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télévision - Page 5

  • Anouk Aimée la savoureuse marginale

    « Anouk Aimée, c'est un peu un cas en marge. "Huit et demi", "Lola", "Un homme et une femme" sont eux aussi des films en marge, mais c'est dans les marges du cinéma que se conçoit et s'épanouit le vrai cinéma. » (François Chalais, mai 1966).




     

     
     


    Monument du cinéma français, selon l'expression de France Culture, l'actrice Anouk Aimée s'est éteinte à son domicile parisien ce mardi 18 juin 2024 à l'âge de 92 ans (née le 27 avril 1932 à Paris) selon un communiqué de sa fille Manuella. Cette dame déjà d'un grand âge avait su rester jeune non seulement dans l'esprit mais même dans le corps, il suffit de revoir une interview de 2002 (elle avait presque 70 ans) pour s'en rendre compte (on ne lui aurait pas donné un tel âge). Elle était une enfant précoce du cinéma et, jeune et belle star des années 1950 et 1960, elle a tourné avec les plus grands réalisateurs.

    Pour Pierre Murat, dans un article publié ce 18 juin 2024 dans "Télérama", elle était la « reine des rôle énigmatiques » et n'avait pas besoin d'être dirigée : « Elle était là, elle, et cela suffisait. Tous ses metteurs en scène s’effaçaient devant l’incroyable présence qui lui servait de talent. ». Fellini, qui lui a donné deux rôles, disait d'elle : « Son visage évoque la même sensualité que ceux de Greta Garbo, de Marlene Dietrich et de Joan Crawford, ces grandes reines pleines de mystère. ». Il a dit à Anouk joliment : « Le temps se comporte avec toi comme un gentleman ! ».


    Née de deux parents comédiens et d'origine juive, elle s'appelait d'abord Nicole Dreyfus. Cette origine juive l'a conduite à être scolarisée au collège de Morzine en Savoie pour échapper aux rafles, et elle y a connu Roger Vadim qui lui a appris à faire du ski. Parce qu'elle était une adolescente à la beauté étincelante, le réalisateur Henri Calef lui a proposé de tourner dans "La Maison sous la mer" (sorti le 20 août 1947) : elle avait 14 ans. En fait, Anouk Aimée a toujours un peu regretté de ne pas avoir fait carrière : elle aurait pu demander des rôles, elle n'a fait qu'accepter (ou refuser) les rôles qu'on lui proposait. Elle est devenue actrice par effraction, et elle aurait voulu devenir danseuse classique ou pharmacienne.

    Ainsi, malgré la participation à des films éclatants (et culte), elle n'a jamais bénéficié de ses succès et chaque fois, ce fut un recommencement pour avoir des rôles. Elle n'a pas "capitalisé" sur ses succès parce qu'elle n'a jamais cherché à le faire. Un peu plus tard, dans les années 1970, elle a même fait un break pour devenir femme au foyer et elle a appris à faire de la bonne cuisine lorsqu'elle vivait avec l'acteur britannique Albert Finney, son quatrième (et dernier) mari.

    Elle n'a pas fait carrière mais elle a quand même tourné près de quatre-vingt-dix films, surtout au cinéma, quelques-uns à la télévision. Et pas rien : Marcel Carné, André Cayatte, Alexandre Astruc, Julien Duvivier, Jacques Becker, Georges Franju, Jean-Pierre Mocky, Federico Fillini, Jacques Demy, Philippe de Broca, Robert Aldrich, Claude Lelouch, André Delvaux, George Cukor, Élie Chouraqui, Robert Altman, Alexandre Arcady, Marceline Loridan-Ivens, Yvan Attal, Édouard Molinaro, Agnès Varda, Charlotte de Turckheim, etc.

    En particulier, elle a tourné avec le rôle principal dans des chefs-d'œuvre : "La dolce vita" de Fellini (sorti le 5 février 1960 ; Palme d'Or à Cannes) avec Marcello Mastroianni et Anita Ekberg ; "Lola" de Jacques Demy (sorti le 3 mars 1961) ; "Huit et demi" de Fellini (sorti le 14 février 1963) avec Marcello Mastroianni et Claudia Cardinale ; "Un homme et une femme" de Lelouch (sorti le 27 mai 1966) avec Jean-Louis Trintignant, Pierre Barouh (un futur mari) et Valérie Lagrange. 1966 fut la consécration internationale pour l'actrice de 32 ans avec ce film qui a obtenu la Palme d'Or à Cannes et une nomination aux Oscars : dans l'une des deux vidéos que je propose ci-après, on la voit interrogée par François Chalais pour le Festival de Cannes en mai 1966. Elle était enjouée, souriante, spontanée, naturelle. Elle ne jouait pas la star boudeuse.

     

     
     


    Elle a été adulée aux États-Unis et on lui a permis de rencontrer Groucho Marx. L'acteur qu'elle admirait John Wayne est aussi venu la voir pour la saluer et la féliciter. Avec Danielle Darrieux et Catherine Deneuve, Anouk Aimée était l'une des muses de Jacques Demy (trois films). Et aussi une des égéries de la Nouvelle Vague, elle était une actrice fétiche de Claude Lelouch avec qui elle a tourné huit films.

    Anouk était le nom de son premier personnage dans son premier film "La Maison sous la mer" et rapidement, on l'appelait ainsi. Elle comptait garder ce nom de scène tout seul (Anouk) comme une autre actrice s'appelait seulement Arletty ("Atmosphère ! Atmosphère ! Est-ce que j'ai une gueule d'atmosphère ?"), mais Jacques Prévert lui a confié ce précieux conseil : Anouk tout seul ? Mais à 40 ans, qu'est-ce que tu vas devenir ?... et il lui a ajouté : Aimée. Elle allait donc être Anouk Aimée.

    Elle avait fait la connaissance de Jacques Prévert en mai 1947 pendant le tournage de son deuxième film, "La Fleur de l'âge", de Marcel Carné (avec Arletty, Serge Reggiani, Martine Carol et Paul Meurisse), qui n'a pas été achevé pour cause de manque de financement (Prévert en était le coscénariste). Au début des années 1950, Anouk Aimée s'est intégrée dans le petit milieu de Saint-Germain-des-Prés, faisant la connaissance de Pablo Picasso, Jean Genet, Jean Cocteau, Raymond Queneau, Jean-Paul Sartre, Simone de Beauvoir, Juliette Gréco, etc. (Pierre Murat : « Jean Genet qui lui dit adorer sortir avec elle : sa beauté attire le regard des hommes qu’il tente, ensuite, de draguer ! »). Elle a joué avec de nombreux acteurs comme Gérard Philipe, Jean-Pierre Cassel, Serge Reggiani, Yves Montand, etc. En France, en Grande-Bretagne, en Allemagne, en Italie, aux États-Unis. Dans les années 1990 puis 2000, elle a fait du théâtre avec Alain Delon, Philippe Noiret, Gérard Depardieu, Jean-Louis Trintignant, Jacques Weber, Bruno Cremer, etc.

    Dans les récompenses qu'elle a reçues, on peut citer entre autres le prix d'interprétation féminine du Festival de Cannes en 1980, un César d'honneur pour l'ensemble de sa carrière en 2002 (et une nomination au César de la meilleure actrice en 1979), un Golden Globe en 1967 (meilleure actrice), le prix de la meilleure actrice étrangères aux BAFTA en 1968, même l'Aigle d'or en 2010 (récompense russe), une nomination pour l'Oscar de la meilleure actrice en 1967 (pour "Un homme et une femme"), etc.


    Anouk Aimée se répandait rarement sur les plateaux de télévision. Néanmoins, elle était l'invitée de Thierry Ardisson le 13 avril 2002 sur France 2 dans son émission "Tout le monde en parle" (et pas le 9 octobre 2004 : elle venait juste de recevoir son César d'honneur). C'est la seconde vidéo que je propose ici. Se prêtant au jeu du pas très conventionnel animateur, elle se montrait à la fois intelligente et intellectuelle (elle disait regarder Arte), et malgré son caractère réservé, elle dévoilait un excellent sens de la répartie.
     

     
     


    L'intellectualisme, on peut l'appréhender lorsque Thierry Ardisson lui a demandé quelle question elle lui poserait : elle lui a posé une question ...tellement compliquée que cela a rendu silencieux le bavard animateur (qui était donc sans réponse). À la question : si vous deviez refaire votre vie, elle a reconnu qu'elle prendrait en considération avec un peu plus de sérieux l'argent... tout en se disant pour sa vie en cours : « Je n'ai pas trop à me plaindre ! ». À la question : que vous dites-vous en vous regardant dans un miroir le matin ?, elle a répondu : « Je me regarde, mais je ne mets pas mes lunettes ! ». La dernière fois qu'elle a pleuré (le sujet est encore d'une actualité très brûlante) : elle a vu deux mois auparavant un reportage sur des enfants palestiniens et des enfants israéliens qui jouaient ensemble... puis quand ils sont rentrés chez eux, ils se disaient que peut-être, quand ils seraient grands, ils seraient amenés à s'entre-tuer.

    Mais la plus belle démonstration de son esprit de répartie, c'était à la question : s'il vous restait vingt-quatre heures à vivre, vous feriez quoi pendant ces vingt-quatre heures ? Elle a répondu avec un éclat de rire et sans hésiter : « Je pars à Honolulu parce que je gagne un jour ! ». Hélas, ce mardi matin, les vols pour Honolulu étaient complets. RIP.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (18 juin 2024)
    http://www.rakotoarison.eu

    Pour aller plus loin :
    Anouk Aimée.
    Marceline Loridan-Ivens.
    Édouard Baer.
    Françoise Hardy.
    Charles Aznavour.
    Alain Souchon.
    Patrick Bruel.
    Frédéric Mitterrand.
    Fanny Ardant.
    Alain Bashung.
    Alain Chamfort.
    Sophia Aram.
    Plastic Bertrand.
    Micheline Presle.
    Sarah Bernhardt.
    Jacques Tati.
    Sandrine Bonnaire.
    Shailene Woodley.
    Gérard Jugnot.
    Comment va Alain Delon ?
    Alfred Hitchcock.
    Brigitte Bardot.
    Charlie Chaplin.











    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240618-anouk-aimee.html

    https://www.agoravox.fr/culture-loisirs/culture/article/anouk-aimee-la-savoureuse-255310

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/06/18/article-sr-20240618-anouk-aimee.html




     

  • Françoise Hardy : Rendez-vous dans une autre vie...

    « Pardon si je pars en catimini
    Et sans préavis
    Pardon pour ce soir, pour hier aussi
    La pièce est finie »

    (Françoise Hardy/François Maurin, 2012).




     

     
     


    Tristesse et peut-être soulagement : ce mardi 11 juin 2024, dans la soirée, la nouvelle est tombée. Françoise Hardy s'est débarrassée de sa maladie, mais pas seulement. Icône des années 1960, star durable de la chanson française, elle avait beaucoup témoigné ces dernières années pour raconter ses souffrances et sa maladie. Elle avait fêté ses 80 ans au début de l'année, il y a à peine cinq mois.

    Elle n'aimait pas être une star, ni être sur scène, mais elle aimait chanter et elle nous a laissé de très nombreuses œuvres (79 albums en France, 43 musiques de film, etc., sans compter les albums pour l'étranger). Avec beaucoup de collaborations avec d'autres artistes comme Serge Gainsbourg ("Comment te dire adieu"), Michel Berger ("Message personnel"), Michel Jonasz ("J'écoute de la musique saoule"), Alain Souchon ("C'est bien moi"), Michel Fugain ("Tabou"), Louis Chedid ("Moi vouloir toi"), Jacques Dutronc ("Partir quand même"), Étienne Daho ("Laisse-moi rêver"), Julien Clerc ("Fais-moi une place"), etc. Une chanson comme "Partir quand même" est très belle, très douce, très nostalgique (elle allait devenir disque d'or en quelques semaines) ; elle m'avait souvent accompagné dans mes trajets nocturnes à une époque où je faisais beaucoup de route le week-end. En janvier 1982, Françoise Hardy disait : « J’ai toujours été la même, j’aime les belles chansons lentes sur fond de violons. Je n’aime que les chansons tristes. » ("Best" n°62, cité par Wikipédia).

    Bien entendu, femme éclatante (de beauté en particulier), qui attirait tout le monde, jusqu'à Bob Dylan ! Jacques Dutronc fut son mari et Thomas Dutronc leur fils. Elle a eu un peu de chance pour ce qui allait devenir son "tube" très connu qui a marqué les années 1960, "Tous les garçons et les filles", car lors de la soirée électorale du référendum sur l'élection du Président de la République au suffrage universel direct, le dimanche 28 octobre 1962, soirée très suivie par les téléspectateurs sur l'unique chaîne de la future ORTF, entre deux intervenants politiques, la chanson a été diffusée en guise d'intermède, ce qui l'a rendue célèbre et populaire en quelques minutes. Le disque s'est vendu à plus d'un demi-million d'exemplaires à la fin de l'année. Merci De Gaulle !

    Comme actrice, elle a également amorcé à ses débuts une carrière cinématographique qu'elle n'a pas poursuivie, sauf pour les bandes originales de films. Pour son œuvre musicale, elle a reçu de très nombreuses récompenses dont deux Victoires de la musique (en 1991 et 2005), le grand-prix du disque de l'Académie Charles-Cros en 1963, le grand-prix de la Sacem en 2000, la grande médaille de la chanson française de l'Académie française en 2006, etc.


    L'Internet peut faire revivre ses principaux succès immédiatement.
    Hommage, en quinze déclinaisons.


    1. "Tous les garçons et les filles" (1962)






    2. "Comment te dire adieu" (1968)






    3. "Parlez-moi de lui" (1968)






    4. "Message personnel" (1973)





    5. "Les Paradis perdus" (duo avec Christophe, sur Europe 1 le 21 septembre 1974)






    6. "Chanson sur toi et nous" (1977)






    7. "J'écoute de la musique saoule" (1978)






    8. "C'est bien moi" (1982)





    9. "Tabou" (1982)






    10. "Moi vouloir toi" (1983)






    11. "V.I.P." (1986)






    12. "Partir quand même" (1988)






    13. "Laisse-moi rêver" (1988)






    14. "Fais-moi une place" (1989)






    15. "Rendez-vous dans une autre vie" (2012






    « Partir quand même
    pendant qu'il dort
    pendant qu'il rêve
    et qu'il est temps encore
    partir quand même
    au moment fort
    briser les chaînes
    qui me lient à son sort
    vont faire de moi un poids mort

    un objet du décor »

    (Françoise Hardy/Jacques Dutronc, 1988).



    Aussi sur le blog.


    Sylvain Rakotoarison (11 juin 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Un calvaire.
    Françoise Hardy.
    Charles Aznavour.
    Alain Souchon.
    Patrick Bruel.
    Eden Golan.
    ABBA.
    Toomaj Salehi.
    Sophia Aram.
    Fanny Ardant.
    Alain Bashung.
    Alain Chamfort.
    Micheline Presle.
    Plastic Bertrand.
    Jacques Dutronc.

    Guy Marchand.
    Maria Callas.
    Catherine Deneuve.
    Gérard Depardieu.
    Stéphanie de Monaco.
    Jane Birkin.
    Fernand Raynaud.
    Marcel Zanini.
    Patricia Kaas.
    Kim Wilde.

     

     
     





    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240611-francoise-hardy.html

    https://www.agoravox.fr/culture-loisirs/culture/article/francoise-hardy-rendez-vous-dans-255170

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/06/11/article-sr-20240611-francoise-hardy.html







     

  • Sidération institutionnelle : la Vie dissolue d'Emmanuel Macron

    « - Le Président de la République peut, après consultation du Premier Ministre et des Présidents des assemblées, prononcer la dissolution de l'Assemblée Nationale.
    - Les élections générales ont lieu vingt jours au moins et quarante jours au plus après la dissolution.
    - L'Assemblée Nationale se réunit de plein droit le deuxième jeudi qui suit son élection. Si cette réunion a lieu en dehors de la période prévue pour la session ordinaire, une session est ouverte de droit pour une durée de quinze jours.
    - Il ne peut être procédé à une nouvelle dissolution dans l'année qui suit ces élections. »
    (Article 12 de la Constitution).





     

     
     


    On ne va pas le cacher, je reste surpris et atterré par la dissolution annoncée par le Président Emmanuel Macron au soir des élections européennes de ce dimanche 9 juin 2024. J'étais dans mon bureau de vote en fin de dépouillement quand je l'ai appris et je l'ai moi-même appris aux autres assesseurs et scrutateurs consternés.

