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  • Automobilistes franciliens, attention à la voie du covoiturage sur le périph !

    « Il faut rappeler quand même que Paris c'est 2 millions d'habitants et qu'il y a tous les jours un million de salariés qui rentrent dans la ville et 2 ou 3 millions d'autres personnes. Le périphérique, il est entre tout ça. Donc, essayer, pourquoi pas, mais la vraie question c'est : est-ce qu'on a envie de covoiturer sur des trajets du quotidien ? Quand c'est tous les jours, c'est autre chose, parce qu’on rentre dans l'intimité d'un quotidien et est-ce qu'on a envie de se voir tous les jours avec un voisin de palier ? Ce n'est pas sûr du tout. » (Jean Viard, sociologue, le 2 mars 2025 sur France Info).




     

     
     


    Ah non, l'image n'est pas contractuelle ! Elle est issue d'une publicité pour Blablacar, l'application française de covoiturage bien connue. En fait de bande de copains joyeux roulant au milieu d'une végétation luxuriante, il faut plutôt voir un automobiliste francilien seul, honteusement seul, au volant de son véhicule, roulant dans une zone ultrabétonnée, le matin, exaspéré sinon furieux de voir la durée des bouchons sur le périphérique augmenter. On appelle cela l'autosolisme, le fait de conduire seul, ce qui correspond à environ 80% des usagers de la route (1,24 personne par véhicule en moyenne, et même 1,10 sur les trajets domicile-travail).

    La raison ? À partir de ce lundi 3 mars 2025, en concertation avec la préfecture de police de Paris et la préfecture de la région Île-de-France, la ville de Paris a mis en place sur le périphérique parisien une voie de covoiturage, la voie de gauche. Elle existe aussi sur le début de l'autoroute A1, au nord, et sur le début de l'autoroute A13, à l'ouest. Sur le périphérique parisien, seul le tronçon sud, entre la Porte de Bercy et le Quai d'Issy, est épargné par la mesure, et sera inclus dans le dispositif dans un temps ultérieur.

    Comme toujours, cela commence par de l'expérimentation, mais on sait très bien ce que cela signifie. Espérons que l'évaluation sera correctement faite avant que le dispositif soit définitif. Ainsi, sur ces tronçons où la circulation automobile est particulièrement dense, quand le losange blanc est allumé, cette signalétique signifiant que la voie de gauche est réservée au covoiturage, il sera interdit d'y accéder si on est tout seul dans son véhicule. On ne précise pas si l'on transporte des chats ce qu'il advient. En fait, si, on le précise ; un animal de compagnie n'est pas considéré comme un passager. En revanche, le système reconnaît les enfants, même dans un siège enfant à l'arrière.

     

     
     


    Cette voie réservée est activée en semaine, du lundi au vendredi, de 7 heures à 10 heures 30 et de 16 heures à 20 heures. C'est la voie de gauche qui a été choisie pour ne pas perturber l'accès aux bretelles de sortie ou d'entrée. Quand il y a trop de bouchon, les autorités (la préfecture de police) pourront quand même désactiver le dispositif (éteindre le losange blanc) malgré ces horaires et tenter de refluidifier le trafic. De même, lorsque le trafic est faible, l'activation ne sera peut-être pas faite car inutile.
     

     
     


    Ceux qui ont accès à cette voie spéciale sont les véhicules transportant au moins deux personnes, les transports public collectifs (bus scolaires), les taxis, les VTC en charge, les deux-roues motorisés en circulation interfile, les véhicules des services de secours et des forces de sécurité, dont les ambulances privées, et les personnes détentrices de la carte mobilité inclusive stationnement (il faut s'inscrire sur une plate-forme pour être reconnu par les radars). En outre, les camions de plus de 3,5 tonnes transportant de la marchandise ne sont pas autorisés sur cette voie.
     

     
     


    Qui dit contrainte dit bien sûr contrôle. Le contrôle est réalisé par un double radar qui, à l'aide de l'intelligence artificielle, détermine le type de véhicule roulant sur la voie réservée et le nombre de personnes transportées. Au début, il n'y aura que des contrôles pédagogiques et les premières amendes seront envoyées à partir du 1er mai 2025, histoire de fêter le muguet ! L'amende est classique, d'un montant de 135 euros, et est délivrée par vidéo-verbalisation assistée par ordinateur (VAO).
     

     
     


    Attention aux petits malins qui mettraient leur poupée gonflable ou leur Gaston Lagaffe en latex sur le siège du passager avant (comme cela arrive parfois aux États-Unis pour tromper les contrôles). Les radars sont dotés de cellules thermiques et pourront donc distinguer le vrai du faux passager. En cas de verbalisation, cela pourrait donc aller beaucoup plus loin que la simple amende puisqu'il y aura eu une volonté de frauder (le contrevenant risque jusqu'à 350 000 euros d'amende !).

     

     
     


    En fait, le principe de voie réservée n'est pas nouveau en France. Il existe déjà dans plusieurs grandes agglomérations, en particulier à Lyon (je l'ai expérimenté), à Grenoble, à Lille, et même à Paris et les autoroutes s'y concentrant, cela a été fait pendant toute la période des Jeux olympiques et paralympiques. Je l'ai aussi expérimenté notamment sur l'A86 et l'A4, mais avec une autre définition des véhicules autorisés (il ne s'agissait pas de covoiturage dans ce cas-là). Certains ont cru intelligent de faire un bilan positif sur le trafic automobile, mais en oubliant que cette période était la période estivale, donc beaucoup plus légère en termes de circulation (tous les Franciliens qui roulent habituellement dans l'agglomération parisienne soufflent un peu pendant les périodes estivales).

