 6 ans est encore en fuite et peut d'ailleurs être dangereux (des conseils de prudence et de vigilance sont donnés).

    Dans le communiqué du procureur de la République de Rouen publié au milieu de la nuit (lire en fin d'article), il est précisé que la mère de Célya a d'abord été victime de coups de son compagnon et a été hospitalisée, sans que ses jours, heureusement, ne soient en danger. Enfin, c'est une façon de parler, car lorsqu'elle s'apercevra de la situation, sa vie sera foutue, elle aura une blessure indélébile, incicatrisable, le monde s'est écroulé pour elle. Perdre un enfant. Toujours innocent. Insurmontable.

    Beaucoup de réactions affluent, en particulier sur Twitter, même des politiques, dont le député FI Carlos Martens Bilongo. Soit les internautes s'adressent à l'enfant pour lui souhaiter la paix, un monde doux dans le ciel, soit ils pensent à la famille, à sa mère (qui est hospitalisée). Compassion. Certains se demandent si la mort remonte à avant ou après l'alerte enlèvement, d'autres évoquent la peine de mort, se lâchent même sur leur propre idéologie qui y voit matière à récupération politique, mais heureusement, ils sont très peu nombreux. Face à l'amour d'une vie, au départ d'un enfant, la décence reste relativement bien partagée. Quelques-uns enfin ont publié la photographie du suspect, le compagnon de la mère, comme pour inciter au lynchage, alors qu'il faut rappeler que la sanction doit être prononcée par la justice et tant qu'un suspect n'est pas jugé, il est présumé innocent. Je sais, c'est dur de l'écrire, mais qui est-on pour condamner alors qu'on ne connaît rien de rien ?

    Entre les statistiques des homicides volontaires et la photo de la petite Célya, entre les arguments nauséeux de gros bourrins qui se nourrissent, comme des vampires, des victimes, et l'innocence de cette âme assassinée, il y a effectivement un immense fossé. La violence, celle de la maison d'à-côté, la guerre, lointaine ou proche, dans les cœurs, les arguments de force, de brutalité, hélas, font partie inhérente de cette humanité qui peut le meilleur et le pire, et parfois en même temps.


    Est-ce un féminicide d'avoir voulu assassiner sa mère, d'avoir assassiné sa belle-fillette ? On pourrait aussi appeler un célyacide, tellement chaque victime, chaque meurtre est une histoire entière, spécifique, singulière et doit prendre un nom différent. Quelles qu'en soient ses raisons, ou ses déraisons, l'auteur de cette horreur définitive, suprême, de prendre la vie d'un enfant a nécessairement tort, mérite jugement, condamnation et châtiment. Mais de grâce, nous, hommes et femmes libres et éclairés de la société des Lumières, endeuillés, enlarmés par cette tragique, par les autres et par les suivantes hélas, restons humains et n'imitons pas les bourreaux. Ce serait assassiner une seconde fois l'enfance.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (13 juillet 2024)
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    Pour aller plus loin :
    La nuit de Célya.
    La nuit d'Émile Soleil.
    Affaire Grégory : la vérité sans la boue ?

     

     
     




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