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  • Législatives 2024 (36) : Gérald Darmanin plaide pour un Premier Ministre non macroniste !

    « J’étais un homme qui aimait la politique, je suis devenu un homme désormais bien plus attaché au service de l'État. » (Gérald Darmanin, le 12 août 2024 dans "Le Figaro").




     

     
     


    À 41 ans, l'actuel Ministre de l'Intérieur et des Outre-Mer démissionnaire Gérald Darmanin est depuis plusieurs années un homme qui compte dans le camp présidentiel. Son positionnement à l'issue des élections législatives anticipées du début de cet été peut donc avoir une grande influence. Bien que toujours en poste ("ministre démissionnaire"), il avait déjà averti dès juin 2024 qu'il quitterait le gouvernement si son camp n'obtenait pas la majorité, une déclaration peut-être un peu trop hâtive après réflexion.

    Chouchou à la fois de Nicolas Sarkozy et Emmanuel Macron, il a marqué la Place Beauvau qu'il occupe depuis maintenant quatre ans (un petit record depuis mars 1974, il "bat" la longévité de Christian Bonnet ces jours-ci) au point qu'il personnifie, pour le grand public, la fonction de "premier flic de France" comme l'avaient fait avant lui Raymond Marcellin, Michel Poniatowski, Gaston Defferre, Pierre Joxe, Charles Pasqua, Jean-Pierre Chevènement, Nicolas Sarkozy, Manuel Valls et Bernard Cazeneuve.

    Le succès de l'accueil des Jeux olympiques qui se sont achevés ce dimanche 11 août 2024, c'est d'abord un succès sportif (la France classée dans le Top 5, mission accomplie), qui est dû exclusivement aux athlètes français et à leurs entraîneurs, mais c'est aussi un succès de sécurité, dont Gérald Darmanin a été le premier responsable, alors que les mauvaises langues prophétisaient des attentats, des désordres, ou d'autres horreurs pour simplement dénigrer la France qu'ils ne doivent vraiment pas aimer. Le ministre l'a d'ailleurs affirmé dans "Le Figaro" le 12 août 2024 : « La victoire des athlètes français, qui est aussi la victoire du Ministère de l’Intérieur puisque 20% des médaillés sont des agents du ministère. Au-delà, ce succès est aussi l’aboutissement de quatre ans d’intenses préparations avec une loi sécurité globale qui modernise la sécurité privée, une loi de programmation budgétaire, une loi renseignement… Depuis quatre ans, j’ai mis en place le décloisonnement du ministère : via la réforme de la police nationale, entre police et gendarmerie, avec la sécurité privée, sans oublier les nouveaux outils numériques. C'est une grande leçon pour nous : quand le ministère fonctionne en cathédrale et non en silo, il fonctionne beaucoup plus mieux. ».

    Gérald Darmanin se paie donc un CV en or dans une vie politique déjà bien remplie avec deux trophées très concrets : aux Finances, comme Ministre de l'Action et des Comptes publics du 17 mai 2017 au 6 juillet 2020, le grand succès de la réforme structurelle de la retenue à la source de l'impôt sur le revenu ; à l'Intérieur depuis le 6 juillet 2020 (démissionnaire depuis le 16 juillet 2024), l'organisation des JO 2024 à Paris.

    Certaines personnalités politiques commencent leur vie politique à l'extrême gauche (trotskysme) et évoluent vers le centre gauche. Lui, Gérald Darmanin, vient de l'opposé, il a commencé plutôt à la droite dure pour se rapprocher du centre droit. À l'origine, Gérald Darmanin s'est engagé au sein du RPR à l'âge de 16 ans avant même de faire ses études à l'Institut d'études politiques (IEP) de Lille. Collaborateur de l'ancien ministre Jacques Toubon, alors député européen, il s'est rapproché en 2004 du député UMP flirtant avec la droite musclée Christian Vanneste, condamné alors en première instance par la justice pour avoir tenu des propos homophobes (et dont le jugement a été cassé en 2008).

    Son premier mandat électif, Gérald Darmanin l'a obtenu en mars 2008 (à l'âge de 25 ans) comme conseiller municipal d'opposition de Tourcoing sur la liste menée par Christian Vanneste. Très vite, Gérald Darmanin a pris le leadership de l'opposition municipale, tandis que parallèlement, il fut, au sein de l'UMP, le collaborateur de l'ancien ministre Xavier Bertrand, alors secrétaire général de l'UMP, chargé des affaires juridiques, puis, un peu plus tard, chef de cabinet puis directeur de cabinet du ministre David Douillet.

     

     
     


    Conseiller régional du Nord-Pas-de-Calais puis des Hauts-de-France de mars 2010 (il avait alors 27 ans) à juillet 2020, Gérald Darmanin a retrouvé Xavier Bertrand au conseil régional dont il fut le deuxième vice-président de janvier 2016 à mai 2017. Ces deux collaborations avec Xavier Bertrand (UMP et région) donnent aujourd'hui une tournure particulière sur les relations avec Xavier Bertrand : Gérald Darmanin, considéré comme situé à l'aile très à droite de l'UMP, puis sarkozyste proche de Xavier Bertrand, a succombé au macronisme version 2017 après avoir soutenu François Fillon dans sa lutte fratricide contre Jean-François Copé à la présidence de l'UMP en novembre 2012. Il est donc un liant crucial entre Emmanuel Macron et le parti LR même si Xavier Bertrand est aujourd'hui peu populaire au sein de LR (son échec à la primaire LR de décembre 2021 l'a prouvé).

    Entre-temps, Gérald Darmain est parvenu, en homme pressé, à se poser comme un élu local bien établi : élu député du Nord en juin 2012 (il n'avait que 29 ans), élu dans la dixième circonscription, l'ancienne de Christian Vanneste mais aussi de Maurice Schumann, il a gagné la mairie de Tourcoing en mars 2014 (à 31 ans), devenu un baron local au même titre que son mentor local Xavier Bertrand (Gérald Darmanin fut réélu en mars 2020 mais depuis 2017, il a quitté sa place de maire au profit de sa place au gouvernement). En raison du cumul, il ne s'est pas présenté aux élections législatives de 2017 (il était également le quatrième vice-président de la Métropole européenne de Lille de 2014 à 2018), mais s'est représenté et a été réélu en juin 2022, puis en juillet 2024 (61,4% grâce au front républicain, retrait de la candidate FI, son ancienne rivale du second tour en 2022, pour faire barrage au candidat du RN). Gérald Darmanin a aussi été élu conseiller départemental du Nord de juin 2021 à août 2022.

    Pour résumer donc ses deux premières parties de carrière politique, Gérald Darmanin a donc été d'abord un jeune conquérant de droite plutôt dure qui a su conquérir Tourcoing et sa circonscription à un âge très jeune, puis, avec l'élection d'Emmanuel Macron (son suppléant, qui lui avait succédé à l'Assemblée Nationale dès mars 2016, pour cause de cumul, a été réélu député LR en 2017 contre une candidate LREM), il a accepté, à l'instar d'autres stars de LR (en particulier Édouard Philippe et Bruno Le Maire) de franchir le cap macroniste avec l'onction de Nicolas Sarkozy.

     

     
     


    Dès 2020, Gérald Darmanin, fort de son succès de la réforme de l'impôt sur le revenu, était bien entendu, comme tout ministre ambitieux et pressé, candidat à Matignon. Si en 2022, son nom n'était pas évoqué faute d'être une femme, il revenait très sérieusement en lice en juillet 2023 pour remplacer celle qui allait devenir une très brève rivale au sein du camp macroniste, Élisabeth Borne. Peine perdue, il a aussi raté une nouvelle occasion en janvier 2024 avec la nomination de Gabriel Attal à Matignon. Darmanin-Attal, les journalistes seraient tentés d'en faire des rivaux internes préférés, dans la perspective de l'élection présidentielle de 2027, une rivalité qui a failli être confirmée le 13 juillet 2024 lors de la première réunion du groupe Renaissance (devenu Ensemble pour la République, EPR) à l'Assemblée pour la désignation de son président. Découragé par l'Élysée, Gérald Darmanin a cependant laissé le champ libre à Gabriel Attal pour présider le groupe EPR, deuxième groupe de l'Assemblée. Gabriel Attal serait le représentant de l'aile gauche du macronisme et Gérald Darmanin de l'aile droite.

    À l'issue de ses élections anticipées, Gérald Darmanin jouit d'une position personnelle très forte : il a été réélu et est donc présent à l'Assemblée, là où se passera l'essentiel de la vie politique à venir, au contraire d'Édouard Philippe, Bruno Le Maire et quelques autres personnalités tentées, elles aussi, de capter l'héritage politique d'Emmanuel Macron. En revanche, il doit faire face à l'hostilité d'une partie non négligeable du groupe macroniste en raison de la dissolution du 9 juin 2024, ce qui, à court terme, l'empêche de foncer pour prétendre diriger le parti présidentiel.

    Sa position est aujourd'hui très claire. Il faut auparavant préciser qu'il était l'un des rares, du camp présidentiel, à avoir approuvé voire recommandé la dissolution (ce qui était même très rare). Pour lui, le retour au peuple était une nécessité vitale pour la démocratie, et une juste pratique gaullienne des institutions. Malgré ses ambitions, il n'est pas candidat à Matignon, pour une raison très simple : il a bien compris que, parmi les signaux parfois contradictoires émis par le peuple français les 30 juin et 7 juillet 2024, il y a le désaveu du camp macroniste.

    Pas étonnant alors de considérer que le prochain Premier Ministre ne pourrait pas faire partie du camp présidentiel, à moins de faire fi de la volonté populaire. En revanche, il semble évident que le soutien du camp présidentiel au futur gouvernement est une condition absolument nécessaire à son existence parlementaire dans la configuration actuelle (trois tiers inconciliables à l'origine) en raison de sa position centrale.