     

     
     


    Incontestablement, cette nouvelle mesure va engendrer des embouteillages de plus autour de Paris et les banlieusards seront plus impactés que les Parisiens intra muros qui n'ont pas besoin de se déplacer en automobile. De même, l'idée de faire du covoiturage récurrent pour le trajet domicile-travail est intéressante mais assez illusoire, comme l'a dit le sociologue Jean Viard le 2 mars 2025 sur France Info : on n'a pas forcément envie de vivre quotidiennement avec son voisin. Il existe de plus des difficultés pour s'organiser : d'une part, beaucoup de personnes ne savent pas forcément exactement à quelle heure ils rentreront du travail ; d'autre part, il peut y avoir besoin de faire des courses, ou des activités culturelles ou sportives, chercher les enfants à l'école, etc. et cela pas nécessairement de manière anticipée.

    Toutefois, c'est aussi un changement de culture et de mode de vie. Ne pas s'éterniser au bureau et prendre peut-être un rythme plus régulier en semaine. Un changement plutôt vertueux puisqu'il tend à réduire le nombre de véhicules en circulation, ce qui réduit la pollution atmosphérique et sonore.

    Comme pour la limitation du périphérique parisien à 50 kilomètres par heure (au lieu de 70), je suis donc plutôt favorable à cette mesure qui n'empêche personne de se déplacer, cela ne met que quelques contraintes supplémentaires. Le périphérique parisien est la partie la plus polluée de l'agglomération parisienne (2 à 2,5 fois supérieure à Paris intra muros). Chaque jour, 1,5 million d'automobilistes se déplacent sur le périphérique, polluant 550 000 riverais dont certains mourront de maladie respiratoire.
     

     
     


    La réduction de la vitesse sur le périph n'était pas forcément une mesure de bon sens (il y a une vitesse optimale pour réduire au maximum la pollution des véhicules thermiques, cela dépend du véhicule mais elle est plutôt autour de 60 kilomètres par heure), mais il faut être honnête. En ce qui me concerne, si je roule déjà à 40 kilomètres par heure, je suis content vu que les bouchons y sont nombreux. La baisse de la vitesse est, pour les riverains, une mesure de salubrité publique afin de réduire la pollution sonore.

    En revanche, je suis beaucoup plus réservé sur l'interdiction des véhicules dits polluants (mais parfois, moins polluants que des gros SUV récents) dans les zones à faibles émissions (ZFE) car, pour le coup, cela empêche réellement certains automobilistes de se déplacer, en particulier les moins aisés, ceux qui doivent habiter en lointaine banlieue faute de moyens, et, surtout, qui n'ont pas les moyens de s'acheter une voiture neuve ou une voiture électrique. Du reste, leurs véhicules d'occasion dits polluants devraient pouvoir continuer à rouler jusqu'à la mort réelle du véhicule et pas mis à la casse avant, car globalement, c'est beaucoup moins écologique de mettre à la casse des automobiles encore en bon état de fonctionnement.

    On ne pourra jamais faire admettre l'importance (réelle) de la transition écologique si l'on discrimine ainsi socialement les citoyens de notre pays. Les centres-villes ne doivent pas être réservés aux personnes riches, interdites des gueux placés dans les lointains faubourgs pollués, dans une France à deux vitesses. Parce que tout simplement, c'est un mauvais calcul, dès lors que nous restons une démocratie. À l'instar des gilets jaunes, si nous ne comprenions pas la situation des personnes les plus précaires, des mouvements populistes prendraient alors un jour le pouvoir et remettraient en cause toutes les mesures favorables à l'environnement, y compris les bonnes mesures, intelligentes, c'est-à-dire, au moins, efficaces et non discriminantes socialement.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (02 mars 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Automobilistes franciliens, attention à la voie du covoiturage sur le périph !
    Foire aux questions sur Notre-Dame-des-Landes.
    A69, autoroute erratique !
    Méfiez-vous du péage par smartphone sur les autoroutes !
    5 ans de prison dont 2 ferme pour Pierre Palmade.
    Tristesse.
    Contrôle médical obligatoire pour le permis de conduire : une erreur de vision ?
    Émotion nationale pour Alexandra Sonac et sa fille adolescente.
    Claude Got.
    Création du délit d'homicide routier : seulement cosmétique ?
    Le Comité interministériel de la sécurité routière (CISR) du lundi 17 juillet 2023.
    Le refus d'obtempérer est un délit routier.
    Faut-il interdire aux insomniaques de conduire ?
    Faut-il en finir avec le permis de conduire à vie ?
    L'avenir du périph' parisien en question.
    Fin du retrait de point pour les "petits" excès de vitesse : est-ce bien raisonnable ?
    Les trottinettes à Paris.
    L'accident de Pierre Palmade.
    La sécurité des personnes.
    Anne Heche.
    Diana Spencer.
    100 ans de code de la route.
    80 km/h : le bilan 2018-2020 très positif.