    Par l'observation continue des scrutins de la Cinquième République, je pressentais bien qu'il y aurait, comme dans tous les scrutins, une surprise. La surprise de ces européennes, c'est qu'en gros, les résultats sont cohérents avec ce que donnaient les derniers sondages, je les commenterai donc, mais plus tard, dans un autre article. La surprise et la sidération ne viennent pas de ces résultats finalement attendus, mais de la réaction très rapide, trop rapide ?, du Président, au cours d'une courte allocution télévisée à 21 heures, celle de dissoudre l'Assemblée Nationale et d'organiser de nouvelles élections législatives dès le 30 juin 2024 pour le premier tour et le 7 juillet 2024 pour le second tour.

    Après avoir constaté la défaite de son camp et la victoire des populistes, Emmanuel Macron a déclaré en effet : « Pour moi, qui ai toujours considéré qu'une Europe unie, forte, indépendante est bonne pour la France, c'est une situation à laquelle je ne peux me résoudre. La montée des nationalistes, des démagogues, est un danger pour notre nation, mais aussi pour notre Europe, pour la place de la France en Europe et dans le monde. (…) Oui, l'extrême droite est à la fois l'appauvrissement des Français et le déclassement de notre pays. Je ne saurais donc, à l'issue de cette journée, faire comme si de rien n'était. À cette situation s'ajoute une fièvre qui s'est emparée ces dernières années du débat public et parlementaire dans notre pays, un désordre qui, je le sais, vous inquiète, parfois vous choque, et auquel je n'entends rien céder. Or, aujourd'hui, les défis qui se présentent à nous, qu'il s'agisse des dangers extérieurs, du dérèglement climatique et de ses conséquences, ou des menaces à notre propre cohésion, ces défis exigent la clarté dans nos débats, l'ambition pour le pays et le respect pour chaque Français. C'est pourquoi, après avoir procédé aux consultations prévues à l'article 12 de notre Constitution, j'ai décidé de vous redonner le choix de notre avenir parlementaire par le vote. Je dissous donc ce soir l'Assemblée nationale. Je signerai dans quelques instants le décret de convocation des élections législatives qui se tiendront le 30 juin pour le premier tour et le 7 juillet pour le second. Cette décision est grave, lourde, mais c'est avant tout, un acte de confiance. ».


    Comme je l'ai rappelé en début d'article, si l'agenda est serré (j'écrirais même dément pour les communes qui organiseront les deux scrutins !), il reste constitutionnel. L'article 12 de la Constitution dit entre vingt et quarante jours de la dissolution, et là, le Président a proposé vingt et un jours. Un record ! Évacuons quelques remarques préliminaires : comme dans le cas d'un référendum, le principe de retourner aux urnes est, en lui-même, un gage de démocratie, évidemment. Donner la parole au peuple est toujours un gaine de démocratie. Mais il est des décisions qui peuvent être désastreuses. Jouer avec le feu peut brûler.

    Car la première image qui vient à l'esprit, c'est le Président qui offre sur un plateau d'argent le pouvoir au RN, pour deux à trois ans au moins. Comment a-t-il pu penser qu'en trois semaines, les Français changeraient radicalement de tendance électorale ? Au contraire, on a bien vu en 1981, 1988, 2002, 2007, 2012, 2017 et 2022 que les Français ont confirmé la tendance présidentielle aux législatives qui ont suivi, parfois en l'amplifiant, parfois en la freinant mais jamais en la désavouant. Or, on peut imaginer raisonnablement que la tendance ici, favorable au RN, serait amplifiée avec ces élections législatives anticipées. Il faut comprendre que le RN a infusé dans toutes les catégories de la population, âge, catégorie socioprofessionnelle, niveau d'études, etc. Et que son audience électorale remarquable provient d'un mouvement de fond, très profond, pas seulement des gilets jeunes, mais depuis quarante ans (septembre 1983 à Dreux) et, en outre, c'est un mouvement international qui touche pratiquement toute l'Europe (les élections britanniques du 4 juillet 2024 seront instructives) et même les États-Unis, l'Amérique du Sud, etc. (d'où la responsabilité d'Emmanuel Macron pas vraiment évidente).

    Et le calendrier ! Quelle sottise ! Juste en fin d'année scolaire, quand les gens se préparent à leurs vacances (méritées). Juste avant les Jeux olympiques et paralympiques (bonjour la sécurité ! Sans compter que faire campagne dans un Paris à circulation impossible, cela pose quelques questions). Les week-ends de début d'été sont souvent très occupés pour les loisirs, seuls moments de détente après un printemps cette année particulièrement pluvieux. Manifestement, mais on le savait déjà, l'Élysée ne sent pas le pays.


    Dès lors que la dissolution est considérée comme un coup politique, la colère n'en prendra que plus d'ampleur. Ceux qui ont contribué à cette décision auront, face à l'histoire, une bien grave responsabilité. Car imaginer que tout le monde, hors de l'extrême droite, va rejoindre la Macronie au nom d'un combat sur les valeurs morales, c'est perdu d'avance et on le savait depuis 2017. On ne combat pas l'extrême droite, d'autant plus que son emballage a l'air plaisant, avec des incantations moralisatrices dont les électeurs n'ont rien à faire. D'ailleurs, Éric Ciotti, le président de LR, a rapidement confirmé qu'il n'était pas question de faire alliance avec la majorité présidentielle. Quant au PS, il ne lorgne que vers les insoumis sur lesquels ils ont repris l'ascendant électoral (et montre au passage le visage qu'il a toujours eu depuis 2018). Eh puis, que penser d'un Président qui répond "chiche !" aux revendications de dissolution réclamées à grands cris par l'extrême droite ? Comment peut-on tomber dans un tel piège tout seul ? Suicide collective à la mode kamikaze ? C'est comme si on sautait dans le vide de peur d'y être poussé.

    Cette dissolution du 9 juin 2024 a pour conséquence d'oublier encore un peu plus l'Europe, et le Parlement Européen, ce qui est franchement triste et décevant, surtout pour un Président si proche des partisans de la construction européenne. Elle a néanmoins quelques avantages non négligeables mais de court terme : interrompre l'examen du projet de loi sur l'euthanasie ; ne pas instaurer de proportionnelle aux législatives ; casser la concomitance présidentielle suivie des législatives depuis 2002 ; en finir avec cette Assemblée Nationale où régnait le désordre permanent (par le choc de deux extrêmes).

    Quelles ont été les motivations réelles d'Emmanuel Macron ? Probablement que les historiens se pencheront dans quelques décennies sur cette question en séchant. S'il souhaitait lever l'hypothèque RN, il risquerait d'en avoir pour ses frais. Après tout, le Zentrum a bien cherché à lever l'hypothèque de la NSADP en 1933. Rappelons aussi qu'un parti à 30%, comme c'est le cas aujourd'hui avec le RN, c'est la capacité d'obtenir plus de 50% des députés... sauf véritable sursaut électoral.

    Donner le pouvoir au RN pendant deux ou trois ans, sous contrôle présidentiel par une nouvelle cohabitation et éviter de perdre l'élection présidentielle. Maligne, Marie Le Pen s'est bien gardée de vouloir Matignon. Elle préfère laisser la responsabilité à Jordan Bardella dit Coquille vide, dont l'éventualité de l'échec n'impacterait pas sur l'avenir supposé présidentiel de Marine Le Pen. Mais qui dit qu'un gouvernement RN serait forcément impopulaire ? Le RN, astucieux, pourrait avoir tout le loisir, au contraire, de se rendre populaire en supprimant la limitation à 80 kilomètres par heure, le contrôle technique pour les motards, la fin des véhicules thermiques, et quelques autres mesures démagogiques et irresponsables qui soulageraient les Français inquiets par leurs libertés rognées de toute part.


    Il ne faut pas non plus oublier que, comme en 1997, la dissolution oblige le Président de la République qui ne pourra pas dissoudre avant un an. Une configuration de cohabitation donnerait donc nécessairement un grand ascendant au RN s'il gagnait les législatives anticipées car ses députés seraient "indissolvables" pendant un an !

    Cette dissolution du 9 juin 2024, qui restera dans les annales de la République, cela ne fait aucun doute, est la sixième depuis le début de la Cinquième République. Il est facile de se retourner en arrière pour imaginer l'avenir. Dans l'analyse, il faut éliminer les deux dissolutions prises juste après l'élection puis la réélection de François Mitterrand qui n'ont été que des confirmations sans surprise.

    Sans doute que la première comparaison qui arrive à l'esprit est celle avec la dissolution du 21 avril 1997 faite par Jacques Chirac. Et le parallélisme est terrible. Des élections législatives devaient avoir lieu en mars 1998. Jacques Chirac bénéficiait d'une très large majorité depuis le début de son septennat, la plus large de tous les temps. Au début du printemps 1997, le principal parti d'opposition, le PS, avait désigné tous ses candidats aux législatives de l'année suivante, tandis que le RPR n'avait pas fait ce travail de fond. À la dissolution, le PS était prêt à se battre, le RPR était pris à l'improviste. En 2024, le RN est déjà prêt avec tous ses candidats dans les circonscriptions. La rapidité des élections fait que les négociations pour d'éventuelles alliances n'auront pas le temps d'aboutir. Et la majorité est-elle prête à concourir ? Pas sûr. On peut faire la comparaison jusqu'au conseiller hors sol qui a recommandé cette très incertaine décision (Dominique de Villepin en 1997).

    On peut aussi imaginer qu'Emmanuel Macron pensait à la dissolution du 30 mai 1968 : le retournement de tendance a été spectaculaire aux législatives des 23 et 30 juin 1968. Mais retournement de quoi ? D'une "opinion publique" voyant d'un œil vaguement sympathique la révolte étudiante. Mais il n'y avait pas eu d'élections organisées le mois précédent.

     

     
     


    Peut-être qu'Emmanuel Macron pensait plutôt à la première dissolution, celle 9 octobre 1962. Il faut rappeler le contexte : l'Assemblée élue les 23 et 30 novembre 1958 n'avait pas de majorité absolue pour les gaullistes et alliés, la majorité était relative. Quand De Gaulle a proposé le 20 septembre 1962 le référendum pour élire le Président de la République au suffrage universel direct, il s'est heurté à un front uni des partis politiques (autres que l'UNR) contre ce projet (tant sur le fond, l'élection directe du Président, que sur la forme, le référendum par l'article 11 au lieu d'une révision par l'article 89 de la Constitution). Dans la crise politique, une motion de censure a été alors adoptée le 4 octobre 1962, la seule motion de censure jusqu'à maintenant adoptée (depuis 1958), si bien que le 9 octobre 1962, De Gaulle a dissous l'Assemblée et organisé des élections législatives les 18 et 25 novembre 1962, peu après le référendum fixé au 28 octobre 1962 (on note d'ailleurs que la limite de quarante jours a été respectée exactement).

    La quasi-unanimité de la classe politique contre les gaullistes ne laissaient guère de doute sur l'issue des scrutins. La lecture des notes d'Alain Peyrefitte permet de se faire une idée intéressante du climat psychologique. La plupart des ministres et députés gaullistes se considéraient en sursis, le régime des partis et les forces de la Quatrième République allaient gagner la partie contre eux et ils n'auraient qu'à rentrer chez eux après une expérience de quatre ans. La victoire du référendum (62,3% de oui avec 77,0% de participation) a engendré une grande victoire électorale aux législatives le mois suivant, apportant une large majorité absolue à l'UDR (ex-UNR) et ses alliés de 354 sièges sur 487 (avec 47,8% des voix au premier tour).

    Mais tout le monde n'est pas De Gaulle. La dissolution du 9 juin 2024 relève surtout d'une sorte de coup de poker peu admissible car il met la France en danger. Y aura-t-il un sursaut des Français face aux énormes enjeux nationaux et internationaux du moment ? Je le souhaite. Cette initiative présidentielle ne pourra pas être jugée à sa propre valeur avant le 7 juillet 2024, mais ce qui est sûr, c'est que c'est casse-cou et cela heurte de nombreux Français... parmi les plus proches du Président. Le ça-passe-ou-ça-casse très gaullien ne fait plus partie des mœurs d'une république plus participative.



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (09 juin 2024)
    http://www.rakotoarison.eu

    Pour aller plus loin :
    Sidération institutionnelle.
    Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron le 9 juin 2024 vers 20 heures 30 (texte intégral et vidéo).
    Emmanuel Macron, haut et fort dans l'intérêt de la France et des Français.
    Interview du Président Emmanuel Macron le 6 juin 2024 sur TF1 et France 2 (vidéo intégrale).
    Discours du Président Emmanuel Macron le 6 juin 2024 en Normandie.
    Les 80 ans du Débarquement en Normandie.
    Le souverainisme européen selon Emmanuel Macron : puissance, prospérité et humanisme.
    Discours du Président Emmanuel Macron sur l'Europe le 25 avril 2024 à la Sorbonne à Paris (texte intégral et vidéo).
    Emmanuel Macron et son plan de relance de l’Europe (le26 septembre 2017 à la Sorbonne).
    Texte intégral du discours d’Emmanuel Macron le 26 septembre 2017 à la Sorbonne.
    Emmanuel Macron très gaullien à la télévision pour expliquer la gravité de la situation en Ukraine.
    Ukraine : Emmanuel Macron est-il un va-t-en-guerre ?
    Soutien à l'Ukraine : la conférence de l'Élysée pour une défense européenne.
    Amitié franco-ukrainienne : fake news et accord de coopération.
    Pour que la France reste la France !
    Conférence de presse du Président Emmanuel Macron le 16 janvier 2024 à 20 heures 15 à l'Élysée (texte intégral et vidéo).
    Gabriel Macron.
    Tribune du Président Emmanuel Macron dans "Le Monde" du 29 décembre 2023.

    Le gouvernement de Gabriel Attal sarkozysé.
    Liste complète des membres du premier gouvernement de Gabriel Attal.
    Cérémonie de passation des pouvoirs à Matignon le 9 janvier 2024 (texte intégral et vidéo).
    Gabriel Attal plongé dans l'enfer de Matignon.
    Élisabeth Borne remerciée !
    Macron 2024 : bientôt le grand remplacement ...à Matignon ?
    Vœux 2024 d'Emmanuel Macron : mes chers compatriotes, l’action n’est pas une option !

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240609-dissolution.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/sideration-institutionnelle-la-vie-255132

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/06/09/article-sr-20240609-dissolution.html



     

  • Emmanuel Macron, haut et fort dans l'intérêt de la France et des Français

    « Parler un 6 juin est important pour ne pas confondre la mémoire et la vie de la Nation. » (Emmanuel Macron, le 6 juin 2024 sur TF1 et France 2).



     

     
     


    Grande séquence diplomatique pour le Président de la République Emmanuel Macron. Après les trois jours de visite d'État en Allemagne, où le peuple allemand l'a ovationné durant ses déplacements (notamment à Berlin et à Dresde) du 26 au 28 mai 2024, il a reçu ces mercredi 5 et jeudi 6 juin 2024 plus d'une vingtaine de chefs d'État et de gouvernement pour les cérémonies du 80e anniversaire du Débarquement en Normandie. Et cela avant la visite de Volodymyr Zelensky à Paris ce vendredi 7 juin 2024 et la visite d'État du Président américain Joe Biden ce samedi 8 juin 2024.

    Pourquoi alors s'étonner de voir le Président de la République vouloir s'adresser aux Français à cette occasion ? Certes, dans trois jours ont lieu les élections européennes, mais justement, tous ses prédécesseurs, et en particulier le plus illustre d'entre eux, De Gaulle, ne s'étaient pas embarrassés de ces considérations en prenant les ondes quand ils le voulaient, parfois même entre la fin de la campagne officielle et le début du scrutin. Du reste, dans le cas de maintenant, ce n'est plus le gouvernement qui régule les temps de parole mais l'Arcom (l'héritière du CSA) qui a décidé de prendre en compte son temps de parole, et donc, dans cette affaire, c'est surtout Valérie Hayer qui est la plus pénalisée !

    Donc, effectivement, Emmanuel Macron a répondu aux questions de Gille Bouleau de TF1 et d'Anne-Sophie Lapix de France 2 ce 6 juin 2024 entre 20 heures 10 et 20 heures 45, dans un des très beaux cloîtres de Caen (je suis un peu jaloux, lorsque j'y suis allé, je n'ai pas pu le visiter car c'était fermé !). Évidemment, le Président a défendu son droit à parler aux Français, cela fait d'ailleurs partie de sa prérogative constitutionnelle, l'article 5 de la Constitution dit explicitement qu'il est l'arbitre des élégances(« Il assure, par son arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l'État. »).