     

     
     


    Interrogé dans "Le Figaro" de ce lundi 12 août 2024, après l'euphorie des Jeux olympiques, Gérald Darmanin a usé d'un certain euphémisme pour exprimer cette position sans trahir ses amis : « Il y a (…) un fait : nous n'avons pas gagné ces élections législatives. Il n'est pas anormal que quelqu'un qui n'est pas de notre famille politique dirige le gouvernement. ». Il faut ajouter que la nomination d'un Premier Ministre macroniste, quand bien même il résulterait d'une logique d'arithmétique parlementaire, serait très mal comprise des électeurs qui ont voté au début de l'été.

    Quel Premier Ministre ? Son ancien mentor, pardi ! La réponse dans "Le Figaro" était alors évidente : « J'ai dit que Xavier Bertrand avait de grandes qualités. ». Gérald Darmanin semble même impatient de quitter complètement le gouvernement, maintenant que les JO sont passés : « Il est normal d'installer un nouveau gouvernement après des élections. ». Il avait d'ailleurs retiré sa cravate dès la démission acceptée du gouvernement le 16 juillet 2024 pour bien montrer qu'il retrouvait sa liberté personnelle, tout en restant loyal et fidèle à Emmanuel Macron.

    Gérald Darmanin est, ces jours-ci, le sujet de plusieurs analyses politiques dans la presse, en particulier dans un article de Robin D'Angelo paru dans "Le Monde" le mardi 13 août 2024 qui a résumé l'objectif personnel du futur ancien ministre ainsi : « Capitaliser autant que possible sur l’événement [les JO] pour mieux préparer ses arrières dans un contexte politique hautement instable. ».

    Selon "Le Monde", Gérald Darmanin avait envisagé prendre la présidence du groupe Horizons à l'Assemblée en cas de défaite de son président sortant, Laurent Marcangeli, mais ce dernier a été réélu. En outre, les proches de Gabriel Attal insistent beaucoup : « Gabriel a à cœur que Gérald reste dans la famille, car c'est un atout. ».
     

     
     


    Les perspectives de Gérald Darmanin sont analysées ainsi : les conseillers de Gérald Darmanin affirmeraient qu'il ne serait plus opposé à rester au gouvernement si le Président le lui demandait et si les responsabilités proposées lui permettaient de prendre du recul (on penserait Affaires étrangères ou Défense). D'autres évoquent la grande attente des élus locaux de droite et du centre du département du Nord qui restent orphelins d'un grand leader politique pour les représenter, et qui le verraient bien conquérir la Métropole de Lille en 2026.

    Pour l'heure, Gérald Darmanin a prévu de réunir ses fidèles dans un mois, le dimanche 15 septembre 2024 à Tourcoing, pour discuter du pouvoir d'achat. Il souhaiterait avant tout parler aux classes populaires et est partisan de la revalorisation du SMIC. La première réunion des darmanistes avait eu lieu à la rentrée de 2023 sur fond de rivalité avec Élisabeth Borne, reconduite à Matignon, qui avait fait le déplacement et torpillé la journée. Quant à l'actuel locataire de Matignon, démissionnaire, Gabriel Attal a déjà fait savoir qu'il ne se rendrait pas à Tourcoing le 15 septembre 2024 (il aurait déjà un autre engagement !), tandis que des anciens ministres étiquetés plus à gauche, comme Clément Beaune, auraient reçu un carton d'invitation.

    Ce qui est sûr, c'est que le Président de la République veut ménager Gérald Darmanin qui reste un allié indispensable dans la situation politique inextricable actuelle, tant par sa loyauté que par sa connexion avec ses anciens amis de LR. Xavier Bertrand, quant à lui, compte certainement sur son ancien secrétaire général adjoint de l'UMP pour accéder enfin à la reconnaissance nationale : Matignon, en attendant l'Élysée ! Pas sûr que cela plaise beaucoup à un autre acteur LR revenu dans l'arène, Laurent Wauquiez, président du groupe LR.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (13 août 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Cible des hypocrisies ambiantes.
    Législatives 2024 (36) : Gérald Darmanin plaide pour un Premier Ministre non macroniste !
    François Hollande sera-t-il le Premier Ministre de son ancien Ministre de l'Économie ?
    Législatives 2024 (35) : Vers une cohabitation du troisième type ?
    Législatives 2024 (34) : Lucie Castets noyée dans une réalité alternative !
    Législatives 2024 (33) : Le grain de sel du Sénat !
    Législatives 2024 (32) : Le casse-tête de Lucie Castets.
    Législatives 2024 (31) : Emmanuel Macron et les joyeux JO.
    Interview du Président Emmanuel Macron le 23 juillet 2024 sur France 2 (vidéo intégrale).
    Claude Malhuret au Sénat : le spectacle continue !
    Législatives 2024 (30) : coalition ou pacte ?
    Législatives 2024 (29) : le staff de l'Assemblée Nationale.
    Législatives 2024 (28) : la stratégie du chaos institutionnel de Jean-Luc Mélenchon.
    Législatives 2024 (27) : l'émotion de Yaël Braun-Pivet.
    Législatives 2024 (26) : les larmes de Marine Tondelier.
    Législatives 2024 (25) : faut-il ostraciser le RN à l'Assemblée Nationale ?
    Législatives 2024 (24) : Huguette Bello, mélenchonette en peau de lapin.
    Législatives 2024 (23) : grand pays recherche son gouvernement.
    Législatives 2024 (22) : qui au perchoir ?
    Législatives 2024 (21) : marche sur Matignon ?
    Lettre aux Français par Emmanuel Macron le 10 juillet 2024 (texte intégral).
    Législatives 2024 (20) : le poison du scrutin proportionnel.
    Législatives 2024 (19) : quel possible Premier Ministre pour une impossible majorité ?
    Législatives 2024 (18) : la fin du cauchemar Bardella (pour le moment).
    Résultats du second tour des élections législatives du 7 juillet 2024.
    Fake news : la scandaleuse manipulation politique du RN.
    Législatives 2024 (17) : rien n'est joué dimanche prochain !
    Législatives 2024 (16) : la question de dimanche prochain.
    Législatives 2024 (15) : les promesses n'engagent que ceux qui y croient !
    Législatives 2024 (14) : la revanche des gilets jaunes ?
    Législatives 2024 (13) : fortes mobilisations au premier tour.
    Résultats du premier tour des élections législatives du 30 juin 2024.
    Appel aux sociaux-démocrates.
    Éric Le Boucher : la France va plutôt bien (27 juin 2024).
    Législatives 2024 (12) : un isoloir, ce n'est pas un cabine d'essayage !
    Législatives 2024 (11) : front, rassemblement, union nationale, barrage, consignes de vote...
    Législatives 2024 (10) : il était une fois Jordan Bardella, Gabriel Attal et Manuel Bompard.
    Législatives 2024 (9) : Emmanuel Macron et son n'ayez-pas-peur !
    Interview d'Emmanuel Macron à Génération Do It Yourself le 24 juin 2024 (podcast intégral).
    Lettre aux Français d'Emmanuel Macron le 23 juin 2024 (texte intégral).
    Législatives 2024 (8) : la bataille de Matignon.
    Le programme aux élections législatives du 30 juin 2024 d'Ensemble pour la République (document à télécharger).
    Législatives 2024 (7) : Ensemble pour la République.
    Législatives 2024 (6) : Nicolas Sarkozy et François Fillon bougent encore !
    Législatives 2024 (5) : le trouble de Lionel Jospin.
    Législatives 2024 (4) : l'angoisse de Manuel Valls.
    Législatives 2024 (3) : François Hollande dans l'irresponsabilité totale !
    Législatives 2024 (2) : clarification ou chaos ?
    Législatives 2024 (1) : vaudeville chez Les Républicains.
    Sidération institutionnelle.
    Élections européennes 2024 (4) : la surprise du chef !
    Résultats des élections européennes du dimanche 9 juin 2024.

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240812-darmanin.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/legislatives-2024-36-gerald-256311

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/08/13/article-sr-20240812-darmanin.html



     

  • François Hollande sera-t-il le Premier Ministre de son ancien Ministre de l'Économie ?

    « En politique, je le sais au fond de moi, il est irrationnel de ne pas tenir compte de l'irrationalité. » (François Hollande, 11 avril 2018).



     

     
     


    Cette petite phrase, elle pourrait s'appliquer à son auteur qui l'a publiée au milieu de ses mémoires d'ancien Président de la République le 11 avril 2018 (aux éd. Stock). Justement, François Hollande est à l'honneur ce lundi 12 août 2024 puisqu'il fête son 70e anniversaire. 70 ans, de nos jours, c'est "rien", mais néanmoins, en politique, c'est déjà un âge canonique, pourrait-on dire par un euphémisme mal compris.

    Concrètement, François Hollande a repris un dosette d'eau de Jouvence en juin dernier. Rappelez-vous ! En décembre 2016, lucide sur sa capacité à mobiliser les foules d'électeurs, le Président de la République en exercice avait renoncé à solliciter un nouveau mandat. Son Premier Ministre Manuel Valls l'avait alors abandonné pour se lancer, avec l'insuccès que l'on sait, dans l'aventure de la primaire socialiste. Finalement, son ancien Ministre de l'Économie Emmanuel Macron a gagné l'élection présidentielle en 2017 et pour l'ancien mentor qui l'avait nommé Secrétaire Général adjoint de l'Élysée en 2012, ce fut la traversée du désert (au lieu de la fierté).


    De sa génération, peu ont raccroché : Ségolène Royal cherche toujours à se faire voir et à croire qu'on viendra la chercher ; François Bayrou est toujours une personnalité influente qui reste opérationnelle (chef de parti et maire d'une grande ville) ; Nicolas Sarkozy peut penser, mais de moins en moins, qu'il pourrait devenir un recours. Il n'y a guère que François Fillon qui a lâché prise pour s'investir dans d'autres affaires que la politique.