     

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250303-covoiturage-peripherique.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/societe/article/automobilistes-franciliens-259653

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/03/03/article-sr-20250303-covoiturage-peripherique.html


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  • A69, autoroute erratique !

    « Il résulte (…) que s’il est établi que le gain de temps généré par la liaison autoroutière permettra une meilleure de desserte du bassin de Castres-Mazamet ainsi qu’un gain de confort, facilitera l’accès de ce bassin à des équipements régionaux et participera du confortement du développement économique de ce territoire, ces avantages, pris isolément ainsi que dans leur ensemble, qui ont justifié que ce projet soit définitivement reconnu d’utilité publique, ne sauraient, en revanche, eu égard à la situation démographique et économique de ce bassin, qui ne révèle pas de décrochage, ainsi qu’aux apports limités du projet en termes économique, social et de gains de sécurité, suffire à caractériser l’existence d’une raison impérative d’intérêt public majeur, c’est-à-dire d’un intérêt d'une importance telle qu'il puisse être mis en balance avec l'objectif de conservation des habitats naturels, de la faune et de la flore sauvage. » (n°43 ; extrait de la décision n°2303544 du tribunal administratif de Toulouse du 27 février 2025).



     

     
     


    L'annonce de la double décision de la troisième chambre du tribunal administratif de Toulouse faite le jeudi 27 février 2025 a étonné et même stupéfait un grand nombre d'acteurs politiques et économiques de la région Occitanie. En effet, le juge administratif a annulé les arrêtés du 1er et du 2 mars 2023 des préfets de la région Occitanie et des départements de Haute-Garonne et du Tarn donnant autorisation environnementale à la société Atosca de construire la liaison autoroutière Toulouse-Castres dite A69.

    Ce sujet est juridiquement, politiquement, économiquement très complexe, mais il a abouti, peut-être de manière provisoire, à la suspension des travaux de cette liaison autoroutière débutés il y a deux ans, d'un coût de 530 millions d'euros (dont 23 millions d'euros d'argent public) pour 900 emplois. La très grande compréhension des conséquences (argent public gâché, travaux inachevés, que faire des constructions déjà réalisées ?, emplois "en suspension", aménagement du territoire, etc.) fait que chaque citoyen peut ressentir le besoin d'avoir son avis sur la question, et celui-ci se résumerait à seulement deux possibilités : hourrah, les "résistants" autoproclamés ont gagné ! Ou : quelle ineptie, les écologistes ont gagné, on retourne aux siècles antérieurs, à l'âge des cavernes ! Avec une resucée du style : à bas le gouvernement des juges !

    Avant d'expliciter plus en détail les décisions du tribunal administratif de Toulouse, un petit témoignage personnel. Il y a quelques années, j'étais en déplacement à Cahors et je devais me rendre à Béziers. J'étais (honteusement) en automobile (j'avais mes raisons très acceptables et de toute façon, je n'ai pas à le justifier, du moins, pas encore à le justifier) et je me suis fait cette réflexion : la région est belle mais difficile d'accès. Je suis passé par la nationale N126 pour aller à Castres puis Mazamet, et redescendre par le Haut Languedoc. Comme j'allais à Béziers, j'aurais pu prendre l'autoroute A61 de Toulouse à Narbonne en passant par Carcassonne, puis l'A9 pour remonter vers Béziers. Pour une seule fois, cela ne me gênait pas vraiment de passer par la montagne, mais si je devais faire tous les jours Toulouse-Castres, je me disais que cela serait vraiment la galère.

    À l'évidence, les environs de Castres sont enclavés. Il y a certes un aéroport, mais avec très peu de lignes aériennes. Il y a certes une gare, mais pour aller à Paris, il faut au moins sept heures de train et une correspondance. La loi de la République, c'est l'aménagement du territoire pour tous, le désenclavement des régions enclavées. C'est le principe d'égalité des chances de tous les citoyens quelle que soit sa localisation géographique. Du moins, c'est l'horizon idéal vers quoi la République doit tendre. Donc, désenclaver le bassin de Castres-Mazamet, le seul de cette importance démographique autour de Toulouse à ne pas être relié par une autoroute, et réduire les risques accidentogènes.

    Je referme la parenthèse, mais pas complètement, car bien entendu, la décision de faire la liaison autoroutière Toulouse-Castres répond à une logique économique de bassin d'emplois. L'idée est de permettre à des habitants de l'agglomération de Toulouse de pouvoir travailler dans l'agglomération de Castres, qui est un grand bassin d'emplois. Certains zadistes ont rappelé que Pierre Fabre, fondateur des laboratoires pharmaceutiques qui portent son nom et très implanté autour de Castres, a fait de fortes pressions auprès des milieux politiques pour obtenir une telle autoroute. Il faut encore une fois reconnaître que l'intérêt particulier peut parfois se confondre avec l'intérêt général quand il s'agit de créer des emplois et de l'activité économique, surtout dans une période économique morose.

    En clair, la plupart des élus locaux (pour ne pas dire tous), de droite comme de gauche ou du centre, ont soutenu ce projet d'aménagement du territoire. Bernard Bosson (UDF), François Fillon (UMP), Jean-Louis Borloo (centriste), initialement opposé au projet, Dominique Perben (UMP), François Hollande (PS), Martin Malvy (PS), Carole Delga (PS), Édouard Philippe (HOR), Élisabeth Borne (REN), Jean Castex (REN), etc., ont pris des décisions de soutien à l'autoroute A69. La structure étoilée du territoire (tout pour Paris) a fait oublier des populations entières, et celle de Toulouse a été parmi les dernières servies par une ligne TGV ou une autoroute la reliant à Paris. Les infrastructures régionales ont souvent été négligées, d'autant plus en région de montage car les coûts des ouvrages sont beaucoup plus élevés.