    Les messages d'Emmanuel Macron sont assez clairs et simples.

    Le premier, c'est en rapport avec les festivités du Débarquement. Il a souligné la grande participation populaire, beaucoup de Français, bien au-delà des invités, étaient présents à ces cérémonies et ce n'était pas par curiosité pour voir les officiels mais surtout pour rendre hommage aux vétérans venus spécialement des États-Unis et de Grande-Bretagne. Ces hommes-là étaient de très jeunes soldats, 18 ans, 20 ans, et ils ont perdu beaucoup d'amis, de camarades dans les combats, ils sont traumatisés à vie, ils sont maintenant centenaires ou pas loin de l'être. C'est grâce à eux que nous sommes une nation libre. Comment ne pas mettre le parallèle avec les élections européennes ? Emmanuel Macron a exhorté les Français à aller voter ce dimanche. Comment ne pas voter alors que des Américains et des Britanniques ont sacrifié leurs vies pour que nous puissions avoir ce droit ?

     

     
     


    Mais ce message est double. S'abstenir, c'est laisser les autres décider de l'Europe à sa place. Le Président a pris en exemple des électeurs britanniques qui n'avaient pas voté au référendum sur le Brexit et qui se sont retrouvés hors de l'Union ; ils s'en mordent encore les doigt. Emmanuel Macron craint un blocage de l'Europe avec l'arrivée massive de l'extrême droite, tant de France que d'ailleurs. Il entend donc remobiliser ceux qui sont pro-Européens pour stopper cette vague de sentiment anti-européen. Pour Emmanuel Macron, l'Europe nous protège et si l'extrême droite avait eu le pouvoir de blocage des institutions, il n'y aurait pas eu de vaccin contre le covid-19 qui aurait été soigné à coups de chloroquine et de Spoutnik. Il n'y aurait pas eu non plus de plan de relance contre lequel tous ses opposants français ont voté.

    Le deuxième message est plus régalien. Il a évoqué ce qu'il annoncerait officiellement le lendemain avec la visite de Volodymyr Zelensky à Paris, à savoir que la France allait livrer des Mirage 2000 à l'Ukraine pour défendre son espace aérien avec la possibilité d'atteindre des cibles militaires russes sur territoire russe si nécessaire pour se protéger. Par ailleurs, la France formera 4 500 soldats ukrainiens (qu'il a appelés très improprement « bataillon français »).


    Emmanuel Macron a expliqué que le Président ukrainien lui avait adressé la veille une lettre lui demandant officiellement cette aide. Il considère qu'il n'y a pas d'escalade et que la France ne fait pas la guerre à la Russie mais veut défendre l'Ukraine. Cette position rationnelle, ferme et nécessaire ennuie évidemment fortement Vladimir Poutine qui s'en prend aujourd'hui plus particulièrement à la France. Contrairement à tout ce qui avait été dit avant son intervention télévisée, le Président de la République n'a pas dit que les formateurs français formeraient sur le territoire ukrainien, mais il n'a pas dit non plus le contraire, laissant cette information dans le flou stratégique.

    Emmanuel Macron veut surtout rappeler que c'est Vladimir Poutine l'agresseur et que la réponse de la France dépend de lui, de ses propres évolutions tactiques. Lorsque les tirs russes proviennent de bases sur territoire russe, ne pas autoriser l'Ukraine à viser ces bases l'obligerait à accepter d'être bombardée sans réagir.

     

     
     


    Le troisième message concerne la situation à Gaza. Pour le Président français, la solution à deux États est la seule voie possible pour la paix. Mais la reconnaissance de l'État palestinien ne doit pas se faire dans l'émotion de la situation à Gaza. Cette émotion n'est pas seulement au Proche-Orient mais aussi en France, entre autres. S'il a loué l'absence de violence dans les manifestations pro-palestiniennes en France, au contraire d'autres pays, il a toutefois souligné la recrudescence très inquiétante des actes d'antisémitisme.

    À ceux qui le dénigrent parce qu'il personnaliserait la campagne des européennes, Emmanuel Macron a répondu très clairement : ce sont d'abord toutes les oppositions qui personnalisent la campagne, puisque matin midi et soir, leurs seuls arguments, c'est de s'en prendre à lui en le caricaturant, en s'en prenant d'ailleurs plus à sa personne qu'à sa politique.


    Le message européen d'Emmanuel Macron est donc clair et déterminé, mais il était aussi prévisible. Rejetant les sondages (il n'est pas un commentateur de sondages), pour lui, ce qui importe sera le résultat des élections dimanche soir, et il verra ensuite ce qu'il devra faire. Il a rappelé qu'en 2017 et en 2022, les Français ont élu le candidat qui a fait de la construction européenne son identité politique bien marquée, ce qui veut dire que son rôle ici n'est pas de contrer un peu stérilement les ennemis de l'Europe, mais plutôt de motiver les partisans de la construction européenne qui seraient déçus ou déconcertés par son action depuis le début de son second quinquennat de regarder l'essentiel, à savoir l'Europe au regard de l'histoire. C'est un discours qui se tient et qui, je l'espère, aura une incidence dans l'esprit des candidats à l'abstention.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (06 juin 2024)
    http://www.rakotoarison.eu

    Pour aller plus loin :
    Emmanuel Macron, haut et fort dans l'intérêt de la France et des Français.
    Interview du Président Emmanuel Macron le 6 juin 2024 sur TF1 et France 2 (vidéo intégrale).
    Discours du Président Emmanuel Macron le 6 juin 2024 en Normandie.
    Les 80 ans du Débarquement en Normandie.
    Le souverainisme européen selon Emmanuel Macron : puissance, prospérité et humanisme.
    Discours du Président Emmanuel Macron sur l'Europe le 25 avril 2024 à la Sorbonne à Paris (texte intégral et vidéo).
    Emmanuel Macron et son plan de relance de l’Europe (le26 septembre 2017 à la Sorbonne).
    Texte intégral du discours d’Emmanuel Macron le 26 septembre 2017 à la Sorbonne.
    Emmanuel Macron très gaullien à la télévision pour expliquer la gravité de la situation en Ukraine.
    Ukraine : Emmanuel Macron est-il un va-t-en-guerre ?
    Soutien à l'Ukraine : la conférence de l'Élysée pour une défense européenne.
    Amitié franco-ukrainienne : fake news et accord de coopération.
    Pour que la France reste la France !
    Conférence de presse du Président Emmanuel Macron le 16 janvier 2024 à 20 heures 15 à l'Élysée (texte intégral et vidéo).
    Gabriel Macron.
    Tribune du Président Emmanuel Macron dans "Le Monde" du 29 décembre 2023.

    Le gouvernement de Gabriel Attal sarkozysé.
    Liste complète des membres du premier gouvernement de Gabriel Attal.
    Cérémonie de passation des pouvoirs à Matignon le 9 janvier 2024 (texte intégral et vidéo).
    Gabriel Attal plongé dans l'enfer de Matignon.
    Élisabeth Borne remerciée !
    Macron 2024 : bientôt le grand remplacement ...à Matignon ?
    Vœux 2024 d'Emmanuel Macron : mes chers compatriotes, l’action n’est pas une option !

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240606-macron.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/europe/article/emmanuel-macron-haut-et-fort-dans-255052

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/06/06/article-sr-20240606-macron.html

     

  • Élections européennes 2024 (3) : y aura-t-il une surprise dimanche soir ?

    « Il est donc certain que le Parlement européen n’est pas une institution de la République et qu’il ne participe pas de l’expression de la souveraineté nationale. Pour autant, son élection est déterminante pour les institutions républicaines, le peuple français ayant bien l’intention d’y faire entendre sa voix souveraine. » (Jean-Philippe Derosier, le 3 juin 2024 dans "Le Nouvel Obs").




     

     
     


    Le dernier débat télévisé de la campagne des élections européennes a eu lieu le soir du mardi 4 juin 2024, animé en direct sur France 2 par Caroline Roux. Un double débat puisque, pour faire bonne mesure, France 2 a organisé à la suite de ce débat un autre débat mêlant huit autres têtes de liste (mais quid des vingt-deux autres, alors ?) en invitant les "petits candidats" avec Nathalie Arthaud (LO), Hélène Thouy (Parti animaliste), Jean-Marc Governatori (écologie centriste), Guillaume Lacroix (radical de gauche), Jean Lassalle (Alliance rurale), Florian Philippot (extrême droite), Pierre Larrouturou (Nouvelle donne) et François Asselineau (extrême droite).

    Jean Lassalle, passablement de mauvaise humeur de passer à minuit quand les téléspectateurs ont déjà déserté leur écran, a maugréé avec sa voix rocailleuse, proposant comme « une mesure pour faire changer la vie quotidienne des gens » de condamner les instituts de sondage (et la journaliste qui animait par la même occasion !) en rappelant qu'il avait fait en 2022 le double de voix du parti socialiste (ce qui est à peu près vrai) et qu'il n'y avait pas de raison d'être considéré comme un petit candidat. Il est vrai que ces huit outsiders paraissaient un peu une équipe de bras cassés, où profond ennui (bis), simplisme à outrance, difficulté à s'exprimer (bis), fantaisie joyeuse, obsession complotiste, extrémisme revendicatif étaient monnaies courantes (saurez-vous associer chacun de ces traits à une tête de liste ?). Et pourquoi d'autres candidats n'ont-ils pas été invités, comme Yann Wehrling, Marine Cholley, Francis Lalanne ou encore Caroline Zorn (du Parti pirate) ?

    Le premier débat faisait intervenir les huit têtes de liste habituelles de cette campagne, à savoir : Jordan Bardella (RN), Valérie Hayer (Renaissance), Raphaël Glucksmann (PS), François-Xavier Bellamy (LR), Manon Aubry (FI), Marion Maréchal (Reconquête), Marie Toussaint (EELV) et Léon Deffontaines (PCF). À cette occasion, le téléspectateur a été content d'entendre des échanges francs et directs, au prix de bousculer la règle de l'égalité des temps de parole, rendant le dernier débat plus vivant et plus théâtral, même si, globalement, cela n'aura pas fait changer les lignes.

    Je note cependant deux grossières erreurs (au moins) plus ou moins voulues qui n'ont pas été corrigées par la modératrice. Sur l'énergie, Jordan Bardella a prétendu que la France produisait de l'énergie nucléaire depuis De Gaulle, ce qui est bien évidemment faux, le programme nucléaire civil a démarré en 1973 et c'est sous Valéry Giscard d'Estaing que les premières centrales nucléaires ont fonctionné. En revanche, comme De Gaulle avait voulu l'indépendance pour l'énergie, la France s'est dotée de plusieurs raffineries qui permettaient de produire les carburants directement en France, ce qui assurait une certaine indépendance (pas totale puisqu'il fallait quand même importer le pétrole d'origine).

     

     
     


    L'autre erreur grossière et volontaire, c'est François-Xavier Bellamy qui n'a cessé de la répéter durant l'émission en disant que le groupe PPE (dans lequel LR siège) allait devenir le premier groupe du Parlement Européen en 2024, ce qui est complètement faux : le PPE est le premier groupe depuis 1999 ! et toutes les majorités (sur les votes) ont pour noyau dur le PPE, alors que la tête de liste LR laissait entendre que jusqu'à maintenant, les décisions du Parlement Européen étaient prises avec une majorité de gauche (sociaux-démocrates, macronistes et extrême gauche), ce qui est complètement faux, la preuve, c'est que la Présidente de la Commission Européenne est Ursula von der Leyen qui émane précisément du PPE.

    Quant à Valérie Hayer, il faut noter son annonce intéressante selon laquelle la Commission Européenne allait verser à la France, dès le lendemain 5 juin 2024, une somme de 7,5 milliards d'euros dans le cadre du plan de relance de 2020, qui servira notamment à la rénovation de 500 petites lignes ferroviaires et à multiplier les bornes électriques partout dans le territoire, histoire de montrer que l'Europe, c'est aussi l'investissement dans des projets concrets dans l'intérêt des Français.

     
     


    La campagne de la liste FI menée principalement par Jean-Luc Mélenchon et la candidate Rima Hassan s'est basés presque exclusivement sur des positions pro-palestiniennes et anti-israéliennes, et cela semble avoir aidé la liste de Manon Aubry à surnager au-dessus du seuil de 5% des intentions de vote (la liste aurait récupéré une grande partie du "vote des banlieues"). Ce qu'en dit l'humoriste Sophie Aram dans sa chronique publiée le 2 juin 2024 dans "Le Parisien" résume assez bien la situation : « Jusqu'au bout de l'ignoble. Nul doute que cette poignée d'élus insoumis continuera certainement d'alimenter la haine jusqu'au 9 juin, date à laquelle la liste du Rassemblement national menée par "Jordan TikTok Barre de lol" devrait atteindre des sommets dont aucun Le Pen n'avait osé rêver. Puisque, visiblement, dans le chaos dans lequel l'extrême gauche plonge le débat public, une majorité d'électeurs semblent préférer un ectoplasme gominé vendu à Poutine à toute autre proposition politique. On peut le regretter mais vu la concomitance du vacarme de la fanfare insoumise et de la progression sondagière d'un invertébré en costume cravate, on ne peut ignorer cette hypothèse. (…) Jamais la cause palestinienne n'aura donc été à ce point détournée par des islamistes, en Palestine, et utilisée par des militants d'extrême gauche, en Occident, pour alimenter leurs propres intérêts (…). Le plus surprenant pour moi étant de constater que cela ne les empêche visiblement pas de danser, de danser sur le chaos. ».
     

     
     


    Par ailleurs, à deux reprises, cette semaine (le 4 juin 2024) et la semaine dernière (le 28 mai 2024), un député FI a brandi le drapeau palestinien dans l'hémicycle, perturbant durablement deux séances de questions au gouvernement. Contrairement à ce que Raphaël Glucksmann laisse entendre, à savoir que le PS ne serait plus l'allié de FI, la solidarité dans la Nupes existe toujours à plein puisque le PS a soutenu les insoumis dans ces troubles parlementaires au nom de la reconnaissance d'un État palestinien, et le soutien du PS le 3 juin 2024 à la motion de censure déposée par les insoumis prouve bien que le PS reste complètement dépendant de Jean-Luc Mélenchon. Raphaël Glucksmann ne cesse de se référer à l'héritage de Jacques Delors, mais c'est abuser de sa mémoire car jamais Jacques Delors n'aurait accepté une telle compromission avec les idées de Jean-Luc Mélenchon pour un plat de lentilles.

    De son côté, Jordan Bardella n'a aucun respect ni pour les Français et ses lois, ni pour le directeur général de la gendarmerie nationale qui a signalé une affiche absolument abjecte du RN : « Je suis gendarme, je vote Bardella ». Pour se rendre compte de l'ineptie, prenez votre profession et imaginez une affiche qui vous associerait à un vote donné : « Je suis xxx (mettez votre profession) et je vote machin ». Sur le principe générique et généraliste, c'est déjà stupide et démagogique, mais concernant les forces de l'ordre, c'est abject puisqu'elles sont au service de la nation et qu'elles doivent la neutralité totale pour remplir ses missions, sinon, elles n'auraient plus d'autorité. Le pire, c'est que Jordan Bardella, 28 ans, même pas de service militaire, a donné des leçons à ce haut fonctionnaire qui a consacré toute sa carrière à la sécurité et à la protection des Français. Pour un politicard censé soutenir le parti de l'ordre, cela fait un peu trop rebelle et c'est une vraie boulette, car avec l'extrême droite, le naturel revient toujours au galop après la façade lisse d'une respectabilité creuse.

     

     
     


    Le président du RN et ses colistiers pourraient d'ailleurs être appelés des "députés européens de papier", pour reprendre une expression qui leur est commune, en ce sens qu'effectivement, ceux qui sont élus sont bien sur le papier (et sur leur compte en banque) des députés européens, mais ils ne font rien au Parlement Européen, ils ne travaillent pas activement pour l'intérêt des Français. Pour preuve, ce bilan particulièrement nul de Jordan Bardella dit Coquille creuse qui, en cinq ans de mandats, n'a pondu aucun rapport, n'a déposé que 21 amendements (4 par an !) alors que d'autres en ont déposé des milliers, il n'est intervenu que 52 fois en séance plénière (une fois toutes les cinq semaines !) et il a l'un des taux d'absentéisme record avec 70% depuis 2019. L'épouse de François Fillon a été épinglée par la justice pour n'avoir pas su démontrer qu'elle travaillait en rapport avec son salaire. Si on prenait ce principe en général, Jordan Bardella devrait être renvoyé ! Les Français veulent élire des députés européens qui fassent au moins leur boulot, pas des fainéants, ne serait-ce qu'être présents à Strasbourg ou Bruxelles.