    François Hollande, comme Nicolas Sarkozy, a bien sûr une position doublement singulière dans la vie politique : d'une part, il a été le chef d'un grand parti gouvernemental réduit à peau de chagrin ; d'autre part (le plus important), il est un ancien Président de la République, et quand on a moins de 80 ans, on se demande toujours ce qu'on peut faire d'utile pour le pays... ou pour soi. Sous la Cinquième République, De Gaulle, François Mitterrand et Jacques Chirac ont quitté l'Élysée et leur vie politique en même temps, terminant leur destinée par quelques mémoires. Seul, Valéry Giscard d'Estaing, battu en 1981 à l'âge de 54 ans, a refait toute une carrière politique, reprenant le plus bas échelon dès 1982 avec un mandat cantonal, puis parlementaire, régional, municipal, etc.


    En raison de l'échec de Nicolas Sarkozy à la primaire LR de novembre 2016, ce qui l'a conduit à renoncer à toute prétention ultérieure, le seul qui pourrait se faire comparer à VGE serait donc François Hollande : les deux se sont fait réélire député après leur mandat présidentiel. En 1986, parmi certaines hypothèses, certes peu plausibles, Valéry Giscard d'Estaing aurait même pu devenu le Premier Ministre de son meilleur adversaire politique, François Mitterrand, mais Jacques Chirac avait veillé sur sa propre influence.

    Aujourd'hui, François Hollande est plongé dans une grande irrationalité. Il s'est présenté sous l'étiquette de la nouvelle farce populaire (NFP) alors que ce mouvement baroque ne correspondait absolument pas à ses options politiques. Fallait-il sacrifier ses convictions pour un plat de lentilles ? C'est un peu le cas pour ceux qui se croyaient sociaux-démocrates, qui ont blâmé Emmanuel Macron pour le petit écart de déficit en 2023 et qui viennent de signer pour au moins 150 milliards d'euros de dépenses publiques supplémentaires, rien que cela ! J'avais parlé d'irresponsabilité, on peut aussi parler d'irrationalité.
     

     
     


    Tous ceux, de ses camarades socialistes, qui ont saboté son socle politique pendant son quinquennat, ceux qu'on a appelés les frondeurs, sont aujourd'hui à la manœuvre au sein du NFP. Les politologues et les historiens se poseront longtemps la question du pourquoi de la dissolution du 9 juin 2024, mais ils se poseront aussi la question sur la motivation qui a amené François Hollande à reprendre du service (à la fin de son mandat de député de cinq ans, il aurait donc près de 75 ans) sous les couleurs d'une gauche ultradicalisée qui n'est certainement pas la sienne mais celle de ceux qui l'ont toujours détesté et détesté ses options, à commencer par un ancien apparatchik socialiste, Jean-Luc Mélenchon.

    On peut toutefois imaginer les motivations de François Hollande qui a été réélu de manière assez laborieuse, avec seulement 43,1% des voix au second tour dans une triangulaire contre le candidat RN et le député LR sortant, ce qui est son plus mauvais score, même lorsqu'il a été battu en mars 1993, il l'a été avec quand même 46,1%.

    La première motivation, très "désintéressée", c'est de tempérer les folles ardeurs dépensières du NFP afin de maintenir la France dans une ligne budgétaire qui reste compatible à son appartenance à l'Europe et à la zone euro. Boulot d'Hercule, pour certains ; mission impossible pour tous les autres. En tout cas, ce n'est pas avec Lucie Castets, déjà à l'œuvre à la ville de Paris, qu'on peut se rassurer.

    La seconde motivation, c'est de reprendre de l'activité politique et on imagine sans mal que la fonction de simple député ne lui suffira pas. Le perchoir aurait pu être un beau lot de consolation et les rumeurs parlaient de lui parmi de nombreux autres candidats potentiels, mais il s'est bien gardé de tenter sa chance dans une élection qui a finalement montré que le NFP n'avait pas la majorité, même relative.

    Mais d'autres hypothèses peuvent se présenter à lui, en particulier dans la recherche d'un Premier Ministre introuvable. Cheval de Troie au NFP, il reprendrait alors le dessus sur les dirigeants du NFP inféodés au mélenchonisme : car la seule majorité possible est une majorité qui irait des socialistes aux LR et l'idée d'un chef du gouvernement macroniste est peu crédible pour rassembler d'autres composantes de cette majorité impossible, et des LR et des socialistes, les socialistes sont les plus nombreux. La logique voudrait donc que Matignon revienne plus à un socialiste de type social-démocrate qu'à une personnalité d'origine LR comme Xavier Bertrand, même si la désignation de ce dernier semble une option sérieusement étudiée à l'Élysée.

    De plus, François Hollande a une seule spécialité pour laquelle il est reconnu, c'est la capacité à faire des synthèses. Il l'a pratiquée en tant que premier secrétaire du PS de 1997 à 2008, notamment lors du référendum sur le TCE en 2005 où il a réussi le tour de force de garder uni un PS archi-divisé entre les pro-TCE et les anti-TCE. Le Premier Ministre de l'été 2024 devra à l'évidence être capable de construire des compromis sur des bases à l'origine très divergentes.
     

     
     


    Dans son bouquin déjà cité, François Hollande se reconnaît un défaut ou une qualité, selon la perspective que l'on donne à ce trait de caractère marquant : « Au prétexte que j'avais longtemps comme dirigeant politique cherché la synthèse pour rassembler, on m'imputa l'habitude de préférer l'équilibre à l'audace, le dialogue à l'autorité, la prudence à la surprise ; alors que l'air du temps, nous disait-on, exigeait intrépidité, rapidité et fermeté. ».

    Il expliquait également la raison pour laquelle il n'avait pas réformé le mode de scrutin pour les élections législatives : « La stabilité que nous confèrent nos institutions tient au fait majoritaire. Le scrutin proportionnel, en éclatant la représentation, priverait le chef de l'État d'un appui solide pour mener ses réformes. Il élargirait la place réservée aux extrêmes et donc obligerait à une coalition des partis de gouvernement comme on le voit en Allemagne, ce qui engendrerait à mes yeux confusion partisane et radicalisation politique. ».

    Cette analyse est pertinente et reste pertinente malgré la situation issue des élections anticipées du 30 juin et 7 juillet 2024. En effet, le scrutin proportionnel ferait de la situation actuelle la seule représentation possible, et on voit bien à quel point la classe politique est incapable, aujourd'hui, de l'assumer. En d'autres termes, le scrutin majoritaire à deux tours ne donne pas obligatoirement une majorité absolue (exemples de 1958, 1988, 2022 et 2024), alors que le scrutin proportionnel donnerait obligatoirement une situation chaotique.

    Premier Ministre "normal" ? Premier Ministre d'Emmanuel Macron ? Après tout, c'est lui qui l'avait promu à l'Élysée puis à Bercy. Il racontait sa relation avec Emmanuel Macron ainsi : « Je pressens chez lui un talent rare pour réunir des gens de sensibilités différentes. (…) Emmanuel Macron se révèle un conseiller hyperactif, dormant peu et recevant beaucoup, s'intéressant à tout, sans œillères, formulant des vues originales, détonnant par sa liberté d'esprit au sein de l'administration. (…) Il croit volontiers (…) que tout risque de conflit peut être surmonté par un dialogue direct entre personnes de bonne foi, que toute difficulté peut être dépassée par une forme d'impétuosité. Il est sûr que le réel se pliera de bonne grâce à sa volonté dès lors qu'elle s'exprime. ».

    Le réel se pliera-t-il à la volonté du peuple du 7 juillet 2024 ? Le chantre de la synthèse et le dieu du en-même-temps auront au moins un langage commun. Reste pour eux à convaincre leurs troupes que gouverner dès maintenant, sans attendre 2027, est un impératif de responsabilité ...et de raison !


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (10 août 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    François Hollande sera-t-il le Premier Ministre de son ancien Ministre de l'Économie ?
    François Hollande dans l'irresponsabilité totale !
    François Hollande : si j’étais Président…
    Julie Gayet.
    Ségolène Royal.
    Élysée 2022 : François Hollande candidat ?
    François Hollande veut américaniser les institutions françaises.

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240812-hollande.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/francois-hollande-sera-t-il-le-256016

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/08/11/article-sr-20240812-hollande.html



     

  • Pierre Waldeck-Rousseau, à la tête d'un impossible gouvernement de Défense républicaine

    « C'est un coup de théâtre. En vérité, c'est un étrange assemblage ; rien n'était plus inattendu que la rencontre de ces trois hommes dans une même action politique. Waldeck-Rousseau, l'ami, l'élève favori de Gambetta, l'un des représentants les plus autorisés de la politique dite opportuniste. Galliffet, qui fut aussi de l'intimité de Gambetta, un soldat, de l'école des sabreurs à panache, qui a malheureusement laissé dans nos guerres civiles une trace d'implacabilité légendaire. Millerand, enfin, un socialiste révolutionnaire qui revendique hautement les droits de la démocratie laborieuse, en vue de l'organisation de [sic] justice sociale si lente à venir. » (Clemenceau, cité par Michel Winock, 2007).



     

     
     


    Il y a cent vingt ans, le 10 août 1904, est morte une personnalité politique importante de notre République, Pierre Waldeck-Rousseau. Il a succombé des suites d'un cancer du pancréas à l'âge de 57 ans, chez lui, à Corbeil-Essonnes (il est né le 2 décembre 1846 à Nantes). Il n'a pas eu la postérité d'un Clemenceau ni même d'un Raymond Poincaré, mais il a fait partie des hussards de la Troisième République qui ont fondé ce qu'on appelle aujourd'hui les valeurs républicaines, ce creuset républicain qui réunit les Français autour de valeurs communes et universelles. À son actif, s'il fallait ne résumer son parcours politique que d'un acte, il est l'auteur de la fameuse loi sur la liberté d'association du 1er juillet 1901.

    Né d'un père député à la Constituante de 1848 et maire de Nantes en 1870, Pierre Waldeck-Rousseau a fait des études de droit à Poitiers puis Paris pour devenir avocat à Saint-Nazaire, près de Nantes, avocat comme son père. Il était, politiquement, parmi ceux qu'on a appelés les "opportunistes", c'est-à-dire un républicain modéré qui souhaitait à la fois l'ordre et la République, à l'instar de Léon Gambetta dont il fut ministre. Également rédacteur d'articles politiques, il s'est installé à Rennes où il a été élu député pour la première fois à l'âge de 32 ans, en 1879 et réélu deux fois jusqu'en 1899, siégeant au groupe de l'Union républicaine.