     

     
     


    Cette liaison rapide a été envisagée dès le 8 mars 1994 (le ministre Bernard Bosson a approuvé le principe de l'A69), c'est dire si, comme d'autres liaisons en province, elles prennent beaucoup de temps pour aller de l'idée à la réalisation (comme l'A49 entre Grenoble et Valence qui a mis aussi près d'une trentaine d'années pour être construite), avec deux difficultés principales, le financement (des études puis du projet), et les aspects techniques sur le terrain, tant sur les expropriations nécessaires que la protection de l'environnement. C'est évidemment ce dernier point qui a préoccupé le tribunal administratif.

    Je veux d'abord préciser deux ou trois choses. Il y a eu deux décisions car il y a officiellement deux projets, l'élargissement de l'autoroute A680 et la construction de l'autoroute A69, qui sont deux ouvrages continus (l'un jusqu'à Verteil et l'autre à partir de Verteil). Pour la simplification du propos, je ne parlerai que de l'A69 alors qu'il s'agit des deux, et je ne parlerai que d'une décision alors qu'il y en a deux, de même qu'il y a eu deux arrêtés signés les 1er et 2 mars 2023 (en fait, pour être vraiment exact, il y a même quatre décisions du tribunal administratif de Toulouse, numéros 2303830, 2303544, 2304976 et 2305322, mais nous considérons que c'est la même dans leur globalité).

    Parlons aussi des acteurs de cette décision administrative, puisque certains en ont parlé. La rapporteure publique s'appelait Mona Rousseau (cela ne s'invente pas), elle a communiqué ses conclusions le 20 novembre 2024, elle est une jeune débutante dans ses fonctions depuis deux ans, mais les détracteurs de cette décision (je me sens plutôt de ce côté-là) ne devraient pas prendre ce genre d'argument pour critiquer la décision, et de toute façon, ce n'est pas elle qui a pris la décision, mais des juges expérimentés, la présidente du tribunal a dix-sept ans d'expérience et sa première assesseure est docteure en droit public et maître de conférences à l'université.
     

     
     


    Plus intéressante est la raison de l'annulation de l'arrêté d'autorisation, qui a pour effet la suspension des travaux. Au contraire de la justice pénale, les décisions de la justice administrative ne sont pas suspensives en cas d'appel, sauf exception (nous le verrons plus loin). Par conséquent, les travaux doivent s'être arrêtés dès le 27 février 2025. C'est l'État qui va faire appel, ce qui est logique (et pas du tout choquant) puisque le tribunal a remis en cause la décision de deux préfets, représentants de l'État. On peut regretter cette décision de justice, mais il faut bien se garder de hurler contre le principe d'un État de droit qui permet aux citoyens de se défendre contre la décision de l'État ou d'une autre autorité publique. Ce n'est pas dans une dictature que nous aurions une telle décision.

    Dans le cadre de la protection de l'environnement et de la biodiversité, il y a eu de nombreuses lois qui ont été promulguées en France pour assurer la conservation de faune et de flore. Certaines lois sont aussi des transpositions nationales de directives européennes qui ont été décidées, répétons-le sans cesse, par les États membres, et donc par la France sans qui peu de décisions importantes pourraient être prises au niveau européen (parce que la France est un grand pays, en population et en superficie, et qu'il est l'un des fondateurs de l'Union Européenne). Et ces transpositions nationales sont votées sous forme de lois par le Parlement français. Donc, toute notre législation sur l'environnement est avant tout une volonté nationale de la France.

    Pour construire des ouvrages comme une autoroute, il faut la délivrance d'une autorisation environnementale. Formellement, elle est signée par le préfet, puisque c'est à l'État de faire appliquer la loi, mais le préfet n'est pas un tyran, il doit prendre sa décision dans le cadre législatif en vigueur et avec de solides arguments. La preuve, c'est que n'importe quelle décision administrative peut être remise en cause par la justice administrative avec, là aussi, de solides arguments juridiques.

    L'autorisation environnementale a été délivrée au titre de l'article L.181-1 du code de l'environnement. Elle vaut dérogation "espèces protégées". En clair, le préfet donne l'autorisation environnementale à réaliser un projet qui met en danger la sauvegarde de l'environnement et de la biodiversité en contrepartie de laquelle il existe une « raison impérative d'intérêt public majeur ». C'est cette expression qui est l'essentiel du dossier.

    Pour être plus simple, on peut dire que l'autorisation environnementale, comme l'a expliqué l'avocat fiscaliste Collab blues sur Twitter, « c'est le permis de construire en matière d'infrastructure routière, il rassemble toutes les autorisations nécessaires pour commencer les travaux. Donc, c'est très bien, car ça simplifie et limite le nombre d'autorisations à obtenir (et potentiellement attaquables), mais c'est aussi un risque car si un point de l'autorisation est branlant, c'est tout l'édifice qui s'effondre. » (28 février 2025).