    Chez Les Républicains, on s'inquiète d'une rumeur persistante en ce début de semaine : après le désastre électoral de la Macronie, Emmanuel Macron proposerait un gouvernement de coalition avec LR en nommant Gérard Larcher Premier Ministre. Le Président du Sénat a donc dû rapidement désamorcer la rumeur qui pourrait coûter de nombreuses voix à LR, lors de la réunion du groupe LR au Sénat le 4 juin 2024, en affirmant fermement qu'il n'était pas question qu'il accepte d'être le Premier Ministre d'Emmanuel Macron. Une dénégation qui n'aura certainement pas beaucoup d'effet sur les suspicions de ralliement à la Macronie, tant il y en a eu chez LR depuis 2017 (Jean-Paul Delevoye, Édouard Philippe, Gérald Darmanin, Bruno Le Maire, Franck Riester, Jean Castex, Roselyne Bachelot, Damien Abad, Christophe Béchu, Catherine Vautrin, Rachida Dati, etc.).

    Une campagne sert en général à faire bouger les lignes. Or, si l'on en croit les sondages d'intentions de vote, ces lignes ont peu bougé. Certes, il y a eu des évolutions, le RN à la hausse (en un an, passage de 24 à 30%), parallèlement à une baisse pour la liste Hayer (20 à 16%) et d'une hausse de Glucksmann (8 à 13%). Mais dans l'ensemble, il n'y a pas eu de fait singulier cassant des dynamiques "entropiques naturelles" comme j'oserais (mal) écrire, c'est-à-dire que si aucun n'avait fait campagne, on pourrait se retrouver avec les mêmes résultats.

    Y aura-t-il des surprises ? C'est probable. Il y a toujours des surprises dans chaque scrutin, ce qui laisse la liberté de choix plus ouverte que les sondages ne laissent apparaître. Selon ces enquêtes, un tiers des électeurs hésitent encore, c'est beaucoup. En 2019, il y a eu au dernier moment un regain de participation. Ainsi, l'effondrement du PS et celui de LR en 2019 n'étaient pas du tout prévus quelques jours avant le scrutin, tout comme la montée de la liste écologiste. De même, la forte audience des écologistes faisant jeu égal avec le PS en 2009 n'était pas prévue.

     

     
     


    Si on prend le concept de troisième homme (que connaît bien François Bayrou), en pensant à Raphaël Glucksmann qui meurt d'envie de dépasser la liste Hayer (le croisement tant pronostiqué n'a pour l'instant jamais eu lieu), on peut aussi rappeler opportunément qu'à l'élection présidentielle de 2002, le troisième homme dans les sondages était Jean-Pierre Chevènement avec une dynamique qui l'a poussé jusqu'à 15% des intentions de vote, et finalement, il n'a eu que 5,3%, classé sixième derrière Arlette Laguiller ! Il est des dynamiques déçues (ou décevantes) et généralement, les élections sont plus un cimetière des ambitions déçues que de victoires attendues.

    L'enjeu national est évidemment dans la mise à jour des rapports de force. Si l'on en croit les sondages, l'extrême droite aurait 40% des suffrages. Les écologistes "risquent" (pour ma part, je m'en réjouirais !) de ne pas avoir d'élus (car en dessous de 5%), le PS revaudrait le double de FI (mais les socialistes ont déjà refait allégeance à Jean-Luc Mélenchon pour 2027), et LR se maintiendrait (qu'il faudra comparer avec le score de Reconquête qui ont un électorat commun).

    Bien entendu, tout le monde scrutera avec attention (et médisance pour certains) le score de la liste Hayer, qui donnera une idée de l'audience du gouvernement et de la majorité présidentielle dans le pays, et dans tous les cas, même à 20%, ce sera très faible. Mais là encore, il faut se rappeler que ce sont des élections européennes et pas des élections législatives, elles n'auront aucun impact institutionnel en principe, et ce n'est pas parce qu'un jeune écervelé propre sur lui réclamera avec fracas la dissolution qu'il faudra dissoudre. Regardons encore le passé : en juin 1984, le PS au pouvoir n'a eu que 20,8% (face aux 43,0% de l'union UDF-RPR) et si le gouvernement de Pierre Mauroy a démissionné en juillet 1984, ce n'était pas à cause des élections européennes mais de la grave crise provoquée par le projet de loi contre l'enseignement libre qui a mis 2 millions de Français dans la rue. En 1989, le gouvernement de Michel Rocard n'a pas démissionné malgré les seulement 23,6% de la liste PS (face aux 28,9% de la liste de Valéry Giscard d'Estaing), ni le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin (reconduit en mars 2004 après les régionales) n'a démissionné en juin 2004 malgré les seulement 16,6% des listes de l'UMP (face aux 28,9% des listes socialistes), ni encore le gouvernement de Manuel Valls (nommé en avril 2014) n'a démissionné en mai 2014 malgré les seulement 14,0% des listes socialistes (face aux 24,9% du FN et aux 20,8% de l'UMP).

    C'est d'ailleurs ce dernier cas (en 2014) qui serait le plus proche de celui du gouvernement de Gabriel Attal, nommé en janvier 2024 et qui n'a que quelques mois d'existence, et on n'a jamais reproché à François Hollande, pourtant beaucoup plus impopulaire à l'époque qu'Emmanuel Macron aujourd'hui, de passer par pertes et profits ces élections européennes désastreuses pour son parti. Du reste, après les élections européennes, les médias seront très occupés par les Jeux olympiques et paralympiques pendant deux mois si bien que le désastre électoral, si désastre devait avoir lieu, sera vite oublié dans la mémoire collective.

    Il faut aussi se rappeler, puisqu'on l'évoque, que le RN est en tête de toutes les listes aux élections européennes depuis 2014 : en 2014, en 2019, et probablement en 2024 vu les sondages qui lui donneraient plus de 10 points d'avoir sur les autres listes. Mais depuis dix ans, qu'a fait le FN/RN de ses victoires aux européennes ? Rien, puisque ses élus ne participent pas aux débats, ne déposent pas d'amendement, ne rédigent aucun rapport pour améliorer la situation des Français et des Européens. Pour le RN, le Parlement Européen n'est qu'une banque, une sorte de tirelire partisane d'ailleurs un peu trop utilisée puisque Marine Le Pen et ses sbires vont être en procès en septembre procès pour cette raison.

    Pour finir sur les considérations de politique intérieure franco-française, il faut aussi affirmer que l'abstention, aujourd'hui (et depuis une dizaine d'années), joue en défaveur du RN et pas en sa faveur. En effet, le RN est devenu un parti attrape-tout, le premier en France, donc le parti du système, il devient ainsi le parti référence pour beaucoup de courants de pensée. S'il y a une augmentation du désir de participation à la fin de la semaine, elle ne se fera donc pas nécessairement contre le RN malgré son déjà très haut niveau dans les sondages.

    Je veux également évoquer les considérations européennes, car après tout, les élections européennes servent d'abord à désigner un nouveau Parlement Européen. 81 députés européens français sur 720 députés européens en tout des vingt-sept États. Pour la première fois, il n'y a plus de députés européens britanniques (Brexit effectif en 2020). Il y aura manifestation un véritable vague à droite, à savoir notamment de droite extrême, à l'instar du RN en France (mais probablement de moindre ampleur dans les autres pays). On regardera avec attention la situation notamment des Pays-Bas (où un parti centriste a fait alliance avec les populistes), de la Hongrie (où un parti dissident de Viktor Orban est en train de gagner des voix), de la Belgique (qui joue aussi son avenir national avec des élections législatives), de la Slovénie (où il y a aussi des référendums) et de l'Italie. Plus l'Allemagne avec une coalition du Chancelier Olaf Scholz qui est bien chancelante.

     

     
     


    En Italie, la situation est intéressante car la Première Ministre Giorgia Meloni a pris la tête de la liste de son parti, les Frères d'Italie, qui aujourd'hui est en tête des intentions de vote dans les sondages (autour de 25%, nettement devant ses deux partenaires de coalition, la Lega et Forza Italia, tous les deux autour de 8%). Le parti de Giorgia Meloni est dans le groupe des conservateurs et des réformistes européens (CRE), groupe opposé à l'autre groupe d'extrême droite où siègent les élus RN et de l'AfD. Giorgia Meloni refuse de voir les élus RN la rejoindre car elle veut conclure un accord avec Ursula von der Leyen, lui proposant son soutien pour sa reconduction en échange de concessions par la suite sur la politique migratoire. Dans cette configuration, les écologistes européens vont perdre beaucoup de plumes, mais Renew pourrait rester le troisième groupe du Parlement Européen devant les populistes et les trois premiers groupes (avec le PPE et S&D) pourraient donc continuer à régner (dans les projections, ils totaliseraient 404 sièges sur 720). Toutefois, 75 députés européens seraient non-inscrits, ou plutôt, n'auraient pas de groupe politique identifié à ce jour et pourraient créer quelques surprises.

    En Europe, nous avons la chance de pouvoir nous exprimer par un vote libre, secret et sincère. En France, près de 50 millions d'électeurs sont convoqués, dont près de 270 000 de ressortissants d'autres pays européens habitant en France (sur une liste électorale séparée). Le scrutin sera clos en France à 20 heures ce dimanche 9 juin 2024, l'heure des victoires et des déceptions. Que le meilleur gagne !



    1. Débat du 14 mars 2024 sur Public Sénat






    2. Débat du 5 mai 2024 sur LCP et M6






    3. Débat du 27 mai 2024 sur BFMTV







    4. Débat du 30 mai 2024 sur CNews






    5. Débats du 4 juin 2024 sur France 2












    6. Débats du 5 juin 2024 sur Mediapart





     

    Aussi sur le blog.


    Sylvain Rakotoarison (05 juin 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Élections européennes 2024 (3) : y aura-t-il une surprise dimanche soir ?
    Quel est le programme européen de la liste Renaissance ?
    Programme de la liste Hayer à télécharger (6 mai 2024).
    Ursula von der Leyen.
    L'hommage de l'Europe à Jacques Delors.
    Le débat Gabriel Attal vs Jordan Bardella du 23 mai 2024.
    Élections européennes (2) : 37 listes et un bulletin de vote !
    Le souverainisme européen selon Emmanuel Macron : puissance, prospérité et humanisme.
    L'hymne à l'Europe.
    Fête de l'Europe, joies et fiertés françaises.
    Le Tunnel sous la Manche.
    Les 120 ans de l'Entente cordiale.
    Eurovision 2024.
    La vision européenne d'Édouard Balladur.
    Débat Valérie Hayer vs Jordan Bardella : l'imposture démasquée de Coquille vide.
    Il y a 20 ans, l'élargissement de l'Union Européenne.
    La convergence des centres ?
    Élections européennes 2024 (1) : cote d'alerte pour Renaissance.
    Valérie Hayer, tête de la liste Renaissance.
    Charles Michel et Viktor Orban : l'Europe victime d'une histoire belge !
    Jacques Delors : il nous a juste passé le relais !
    Il y a 15 ans : Nicolas Sarkozy, l'Europe et les crises (déjà).
    La Méditerranée, mère de désolation et cimetière de nos valeurs ?
    Le 8 mai, l'émotion et la politique.
    Ukraine, un an après : "Chaque jour de guerre est le choix de Poutine".
    Le 60e anniversaire du Traité de l'Élysée le 22 janvier 2023.
    De Gaulle, l’Europe et le volapük intégré.
    L’inlassable pèlerin européen Emmanuel Macron.
    Valéry Giscard d’Estaing, le rêveur d’Europe.
    Enfin, une vision européenne !
    Relance européenne : le 21 juillet 2020, une étape historique !


     

     
     





    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240604-europeennes.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/europe/article/elections-europeennes-2024-3-y-255024

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/06/04/article-sr-20240604-europeennes.html





     

  • Édouard Baer mis en accusation dans un rôle non voulu

    « Vous vous rendez compte qu'il y a douze sujets en un là, il y a douze prises de parole différentes, il y a des scandales. Tout est différent. Il y a des saloperies, il y a des malentendus… Je pense que c'est les médias qui réunissent tout ça dans une grande cause d'époque. » (Édouard Baer, le 12 mai 2024 sur France 2).



     

     
     


    Très déstabilisé, Édouard Baer répondait le dimanche 12 mai 2024 à cette question de Laurent Delahousse dans le journal de 20 heures de France 2 : « Est-ce que vous considérez que les hommes ne parlent pas assez, ne défendent pas assez ou n'expriment pas une sorte de mea culpa ? ». L'invité, venu pour promouvoir son nouveau spectacle "Ma candidature", n'était pas n'importe qui.

    En effet, Édouard Baer, à 57 ans, est l'un des acteurs les plus "bankables" de France, comme on dit. Acteur, réalisateur de cinéma, metteur en scène de théâtre, animateur et producteur de télévision et de radio, on le voit et l'entend partout. Initié à la comédie par la savoureuse Isabelle Nanty, sa prof d'art dramatique au cours Florent, il a eu un parcours artistique très flatteur, couronné déjà par un Molière en 2001 (et deux nominations) et par trois nominations aux Césars.

    Pourquoi l'acteur était-il si gêné de parler de MeToo à la veille du Festival de Cannes ? Peut-être parce qu'il avait été mis au courant qu'un article incendiaire allait être publié par Mediapart ce jeudi 23 mai 2024. L'article d'Amine Abdelli et Julia Tissier commence d'ailleurs par ce malaise au 20 heures : « Confus et visiblement mal à l’aise, le comédien fronce les sourcils, bafouille et s’embourbe. Lui, le pro de l’impro, apparaît soudainement déstabilisé. ».

    Pas étonnant de bafouiller autant quand on sait qu'il va être mis sur le grill de la vindicte populaire par six femmes qui ont été contactées depuis plusieurs mois par Mediapart et qui, dans cet article, accusent Édouard Baer de harcèlement sexuel et d'agressions sexuelles. L'article précise : « Elles livrent le récit de faits de harcèlement et d’agressions sexuelles sur une période s’étalant de 2013 à 2021 (…), majoritairement dans des contextes professionnels », à savoir son bureau parisien, quand il est au théâtre, ou dans les stations de radio, quand il est animateur, c'est-à-dire à Radio Nova puis à France Inter.
     

     
     


    Le journal "Le Monde", qui en rend compte avec l'AFP, explique : « Selon l’une de ces femmes, Édouard Baer aurait pris son "sein gauche avec sa main" dans un ascenseur. Une autre l’accuse de lui avoir touché "les seins à plusieurs reprises", de l’avoir "prise par la taille" et d’avoir "posé sa main sur [s]es fesses". "Il essaie de m’embrasser dans le cou et sur la bouche. Je le repousse", selon les propos rapportés d’une autre. Certaines évoquent des sollicitations répétées, des compliments insistants sur leur physique. L’une explique ne pas avoir porté plainte car elle a pensé que ce serait "sa parole contre la [s]ienne". ».

    Aucune de ces six femmes, âgées d'une vingtaine d'années au moment des faits et qui ont voulu rester anonymes dans leur témoignage, n'a déposé plainte (à ce jour). J'ajoute que dans l'entourage d'une des radios, l'information n'était pas connue même sous forme de rumeur et certains ont été étonnés de l'apprendre.

    Comme est étonné Édouard Baer lui-même qui a rapidement publié, en réponse à l'article, un communiqué d'incompréhension mais aussi d'excuses : « C’est avec stupeur et une grande tristesse que je découvre les témoignages que vous me rapportez. Je ne me reconnais pas dans les mots ou les gestes qui me sont attribués, mais je ne peux qu’exprimer mes regrets que mon comportement ait mis mal à l’aise ou blessé ces femmes. Je n’ai pas eu l’intelligence de le percevoir. J’en suis profondément désolé. Je n’ai jamais cherché à les heurter intentionnellement. Je leur présente toutes mes excuses. ».

    Si on résume grossièrement le message, c'est ceci : j'ai été assez lourd dans mon approche, aucune ne m'a dit que j'allais trop loin et je m'en veux de ne pas l'avoir vu moi-même, désolé. Dans ce genre d'affaire, on peut supposer que les deux parties, les six femmes, d'un côté, et l'acteur, de l'autre côté, sont complètement sincères. Il faut aussi comprendre qu'Édouard Baer est une grande star qui a fasciné ces six femmes qui ont à peine commencé leur vie active. On peut imaginer qu'il leur était difficile, sans être dotée une personnalité très forte, de rejeter les éventuels gestes déplacés.