    Très vite, Pierre Waldeck-Rousseau fut appelé à des responsabilités ministérielles alors qu'il était jeune trentenaire : Ministre de l'Intérieur du gouvernement de Léon Gambetta du 14 novembre 1881 au 30 janvier 1882, puis du gouvernement de Jules Ferry du 21 février 1883 au 6 avril 1885 (en cumulant Intérieur et Cultes dont l'attribution était généralement associée, et elle le reste encore aujourd'hui). Dès 1882, il proposa un projet de loi sur la liberté d'association, qui était son dada en politique. Ce projet n'allait aboutir qu'une dizaine d'années plus tard.

    À l'Intérieur, Pierre Waldeck-Rousseau a déjà fait adopter la loi relative à la création des syndicats professionnels qui a abrogé la loi Le Chapelier du 14 juin 1791 qui interdisait tout groupement professionnel. Au contraire, avec cette nouvelle loi, il a inauguré la liberté syndicale qui fait encore aujourd'hui partie du "package" des valeurs républicaines et qui a été intégrée dans le code du travail. La loi Émile Ollivier du 25 mai 1864 avait déjà supprimé le délit de coalition (mais pas le délit d'entrave à la liberté du travail) sous le Second Empire. Il a été aussi à l'origine de la loi très contestable instaurant la relégation des récidivistes, votée le 27 mai 1885, qui a envoyé à perpétuité au bagne de Cayenne, en Guyane, les condamnés récidivistes des colonies (cette loi pour s'attaquer à la récidive fut dès le début fortement critiquée, notamment par Clemenceau, et peu appliquée par les juges en raison de sa sévérité).


    L'opposition de Clemenceau à la politique coloniale de Jules Ferry a d'ailleurs fait chuter le gouvernement le 30 mars 1885, ce qui a rendu sa liberté à Pierre Waldeck-Rousseau qui en profita pour se marier (avec une veuve belle-sœur de l'explorateur Jean-Baptiste Charcot), exercer sa profession d'avocat (au barreau de Paris, son cabinet spécialisé dans les affaires financières était devenu l'un des plus réputés) et occuper le reste de son temps à peindre des aquarelles (il était un artiste très fécond).

    Profitant d'une élection partielle, Pierre Waldeck-Rousseau s'est fait élire sénateur de la Loire en 1894 et, réélu en 1897, le resta jusqu'à sa mort en 1904. Quelques mois après cette élection au Sénat, Jean Casimir-Perier donna sa démission de Président de la République (comprenant qu'il n'avait aucun pouvoir à l'Élysée). Les parlementaires furent donc convoqués pour une nouvelle élection présidentielle le 17 janvier 1895. Pierre Waldeck-Rousseau fut alors candidat pour les républicains progressistes (centre droit, ex-"opportunistes"), opposé à Henri Brisson, le candidat des radicaux (gauche), ancien et futur Président du Conseil et Président de la Chambre en exercice. Au premier tour, Henri Brisson s'est retrouvé en première place avec 338 voix sur 793 et Pierre Waldeck-Rousseau relégué à la troisième place avec 184 voix. En deuxième place, le Ministre de la Marine Félix Faure, également républicain progressiste, avec 244 voix. Pour le second tour, Pierre Waldeck-Rousseau s'est désisté en faveur de Félix Faure qui a été élu avec 430 voix sur 801 contre Henri Brisson 361 voix.

    Les élections législatives des 8 et 22 mai 1898 ont apporté une Chambre assez difficile pour trouver une majorité stable. Le Président du Conseil d'alors, Jules Méline, a perdu le soutien des socialistes et des radicaux en raison de son conservatisme social et gagné celui des "ralliés" (anciens monarchistes catholiques ralliés à la République selon l'autorisation de Léon XIII) et de la droite en général à cause du climat d'insécurité des attentats anarchistes. L'Affaire Dreyfus n'a pas eu beaucoup d'influence sur ces élections malgré le manifeste d'Émile Zola et Clemenceau du 13 janvier 1898 parce que c'était encore trop tôt (à l'époque, il n'y avait pas de chaîne de télévision d'information continue ni des réseaux sociaux qui faisaient surréagir dans l'heure), mais l'affaire allait enflammer la classe politique l'année suivante.

    Les résultats de mai 1898 marquèrent une montée de l'extrême gauche (radicaux dans le Sud-Ouest et aussi les socialistes, à l'exception de Jean Jaurès et Jules Guesde battus), et les républicains progressistes (les modérés) ont reculé mais restaient encore le groupe le plus important. Quant aux monarchistes, ils ont légèrement progressé. Cela a donné une configuration un peu bizarre : 237 sièges (sur 581) pour les progressistes, 182 pour les radicaux, 50 pour les socialistes, 92 pour les monarchistes (menés par le légitimiste Albert de Mun, promoteur du catholicisme social), dont 39 "ralliés" à la République, et 20 pour les nationalistes. Les progressistes, qui avaient une majorité absolue, l'ont perdu (237 au lieu de 291), l'extrême gauche n'avait pas non plus la majorité (232), ni la droite (112). Il fallait donc des compromis. Cette situation parlementaire n'est pas sans faire penser à celle de juillet 2024 !

    Résultat : après trois gouvernements dirigés successivement par le radical Henri Brisson puis le progressiste Charles Dupuy, la crise politique était là, en raison du contexte explosif de la situation nationale. En effet, l'Affaire Dreyfus éclatait réellement. Henri Brisson demanda la révision du procès de décembre 1894. Le Président de la République Félix Faure, favorable aux antidreyfusards, est mort subitement le 16 février 1899 (après avoir perdu sa connaissance). L'élection présidentielle du 18 février 1899 a fait gagner Émile Loubet, républicain modéré soutenu par les radicaux (dont Clemenceau) face à Jules Méline qui n'a pas pu convaincre les républicains dreyfusards hostiles à sa politique trop favorable aux antidreyfusards. Bien que s'étant désisté, Jules Méline a reçu 279 voix (sur 824) de la part de la droite antidreyfusarde tandis qu'Émile Loubet a fait le plein à gauche et chez les républicains, élu dès le premier tour avec 483 voix.

    La polarisation politique était très forte, entre les socialistes et radicaux très dreyfusards et les nationalistes et monarchistes très antidreyfusards et les violences verbales à la Chambre n'avaient rien à envier à celles de 2022-2024. Le 3 juin 1899, la Cour de Cassation a cassé le verdict du conseil de guerre condamnant le capitaine Dreyfus et ordonna la révision du procès. Quatre jours auparavant, le 31 mai 1899, le nationaliste Paul Déroulède, jugé pour tentative de putsch pendant les funérailles de Félix Faure, a été acquitté. Avec tous ces événements assez contradictoires, Charles Dupuy donna sa démission le 12 juin 1899. Anatole France a décrit en 1904 ce ministère : « Il n’y a pas de mots pour peindre le ministère Dupuy qui lui succéda. Ce fut le chaos, l’écroulement et l’abîme. La République allait où l’emportait l’Affaire, que soulevaient en hurlant les nationalistes, entraînés par les bandes romaines. Alors régnèrent dans les villes les matraques et les bayados, et une canne aristocratique défonça le chapeau du Président Loubet. ». Il fallait donc un gouvernement d'unité nationale pour tenter de réunir les bonnes volontés de la Chambre.

    Émile Loubet a d'abord demandé à Raymond Poincaré de former le nouveau gouvernement (cela aurait été son premier gouvernement), mais il n'a pas obtenu le soutien d'une majorité. Il a conseillé au Président de la République de charger Pierre Waldeck-Rousseau, républicain austère, raisonnable, respecté et peu passionné, de réunir une large majorité. Nommé le 22 juin 1899, Pierre Waldeck-Rousseau a formé un "gouvernement de Défense républicaine" (considéré par les nationalistes comme un gouvernement Dreyfus) regroupant des radicaux, des progressistes, des personnalités de droite comme le général Galliffet, considéré comme le boucher de la Commune par l'extrême gauche, mais aussi un socialiste, le premier de l'histoire républicaine, Alexandre Millerand, chargé du Commerce, de l'Industrie, des Postes et Télégraphes. Parmi les autres ministres importants : le radical Théordre Delcassé, reconduit aux Affaires étrangères, le radical Ernest Monis à la Justice, Gaston de Galliffet à la Défense (remplacé le 29 mai 1900), le radical Joseph Caillaux aux Finances et le modéré Georges Leygues à l'Instruction publique et aux Beaux-Arts.

     

     
     


    Ce gouvernement, soutenu à la fois par Clemenceau et Jaurès, a été finalement investi le 26 juin 1899 d'une courte majorité après des discussions passionnées par la présence, parmi les ministres, de Galliffet et de Millerand, et malgré cette majorité introuvable, il fut le gouvernement le plus long de toute la Troisième République, pendant près de trois ans, jusqu'à sa démission le 3 juin 1902 avec l'installation d'une nouvelle Chambre (élue les 27 avril et 11 mai 1902). Comme l'a expliqué Clemenceau (cité par Michel Winock dans sa biographie et mis en tête d'article), le gouvernement n'était pas homogène et était à la fois de droite, du centre et de gauche (Emmanuel Macron hantait déjà la classe politique !).

    Et cet attelage a tenu grâce à la perspicacité de Pierre Waldeck-Rousseau qui était un conservateur progressiste, dans le sens propre de ces deux termes, au-delà des étiquettes de l'époque. Républicain, ainsi se définissait-il, et il a été à bonne école, celle de Gambetta et Jules Ferry, et c'est sans doute la raison pour laquelle la période 1899-1902 fut aussi fondatrice que les années 1880 (liberté d'expression, école libre et gratuite, etc.) pour la République française (avant aussi la loi du 9 décembre 1905 de la séparation des Églises et de l'État).