    Reprenons-la dans un extrait de la décision qui donne, en quelque sorte, le mode d'emploi : « Il résulte (…) qu’un projet de travaux, d’aménagement ou de construction d’une personne publique ou privée susceptible d’affecter la conservation d’espèces animales ou végétales protégées et de leur habitat ne peut être autorisé, à titre dérogatoire, que s’il répond, par sa nature et compte tenu des intérêts économiques et sociaux en jeu, à une raison impérative d’intérêt public majeur. En présence d’un tel intérêt, le projet ne peut cependant être autorisé, eu égard aux atteintes portées aux espèces protégées appréciées en tenant compte des mesures de réduction et de compensation prévues, que si, d’une part, il n’existe pas d’autre solution satisfaisante et, d’autre part, cette dérogation ne nuit pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle. » (n°28).

    Autrement formulé, il fallait que le juge administratif appréciât si la construction de l'autoroute A69 était motivée par une raison impérative d'intérêt public majeur. Je ne disserterai pas sur cette expression très juridique, car on peut se demander d'abord ce qu'est "l'intérêt public" (il y a des définitions juridiques très spécifiques), ce qu'est un intérêt public "majeur" et enfin, ce qu'est une raison "impérative". Cette raison peut être de nature sociale et économique. On voit que le juge a la possibilité d'interpréter de différentes manières le sujet.

    La preuve, c'est que la justice administrative avait déjà pris en référé des décisions qui étaient le contraire de celle du 27 février 2025 (j'y viens plus loin). Car les zadistes ont voulu s'opposer de toutes les façons à la construction de cette autoroute, par l'occupation sur le terrain, par des opérations de sensibilisations médiatiques, et surtout, par de nombreux recours administratifs et juridiques.
     

     
     


    Leurs arguments ne sont pas minces : la construction d'une autoroute met en l'air la faune et la flore. Pas besoin de faire un dessin ni de militer chez les Verts pour comprendre à quel point l'asphalte est une horreur écologique pour tout ce qui est vivant. Les zadistes ont souligné que toutes les mesures de compensation présentées par la société qui construit l'autoroute étaient des leurres, notamment pour replanter les arbres coupés (on parle de cent trente espèces). Je n'ai pas la possibilité de savoir s'ils ont raison ou s'ils exagèrent, on peut juste se dire que la société qui construit l'autoroute n'est pas une entreprise écologique, son cœur de métier, c'est l'autoroute, et donc, toutes ses solutions écologiques sont limitées au mieux à la loi, au pire, à l'affichage. Cela ne signifie pas que cette société est malhonnête, bien sûr, mais elle cherchera forcément à minimiser les coûts de ces opérations de compensation.

    Les zadistes soutiennent aussi qu'il suffirait d'aménager la nationale N126 pour permettre une liaison routière plus rapide qu'actuellement sans faire de gros bouleversements écologiques, d'autant plus que le tracé de l'A69 est assez parallèle de celui de la N126. D'ailleurs, sur les 53 kilomètres prévus de l'A69, 9 kilomètres sont un élargissement de l'A680. Et une section de l'A69 reprendra une rocade de la N126, ce qui est scandaleux pour les zadistes car cette section deviendra donc payante et ceux qui ne voudront pas payer devront traverser des communes, ce qui n'est pas le cas actuellement. L'A69 touchera vingt-quatre communes, et le projet comprendra deux cents ouvrages d'art et hydrauliques, ainsi que seize points de recharges pour voitures électriques (pour lesquelles le péage sera un peu moins cher).
     

     
     


    Et venons-en au fait du péage. Le prix de l'autoroute est considéré par le tribunal administratif comme trop cher pour qu'il puisse apporter un avantage économique majeur. En effet, la décision dit ceci : « S’il ne saurait être réfuté que la création d’une liaison autoroutière constitue un des facteurs pouvant participer au confortement du développement économique d’un bassin économique et, par suite, à son attractivité, notamment par le gain de temps de trajet qu’il procure, lequel sera, en l’espèce, de l’ordre d’une vingtaine de minutes, cet impact économique doit, toutefois, être relativisé dès lors, d’une part, qu’il résulte de l’instruction qu’une telle liaison ne constitue pas un facteur suffisant de développement économique, et, d’autre part, que le coût élevé du péage de la future liaison autoroutière sera de nature à en minorer significativement l’intérêt pour les opérateurs économiques. » (n°38).

    Et il en résulte pour le juge administratif ceci : « Dans ces conditions, compte tenu de la seule nécessité de conforter le développement économique du bassin de Castres-Mazamet, et non de procéder à son redressement, ainsi que des effets relatifs que la création d’une liaison autoroutière peut avoir sur ce confortement, les motifs économiques avancés pour justifier un tel projet ne sauraient caractériser l’existence d’une raison impérative d’intérêt public majeur. » (n°39).

    Cela dit, le prix du péage ne devrait être une raison principale, il devrait anecdotique en ce sens que le prix peut être fixé autrement, soit par une baisse avec un apport d'argent public supplémentaire (c'est-à-dire que les contribuables paient au lieu des usagers) soit une baisse sans compensation publique, qui serait de toute façon plus rentable que l'arrêt définitif des travaux aujourd'hui.
     