    La réponse rapide et finalement assez humble (présentant ses excuses) d'Édouard Baer plaide plutôt en sa faveur, ou du moins, pour sa sincérité. Il ne nie pas les éventuels faits sans les reconnaître précisément car il y a plusieurs faits, et la réponse reste assez floue. Ce n'est pas comme Gérard Depardieu ou même comme Patrick Poivre d'Arvor qui, à ma connaissance (sous réserve que je ne me trompe pas, je ne suis peut-être pas en possession d'informations plus récentes), ne reconnaissaient pas les faits et surtout, ne présentaient pas leurs excuses à leurs (nombreuses) accusatrices.

    Évidemment, un vieil article de la journaliste Josyane Savigneau publié le 5 novembre 2016 dans "Le Monde" revient en pleine figure d'Édouard Baer. À l'origine, la journaliste voulait faire la promotion de l'acteur redevenu animateur à Radio Nova, responsable de la matinale depuis le 10 octobre 2016. Mais elle s'est sentie très mal accueillie à son arrivée à 6 heures 45 un jour d'octobre 2016, « victime des humeurs du présentateur vedette », si bien qu'elle a exprimé sa colère : « D’emblée il est odieux. Furieux qu’on ait osé désobéir, il aurait exigé qu’on ne vienne qu’à 7h30, il insiste haut et fort : il n’a rien demandé, on a omis de le prévenir, on lui pourrit la vie, on va lui faire rater son émission, qu’on dégage. Avec plaisir. Dans une vie de journaliste, il arrive parfois que l’on rencontre, c’est fatal, des gens désagréables. À ce point d’arrogance et de mépris, c’est plus que rare. Morale de l’histoire : quand on remplace les journalistes par des stars, on s’expose à ce genre de caprices. ».

     

     
     


    Ce qui n'a pas empêché la journaliste d'en dire aussi du bien (il faut dire que Matthieu Pigasse, actionnaire du "Monde", venait de racheter Radio Nova) : « On retrouve avec plaisir la voix de Baer, son ton décalé, ses improvisations bienvenues, son accueil chaleureux des participants. ». Et de terminer sur l'avis du nouveau patron : « Matthieu Pigasse se félicite de la réussite de la matinale et de l’idée de Bernard Zekri de faire appel à Édouard Baer, "tant Nova et Édouard se correspondent : les 3 C, Culture, Curiosité d’esprit, Carrefour d’échanges". "Elle incarne ce que nous voulons être et faire, précise-t-il : refuser le repli sur soi, être ouverts à tous, donner du sens et s’engager par la culture". ». Édouard Baer a quitté Radio Nova pour France Inter en 2018 (jusqu'en 2022, il me semble).

    Pour l'heure, Édouard Baer, qui avait un spectacle à Romans-sur-Isère le vendredi 24 mai 2024 à 20 heures (au théâtre des Cordeliers), l'a maintenu. Le problème qu'il n'y ait pas de dépôt de plainte, c'est de transférer cette affaire du tribunal correctionnel au tribunal médiatique, avec tous les excès que cela peut entraîner, notamment dans les réseaux (a)sociaux. Comme je ne sais que penser des accusatrices sincères et d'un supposé prédateur sexuel qui s'ignorerait et qui affirme que ce n'est pas du tout lui, et n'étant pas juge, je ne peux faire aucun commentaire de soutien aux unes ou à l'autre.

    En revanche, ce problème récurrent depuis quelques années (MeToo date de 2018) où des femmes (en général) accusent (parfois plusieurs décennies après les faits) une personnalité (généralement très connue) dans des milieux bien définis (cinéma, sports, médias audiovisuels, etc.) de divers faits allant du simple geste déplacé (voire maladroit) jusqu'au crime (le viol), en passant par des agressions sexuelles ou du harcèlement sexuel (qui sont des délits), est souvent insoluble quand il n'y a aucune preuve (car il faut que la victime prouve l'absence de consentement, ce qui est très difficile). Alors, c'est parole contre parole, et un juge, si cela arrive à la suite du dépôt d'une plainte, ne pourra pas condamner si le doute persiste (principe général du droit). D'un côté, il faut écouter les victimes, les femmes, ou du moins qu'elles soient écoutées, de l'autre, il ne faut pas détruire la réputation d'une personne qui serait injustement accusée (dans l'affaire d'Outreau, une personne injustement accusée s'est même suicidée). C'est du tout ou rien. Ou salaud, ou salopes, en quelque sorte.

    Un livre explique très bien ce problème. Il s'agit d'un roman d'une ancienne procureure américaine qui a fait non seulement des études de droit mais avant, des études de psychologie et qui s'est recyclée dans l'écriture de romans à succès. Alafair Burke a en effet publié en 2018 un très bon roman "Un Couple irréprochable" (en anglais "The Wife"), dont le sujet principal est cette accusation contre une personnalité médiatique.

     

     
     


    L'histoire est celle-ci, et racontée selon le point de vue de l'épouse (mère au foyer) d'un économiste qui, au-delà de donner des cours d'économie à l'université, a écrit un livre devenu best-seller, ce qui lui a donné gloire, fortune et notoriété (il a créé un cabinet de conseil en entreprises et il est invité très fréquemment à la télévision pour donner son avis). Et son expertise, c'est l'éthique dans les entreprises, et sa parole est d'or car il fait et défait des réputations d'entreprises auprès de leurs investisseurs. (L'homme accusé est un parangon de l'éthique, comme Édouard Baer considéré ouvert, sympa).

    Et puis soudain, une stagiaire l'accuse de gestes déplacés en déposant plainte. Plus tard, une autre femme avec qui il est en contact sur le plan professionnel l'accuse carrément de viol. L'affaire est suivie par une inspectrice de police spécialisée dans ce domaine (l'Unité spéciale des victimes). Il y a aussi la réaction du procureur adjoint qui ne veut poursuivre que lorsqu'il y a de fortes suspicions de culpabilité, d'autant plus que ce prévenu serait une personnalité célèbre. Comme l'auteure du roman est une spécialiste du droit, cela permet aussi de voir comment fonctionne la justice et la police (ici américaines) dans les coulisses face à une telle affaire. Interviennent aussi dans l'histoire une animatrice de télévision féministe (et amie de l'accusé), une avocate exigeante, etc.

    L'inspectrice, parce qu'elle est féministe, veut aller au plus profond des détails pour pincer l'éventuel auteur d'agressions sexuelles voire de viols. Elle admet d'ailleurs que pour la victime, il vaut mieux être violée de façon violente en pleine rue que subir des attouchements sexuels par des personnes familières dans un lieu privé, parce que ce sera beaucoup plus facile à prouver.

    La première des réactions, dans ce genre d'affaire (agression sexuelle voire viol), c'est de se focaliser sur la victime et pas sur le prédateur présumé. Et de trouver des éléments chez la victime que son infortune était la conséquence de sa vie et cela, pour se dire qu'on n'est pas comme la victime et donc, que ça ne peut pas arriver à soi : « N'est-ce pas dans la nature humaine que de toujours rejeter la faute sur la victime ? ».

    Et pourtant, parfois, les victimes ne disent pas exactement la vérité : « Impossible pour [les policiers] d'affirmer que les victimes ne racontent jamais toute la vérité, parce que cela reviendrait à les traiter de menteuses. Or, elles ne mentent pas, elles tentent de se protéger. Se préparent à affronter le scepticisme. Anticipent déjà toutes les attaques à venir, se forgent un bouclier. ».

    L'animatrice de télévision donne aussi les différentes étapes dans ce genre d'affaire : « La première réaction de l'opinion publique, c'est toujours de jeter le discrédit sur la femme, parce que la société ne veut pas admettre que de telles horreurs se produisent. Alors, en réaction, les féministes convaincues ont décrété qu'il fallait croire toutes les femmes, chaque fois. ».

    Féministe, l'animatrice est d'accord avec cette réaction : « C'est vrai, a-t-elle admis, je suis toujours la première à défendre les femmes dans les cas d'agression sexuelle où tout repose sur la parole de l'un contre celle de l'autre. Parce que, dans quatre-vingt-dix-neuf pour cent des cas, elles disent la vérité, et que c'est une terrible épreuve pour elles d'en parler. Elles se retrouvent jugées, stigmatisées, blâmées, critiquées. ».

    Et dans une affaire de viol, cela retombe toujours sur la même question : « Quelles que soient les allégations de cette fille, ce sera sa parole contre celle de [l'accusé]. Or l'accusation a besoin d'éléments concrets. Et même s'il peut s'appuyer sur l'ADN, le procureur doit démontrer que la relation n'était pas consentie. ».

    Mais justement, des petits détails peuvent faire pencher la balance d'un côté ou de l'autre pour la police. Ainsi, dans ce roman, la policière va voir de façon informelle l'accusé qui ne sait pas encore qu'il est aussi accusé de viol par une seconde femme (il est juste accusé de harcèlement sexuel par une première femme). La policière lui demande alors s'il a eu des relations sexuelles avec cette seconde femme et ce dernier, au lieu de refuser de répondre sans son avocat, fait l'erreur de dire qu'il n'a pas eu de relations sexuelles, sans savoir que la seconde femme avait gardé intacte sa robe avec des traces de lui. Avoir des relations sexuelles ne confirme pas forcément le viol, car ces relations peuvent être consenties, mais mentir sur la réalité des rapports sexuels (même pour éviter d'en informer son épouse), c'est jeter un discrédit sur tout ce qu'il va affirmer.

    A contrario, la policière garde aussi des détails sur l'accusatrice qui lui demande une heure avant de passer chez elle, le temps de faire un peu de ménage : « [La policière] venait déjà de découvrir quelque chose à propos de [l'accusatrice] : c'était le genre de personne qui pensait à remettre de l'ordre chez elle avant de recevoir un policier pour dénoncer des actes de harcèlement sexuel. En soi, ça ne signifiait rien, pourtant [l'inspectrice] remisa soigneusement ce détail dans un coin de sa tête, parce qu'elle aimait à penser que rien ne lui échappait. ».

    Bref, ce roman est très intéressant pour comprendre la mécanique des accusations, des défenses et des jugements. Plus rien de mal ne doit rester impuni. Mais reste à se mettre d'accord sur ce qui est mal, sur ce qui est un mauvais comportement, un comportement inapproprié. L'homme est décidément détrôné, dans cette société qui se transforme à vive allure.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (25 mai 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    "Un Couple irréprochable" (2018) d'Alafair Burke.
    Édouard Baer.
    Lucien Neuwirth.
    Le vote des femmes en France.
    Femmes, je vous aime !
    Ni claque ni fessée aux enfants, ni violences conjugales !
    Violences conjugales : le massacre des femmes continue.
    L'IVG dans la Constitution (3) : Emmanuel Macron en fait-il trop ?
    Discours du Président Emmanuel Macron le 8 mars 2024, place Vendôme à Paris, sur l'IVG (texte intégral et vidéo).
    L'IVG dans la Constitution (2) : haute tenue !
    L'IVG dans la Constitution (1) : l'émotion en Congrès.
    La convocation du Parlement en Congrès pour l'IVG.
    L'inscription de l'IVG dans la Constitution ?
    Simone Veil, l’avortement, hier et aujourd’hui…
    L’avortement et Simone Veil.
    Le fœtus est-il une personne à part entière ?
    Le mariage pour tous, 10 ans plus tard.
    Rapport 2023 de SOS Homophobie (à télécharger).
    Six ans plus tard.
    Mariage lesbien à Nancy.
    Mariage posthume, mariage "nécrophile" ? et pourquoi pas entre homosexuels ?
    Mariage annulé : le scandaleux jugement en faveur de la virginité des jeunes mariées.
    Ciel gris sur les mariages.

    Les 20 ans du PACS.
    Ces gens-là.
    L’homosexualité, une maladie occidentale ?
    Le coming out d’une star de la culture.
    Transgenres adolescentes en Suède : la génération sacrifiée.
    PMA : la levée de l’anonymat du donneur.
    La PMA pour toutes les femmes.

     

     
     





    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240523-edouard-baer.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/societe/article/edouard-baer-mis-en-accusation-254809

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/05/26/article-sr-20240523-edouard-baer.html


     

  • Alain Souchon et sa quête de la fidélité et du plaisir

    « Vous voulez dire que ma vie se définit par la quête de la fidélité et du plaisir qu'elle procure ? C'est vrai. » (Alain Souchon).


     

     
     


    Dans cette interview recueillie par Hugo Cassavetti et Valérie Lehoux, et publiée dans "Télérama" le 27 septembre 2008, il poursuivait : « Comme j'ai beaucoup changé, tout le temps, je me suis toujours dit que je n'aimerais pas changer de femme, j'habite toujours le même appartement, j'ai toujours le même numéro de téléphone... ». Et d'ajouter à Ludovic Perrin le 19 octobre 2019 dans le "Journal du dimanche" : « Je n’ai ni portable ni tablette, je n’ai pas l’expérience d’Internet ! ».

    Eh oui, il y a toujours cette impression que le chanteur est en dehors du temps, un peu tendre rêveur, un peu souriant amer, un peu nostalgique... et voici qu'il se prend sur la binette la glaciale addition de l'état-civil : Alain Souchon fête son 80e anniversaire ce lundi 27 mai 2024. Un vieillard, un vieillard adolescent ! Le 24 mai, c'était le tour de Dominique Lavanant, et le 25, cela aurait dû être celui de Pierre Bachelet, mais il est parti depuis longtemps sans crier gare.

    Ce ne serait pas très original si j'écrivais que j'adore Alain Souchon, et comme c'est vrai, je l'écris quand même. Il est à la fois hors du temps et en plein dans son époque, car beaucoup de ses chansons évoquent de nombreux sujets d'actualité, de société, et c'est le cas pour de nombreux chanteurs, d'ailleurs. Il combat ce monde d'hyperconsommation et se dit qu'il n'était pas fait pour ce monde. Heureusement qu'il est devenu un chanteur à succès, avec une carrière qui lui a permis cette existence sociale, car il ne sait pas ce qu'il aurait fait de sa vie, sans cela : « Il y a un truc de maladie, de tristesse, je suis sûr de ça. Je suis privilégié, j'ai une vie extraordinaire qui me permet de ne pas être pris dans le tourbillon, d'être retiré du monde rentable. Mais seul, on n'est rien. Les autres, c'est notre raison d'être. Regarder, écouter les autres, c'est toujours intéressant. » ("Télérama"). "Foule sentimentale" : « On a soif d'idéal, Attirée par les étoiles, les voiles, Que des choses pas commerciales, Foule sentimentale, Il faut savoir comme on nous parle ».

    Alain Souchon, c'est le gars trop distrait pour faire des études, sorte de Gaston Lagaffe (il a un tonton Gaston) avant l'heure... et sans les gaffes. Qui aurait bien aimé explorer le Pôle Nord ou être un universitaire écouté et érudit. Et puis, il y a eu ce satané accident d'automobile qui a coûté la vie à son père prof d'anglais (sa mère a dû écrire des romans de gare pour survivre). Nouvelle famille à 7 ans (sa mère s'est remariée avec son père biologique, après avoir quitté son beau-père). Orphelin à 15 ans. Amour, tendresse, et gravité à la fois, dépression même. Et bien sûr nostalgie. Les thèmes sont souvent graves et pourtant doux en même temps. Il n'a vraiment commencé sa carrière d'auteur compositeur interprète qu'en 1973 où il a vite eu une reconnaissance de professionnels et la possibilité d'enregistrer un disque. À l'aube de ses 30 ans.

    Le disque, c'est tout pour lui. Il en a d'ailleurs vendu plus de 10 millions, c'est beaucoup même si d'autres confrères ont fait bien plus : « Autrefois, on faisait des disques qui marchaient très fort et qui passaient beaucoup à la radio. Et puis on allait faire des salles, à Montpellier ou ailleurs, et il n'y avait personne. Maintenant, c'est le contraire. Les radios sont tellement submergées qu'on peut très peu y passer. En revanche, il y a du monde aux spectacles. Comme dans les années 50, on revient à la fonction première du chanteur : il chante et, éventuellement, on achète son disque pour se souvenir. Mais moi je viens d'une époque où l'important, c'était le disque. » ("Télérama"). La consécration, pour lui, fut l'Olympia en 1979 (au début, il était en première partie de spectacle, ceux de Thierry Le Luron par exemple). Et plus tard une dizaine de trophées aux Victoires de la musique.