    Ce gouvernement a fait en effet adopter des lois qui font encore aujourd'hui partie de notre socle républicain et la première d'entre elle, première en importance mais presque dernière en ordre chronologie, c'était bien sûr la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association qui définissait une association sans but lucratif (au contraire d'une entreprise commerciale). Cette loi est importante puisque plus de cent vingt ans plus tard, il y a environ 1,5 million d'associations loi 1901 en France (dont un quart d'associations sportives), faisant travailler environ 2 millions de salariés (soit un salarié du privé sur dix) et correspondant à environ 21 millions d'adhérents pour un budget d'environ 110 milliards d'euros (dont 40 milliards d'euros de masse salariale). La Chambre a cependant rendu contraignant la création d'une association en la soumettant à une décision préfectorale, et les congrégations religieuses devaient se transformer en associations (le successeur de Pierre Waldeck-Rousseau, Émile Combes, fut intraitable dans son anticléricalisme alors que ce n'était pas l'esprit de la loi de 1901).

    L'un des premiers actes politique du gouvernement Waldeck-Rousseau a été de réviser le procès Dreyfus qui s'est rouvert le 7 août 1899 à Rennes et de profondément remplacer préfets, juges et officiers (en limogeant les antidreyfusards). Le gouvernement a réprimé aussi les agitateurs nationalistes (Pierre Waldeck-Rousseau était également Ministre de l'Intérieur et des Cultes et voulait montrer la fermeté de la défense républicaine). La cour de Rennes a cependant condamné à nouveau Dreyfus le 9 septembre 1899 pour trahison mais (le "en même temps") avec circonstances atténuantes (!) à dix ans de prison et à la dégradation. La cour voulait ménager la chèvre nationaliste et le chou dreyfusard puisque les circonstances atténuantes laissaient entrevoir l'innocence de Dreyfus sans pour autant la reconnaître.

     

     
     


    Pierre Waldeck-Rousseau proposa alors la grâce présidentielle même si les dreyfusards revendiquaient la reconnaissance de l'innocence par la justice et la réhabilitation de Dreyfus. Émile Loubet a signé le décret de grâce le 19 septembre 1899, ce qui a libéré Dreyfus deux jours plus tard. Il fut complété par une loi d'amnistie promulguée le 14 décembre 1900 (mais amnistiant non seulement Dreyfus mais aussi Émile Zola, le colonel Picquart, et aussi les complotistes, au grand dam des dreyfusards). Dans les faits, à partir de 1900, les agitations nationalistes se sont arrêtées grâce à la politique du gouvernement.

    Parmi les autres mesures importantes de ce gouvernement, Alexandre Millerand a fait adopter la loi du 30 mars 1900 sur le travail des femmes et des enfants (le réglementant), et la loi du 30 septembre 1900 sur la durée du travail journalier baissée à 11 heures et hebdomadaire à 60 heures (pour les hommes). Joseph Caillaux, quant à lui, a présenté un budget excédentaire, refondant des taxes et impôts (notamment sur les successions) mais renonçant à créer l'impôt progressif sur le revenu pour lequel il militaire, considérant qu'il n'y avait pas encore de majorité pour cela (ce n'était que partie remise !). À l'Agriculture, le ministre Jean Dupuy a développé l'implantation locale du Crédit Agricole. À la Justice, Ernest Monis a autorisé par la loi du 1er décembre 1900 l'accès des femmes à la profession d'avocat.

    Pierre Waldeck-Rousseau a dirigé la campagne électorale du bloc des gauches, correspondant à son gouvernement (républicains modérés à socialistes) et a gagné les élections législatives des 27 avril et 11 mai 1902. Toutefois, il n'a pas voulu continuer à rester au gouvernement et a proposé le radical Émile Combes pour lui succéder. Le retrait de Waldeck-Rousseau, explicable par sa maladie, pourrait aussi être motivée par d'autres raisons comme la peur d'être désavoué par la nouvelle Chambre. Redevenu sénateur, il regretta d'avoir proposé Émile Combes pour sa succession et s'opposa à sa politique fortement anticléricale en dénaturant, par son application sévère, sa loi de 1901 en principe basée sur la tolérance et la liberté.

    Après sa mort, plusieurs lieux ou équipements ont été baptisés de son nom mais peut-être que le plus bel hommage est venu du père du futur secrétaire général du PCF (entre Maurice Thorez et Georges Marchais) qui l'a appelé Waldeck Rochet par passion pour la République et admiration pour Jaurès. Le père de Pierre Waldeck-Rousseau s'appelait en fait René-Valdec Rousseau et avait fait modifier son patronyme pour se distinguer des Rousseau très nombreux en France.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (03 août 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Pierre Waldeck-Rousseau.
    Alexandre Millerand.
    La victoire des impressionnistes.
    Les 120 ans de l'Entente cordiale.
    Mélinée et Missak Manouchian.
    Le Débarquement en Normandie.
    La crise du 6 février 1934.
    Gustave Eiffel.

    Maurice Barrès.
    Joseph Paul-Boncour.
    G. Bruno et son Tour de France par Deux Enfants.
    Pierre Mendès France.
    Léon Blum.
    Jean Jaurès.
    Jean Zay.
    Le général Georges Boulanger.
    Georges Clemenceau.
    Paul Déroulède.
    Seconde Guerre mondiale.
    Première Guerre mondiale.
    Le Pacte Briand-Kellogg.
    Le Traité de Versailles.
    Charles Maurras.
    L’école publique gratuite de Jules Ferry.
    La loi du 9 décembre 1905.
    Émile Combes.
    Henri Queuille.
    Rosa Luxemburg.
    La Commune de Paris.
    Le Front populaire.
    Le congrès de Tours.
    Georges Mandel.
    Les Accords de Munich.
    Édouard Daladier.
    Clemenceau a perdu.
    Au Panthéon de la République, Emmanuel Macron défend le droit au blasphème.
    150 ans de traditions républicaines françaises.


     

     
     






    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240810-waldeck-rousseau.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/pierre-waldeck-rousseau-a-la-tete-256194

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/08/03/article-sr-20240810-waldeck-rousseau.html


     

  • Mick Jagger jaloux d'Alain Delon ?

    « When you're Mick Jagger, but the other one is Alain Delon ! »


     

     
     


    À l'annonce de la mort du grand acteur français et international Alain Delon (ce dimanche 18 août 2024), les réseaux sociaux ont rejoint les médias en général pour des hommages de toute sorte. Mais aussi pour un peu d'humour. Parmi les témoignages parfois insignifiants revient un élément majeur d'Alain Delon : certes, le jeune homme était beau, quoique, de la beauté masculine, je n'ai pas grand-chose à dire, mais sa beauté n'était pas tout. Après tout, il n'était pas le seul jeune homme beau de tout le village, et pourtant, il n'y a pas eu beaucoup d'Alain Delon en fin de compte. Cet élément reconnu par tous, qui a fait la différence, c'était le charisme. Le charisme d'Alain Delon !

    Le charisme, c'est que qui permet à des responsables politiques pourtant, pour certains, peu recommandables d'être réélus ou d'être encore appréciés malgré, parfois, quelques casseroles. Par exemple, Alain Carignon, qu'il faut avoir approcher pour bien comprendre l'homme. Lorsqu'il était maire, il était du genre à traverser assez rapidement le très large boulevard Jean-Pain, celui devant la mairie, qui s'engage directement vers l'autoroute Grenoble-Chambéry très passant, le regard bloqué sur le Grenoblois qu'il allait croiser, et à le saluer en lui demandant des nouvelles du petit dernier. Bernard Tapie, Jacques Chirac, Jean-Marie Le Pen, Nicolas Sarkozy, Ségolène Royal, Jean-Luc Mélenchon, Emmanuel Macron, etc. (j'en oublie plein), quoi qu'on en pense, sont ou ont été des personnalités charismatiques qui leur ont permis de convaincre parce qu'elles fascinaient. Le charisme. Mélange de présence et de magnétisme. De sincérité plus ou moins feinte et d'authenticité plus ou moins réelle.

    Évidemment, un bon acteur ne peut être que charismatique et on peut en citer beaucoup, Yves Montand, Jean Gabin, Lino Ventura, Fabrice Luchini, Gérard Depardieu, etc. (pareil, j'en oublie de nombreux). Alain Delon était sans doute l'un des plus charismatiques et c'est cela qui l'a distingué des autres, plus que sa dite beauté dont je ne connais pas la définition.

     
     

    Les réseaux sociaux ont alors rappelé une photographie célèbre (plusieurs en fait) et un trait d'humour déjà ancien : "Quand tu es déjà une star et que tu sors avec ta (très belle) copine, méfie-toi d'Alain Delon !". C'est un peu cela l'idée.

    Sur Wikipédia, Mick Jagger (81 ans), le célèbre chanteur des Rollings Stones, est considéré très charismatique : « Véritable star depuis le milieu des années 1960, il est, par son jeu de scène démonstratif, son attitude et son charisme, considéré comme l'archétype du chanteur de rock, souvent cité comme référence par de nombreux artistes. ». Entre 1966 et 1970, selon des potins très médiatisés, il vivait avec la très belle chanteuse (et actrice) britannique Marianne Faithfull (77 ans). Il l'a même aidée à démarrer sa carrière de chanteuse, a composé quelques-unes de ses chansons, etc.

     
     


    La photographie en question daterait du 15 novembre 1967 (je peux me tromper). Mick Jagger n'avait que 24 ans (et déjà très connu), Marianne Faithfull pas encore 21 ans (et un petit peu connue). L'actrice a rencontré Alain Delon par l'entremise du réalisateur britannique Jack Cardiff (alors 53 ans) pour un projet de film franco-britannique. Elle fut tout de suite attirée par le charisme d'Alain Delon (qui venait d'atteindre ses 32 ans). À cet instant magique, il n'y avait pas photo... ah si, il y avait photos, justement !
     

     
     


    Marianne Faithfull a raconté plus tard que cette rencontre a rendu très jaloux Mick Jagger alors que ce n'était pas son tempérament d'être jaloux. L'histoire retient toutefois que la chanteuse n'a pas vraiment accroché avec Alain Delon : il était fascinant, mais pas forcément de quoi en être amoureuse.