     
     


    D'autres arguments ont été pris en compte par le juge administratif, au point de conclure comme le proclame l'extrait mis en tête de l'article, que tous les arguments pour l'autoroute « ne sauraient (…) suffire à caractériser l’existence d’une raison impérative d’intérêt public majeur ». Il faut bien comprendre que pour arriver à cette conclusion, le juge administratif a fait une analyste très détaillée de la situation, en particulier, il a étudié la démographie du bassin de Castres-Mazamet (et a conclu qu'il n'y avait plus le décrochage démographique à la hausse envisagé dans les années 1990), aussi l'historique des accidents routiers sur la N126, et plein d'autres éléments comme la nature du trafic routier actuel (professionnel, particulier, destination des déplacements, etc.).

    C'est cette conclusion qui est fustigée par les partisans de l'autoroute A69 avec plusieurs arguments de poids.

    Le premier est quasi-philosophique : les acteurs politiques sur le terrain, de tous les bords politiques, qui sont les représentants du peuple, sont les plus aptes à dire ce qui est l'intérêt général, l'intérêt des populations, l'intérêt public majeur. Si la justice administrative empêche toute construction, il n'y a plus de possibilité d'évoluer, de se moderniser, de se développer, d'innover, c'est donc grave. Il y a une clivage juge versus politique sur ce que doit devenir la société.
     

     
     


    À cette inquiétude, réelle, qui se retrouve à un niveau plus élevé avec les décisions du Conseil Constitutionnel qui peut invalider des dispositions d'un texte de loi voté par le Parlement, il y a une réponse qui me paraît assez simple. Au même titre que le Conseil Constitutionnel ne se fie qu'à la Constitution (et au bloc de constitutionnalité), et qu'il suffit aux parlementaires de réviser la Constitution pour valider une disposition qui n'aurait pas été validée en l'état, le juge administratif ne fait que lire la loi (et l'interpréter, bien sûr, ce qui crée de la jurisprudence), et il y a un côté schizophrénique des politiques qui font des lois qui, ensuite, les piègent, qui les enserrent, les enferment, les empêchent de tourner en rond.

    Et toutes les lois sur l'environnement sont de ce ressort : ce sont des lois qui mettent de nombreuses contraintes pour protéger l'environnement. Mais certains objectifs comme le zéro artificialisation nette sont démentiels, je pèse mon mot, lorsqu'on a besoin d'infrastructures nouvelles et surtout, de logements nouveaux pour une population qui, malgré la faible natalité, ne cesse de croître (du moins, ses besoins en logement, car le mode de vie renforce l'individualisation, la séparation des familles, leur recomposition, etc.). Peut-être qu'avant de dicter l'idéal, il faudrait juste le réalisable pour qu'il y ait une acceptation globale de la société de ces contraintes (sinon, le risque, c'est de faire le jeu des populismes et de revenir très brutalement en arrière).


    Dans le point 43 de la conclusion proposée, il est suivi ceci, qui est très intéressant aussi : « et ce, quand bien même la loi d’orientation susvisée du 24 décembre 2019, dite LOM, laquelle a pour objet de définir la stratégie et la programmation financière et opérationnelle des investissements de l'État dans les systèmes de transports pour la période 2019-2037, a reconnu ce projet comme étant prioritaire au titre des dépenses de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France et que l’arrêté susvisé du 31 mai 2024, lequel est de niveau infra-législatif, a, dans le cadre d’une législation distincte, classé ce projet parmi ceux d’envergure nationale ou européenne présentant un intérêt public majeur. ».

    En clair, le juge administratif se sent permis de juger quelle loi prime sur quelle autre. C'est très important... et surtout, nécessaire, dès lors que des textes de loi s'entremêlent, voire se contredisent, avec des injonctions contradictoires. Si le législateur était plus ordonné, plus global, il éviterait de laisser le choix à un tribunal administratif. (L'exemple type est : il faut construire beaucoup plus de logements notamment beaucoup plus de logements sociaux, mais il ne faut plus artificialiser de terrain ; on fait quoi ?on creuse des cavernes ?).

    Le deuxième argument pour fustiger cette conclusion, ce sont les conséquences d'une suspension, provisoire ou, pire, définitive, des travaux alors qu'ils ont commencé il y a deux ans, que des centaines d'emplois sont en jeu et que des centaines de millions d'euros ont déjà été engagés dans ce projet. Dès lors que toutes les autorisations ont été données, après enquêtes publiques, etc., comment la justice peut-elle, après coup, encore interdire le projet ?

    Cet argument ne tient pas beaucoup car il est presque trumpien ! En gros, forçons la construction et c'est la politique du fait accompli. Certaines villas au bord de la mer, qui violent la loi littoral, ont subi les mêmes déboires judiciaires ou administratifs. À côté de Grenoble, un hypermarché a même été remis en cause plusieurs années voire une dizaine d'années après son ouverture, qui avait été considérée comme illégale, longtemps après.

    Le troisième argument est, à mon sens, plus sérieux, car le jugement sur le fond n'était pas le premier recours déposé par les zadistes contre le projet d'A69. C'était le énième. Il y a eu de nombreuses décisions qui avaient déjà donné raison au projet, d'où la surprise de la décision du 27 février 2025.