     

     
     


    Avec quelques autres comme Michel Jonasz ou Jacques Higelin, Alain Souchon a un peu révolutionné la chanson française, avec la volonté d'éviter de copier Georges Brassens ou Jacques Brel qui l'ont fasciné. Sa chance, c'était sa rencontre avec un autre artiste débutant Laurent Voulzy en 1974 et depuis, ils ont cultivé une grande amitié mais aussi collaboration fidèle et durable. En gros, Voulzy compose de la musique pour Souchon (exemple : "J'ai 10 ans") et Souchon écrit des textes pour Voulzy (exemple : "Rockollection" en 1977) : « On se voyait avec Michel Jonasz, nous n'étions alors pas connus. On voulait être différents, mais c'était instinctif, pas calculé. On n'avait pas envie de faire comme ceux qui nous avaient précédés. D'abord parce qu'on n'aurait pas pu. Quand on arrive derrière Brassens, on ne peut pas faire mieux, ni même aussi bien, c'est tellement fort. Alors, j'écrivais mes trucs de "bobo-pipi-bobo" sans réfléchir. C'est venu tout seul. Je n'étais qu'un amateur. Puis j'ai rencontré Laurent Voulzy, avec sa culture pop extraordinaire, qui jouait de la guitare les doigts dans le nez. Il jouait comme j'en rêvais. Lorsqu'on a fait "J'ai 10 ans", ça m'a ouvert un monde : c'était travaillé, agencé, avec des notes placées volontairement, pas par hasard. Ça m'a donné un plaisir inouï, à cause du rythme, du "beat". C'était exactement ce que je voulais, je n'y arrivais pas tout seul. Laurent est trop perfectionniste et moi trop amateur, c'est cet équilibre qui définit notre couple. Et qui est rassurant. Pour moi. Pour lui. Cette approche plus rythmique m'a obligé à modifier mon écriture, à briser mes phrases, à bousculer la langue, le français. C'était comme un jeu. Un jeu qui a duré plusieurs années. Jusqu'à en devenir un tic d'écriture, trop facile. Alors je suis revenu à un style plus classique. » ("Télérama"). Laurent Voulzy a maintenant 75 ans et les deux chanteurs continuent à bosser ensemble !

    Comme de nombreux chanteurs, Alain Souchon a fait une (courte) incursion dans le cinéma. Déjà pour la musique de films, en particulier avec François Truffaut ("L'amour en fuite", en 1979), mais il a aussi été acteur, jouant sous la direction de Claude Berri, Jean-Pierre Rappeneau, Jean Becker, Jacques Doillon, Agnès Varda et quelques autres, aux côtés de Catherine Deneuve, Serge Gainsbourg, Isabelle Adjani (particulièrement "Tout feu, tout flamme" et "L'Été meurtrier"), Miou-Miou, Robin Renucci, Gérard Depardieu, etc. (en tout, douze films de 1980 à 2019, mais, malgré ses deux nominations aux Césars en 1981 et 1984, il n'a pas beaucoup persévéré dans cette voie quand il a vu Michel Bouquet ou Michel Piccoli, entre autres, qui étaient, eux, de grands acteurs).

    Alain Souchon a fait de nombreuses collaborations artistiques, pas seulement avec son compère Voulzy mais aussi avec (notamment) Jane Birkin, Françoise Hardy, Louis Chedid, Charles Aznavour, Jean-Louis Aubert, Eddy Mitchell, Patrick Bruel, Zazie, Nolwenne Leroy, Michel Delpech, Salvator Adamo, Nana Mouskouri, Véronique Sanson, etc. ...et même Marcel Amont ! Sans compter que depuis quelques années, ses deux enfants (Pierre Souchon et Charles Souchon dit Ours) l'accompagnent dans ses prestations.

    Invité d'Émilie Mazoyer le 4 janvier 2023 sur France Bleu, Alain Souchon, grand travailleur, a lâché : « À 16 ans, j'étais un trainard impressionné par le fait qu'il fallait gagner sa vie. ». Plus de soixante ans plus tard, il est plus impressionnant qu'impressionné parce qu'il est toujours sur scène, l'an dernier dans une tournée de cent cinquante concerts. Son dernier album est sorti le 25 novembre 2022. Alors, puisqu'on ne présente pas Souchon (Émilie Mazoyer le présente comme « l'un des plus grands artistes » et « le monument de la chanson française », tandis que sa notice dans le Larousse explique doctement qu'il « [cultive] l'image d'un éternel adolescent au spleen tout baudelairien »), laissons-nous vibrer avec lui...



    1. "J'ai 10 ans" (1974)






    2. "Bidon" (1976)






    3. "Jamais content" (1977)






    4. "Allo Maman bobo" (1977)






    5. "Y'a d'la rumba dans l'air" (1977)






    6. "Papa mambo" (1978)






    7. "L'amour en fuite" (1979)






    8. "C'est comme vous voulez" (1985)






    9. "La ballade de Jim" (1985)






    10. "Ultra moderne solitude" (1988)







    11. "Quand j'serai KO" (1988)






    12. "C'est déjà ça" (1993)






    13. "Foule sentimentale" (1993)






    14. "L'amour à la machine" (1993)






    15. "Sous les jupes des filles" (1993)






    16. "Le baiser" (2000






    17. Interview par Darius Rochebin sur RTS le 22 janvier 2012



     


    Aussi sur le blog.


    Sylvain Rakotoarison (25 mai 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Charles Aznavour.
    Alain Souchon.
    Patrick Bruel.
    Eden Golan.
    ABBA.
    Toomaj Salehi.
    Sophia Aram.
    Fanny Ardant.
    Alain Bashung.
    Alain Chamfort.
    Micheline Presle.
    Plastic Bertrand.
    Jacques Dutronc.

    Françoise Hardy.
    Guy Marchand.
    Maria Callas.
    Catherine Deneuve.
    Gérard Depardieu.
    Stéphanie de Monaco.
    Jane Birkin.
    Fernand Raynaud.
    Marcel Zanini.
    Patricia Kaas.
    Kim Wilde.


     

     
     





    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240527-alain-souchon.html

    https://www.agoravox.fr/culture-loisirs/culture/article/alain-souchon-et-sa-quete-de-la-254645

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/05/21/article-sr-20240527-alain-souchon.html




     

  • Débat Gabriel Attal vs Jordan Bardella : et le vainqueur est...

    « Votre programme, c'est un Banco ; il y a plein de promesses, mais quand on gratte, il n'y a rien derrière ! » (Gabriel Attal à Jordan Bardella, le 23 mai 2024 sur France 2).



     

     
     


    Il était attendu quasiment depuis janvier 2024, et c'est une chaîne de France Télévisions, en l'occurrence France 2, qui a eu le privilège d'organiser le premier débat entre le Premier Ministre Gabriel Attal et le président du RN et tête de liste Jordan Bardella. Cela s'est passé en début de soirée ce jeudi 23 mai 2024.

    Disons-le d'emblée : ce choc des jeunes titans n'aura sans doute pas fait bouger les lignes, on a même l'impression que rien ne fait bouger les lignes, enfin, les sondages, mais même l'accumulation d'événements plus malheureux qu'heureux, c'est vrai, depuis plusieurs mois, a peu d'effet. Disons aussi que les protestations des têtes de liste autres que celles du RN et de la majorité présidentielle sont justifiées... ou pas.

    Justifiées si on admet, et c'est le cas, que ce débat télévisé participe à la campagne des élections européennes. Pourquoi n'inviter que les représentants de deux listes sur trente-huit (trente-huit et pas trente-sept, le Conseil d'État a validé in extremis le 23 mai 2024 une trente-huitième liste, les murs des villes vont être joliment tapissés de ces très hideux panneaux gris) ? Du coup, cinq têtes de liste ont été interviewées à la suite du débat, mais pour François-Xavier Bellamy, il y a rupture d'égalité. Raphaël Glucksmann, qui se trouverait proche, dans les sondages, de la liste de la majorité présidentielle, a refusé d'y prendre part et a obtenu d'être invité jeudi prochain à la même heure de grande écoute. Mais selon ce principe d'équité, je l'avais évoqué pour le débat du 21 mai 2024 sur LCI, pourquoi ne pas avoir invité les trente autres têtes de liste ? La grande entorse à l'équité, c'est bien la différence de traitement médiatique entre la tête de la liste communiste Léon Deffontaines, crédité de 2% dans les sondages, et la tête de la liste du parti animaliste, Hélène Thouy, qui, elle, avait déjà eu 2% aux élections précédentes de 2019.

    La direction de France Télévisions a répondu qu'il s'agissait d'un "grand" débat, entre le Premier Ministre de la France, donc le chef de la majorité, et le président du premier parti d'opposition. Cela peut se défendre. Et c'est ainsi qu'on l'analysera.

    Ce débat ne sera pas un débat historique, mais sa postérité devrait être plus longue que la durée de la campagne électorale. Finalement, un débat télévisé en début de soirée faisant intervenir le Premier Ministre, c'est rare, très rare : on se souvient du débat entre Georges Pompidou et Pierre Mendès France le 27 février 1967, mais ce n'était pas à la télévision mais à Grenoble devant 6 000 personnes, celui entre Raymond Barre et François Mitterrand le 12 mai 1977 sur TF1, aussi entre Laurent Fabius et Jacques Chirac le 27 octobre 1985 sur TF1 (le choc des Premiers Ministres, celui en exercice et un ancien et futur Premier Ministre), mais cela se limite assez vite à ceux-là. Les autres avec un Premier Ministre en exercice étaient des débats de second tour à l'élection présidentielle, un en fait, il faut mettre au singulier, c'était le 28 avril 1988.

    Le débat entre Gabriel Attal et Jordan Bardella a ceci d'emblématique qu'il oppose deux jeunes loups de la politique qui sont déjà devenus de vieux crocodiles. Ils représentent à eux deux l'avenir de la classe politique dans ce qu'elle a de plus lisse et de plus aseptisé. Certains évoquent même des hommes politiques hors sol, qui n'ont jamais connu que la politique et qui ne savent rien de la vraie vie. C'est peut-être vrai, mais c'était le cas de tous leurs prédécesseurs, et notamment des plus illustres : François Hollande, Nicolas Sarkozy, Jacques Chirac, François Mitterrand, Valéry Giscard d'Estaing n'ont jamais fait que de la politique depuis leur jeunesse et ne représentaient pas des citoyens ordinaires.

    Gabriel Attal et Jordan Bardella ont pour eux d'être parmi les personnalités politiques les plus populaires de France. On se doute que la cote du Premier Ministre s'essoufflera puisqu'il est en charge de toute la politique de la nation et à ce titre, est responsable de tout, tandis que la baudruche Bardella, responsable de rien, lisse comme un robot d'Asimov, pourra encore croître (telle une baudruche).

     

     
     


    Pour Gabriel Attal, se prêter à ce débat valait surtout pour aider Valérie Hayer dans la campagne de la majorité présidentielle qui tarde à décoller (c'est le moins qu'on puisse dire). Pour Jordan Bardella, dans la théorie, il avait aussi tout intérêt à ce débat pour se hisser au niveau du Premier Ministre. Cela tombe bien : imitant Jean-Luc Mélenchon en 2022, Jordan Bardella s'est autoproclamé candidat au poste de Premier Ministre depuis quelques mois. Mais on frissonne à l'idée qu'il puisse être à la tête du gouvernement de la République, paresseux et peu travailleur qu'il est.

    Car il n'y a pas photo dans le résultat des courses : Gabriel Attal a très largement dominé ce débat, tandis que son contradicteur professionnel peinait à surnager dans ses dossiers. Si les deux avaient une aisance verbale bien nécessaire aux joutes des téméraires, Gabriel Attal est arrivé sans notes, connaissant tous les dossiers, les chiffres, les dates, les projets, les enjeux... tandis que Jordan Bardella rougissait lorsqu'il s'agissait de préciser une proposition, lorsqu'il fallait développer une mesure floue et sans intérêt. Ce n'est pas pour rien que Jordan Bardella a reçu quelques surnoms comme Coquille vide ou Bidon. Il a suivi des cours de communication, de l'entraînement, incontestablement, mais il singeait beaucoup trop de vrais responsables politiques qui avaient de la conviction et du fond, alors que lui, à l'évidence, n'avait que du creux à vendre (d'où le concept de la baudruche, classique pour l'extrême droite quand on commence à regarder les détails).


    Comme un chat jouant avec une souris sans avoir faim, Gabriel Attal a esquissé souvent le petit sourire gourmand mi-carnassier mi-tendre du joueur qui sent que la partie est facile et qu'il va se régaler. La partie intellectuelle était facile pour Gabriel Attal parce qu'il est d'une nettement autre stature que Jordan Bardella.

    J'en veux pour preuve quelques sujets. Par exemple, sur le marché de l'électricité. Jordan Bardella a avoué qu'il n'avait pas lu le projet adopté par le Parlement Européen et qu'il a rejeté, projet qui réformait le marché de l'électricité qui n'est pas encore entré en application puisque c'est à partir de 2026. Ou encore sur le droit de veto en Europe, notamment en matière fiscale qui empêche d'instaurer une taxe pour les gros du numérique en Europe (car l'Irlande et le Luxembourg s'y opposeront toujours).

    Jordan Bardella n'a cessé de faire de l'antimacronisme primaire et dans ses critiques, il a transformé, il a déformé la réalité. Ainsi, il a dit faussement que les véhicules thermiques seraient interdits en 2035. Gabriel Attal a rectifié magistralement : « 2035 n’est pas la fin de la voiture thermique, mais la fin de la vente des véhicules neufs à moteur thermique. ». Ce signifie qu'il y aura probablement des véhicules à moteur thermique en circulation encore en 2050.

    Les propositions du RN sont antiéconomiques. Ainsi, lorsque Jordan Bardella a proposé une priorité nationale dans les marchés publics : « Vous produisez sur le sol français, vous devez avoir un avantage dans la commande publique. », Gabriel Attal a rétorqué : « 80% de nos PME exportent, vous allez leur couper les jambes. ».

    Mais le pire est toujours sur le thème de l'immigration. Gabriel Attal a rappelé que les députés RN ont voté pour la loi Immigration et à ce titre, pour la régularisation des milliers de sans-papiers dans les secteurs en tension. L'objectif du RN de refuser l'accostage de bateaux de réfugiés est irréalisable. Mais plus encore, et Valérie Hayer l'avait systématiquement pointé du doigt, l'idée de la double frontière proposée par Jordan Bardella est du vent et du creux stupide.

    Cette idée, c'est de laisser la libre circulation des citoyens européens dans l'Espace de Schengen, mais pas celle des migrants qui auraient obtenu une carte de séjour dans l'un des États membres, eux n'auraient pas la possibilité de franchir les frontières de l'Europe. Mais Gabriel Attal a demandé à son contradicteur comment il allait appliquer une telle mesure. Jordan Bardella s'est enlisé en prenant la comparaison avec un aéroport où il y a deux files, une pour les Européens et une pour les extra-européens. En oubliant que dans les deux cas, les gens devront attendre et faire la queue au contraire d'aujourd'hui. Cela signifierait des contrôles aux frontières partout (il faudrait alors recruter massivement), et des queues épouvantables pour les 500 000 Français frontaliers qui travaillent de l'autre côté de la frontière.


    Jordan Bardella a alors reculé en disant que ce ne serait que des contrôles aléatoires aux frontières... affirmant que c'était permis avec Schengen. Gabriel Attal a alors salué l'idée puisque c'est déjà fait depuis 2015 pour assurer le contrôle des flux migratoires, mais que ces contrôles aléatoires n'empêcheront pas l'immigration illégale. Gabriel Attal de conclure : « En quelques secondes, on est passé d’une double frontière où tout le monde va être contrôlé aux frontières à "on augmente un peu les contrôles aléatoires". ». En somme, sous emballage de montrer une mesure forte (interdiction de l'immigration), le RN ne propose rien puisque les contrôles aléatoires existent déjà aujourd'hui ! Que du creux !

    De plus, la plupart des positions du RN révèlent une véritable supercherie, un double jeu, voire une imposture. Ainsi, Jordan Bardella soutiendrait l'Ukraine mais a refusé de voter toutes les motions soutenant l'Ukraine.