    Cela ne l'a pas empêchée de l'embrasser. Pour des raisons strictement professionnelles bien sûr. Le projet du film de Jack Cardiff a abouti à "The Girl on the Motorcycle", en français, plus pudiquement, "La Motocyclette". Le résumé de Wikipédia explique doctement : « Rebecca s’ennuie auprès de Raymond, l’homme qu’elle vient tout juste d’épouser. Une nuit, elle s’échappe du lit conjugal et part, nue sous une combinaison de cuir, sur sa Harley-Davidson FL, pour rejoindre son amant en Allemagne. ». Le personnage de Rebecca était interprété bien sûr par Marianne Faithfull, celui de l'amant Daniel par Alain Delon. Non, Mick Jagger ne jouait pas le mari trompé (l'acteur était Roger Mutton). Avec la participation de Jacques Marin.

     

     
     


    Ce film est un film érotique (aux États-Unis, le titre est plus explicite : "Naked Under Leather", nue sous le cuir !), et a été tourné en Alsace, à Heidelberg et à Genève. Il a fait partie de la sélection officielle du Festival de Cannes de mai 1968 mais n'a reçu aucune récompense car le festival a été interrompu par la révolte étudiante. Le film est sorti le 23 juin 1968 en France et le 20 octobre 1968 au Royaume-Uni. (Ce qui est amusant avec une encyclopédie comme Wikipédia, c'est qu'il y a des trucs intéressants et des trucs surréalistes, comme le fait qu'un homme né en décembre 1968 puisse avoir été l'assistant réalisateur d'un film sorti en juin 1968 !).

    Pour changer un peu des hommages habituels à Alain Delon, je propose d'écouter une très belle chanson de ...sa partenaire de cinéma Marianne Faithfull, qui a repris l'interprétation de "The Ballad of Lucy Jordan" (Lucie Castets ou Jordan Bardella ? humour de chaussettes dépareillées...) utilisée également au cinéma, notamment dans l'excellent film "Cours privé" de Pierre Granier-Deferre (sorti le 12 novembre 1986), avec Élizabeth Bourgine, Michel Aumont et Xavier Deluc.



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (18 août 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Le charisme d'Alain Delon : The Girl on a Motorcycle.
    Le grand Alain Delon
    Affaire Alain Delon : ce que cela nous dit de la fin de vie.
    Comment va Alain Delon ?







    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240820-mick-jagger.html

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/08/20/article-sr-20240820-mick-jagger.html




     

  • Marianne Faithfull fascinée par Alain Delon en 1967

    « When you're Mick Jagger, but the other one is Alain Delon ! »


     

     
     


    À l'annonce de la mort du grand acteur français et international Alain Delon (ce dimanche 18 août 2024), les réseaux sociaux ont rejoint les médias en général pour des hommages de toute sorte. Mais aussi pour un peu d'humour. Parmi les témoignages parfois insignifiants revient un élément majeur d'Alain Delon : certes, le jeune homme était beau, quoique, de la beauté masculine, je n'ai pas grand-chose à dire, mais sa beauté n'était pas tout. Après tout, il n'était pas le seul jeune homme beau de tout le village, et pourtant, il n'y a pas eu beaucoup d'Alain Delon en fin de compte. Cet élément reconnu par tous, qui a fait la différence, c'était le charisme. Le charisme d'Alain Delon !

    Le charisme, c'est que qui permet à des responsables politiques pourtant, pour certains, peu recommandables d'être réélus ou d'être encore appréciés malgré, parfois, quelques casseroles. Par exemple, Alain Carignon, qu'il faut avoir approcher pour bien comprendre l'homme. Lorsqu'il était maire, il était du genre à traverser assez rapidement le très large boulevard Jean-Pain, celui devant la mairie, qui s'engage directement vers l'autoroute Grenoble-Chambéry très passant, le regard bloqué sur le Grenoblois qu'il allait croiser, et à le saluer en lui demandant des nouvelles du petit dernier. Bernard Tapie, Jacques Chirac, Jean-Marie Le Pen, Nicolas Sarkozy, Ségolène Royal, Jean-Luc Mélenchon, Emmanuel Macron, etc. (j'en oublie plein), quoi qu'on en pense, sont ou ont été des personnalités charismatiques qui leur ont permis de convaincre parce qu'elles fascinaient. Le charisme. Mélange de présence et de magnétisme. De sincérité plus ou moins feinte et d'authenticité plus ou moins réelle.

    Évidemment, un bon acteur ne peut être que charismatique et on peut en citer beaucoup, Yves Montand, Jean Gabin, Lino Ventura, Fabrice Luchini, Gérard Depardieu, etc. (pareil, j'en oublie de nombreux). Alain Delon était sans doute l'un des plus charismatiques et c'est cela qui l'a distingué des autres, plus que sa dite beauté dont je ne connais pas la définition.

     
     


    Les réseaux sociaux ont alors rappelé une photographie célèbre (plusieurs en fait) et un trait d'humour déjà ancien : "Quand tu es déjà une star et que tu sors avec ta (très belle) copine, méfie-toi d'Alain Delon !". C'est un peu cela l'idée.

    Sur Wikipédia, Mick Jagger (81 ans), le célèbre chanteur des Rollings Stones, est considéré très charismatique : « Véritable star depuis le milieu des années 1960, il est, par son jeu de scène démonstratif, son attitude et son charisme, considéré comme l'archétype du chanteur de rock, souvent cité comme référence par de nombreux artistes. ». Entre 1966 et 1970, selon des potins très médiatisés, il vivait avec la très belle chanteuse (et actrice) britannique Marianne Faithfull (77 ans). Il l'a même aidée à démarrer sa carrière de chanteuse, a composé quelques-unes de ses chansons, etc.
     

     
     

    La photographie en question daterait du 15 novembre 1967 (je peux me tromper). Mick Jagger n'avait que 24 ans (et déjà très connu), Marianne Faithfull pas encore 21 ans (et un petit peu connue). L'actrice a rencontré Alain Delon par l'entremise du réalisateur britannique Jack Cardiff (alors 53 ans) pour un projet de film franco-britannique. Elle fut tout de suite attirée par le charisme d'Alain Delon (qui venait d'atteindre ses 32 ans). À cet instant magique, il n'y avait pas photo... ah si, il y avait photos, justement !

     
     


    Marianne Faithfull a raconté plus tard que cette rencontre a rendu très jaloux Mick Jagger alors que ce n'était pas son tempérament d'être jaloux. L'histoire retient toutefois que la chanteuse n'a pas vraiment accroché avec Alain Delon : il était fascinant, mais pas forcément de quoi en être amoureuse.

    Cela ne l'a pas empêchée de l'embrasser. Pour des raisons strictement professionnelles bien sûr. Le projet du film de Jack Cardiff a abouti à "The Girl on the Motorcycle", en français, plus pudiquement, "La Motocyclette". Le résumé de Wikipédia explique doctement : « Rebecca s’ennuie auprès de Raymond, l’homme qu’elle vient tout juste d’épouser. Une nuit, elle s’échappe du lit conjugal et part, nue sous une combinaison de cuir, sur sa Harley-Davidson FL, pour rejoindre son amant en Allemagne. ». Le personnage de Rebecca était interprété bien sûr par Marianne Faithfull, celui de l'amant Daniel par Alain Delon. Non, Mick Jagger ne jouait pas le mari trompé (l'acteur était Roger Mutton). Avec la participation de Jacques Marin.

     

     
     


    Ce film est un film érotique (aux États-Unis, le titre est plus explicite : "Naked Under Leather", nue sous le cuir !), et a été tourné en Alsace, à Heidelberg et à Genève. Il a fait partie de la sélection officielle du Festival de Cannes de mai 1968 mais n'a reçu aucune récompense car le festival a été interrompu par la révolte étudiante. Le film est sorti le 23 juin 1968 en France et le 20 octobre 1968 au Royaume-Uni. (Ce qui est amusant avec une encyclopédie comme Wikipédia, c'est qu'il y a des trucs intéressants et des trucs surréalistes, comme le fait qu'un homme né en décembre 1968 puisse avoir été l'assistant réalisateur d'un film sorti en juin 1968 !).

    Pour changer un peu des hommages habituels à Alain Delon, je propose d'écouter une très belle chanson de ...sa partenaire de cinéma Marianne Faithfull, qui a repris l'interprétation de "The Ballad of Lucy Jordan" (Lucie Castets ou Jordan Bardella ? humour de chaussettes dépareillées...) utilisée également au cinéma, notamment dans l'excellent film "Cours privé" de Pierre Granier-Deferre (sorti le 12 novembre 1986), avec Élizabeth Bourgine, Michel Aumont et Xavier Deluc.



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (18 août 2024)
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    Pour aller plus loin :
    Le charisme d'Alain Delon : The Girl on a Motorcycle.
    Le grand Alain Delon
    Affaire Alain Delon : ce que cela nous dit de la fin de vie.
    Comment va Alain Delon ?






    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240820-marianne-faithfull.html

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/08/20/article-sr-20240820-marianne-faithfull.html







     

  • Claude Malhuret au Sénat : le spectacle continue !

    « Qui aurait pu imaginer une campagne électorale aussi rocambolesque ? Une majorité présidentielle suppliant le Président de se tenir à l’écart, un Nouveau front populaire terrifié à chaque prise de parole de son dirigeant le plus médiatique, des Républicains en guerre contre leur chef barricadé dans ses locaux après les avoir enfermés dehors… Le spectacle continue. » (Claude Malhuret, le 18 juillet 2024 au Sénat).




     

     
     


    Avec les élections législatives anticipées des 30 juin et 7 juillet 2024, une session parlementaire extraordinaire devait se tenir du 18 juillet 2024 au 1er août 2024 pour l'installation des députés, l'élection de leurs responsables internes, etc. Petite incongruité : pour cette raison, le Sénat aussi est en session, mais comme l'ordre du jour était vide, notamment en raison de l'absence du gouvernement, qui est démissionnaire et sans nouveau gouvernement, le Président du Sénat Gérard Larcher a décidé de ne pas tenir d'autre séance publique avant la fin de l'été que celle de ce jeudi 18 juillet 2024 sauf en cas de nécessité.