    Ainsi, le projet a eu sa déclaration d'utilité publique le 19 juillet 2018 (décret n°2018-638 du 19 juillet 2018 signé par Édouard Philippe) et le contrat de concession avec la société Atosca a été signé le 20 avril 2022 (décret n°2022-599 du 20 avril 2022 signé par Jean Castex). L'élargissement de l'A680 a été déclaré d'utilité publique le 22 décembre 2017 par un arrêté du préfet de Haute-Garonne.

    Plusieurs recours en référés ont été déboutés. Le 5 mars 2021, le Conseil d'État a rejeté le recours en annulation du décret du 19 juillet 2018 (décision n°424323). Le juge du référé-liberé du tribunal administratif de Toulouse a rejeté le 24 mars 2023 la demande d'interruption des travaux (ordonnance n°2301521), décision confirmée par le Conseil d'État le 19 avril 2023 (décision n°472633). Le juge des référés a rejeté la demande d'interruption des travaux le 3 août 2023. Le tribunal administratif de Toulouse a rejeté une nouvelle demande d'interruption des travaux le 6 octobre 2023 (ordonnance n°230714). En tout, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté quatre fois par ordonnance la demande d'arrêt des travaux. Le Conseil d'État a validé le 29 novembre 2023 l'autorisation environnementale délivrée le 1er mars 2023 après le rejet le 1er août 2023 par le tribunal administratif de la demande d'annulation dudit décret (ordonnance n°230323). Le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a encore une fois rejeté le 21 janvier 2025 une nouvelle demande de suspension des travaux (ordonnance n°2407798) à cause de la proximité de la date du jugement sur le fond.
     

     
     


    La décision du juge des référés du tribunal administratif de Toulouse du 1er août 2023 est intéressante car justement, il considérait que le projet de l'A69 répondait à une « raison impérative d'intérêt public majeur » avec les arguments suivants : « Il résulte de l’instruction que le projet de l’autoroute A69 a été engagé par l’État en vue de faciliter les liaisons entre Toulouse, chef-lieu de la région Occitanie, et Castres, chef-lieu d’arrondissement du sud du Tarn constituant un pôle important notamment en termes de service public, d’économie et d’emploi dans le cadre d’un bassin de vie et d’activité s’étendant à Mazamet et à l’ensemble de l’est du département, pôle qui, s’il dispose d’une cohérence et d’une dynamique internes, demeure relié à Toulouse par une route nationale dont seule une brève portion dispose d’une chaussée à deux fois deux voies. Par ailleurs, il résulte de l’instruction, que même dans les hypothèses les moins favorables, la construction de cette liaison autoroutière, en absorbant une partie du trafic de la route nationale 126, induirait un gain de temps et de confort sur ce parcours d’environ vingt minutes sur un trajet d’une heure et dix minutes, aurait un effet positif sur la sécurité routière en évitant notamment la traversée du centre de certaines communes et la circulation d’un trafic important sur une route nationale essentiellement composée de sections à deux fois une voie, et serait ainsi susceptible de contribuer au rééquilibrage territorial attendu entre le bassin de Castres-Mazamet et les autres pôles de l’aire d’influence de Toulouse, tant au point de vue démographique qu’au point de vue économique. Si les requérantes, en s’appuyant notamment sur les avis rendus par l’autorité environnementale et le conseil national de protection de la nature sur le dossier de demande d’autorisation environnementale, ainsi que sur certaines analyses socio-économiques réalisées avant l’intervention de la déclaration d’utilité publique, remettent en cause la pertinence de ces objectifs ainsi que la réalité et l’ampleur de ces gains, il ne résulte pas de leur argumentation, qui repose essentiellement sur des hypothèses ou des interrogations sur les effets attendus de l’ouvrage, que les motifs de la politique d’aménagement ainsi menée, la configuration de l’autoroute A69, la nature des territoires qu’elle doit desservir, le coût de son péage, ou ses éventuelles conséquences négatives seraient susceptibles de créer un doute, en l’état de l’instruction, sur son caractère de projet répondant à une raison impérative d’intérêt public majeur au sens et pour l’application de l’article L.411-2 du code de l’environnement. » (n°13).

    En clair, et je ne vois pas en quoi le fait que ce soit le juge des référés qui a pris la décision change la logique, cette décision reconnaissait la raison impérative d'intérêt public majeur en détaillant les arguments pour s'en convaincre. Pourquoi ce même tribunal administratif, sur le fond, un an et demi plus tard, aurait une conclusion diamétralement opposée ? C'est cette question qui me pose problème.

    Maître Arnaud Gossement, professeur associé à la Sorbonne et avocat du cabinet Gossement Avocats spécialisé dans le droit de l'environnement, droit de l'énergie, droit de l'urbanisme, public et privé, a cité aussi, dans son blog, une autre motivation de rejet dans la décision du 1er août 2023, car selon le juge des référés, le bénéficiaire de l'autorisation environnementale contestée a recherché d'autres solutions : « L’étude d’impact préalable à l’intervention de l’autorisation environnementale contestée procède à une comparaison précise des avantages et inconvénients du projet objet de cette autorisation avec ceux afférents aux solutions alternatives que constituent un accroissement de la desserte ferroviaire entre Toulouse et Castres, l’aménagement sur place de la route nationale 126 et son aménagement par création à distance de celle-ci d’un axe non autoroutier doublant cette route, solutions écartées en raison de coûts d’investissement importants et d’un impact majoré sur l’écosystème et les riverains. Il en résulte, dès lors que les hypothèses et conclusions retenues par l’étude d’impact sur ce point ne sont pas sérieusement remises en cause par l’argumentation des requérantes, que le moyen tiré de l’insuffisance de la recherche d’autre solution satisfaisante au sens et pour l’application de l’article L.411-2 du code de l’environnement n’est pas de nature, en l’état de l’instruction, à créer un doute sérieux sur la légalité de l’arrêté attaqué. ».