    Sur la plupart des sujets, Jordan Bardella refusait de répondre aux questions et voulait dérouler ses propres éléments de langage (qu'on connaît depuis longtemps puisqu'il ne sait réciter que cela). Il a bien tenté une échappée politique en lançant timidement au Premier Ministre : « Si vous êtes là ce soir, c'est que vous avez décidé d'engager votre responsabilité dans cette campagne. » (pour aider Valérie Hayer), mais cette critique n'a pas de prise. En confondant élections nationales et élections européennes, Jordan Bardella fait un contre-sens et ses électeurs aussi, car il n'y a aucune raison de dissoudre l'Assemblée Nationale après les élections européennes, quels qu'en soient les résultats, cela d'ailleurs ne s'est jamais produit, y compris quand le PS au pouvoir n'a obtenu que 20,8% aux élections européennes de juin1984, soit moins de la moitié de la première liste (UDF-RPR menée par Simone Veil) qui a obtenu 43,0%.

     

     
     


    La réaction des commentateurs est unanime : Gabriel Attal a dominé le débat et Jordan Bardella a eu du mal à justifier ses positions et ses propositions tant elles sont floues et tant les raisonnements sont incohérents. Au point que le Premier Ministre a dû balancer : « La méthode du Rassemblement national, c'est de dire : on est contre tout. Et puis, dans cinq ou dix ans, si on se rend compte qu'on s'est plantés, on dit qu'on a changé d'avis. C'est ça, votre méthode. Vous vous opposez à tout ce qu'on fait, et comme ça, ensuite, vous pourrez dire, si ça n'a pas marché, bah en fait, on a eu raison de s'opposer. ».

    La revue de presse du site Touteleurope est éloquente. "Libération" : « Le premier [Gabriel Attal] est apparu bien plus à l’aise que son cadet [Jordan Bardella], sur le fond comme sur la forme. ». "Politico" : « M. Bardella, homme politique qui a l'habitude des médias et a tendance à tenir son rang dans les débats, a parfois semblé mal à l'aise face à un Premier Ministre français qui s'exprimait sans notes et semblait maîtriser la situation. ». "Nouvel Obs" : « À l’offensive, Gabriel Attal a poussé son rival dans ses retranchements, révélant les faiblesses ou approximations des promesses du RN. ».

    Par ailleurs, Cyril Graziani, de France Télévisions, a analysé ainsi ce débat : « Sur le fond, indéniablement, [le vainqueur est] Gabriel Attal, arrivé sans notes, contrairement à Jordan Bardella, Attal, beaucoup plus précis, beaucoup plus tranchant, plus concret qu'un Bardella dans les cordes dès les premières minutes et surtout, sur le dossier phare qu'est l'immigration, incapable de dérouler des arguments, qui est resté sur la défensive, alors qu'on l'a connu plus tranchant, beaucoup plus destructeur dans ce genre d'exercice, mais acculé quand il reconnaît ne pas avoir lu le texte de la réforme du marché de l'électricité contre laquelle il a voté ("Vous ne lisez pas les lois avant de voter" s'est étonné le Premier Ministre), et incapable de répliquer, quand Attal lui assène : "Votre programme, c'est un Banco ; il y a plein de promesses, mais quand on gratte, il n'y a rien derrière !" ».

    Un internaute a commencé à comprendre la machine Bardella et a osé se poser la vraie question : « Et si l'élégant Bardella portant beau, bien mis, manucure et dents blanches, d'après les médias, bien sous tous rapports, prédisant à cet esprit sans malice un avenir politique radieux, demain Premier Ministre de la France, n'était qu'un piteux branleur et un lamentable opportuniste ? ».

    La mine réjouie de Gabriel Attal, prêt à la bataille intellectuelle contre son adversaire arrogant mais souriant d'extrême droite, me faisait penser justement à la mine réjouie de Raymond Barre (à l'époque, Raymond-la-science) face à un François Mitterrand qui ne comprenait rien à l'économie (en 1977, voir plus haut). Le débat de 1977 a eu lieu deux mois après les élections municipales qui furent une grande victoire de la gauche socialo-communiste. Mais c'était aussi quelques mois avant les élections législatives de mars 1978 qui, finalement, ont été gagnées par Raymond Barre : François Mitterrand n'a donc pas été Premier Ministre. Néanmoins, la comparaison s'arrête là, doit s'arrêter là, car à force de persévérance, François Mitterrand a fini par se faire élire Président de la République par des électeurs qui n'ont pas tardé à se sentir dupés. C'est vrai qu'à terme, les imposteurs sont toujours démasqués. Encore faut-il qu'entre-temps, la France et les Français n'en souffrent pas trop.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (24 mai 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Le débat Gabriel Attal vs Jordan Bardella du 23 mai 2024.
    Élections européennes 2024 (2) : 37 listes et un bulletin de vote !
    Le souverainisme européen selon Emmanuel Macron : puissance, prospérité et humanisme.
    L'hymne à l'Europe.
    Fête de l'Europe, joies et fiertés françaises.
    Le Tunnel sous la Manche.
    Les 120 ans de l'Entente cordiale.
    Eurovision 2024.
    La vision européenne d'Édouard Balladur.
    Débat Valérie Hayer vs Jordan Bardella : l'imposture démasquée de Coquille vide.
    Il y a 20 ans, l'élargissement de l'Union Européenne.
    La convergence des centres ?
    Élections européennes 2024 (1) : cote d'alerte pour Renaissance.
    Valérie Hayer, tête de la liste Renaissance.
    Charles Michel et Viktor Orban : l'Europe victime d'une histoire belge !
    Jacques Delors : il nous a juste passé le relais !
    Il y a 15 ans : Nicolas Sarkozy, l'Europe et les crises (déjà).
    La Méditerranée, mère de désolation et cimetière de nos valeurs ?
    Le 8 mai, l'émotion et la politique.
    Ukraine, un an après : "Chaque jour de guerre est le choix de Poutine".
    Le 60e anniversaire du Traité de l'Élysée le 22 janvier 2023.
    De Gaulle, l’Europe et le volapük intégré.
    L’inlassable pèlerin européen Emmanuel Macron.
    Valéry Giscard d’Estaing, le rêveur d’Europe.
    Enfin, une vision européenne !
    Relance européenne : le 21 juillet 2020, une étape historique !







    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240523-debat-attal-bardella.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/europe/article/debat-gabriel-attal-vs-jordan-254808

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/05/24/article-sr-20240523-debat-attal-bardella.html





     

  • Élections européennes 2024 (2) : 37 listes et un bulletin de vote !

    « Et n'oublie pas : quand les autres s'abaissent, on s'élève ! » (Alafair Burke, 2018).



     

     
     


    Ce mardi 21 mai 2024 dans la soirée, sur la chaîne LCI, s'est tenu le premier débat dans lequel ont participé toutes les têtes de listes, du moins, celles des huit listes susceptibles d'obtenir des élus selon les sondages (avec une parité parfaite, quatre femmes et quatre hommes). L'émission, appelée "La grande confrontation" a obtenu 3,1% de part d'audience. Elle a duré près de trois heures dix (voir à la fin de l'article la vidéo). Un autre débat est prévu sur la chaîne concurrente BFMTV le lundi 27 mai 2024 à 20 heures 30.

    utant dire que le choix des invités était arbitraire puisque l'élection n'a pas encore eu lieu et que les sondages, par exemple, donnent autour de 2% d'intentions de vote la liste communiste menée par Léon Deffontaines, alors que la liste du parti animaliste menée par l'avocate Hélène Thouy avait obtenu 2,2% des voix en mai 2009 (c'était d'ailleurs une grande surprise) et cette liste se représente en 2024 et n'a pas eu droit à la parole. Notons d'ailleurs que les autres listes qui avaient obtenu au moins 2% des voix en 2019 et qui n'étaient pas représentées par les huit invités de ce mardi soir ne se présentent pas en 2024 : liste de Debout la France menée par Nicolas Dupont-Aignan (3,5%), liste de Générations menée par Benoît Hamon (3,3%) et liste Les Européens de l'UDI menée par Jean-Christophe Lagarde (2,5%). Pas sûr que si elles avaient été candidates, ces listes auraient été invitées au débat télévisé. Cette année, l'UDI fait cause commune avec la majorité présidentielle.

    Évoquons alors très rapidement ce très long débat. Finalement, celui qui l'a gagné n'est crédité que de 2% des intentions de vote : en effet, peu connu jusqu'alors, le candidat communiste Léon Deffontaines a surpris tout son monde. Le benjamin de l'étape (28 ans) a montré sa grande maîtrise de l'oral et son talent de débatteur, à l'aspect sympathique, lisse, propre sur lui, ce qui a amené l'éditorialiste Nicolas Domenach à en faire un "petit Bardella" pour le parti communiste. Même s'il n'est pas élu à ce scrutin, il aura probablement de l'avenir.

     

     
     


    Les autres participants : Valérie Hayer (majorité présidentielle), Jordan Bardella (RN), Raphaël Glucksmann (PS), François-Xavier Bellamy (LR), Marion Maréchal (Reconquête), Manon Aubry (FI) et Marie Toussaint (EELV) n'ont toutefois pas démérité, mais ils n'ont pas non plus surpris. Ils ont repris leurs arguments habituels de manière souvent talentueuse, comme le représentant de LR et le représentant du PS. Valérie Hayer a été plutôt bonne, mais elle est plus à l'aise dans l'exposé rationnel des arguments que dans l'exercice du débat où la passion peut convaincre. Elle a eu deux cibles, le RN et le PS, tandis que le candidat communiste attaquait surtout la représentante des insoumis qui ont le même cœur de cible (la gauche ultra).

    Jordan Bardella, le favori de ces élections, n'a pas fait de boulette malgré sa totale inconsistance intellectuelle, mais a montré une très grande arrogance (les sondages font gonfler les chevilles sinon la tête) qui inquiète jusqu'aux dirigeants du RN eux-mêmes. Mais il a eu l'habileté de désamorcer tous les sujets qui auraient pu le mettre en difficulté, le soutien à Vladimir Poutine (il a déclaré son soutien à l'Ukraine), la proximité avec une extrême droite européenne vraiment "craignos" (il a annoncé que les députés européens RN ne siégeraient plus dans le même groupe que ceux de l'AfD allemande), etc.

    Insistons quand même sur le fait que ce débat, difficile car à huit (long et personne n'a pu vraiment se faire entendre), a été de bonne tenue, et surtout, faisait participer des candidats têtes de liste jeunes, au point que le doyen d'âge, le plus vieux, était Raphaël Glucksmann (44 ans) ! Ce coup de jeune n'est cependant pas un coup de renouvellement puisque quatre des huit têtes de liste présentes étaient déjà têtes de liste aux élections européennes de 2019 (Jordan Bardella, François-Xavier Bellamy, Raphaël Glucksmann et Manon Aubry). C'est Valérie Hayer qui a la fonction plus influente au sein de l'Union Européenne, puisqu'elle est la présidente du groupe Renew sans lequel aucune majorité n'est possible dans l'hémicycle de Strasbourg.

     

     
     


    Abandonnons le débat et revenons aux listes. Le Ministère de l'Intérieur a publié le 17 mai 2024 la liste des listes officiellement candidates : il y en a trente-sept ! [Le Conseil d'État a validé in extremis le 23 mai 2024 une trente-huitième liste]. C'est un record historique pour un scrutin en France (en 2019, il n'y en avait que trente-quatre). Avec 81 candidats pour chaque liste, cela fait 2 997 candidats dont 1 505 hommes et 1 492 femmes (la différence de parité provient du nombre impair de candidats dans chaque liste : il y a plus de têtes de liste hommes que de têtes de liste femmes, 25 contre 12, d'où les 13 de différence). La liste de tous les candidats a été publiée le 18 mai 2024.

    Certaines listes ne se sont pas constituées, principalement faute de moyens ou faute de candidats. En effet, réunir autour de soi quatre-vingts autres personnes n'est pas évident, au niveau national, autour d'un projet commun (à définir), d'autant plus que les règles de la parité imposent quarante hommes et quarante femmes. Cela suppose une organisation très structurée sur le territoire (c'est le cas de la Fédération nationale des chasseurs, de Lutte ouvrière, etc.), ce qui peut être difficile pour des candidats à la seule promotion publicitaire personnelle. Ainsi, Debout la France (Nicolas Dupont-Aignan), Générations (Benoît Hamon), l'Alliance royale, le Mouvement écologiste indépendant (MEI), le Parti fédéraliste, l'Alliance centriste (Philippe Folliot) et Territoire en mouvement (Jean-Christophe Fromantin), etc. n'ont finalement pas déposé de candidature cette année pour diverses raisons (la principale étant le manque de financement).

    Avant de scruter la composition des huit listes principales (celles qui ont débattu le 21 mai 2024 sur LCI), regardons quelles sont donc les vingt-neuf autres listes (je ne comptabilise donc pas les huit principales listes).

    Il y a d'abord beaucoup de listes d'extrême gauche : dix dont celle de Free Palestine (Nagib Azergui), du Parti pirate (Caroline Zorn), de Lutte ouvrière (menée par Nathalie Arthaud et Jean-Pierre Mercier, et en queue de liste, Arlette Laguiller), celle de Georges Kuzmanovic (avec le prince Joachim Charles Napoléon Murat !), du NPA, du Parti des travailleurs (avec Daniel Gluckstein en sixième place), celle du militant communautariste Hadama Traoré.

    Il y a ensuite des listes souverainistes ou d'extrême droite : six dont celle de François Asselineau (UPR), celle de Florian Philippot (Les Patriotes) à laquelle s'est joint Jean-Frédéric Poisson (Via), celle d'Édouard Husson, celle des artistes antisionistes Francis Lalanne et Dieudonné.

    Il y a aussi quelques listes revendiquant l'écologie politique, quatre : Équinoxe de la souriante Marine Cholley, la liste de Yann Wehrling (ancien EELV, ancien MoDem et actuel vice-président du conseil région d'Île-de-France) qui rassemble entre autres Cap21 (le mouvement de Corinne Lepage), le mouvement pour les animaux, le parti nationaliste basque, etc. (et qui est soutenue par l'ancien ministre Jean-Jacques Aillagon, placé en fin de liste), la liste de la Ruche citoyenne, la liste de Jean-Marc Governatori (Écologie au centre).

    Il y a des listes qui ont une revendication particulière, et celle des animalistes d'Hélène Thouy (déjà citée) n'est pas la moins légitime puisqu'elle avait obtenu en 2019 plus de 2% des voix. Il y a aussi les défenseurs de l'esperanto avec Laure Patas d'Illiers, des droits des parents et de la protection de l'enfance avec Gaël Coste-Meunier, la défense de la ruralité avec l'inimitable Jean Lassalle (associé à Willy Schraen, président de la Fédération nationale des chasseurs !), et la défense de la démocratie directe avec Philippe Ponge.

    Il y a aussi des listes de petits partis politiques qui n'ont pas voulu se mettre ou remettre avec des grands partis, quatre : celle de Guillaume Lacroix (Parti radical de gauche), avec l'ancienne ministre Juliette Méadel en quatrième position, celle de Pierre Larrouturou (Nouvelle donne), pourtant député européen sortant de la liste socialiste en 2019, celle de Jean-Marc Fortané (Nous Citoyens), enfin, celle d'Audric Alexandre (Parti des citoyens européens, de tendance social-libérale).

    Si je compte bien, cela fait donc vingt-neuf listes, plus les huit principales, ce qui donne trente-sept, le compte est bon ! (ouf).

     

     
     


    Voyons maintenant les listes principales qui ont toutes concouru en 2019 à l'exception de la liste Reconquête dont le parti n'existait pas à l'époque. Le nombre entre parenthèse suivant le nom d'un candidat correspond à son ordre dans la liste, le n°81 étant le dernier. Il est de coutume de mettre en fin de liste des personnes honorifiques pour "pousser" la liste, c'est le cas du RN, de la majorité présidentielle, de FI, du PCF, (aussi de LO), entre autres. J'indique ainsi les candidats remarquables pour chacune de ces listes.