    Pour ne pas réunir les sénateurs pour rien, la conférence des présidents a décidé de tenir un débat contradictoire sur la situation politique du moment, c'est-à-dire, sur l'après-législatives et le vide politique et gouvernemental qui en résulte. Parmi les orateurs, il y en a un dont ont attend toujours avec impatience les formules chocs, toujours croustillantes, sur la vie nationale. Il s'agit de Claude Malhuret qui, bien évidemment, n'a pas hésité à balancer clairement les choses.

    Le bon docteur Malhuret a brossé une situation politique qui est complètement surréaliste à bien des égards. La gauche irresponsable : « Depuis dix jours, la gauche en principe unie somme le Président de la République de lui livrer séance tenante les clefs de Matignon, sans parvenir à s’accorder pour lui proposer un seul nom. ».

    Et la position de la CGT et de FI, qui fait penser à des épisodes très sombres de notre histoire : « Tout aussi ahurissants, mais plus inquiétants (…), sont les appels de l’extrême gauche à marcher sur Matignon et ceux d’une CGT "LFIsée" à se rassembler devant l’Assemblée Nationale pour "la mettre sous surveillance". Je pose la question avec gravité : que signifie dans une démocratie la mise sous surveillance de l’Assemblée Nationale par une foule attroupée devant ses murs ? La dernière fois que c’est arrivé, en France, c’était le 6 février 1934, et aux États-Unis, le 6 janvier 2021. On connaît le résultat. ».

    La situation institutionnelle n'a cependant pas de quoi rassurer Claude Malhuret qui a décrit une situation inédite sous la Cinquième République : « La Ve République nous a habitués à nommer ses gouvernements en un instant, si bien qu’une situation banale chez nos voisins apparaît chez nous comme angoissante. Ensuite (…), comme ailleurs, cette situation peut durer. Il faut du temps pour se parler et faire des compromis. ». L'angoisse du gouvernement fantôme, ou zombie. Retour à une vieille république.

    Et le président du groupe indépendants au Sénat a mis l'accent sur la difficulté politique des compromis à négocier : « Ces derniers seront qualifiés de compromissions par tous les extrémistes et autres virtuoses des réseaux antisociaux, qui ne manqueront pas de confirmer leur rôle de plaie démocratique auprès d’une population qu’ils ont déjà largement contribué à rendre antiparlementaire et défiante. ».

    Enfin, troisième difficulté : « La perspective de l’élection présidentielle n’incite personne, une fois n’est pas coutume, à rejoindre un gouvernement qui sera fragile à l’Assemblée Nationale et impopulaire du fait des contraintes de la dette et des décisions difficiles que celle-ci impose. ».


    L'état des lieux des forces politiques n'est pas plus réjouissant. À l'extrême droite : « Le Rassemblement national, en forte progression, ne peut gouverner faute d’alliés. De toute façon, il ne le souhaite pas : il attend son heure. ». À gauche : « La gauche est piégée par le Nouveau front populaire, qui lui a permis de sauver ses sièges, mais qui l’a livrée à sa frange la plus radicale, dont le but est non pas de gouverner, mais de rendre le pays ingouvernable. La stratégie du chaos à l’Assemblée Nationale comme dans la rue se poursuivra, pour permettre au sous-commandant Marcos de la Canebière, de plus en plus suffisant, mais de moins en moins nécessaire, de figurer au second tour de l’élection présidentielle de 2027. Son objectif immédiat est d’étouffer dans l’œuf toute hypothèse d’un Premier Ministre issu des rangs de ses alliés. Si je puis me permettre un conseil à ces derniers : dans l’intérêt de la France comme dans le vôtre, chers collègues, échappez-vous du syndrome de Stockholm qu’est devenu le NFP ! Vous méritez mieux que d’être traités de "punaises de lit" ! ».
     

     
     


    Pour Claude Malhuret, la seule réponse aux électeurs à l'issue de ces élections législatives, c'est le front républicain : « Pas de front national, pas de front populaire : la seule hypothèse possible est celle du front républicain. Elle suppose, comme chez nos voisins, mais à rebours des traditions françaises, l’alliance de tous les démocrates, depuis la droite républicaine jusqu’à la gauche de gouvernement. ».

    Une telle configuration, qui demanderait de mettre d'accord socialistes, macronistes et républicains, serait difficile à mettre en place, et pourtant, d'un point de vue arithmétique, c'est la seule viable pour l'année sans dissolution qui vient : « Elle sera difficile, lente, incertaine et provisoire. Elle suppose que des gens qui ont l’habitude de se combattre apprennent à se parler, qu’ils résistent dans chaque camp aux extrêmes quand ces derniers crieront à la trahison et qu’ils aient le courage de s’en séparer. Elle suppose, enfin, qu’ils acceptent la tâche ingrate de se contenter de stabiliser un pays pour l’heure sans boussole, autour de mesures qui peuvent rassembler. Contrairement à ce que nous pouvions redouter, l’annonce d’un pacte d’action législative (…) montre que le pire n’est jamais certain et que la sagesse a quelques chances de l’emporter. Cette perspective n’est pour le moment qu’un espoir ténu, une éventualité qui peut s’effondrer à la moindre bourrasque politique. Cependant, c’est la seule qui ait aujourd’hui une chance de se réaliser. Je ne doute pas qu’une majorité de notre assemblée défende le choix de la sagesse dans ce moment difficile. Notre groupe ne ménagera pas ses efforts pour y parvenir. ».

    Pour une fois, Claude Malhuret ne s'est pas contenté que de beaux mots et de tirer comme dans un chamboule-tout, mais aussi d'un espoir, celui de trouver cette majorité impossible, introuvable dans l'état actuel des forces politiques. Cela nécessiterait donc l'éclatement assumé de cette nouvelle farce populaire (NFP) et la reprise de liberté des socialistes actuellement vassalisés par leur seigneur insoumis. Pas sûr que le PS ait ce courage politique et possible qu'ils préfèrent se morfondre à la remarque de groupes plus radicalisés qu'eux. Avant leur patriotisme de gauche qui, dans ces conditions, les mènerait tout droit vers l'inexistence politique à l'élection présidentielle, ils devraient prendre en compte l'intérêt national, c'est le seul qui vaille.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (18 juillet 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Claude Malhuret au Sénat : le spectacle continue !
    Ukraine : Claude Malhuret se gausse de Jordan Selfie !
    Claude Malhuret sur l'inscription de l'IVG dans la Constitution le 4 mars 2024 à Versailles.
    Claude Malhuret s'en prend à "la pression permanente et déprimante des extrêmes" !
    Claude Malhuret dénonce la "mauvaise république" du guide suprême !
    L'Iran et les femmes : Claude Malhuret contre la mollarchie.
    Passe vaccinal : Claude Malhuret charge lourdement les antivax.
    Covid-19 : les trois inepties du docteur Claude Malhuret.






    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240718-malhuret.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/claude-malhuret-au-senat-le-255916

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/07/20/article-sr-20240718-malhuret.html


     

  • La nuit bleue de Lina

    « Ça donne un peu d’espoir pour retrouver une trace. Est-ce qu’elle est vivante ? On l’espère tous... » (un habitant de Plaine, le 27 juillet 2024 sur France Info).


     

     
     


    Lina Delsarte a été, avec Émile Soleil, l'une de des enfants disparus de l'année 2023, en période estivale (ou quasi-estivale). Les deux disparitions étaient très différentes, l'une concernant un petit bout de chou de 2 ans, disparu le 8 juillet 2023, l'autre une adolescente déjà grande de 15 ans, disparue le 23 septembre 2023. Mais elles avaient un point commun.

    Les deux enquêtes étaient telles, dans leur incapacité à privilégier une piste ou l'autre, avec même parfois des fausses pistes, qu'à la fin de l'année 2023, il y avait une quasi-certitude que la disparition de ces deux enfants resterait un mystère complet. Pendant longtemps, les enquêtes ont pédalé dans la semoule, les recherches pourtant très élaborées n'ont abouti à rien, aucun indice, aucune piste sérieuse.

    Lina a disparu sur le chemin entre chez elle et la gare pour prendre le train pour Strasbourg et rejoindre son petit ami de 19 ans, le samedi 23 septembre 2023 en fin de matinée. La dernière géolocalisation de son smartphone a été enregistrée à 11 heures 22, ce qui correspond aussi à l'heure où des témoins l'ont aperçue. C'est le petit ami qui l'attendait à la gare de Strasbourg qui a alerté la mère de Lina de son absence, et les caméras de surveillance n'ont pas vu Lina embarquer dans le train prévu. La gendarmerie a publié un avis de disparition inquiétante dès l'après-midi du samedi. Plusieurs opérations de ratissage ont eu lieu les jours qui ont suivi, sans résultat. Le petit ami a été menacé plusieurs fois par des accusateurs qui le considéraient comme responsable de la disparition.

    Grâce à l'ADN, les enquêtes ont cependant pu avancer d'un bond. Hélas, pas pour de bonnes nouvelles. Le corps d'Émile a été retrouvé dans une forêt, ses ossements, identifiés par une analyse génétique, ont été retrouvés par une randonneuse et, si on ne sait pas ce qui est réellement arrivé au malheureux Émile, on sait, trois fois hélas, qu'il n'est plus de ce monde depuis longtemps.
     

     
     


    Pour Lina, qui a disparu à Plaine, dans le Bas-Rhin, la situation reste encore très mystérieuse même si l'enquête a beaucoup avancé grâce à son ADN, le premier indice de cette enquête, qu'on a retrouvé dans une voiture volée qui se trouvait pas loin de lieu de disparition de l'adolescente le jour de sa disparition et qui a été retrouvée dans le Languedoc-Roussillon fin mai et début juin 2024 (cette information a été communiquée par la justice le 26 juillet 2024). La procureure de Strasbourg a annoncé le 30 juillet 2024 que le véhicule volé incriminé a été saisi et son propriétaire, après avoir été entendu par la police pour le vol de son véhicule, s'est suicidé peu de temps après, le 10 juillet 2024 à Besançon, en laissant une lettre à ses deux enfants disant ses regrets et sa honte, sans évoquer Lina.