    Enfin, une commission d'enquête parlementaire sur l'A69 a vu le jour à l'initiative du groupe écologiste à l'Assemblée Nationale le 16 janvier 2024, mais la dissolution de l'Assemblée a annulé la commission et tous les travaux en cours. Au cours des auditions du 27 février 2024, l'ancien Ministre des Transports (entre 2005 et 2007) Dominique Perben a expliqué notamment : « À l’époque, nous étions très préoccupés par l’équilibre du territoire et par le fait que le dynamisme de la métropole toulousaine bénéficie aussi aux autres villes. ». Il s'agissait donc bien de désenclaver un bassin d'emploi privé de liaison rapide vers la métropole toulousaine.

    Quelle sera la suite de cette suspension des travaux ordonnée le 27 février 2025 ? Il y en a deux.
    L'État va interjeter appel (dans un délai de deux mois), probablement la société concessionnaire aussi, mais, selon l'article R.811-14 du code de justice administrative, l'appel n'est pas suspensif. C'est la raison pour laquelle l'État va aussi faire une requête en sursis à exécution du jugement, auprès de la cour administrative d'appel, dont le but est de permettre la poursuite des travaux pendant le temps de l'instruction du procès en appel.

    La requête en sursis à exécution du jugement (article R.811-15 du code de justice administrative) est une procédure qui est acceptée très rarement. Elle nécessite deux conditions : d'une part, que les conséquences d'un non-sursis, en l'occurrence l'arrêt des travaux, sont très fâcheuses (notamment pour l'emploi de centaines de personnes), d'autre part, qu'il y a suffisamment d'argument pour penser que la cour d'appel puisse donner une décision contraire à la première instance. Interrogé par Xavier Lalu le 28 février 2025 sur France Info, maître Antoine Hudrisier, avocat spécialiste en droit public, a précisé : « Dans ce cas, si la cour d'administrative d'appel juge la demande recevable, elle peut faire renaître, par ordonnance, l'existence juridique de l'autorisation environnementale, en attendant la décision en appel. (…) Reste à savoir dans quel délai pourrait être jugée cette demande de sursis à exécution car rien n'est précisé dans le code à ce sujet. ».

    Dans tous les cas, cela ira certainement jusqu'au Conseil d'État puisque les deux parties sont prêtes à aller jusqu'au bout, l'État et la société concessionnaire puisque c'est un projet essentiel d'aménagement du territoire, les zadistes par leur combativité juridique.

    Je ne conteste évidemment pas la décision du 27 février 2025 qui a été prise certainement sans légèreté et en comprenant tous les enjeux en présence, notamment économiques et sociaux, mais j'espère que l'appel rétablira la situation qui paraît assez ubuesque actuellement puisqu'une moitié d'autoroute est déjà construite et risque de rester en l'état.

    Je reste néanmoins convaincu que la décision finale de ce qu'est une « raison impérative d'intérêt public majeur » doit rester au pouvoir démocratique, c'est-à-dire aux élus, représentants du peuple, voire au peuple lui-même si on le consulte, et pas aux juges ni aux demandeurs d'arrêt de toutes les constructions d'infrastructures, que ce soit l'A69, le barrage de Sivens (mais qui ne vaut pas la vie d'un jeune homme, rendons hommage à Rémi Fraisse pour la mort duquel la CEDH a condamné le 27 février 2025 la France de violation du droit de toute personne à la vie), ou encore l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, à Nantes, projet pourtant très bien ficelé, consensuel (toute la classe politique l'approuvait), ratifié par une consultation populaire, et annulé sur l'autel de la lâcheté de François Hollande.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (28 février 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Automobilistes franciliens, attention à la voie du covoiturage sur le périph !
    Foire aux questions sur Notre-Dame-des-Landes.
    A69, autoroute erratique !
    Méfiez-vous du péage par smartphone sur les autoroutes !
    5 ans de prison dont 2 ferme pour Pierre Palmade.
    Tristesse.
    Contrôle médical obligatoire pour le permis de conduire : une erreur de vision ?
    Émotion nationale pour Alexandra Sonac et sa fille adolescente.
    Claude Got.
    Création du délit d'homicide routier : seulement cosmétique ?
    Le Comité interministériel de la sécurité routière (CISR) du lundi 17 juillet 2023.
    Le refus d'obtempérer est un délit routier.
    Faut-il interdire aux insomniaques de conduire ?
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    L'avenir du périph' parisien en question.
    Fin du retrait de point pour les "petits" excès de vitesse : est-ce bien raisonnable ?
    Les trottinettes à Paris.
    L'accident de Pierre Palmade.
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    Anne Heche.
    Diana Spencer.
    100 ans de code de la route.
    80 km/h : le bilan 2018-2020 très positif.






    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250227-autoroute-a69.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/environnement/article/a69-autoroute-erratique-259594

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/02/28/article-sr-20250227-autoroute-a69.html


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