    Liste du RN : Jordan Bardella (1), Malika Sorel (2), Fabrice Leggeri (3), Jean-Paul Garraud (5), Matthieu Valet (7), Thierry Mariani (9), Philippe Olivier (11), Alexandre Varaut (13), Julien Sanchez (17), Marie Dauchy (22), Andréa Kotarac (35), Marine Le Pen (80, Louis Aliot (81). Commentaire : Malika Sorel a "harcelé" Emmanuel Macron encore en janvier 2024 pour être nommée Ministre de l'Éducation nationale, ce qui donne une idée de son arrivisme. Ancien directeur de Frontex, Fabrice Leggeri est accusé par la Ligue des droits de l'homme de crime contre l'humanité et complicité de crime de torture pour avoir refusé de secourir des réfugiés. Philippe Olivier est le mari de Marie-Caroline Le Pen et à ce titre, le beau-frère de Marine Le Pen (rappelons aussi que la compagne de Jordan Bardella est Nolwenn Olivier, fille de Philippe Olivier qui est donc le beau-père de la tête de liste ; auparavant, Jordan Bardella était en relation avec Kerridwen Chatillon, la fille de Frédéric Chatillon, selon Wikipédia).

    Liste de la majorité présidentielle (Renaissance, MoDem, Parti radical et Horizons) et de l'UDI : Valérie Hayer (1), Bernard Guetta (2), Marie-Pierre Vedrenne (3), Pascal Canfin (4), Nathalie Loiseau (5), Sandro Gozi (6), Fabienne Keller (7), Laurence Farreng (9), Gilles Boyer (10), Valérie Devaux (11), Christophe Grudler (12), Jérémy Decerle (14), Laurent Hénart (16), Bérangère Abba (17), Max Orville (18), Ambroise Méjean (20), Rachel-Flore Pardo (21), Catherine Amalric (27), James Chéron (28), Pierre Karlesking (30), Pierre Jakubowicz (64), Jean Veil (74), Violette Spillebout (75), Édouard Philippe (76), François Bayrou (78), Stéphane Séjourné (80), Élisabeth Borne (81). Commentaire : en fin de liste, la majorité a mobilisé deux anciens Premiers Ministres, un fils de Simone Veil et le président du MoDem habitué à mener des listes aux européennes.

    Liste du PS : Raphaël Glucksmann (1), Pierre Jouvet (3), Aurore Lalucq (4), Christophe Clergeau (5), Jean-Marc Germain (7), Chloé Ridel (10), François Kalfon (13). Commentaire : Pierre Jouvet a été celui qui a négocié avec Jean-Luc Mélenchon pour fonder la Nupes. Contrairement à ce que déclare Raphaël Glucksmann, ce dernier reste donc toujours dans une optique d'union avec le leader des insoumis pour 2027.

    Liste de LR : François-Xavier Bellamy (1), Céline Imart (2), Christophe Gomart (3), Isabelle Le Callennec (4), Nadine Morano (6), Brice Hortefeux (7), Nathalie Colin-Oesterlé (8), Geoffroy Didier (11), Emmanuelle Mignon (12), Frédéric Nihous (13), Valérie Boyer (14), Pascale Bories (28), Vincent Jeanbrun (81). Commentaire : la présence, en position éligible, des indéboulonnables Nadine Morano et Brice Hortefeux a provoqué beaucoup de protestation au sein de LR. Notons qu'Emmanuelle Mignon était la directrice de cabinet de Nicolas Sarkozy à l'Élysée. Pour terminer la liste, le maire de L'Haÿ-les-Roses, qui fut attaqué par des émeutiers l'été dernier (proche de Valérie Pécresse, il a été vice-président du conseil régional d'Île-de-France).

    Liste de FI : Manon Aubry (1), Leïla Chaibi (5), Rima Hassan (7), Damien Carême (8), Jean-Luc Mélenchon (80). Commentaire : Rima Hassan est une militante pro-palestinienne qui a importé le conflit israélo-palestinien dans les thèmes de campagne.

    Liste de Reconquête : Marion Maréchal (1), Guillaume Peltier (2), Sarah Knafo (3), Nicolas Bay (4), Laurence Trochu (5), Stanislas Rigault (6), Jean Messiha (7), Damien Rieu (12), Éric Zemmour (80). Commentaire : Sarah Knafo est la proche collaboratrice d'Éric Zemmour.

    Liste des écologistes : Marie Toussaint (1), David Cormand (2), Benoît Biteau (6), Caroline Roose (7), Priscillia Ludosky (9), Maël Rannou (54), Cédric Villani (76), Mélanie Vogel (77), Noël Mamère (78), Eva Joly (79), Yannick Jadot (80), Marine Tondelier (81). Commentaire : EELV a mis le paquet sur les soutiens en queue de liste (il ne manque plus que Dominique Voynet et Cécile Duflot !). Priscillia Ludoksy est l'une des leaders du mouvement des gilets jaunes.

    Liste du PCF : Léon Deffontaines (1), Emmanuel Maurel (3), André Chassaigne (5), Cécile Cukierman (80, Fabien Roussel (81). Commentaire : poussée par Fabien Roussel, la liste a intégré Emmanuel Maurel, ancien du PS et élu député européen en 2019 sur la liste des insoumis.



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (22 mai 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Élections européennes 2024 (2) : 37 listes et un bulletin de vote !
    Le souverainisme européen selon Emmanuel Macron : puissance, prospérité et humanisme.
    L'hymne à l'Europe.
    Fête de l'Europe, joies et fiertés françaises.
    Le Tunnel sous la Manche.
    Les 120 ans de l'Entente cordiale.
    Eurovision 2024.
    La vision européenne d'Édouard Balladur.
    Débat Valérie Hayer vs Jordan Bardella : l'imposture démasquée de Coquille vide.
    Il y a 20 ans, l'élargissement de l'Union Européenne.
    La convergence des centres ?
    Élections européennes 2024 (1) : cote d'alerte pour Renaissance.
    Valérie Hayer, tête de la liste Renaissance.
    Charles Michel et Viktor Orban : l'Europe victime d'une histoire belge !
    Jacques Delors : il nous a juste passé le relais !
    Il y a 15 ans : Nicolas Sarkozy, l'Europe et les crises (déjà).
    La Méditerranée, mère de désolation et cimetière de nos valeurs ?
    Le 8 mai, l'émotion et la politique.
    Ukraine, un an après : "Chaque jour de guerre est le choix de Poutine".
    Le 60e anniversaire du Traité de l'Élysée le 22 janvier 2023.
    De Gaulle, l’Europe et le volapük intégré.
    L’inlassable pèlerin européen Emmanuel Macron.
    Valéry Giscard d’Estaing, le rêveur d’Europe.
    Enfin, une vision européenne !
    Relance européenne : le 21 juillet 2020, une étape historique !






    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240521-europeennes.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/europe/article/elections-europeennes-2-37-listes-254785

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/05/21/article-sr-20240521-europeennes.html



     

  • Nostalgies aznavouriennes

    « Je vous parle d'un temps
    Que les moins de vingt ans
    Ne peuvent pas connaître »
    (Charles Aznavour, "La Bohème", 1965).





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    L'auteur, compositeur, interprète et acteur Charles Aznavour est né il y a juste 100 ans, le 22 mai 1924, au sixième arrondissement de Paris. Il serait aujourd'hui centenaire, et un centenaire chantant, car il n'a jamais vraiment arrêté de chanter depuis ses débuts en 1933, jusqu'à son départ de terre le 1er octobre 2018.

    À l'occasion de ce centenaire, Universal France a sorti le 10 mai 2024 le coffret "The Complete Work, Centenary Edition" qui réédite toute sa discographie française et internationale, avec des enregistrements en studio mais aussi en concert (en live), de 1948 à 2015. Il contient 100 CD avec des sons restaurés et remasterisés, incluant des versions inédites. Répartis notamment ainsi : 33 CD pour sa discographie française complète (51 albums originaux comprenant 751 titres) ; 26 CD pour sa discographie internationale complète (41 albums originaux comprenant 542 titres) ; 20 concerts comprenant 513 titres (et il y a encore des CD pour des bonus, des contes pour enfants, etc.). Ce coffret est vendu 300 euros en tirage limité et numéroté (je n'en fais pas la publicité mais je le signale simplement). (Moi, ça m'impressionne toujours les coffrets "toute l'œuvre complète" d'un artiste, que ce soit un chanteur ou un acteur ; c'est comme une urne funéraire, un cube somme toute relativement petit pour représenter, ici, quatre-vingt-quatorze années d'existence de la vie d'un homme).

    Parce que ses chansons éternelles datent de cette époque, malgré ces nombreuses décennies de scène, Aznavour me fait penser avant tout à la nostalgie des années 1960, une nostalgie très parisienne, Montmartre, etc. Une époque peut-être encore facile (ce qui est faux, se soigner était plus compliqué qu'aujourd'hui), sans les turpitudes de la complexité du monde d'aujourd'hui, complexité économique, géopolitique, planétaire, numérique, génétique, etc. S'il fallait donner un couple de chanteurs caractérisant les Trente Glorieuses à Paris, ce serait évidemment Charles Aznavour et Édith Piaf... Je propose à la fin ses quelques chansons ultraconnues qui ont fait si bien aimer Aznavour, Paris, le français, la France, les Français, l'amour...

    Auparavant, je veux évoquer un élément étonnant de sa biographie : sa rencontre avec les Manouchian qu'il connaissait bien avant et pendant la guerre.

    Le père de Charles Aznavour était un Arménien de Géorgie (à l'époque province russe) et sa mère une Arménienne de la région de Marmara (à l'époque dans l'empire ottoman, maintenant, à l'ouest de la Turquie), et ils se sont rencontrés à Constantinople (Istanbul) en 1921. Ils se sont réfugiés à Paris en 1924, juste avant la naissance de Charles (et après la naissance de sa sœur Aïda, née seize mois avant lui). La petite famille Aznavourian était à la fois artiste et restauratrice : le père baryton tenait un restaurant, la mère comédienne, la sœur au piano, et forcément, Charles était dans cette ambiance d'artistes de toutes origines, réfugiés d'Europe centrale et orientale des années 1920 et 1930 (et il y avait aussi en France une forte immigration arménienne à l'époque, les Arméniens fuyant la nouvelle Union Soviétique après avoir fui la Turquie génocidaire). Charles Aznavour, passionné de cinéma et voulant être acteur, adopta son nom définitif, Aznavour (au lieu d'Aznavourian), dès l'âge de 9 ans, à ses premières prestations (il voulait être chanteur et acteur, comme ses parents). Adolescent, il a assisté à des dizaines de concerts de Maurice Chevalier, et allait toutes les semaines au cinéma russe et au théâtre arménien.

     

     
     


    Quel rapport avec les Manouchian ? Celle qui allait devenir Mélinée Manouchian était une rescapée du génocide contre les Arméniens. Orpheline à l'âge de 2 ans, elle s'est réfugiée en Grèce en 1922 puis en France en 1926. Dans les années 1930, elle s'est intégrée à la famille Aznavourian à Paris, et a ainsi accompagné le premier succès de radio-crochet de Charles Aznavour en 1935. Adhérente du parti communiste français pour combattre le fascisme, elle y a rencontré son futur mari, Missak Manouchian, en 1934, qui passait aussi de nombreuses soirées chez les Aznavourian à chanter ou à lire ses poèmes (il a appris à Charles Aznavour à jouer aux échecs). Missak fut fusillé par les nazis le 21 février 1944 au Mont-Valérien après leur engagement dans la Résistance (les Aznavourian avaient caché le couple chez eux). Mélinée Manouchian lui a survécu quarante-cinq ans. Tous les deux ont été transférés au Panthéon le 21 février 2024 dans une cérémonie présidée par le Président Emmanuel Macron.

    Après la guerre, les Aznavourian envisageaient d'aller vivre en Arménie soviétique, ils s'étaient déjà fait faire des passeports soviétiques (Staline avait encouragé tous les réfugiés arméniens à revenir en Arménie), mais Mélinée Manouchian les en dissuada en raison de l'extrême dureté du régime stalinien. La suite est d'ailleurs très étrange : les passeports soviétiques, qui n'ont servi donc à rien, furent laissés au fond d'un tiroir d'un meuble. Complètement oubliés. Un peu plus tard, le meuble en question a été donné à une association caritative pour être vendu (comme aujourd'hui chez Emmaüs). Bien plus tard, Charles Aznavour a reçu un coup de téléphone de l'actrice Simone Signoret : elle venait de retrouver ces passeports et voulait les lui rendre. Elle venait d'acheter le meuble. Destin farceur. Cette anecdote est restée secrète pendant de longues années, jusqu'à ce que Charles Aznavour se soit livré en septembre 2014 auprès de Cyril Hanouna dans son émission sur Europe 1 ("Les pieds dans le plat").

    Fasciné par Maurice Chevalier et Charles Trenet, Aznavour a voulu chanter joyeusement sur des sujets pas forcément joyeux. Charles Trenet était son modèle absolu parce que, comme il l'expliquait le 8 décembre 2014 : « Parce qu’il a fait ce que les autres n’ont pas fait : chanter des chansons gaies, mais avec du fond. Prenez la plupart de ses premiers succès. "Je chante", par exemple : le texte n’est pas du tout léger. C’est tout de même l’histoire d’un gars qui se pend. "J’ai rendez-vous avec la lune: non plus. Il a montré qu’on pouvait aller au-delà de la chansonnette facile. Il y a une ouverture pour quelqu’un comme Guy Béart. D’ailleurs, c’est aussi la force de Trenet : il y a chez lui une ouverture pour tous ceux qui sont venus ensuite. Pour Brassens, pour Brel, et pour moi bien sûr. Trenet, c’est celui que chacun d’entre nous a rêvé d’être. » ("Migros Magazine").

    Cela a donné, après une vingtaine d'années de scène un peu laborieuse, un énorme succès tant commercial qu'artistique, amorcé par "Je m'voyais déjà". En tout, plus de mille deux chansons interprétées (beaucoup d'autres écrites pour d'autres chanteurs comme Édith Piaf, Eddie Constantine, Gilbert Bécaud, Serge Gainsbourg, Joe Dassin, Juliette Gréco, Maurice Chevalier, Régine, Johnny Hallyday, Mireille Mathieu, Eddy Mitchell, Dorothée, Richard Antony, Bob Dylan, etc.), en neuf langues (le français, l'allemand, l'anglais, l'italien, l'espagnol, le russe, l'arménien, le napolitain et le kabyle), quatre-vingt-douze albums enregistrés en studio, dont une trentaine de disques d'or, plus de 180 millions d'exemplaires vendus partout dans le monde. Sans compter sa participation à en environ quatre-vingts films et téléfilms et cinq pièces de théâtre.


    Il avait besoin de la scène : « C’est le miracle. Ce n’est pas juste un désir, c’est un bonheur. Je suis poussé vers elle. Bien avant la presse, le public m’est fidèle. Et j’ai besoin d’aller devant lui. (…) Je suis sans doute le seul chanteur triste qui est heureux d’être devant son public. Et il paraît que ça se sent. » ("Migros Magazine").

    Parmi les très nombreuses collaborations avec d'autres artistes, citons par exemple José Carreras, Elton John, Dalida, Nana Mouskouri, Liza Minnelli, Claude François, les Compagnons de la chanson, Franck Sinatra, Ray Charles, Fred Astaire, Petula Clark, etc. Même le chanteur Kendji Girac, sous les projecteurs de l'actualité récente, a chanté en 2015 sa fameuse chanson "La Bohème" (qui racontait le quartier de Montmartre). Charles Aznavour a reçu de très nombreuses récompenses, dont un Lion d'or de la Mostra de Venise en 1971, un César d'honneur en 1997, deux Victoires de la musique en 1997 et 2010, etc.

    Mais laissons-nous nous enivrer de sa nostalgie...



    1. "Je m'voyais déjà" (1961)






    2. "For me formidable" (1963)






    3. "Hier encore" (1964)






    4. "La Bohème" (1965)






    5. "Emmenez-moi" (1967)






    6. "Mourir d'aimer" (1971)






    7. "Comme ils disent" (1972)






    Aussi sur le blog.


    Sylvain Rakotoarison (20 mai 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    La France de Charles Aznavour.
    Charles Aznavour.
    Alain Souchon.
    Patrick Bruel.
    Eden Golan.
    ABBA.
    Toomaj Salehi.
    Sophia Aram.
    Fanny Ardant.
    Alain Bashung.
    Alain Chamfort.
    Micheline Presle.
    Plastic Bertrand.
    Jacques Dutronc.

    Françoise Hardy.
    Guy Marchand.
    Maria Callas.
    Catherine Deneuve.
    Gérard Depardieu.
    Stéphanie de Monaco.
    Jane Birkin.
    Fernand Raynaud.
    Marcel Zanini.
    Patricia Kaas.
    Kim Wilde.


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    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240522-aznavour.html

    https://www.agoravox.fr/culture-loisirs/culture/article/nostalgies-aznavouriennes-254540

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/05/15/article-sr-20240522-aznavour.html