    De nouvelles fouilles ont été effectuées du 30 juillet au 2 août 2024, en Alsace et dans les Vosges, sans résultat non plus, malgré la géolocalisation de la voiture dans cette zone au moment de la disparition de Lina (le conducteur y aurait fait un arrêt d'une heure trente).

    Le principal suspect, le propriétaire de la voiture qui aurait transporté Lina le jour de sa disparition, est mort sans avoir indiqué s'il était le responsable de la disparition voire de la mort de Lina et sans avoir indiqué le cas échéant où elle se trouvait, elle ou son corps.

    La presse a évoqué largement le profil chaotique de ce suspect, un quadragénaire qui a eu de lourds antécédents de drogue, de bipolarité, de problèmes psychiques, et aussi de vols, d'enlèvements de jeunes filles, etc. Il était très dépressif et connu de la justice. Ce qui est notable également, c'est que, contrairement à un assassin d'enfants comme Michel Fourniret, dont le visage et la silhouette laissent deviner une personne inquiétante, le suspect n'effrayait pas physiquement, semblait tout à fait normal, sans allure inquiétante, avec du reste un nom et une apparence bien français (je le précise car il est souvent de bon ton de répéter, à tort, que les auteurs de meurtres seraient souvent issus de l'immigration, pour rester soft).

    La justice a communiqué avec parcimonie et retard ces nouveaux éléments de l'enquête, probablement avec un objectif précis. Peut-être envisage-t-elle une autre personne impliquée ? Les chances de revoir Lina sourire à nouveau, bien vivante, se réduisent malheureusement depuis ces nouveaux faits.

    Ce qui est troublant aussi, c'est que deux autres affaires, qui n'ont en principe rien à voir avec sa disparition, ont eu lieu : la mort de son premier petit ami (à 22 ans) le 1er octobre 2023 d'un accident de voiture (il roulait trop vite et a été flashé à 185 kilomètres par heure ; l'enquête a conclu qu'il ne s'agissait pas d'un suicide). En outre, Lina avait déposé plainte en juin 2022 car victime d'un viol en réunion (elle avait 13 ans), plainte initialement classée sans suite mais reprise par l'ouverture d'une information judiciaire en février 2024, là aussi sans rapport avec sa disparition.

    Lina avait obtenu le brevet des collèges en juin 2023 et préparait un CAP Aide à la personne. Elle aurait dû fêter son 16e anniversaire ce samedi 10 août 2024. Un anniversaire de larmes.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (03 août 2024)
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    Pour aller plus loin :
    La nuit bleue de Lina.
    La nuit de Célya.
    La nuit d'Émile Soleil.
    Affaire Grégory : la vérité sans la boue ?
    Alexandra Sonac et sa fille adolescente.
    Harcèlement scolaire et refus d'obtempérer.
    Alisha, victime d’un engrenage infernal.
    À propos de la tragique disparition de Karine Esquivillon...
    Meurtre de Lola.
    Nos enseignants sont des héros.
    La sécurité des personnes face aux dangers.


     

     
     





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    https://www.agoravox.fr/actualites/societe/article/la-nuit-bleue-de-lina-256111

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  • Il y a 70 ans, la mort de Colette

    « Sentons jusqu'au fond de nous-mêmes notre jeunesse encore neuve... Peut-être que la mort ne viendra jamais ?... » (1905).




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    La romancière française Colette (Sidonie-Gabrielle Colette de son vrai nom ; son père était le capitaine Jules-Joseph Colette, cela ne s'invente pas) est née à Saint-Sauveur-en-Puisaye (dans l'Yonne) il y a 150 ans, le 28 janvier 1873. Pendant des décennies, elle a dominé la vie culturelle française (et belge), en particulier à la Belle Époque, rapidement devenue mondialement célèbre pour sa littérature mais aussi sa vie de femme moderne. Un caractère, et une personnalité hors du commun.

    Dans une notice bibliographique de son éditeur, on y lit : « Le seul nom de Colette évoque un chatoiement d'images qui illustrent une façon de vivre, heureuse, innocente et sans conformisme. Son œuvre épanouie entre les deux guerres reflète un monde clos et préservé que n'atteint pas l'inquiétude de ces temps troublés. ».

    Malgré cet anticonformisme, elle a été intégrée dans l'un des saints des saints de la littérature française comme membre de l'Académie Goncourt en 1944 (elle était déjà membre de l'Académie royale de Belgique dès 1936) et même, en présidant cette Académie Goncourt de 1949 à sa mort, le 3 août 1954 (à l'âge de 81 ans). Des funérailles nationales furent votées, ce qui était une première pour une femme. Je m'étonne qu'on n'ait pas encore pensé à transférer ses cendres au Panthéon, auprès de femmes comme Germaine Tillion et de Joséphine Baker.

    Personnage très riche de la littérature française, Colette était avant tout une femme moderne. Pas une féministe, au contraire de sa mère, Colette ne soutenait pas les suffragettes et si elle considérait que les femmes pouvaient autant réfléchir que les hommes sur les affaires de l'État et sur les affaires du monde, elle voyait toutefois un inconvénient à leur confier des responsabilités étant donné les quelques jours par mois ; elle estimait en 1927 que leurs ragnagnas les empêcheraient de prendre les bonnes décisions à ces moments précis de leur existence de femmes (car elles seraient « irritables, incontrôlées, imprévisibles »). Pas d'idéologie mais du pragmatisme.

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    Si le personnage a brillé aussi par son côté sulfureux, c'est parce qu'elle affichait sa bisexualité ; non seulement elle a été l'épouse de trois maris successifs (dont Henry de Jouvenel de 1912 à 1923), mère également (d'une fille), mais aussi l'amante de femmes, un coming out qui était très nouveau et qui (bien évidemment) scandalisait les bonnes âmes. Son premier mari Willy (Henry Gauthier-Villars, de treize ans son aîné) lui imposait une fidélité pour ses relations avec les hommes, mais acceptait des "moments d'égarement" avec les femmes.

    Grande lectrice durant son enfance et son adolescence, et aussi grande observatrice, Colette a laissé à la littérature française de nombreux ouvrages, des romans, des poèmes, des pièces de théâtre, aussi une épaisse correspondance. Sa série de romans "Claudine" vaguement autobiographique (parue à partir de 1900) fait intervenir des femmes bisexuelles. Elle a aussi écrit quelques essais comme "Le Pur et l'Impur" (écrit en 1931), des récits et réflexions sur les "plaisirs physiques".

    On peut aussi citer "L'Ingénue libertine" (l'histoire de la jeune et jolie Parisienne Minne) en 1909, "Le Blé en herbe" (l'initiation sentimentale et sexuelle de deux adolescentes) en 1923, "La Chatte" (une femme jalouse car son mari lui préfère sa chatte) en 1933 et aussi "Gigi", une nouvelle publiée en 1944 qui raconte l'histoire d'une Parisienne adolescente à la Belle Époque (Gilberte), ouvrage qui a eu de nombreuses adaptations artistiques, notamment au cinéma et aussi au théâtre (dans sa première version, en anglais, à Broadway, en 1951, Colette a choisi Audrey Hepburn pour y tenir le rôle principal).

    Mais je veux m'attarder surtout sur un de ses premiers ouvrages qui a aussi fait la réputation de Colette, son amour des chats, et plus généralement des animaux domestiques (aussi des chiens). Ce n'est pas exceptionnel qu'un écrivain travaille avec des chats (c'est même très courant), mais Colette a eu le don de les rendre tellement vivants que le lecteur s'invite dans l'intimité domestique de ces affections félines et canines.

    Ainsi, parmi les pépites de Colette, cette grosse pépite que je n'ai pas encore citée, "Dialogues de bêtes", publié initialement avec quatre dialogues en 1904, puis sept en 1905 et enfin douze dialogues dans sa version définitive en 1930. Il s'agit de dialogues avec quatre personnages : le chat Kiki-la-Doucette (« chat des Chartreux »), le chien Toby-Chien (« bull bringé »), et ses deux maîtres, "Lui" et "Elle" (des « Deux-Pattes », « seigneurs de moindre importance »). L'impersonnalisation des humains permet bien sûr de mieux s'attacher au chat et au chien. Le ton est résolument direct, et ressemble à une bande dessinée (1905, c'était avant les bandes dessinées qui utilisaient régulièrement des animaux, comme Walt Disney etc.).

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    Je ne résiste pas à proposer quelques extraits issus de ce merveilleux petit fascicule. Des dialogues qui sont d'une étonnante modernité et du résultat précieux d'une observation détaillée de la vie animale.

    Dans la préface signée de l'écrivain Francis Jammes (1868-1938), une lettre propose cette introduction des personnages : « Il semble parfais que l'on naisse. On regarde. On distingue alors une chose dont le dessous des pieds a l'air d'un as de pique. La chose dit : oua-oua. Et c'est un chien. On regarde à nouveau. L'as de pique devient un as de trèfle. La chose dit : pffffff. Et c'est un chat. ». Mais ce n'est pas de Colette, contrairement à ce qui va suivre.

    Le prétendu égoïsme des chats : « Ils baptisent ainsi, pêle-mêle, l'instinct de préservation, la pudique réserve, la dignité, le renoncement fatigué qui nous vient de l'impossibilité d'être compris par eux ». En d'autres termes : « Le Chat est un hôte et non un jouet. ».

    Dérangements gastriques. Toby : « Tu m'as vu, après, me traîner mélancolique, la tête basse, écoutant dans mon estomac le glouglou malsain de l'huile et cacher dans le jardin ma honte... ». Kiki : « Tu la caches si mal ! ». Toby : « C'est que je n'en ai pas toujours le temps. ».

    Purger un chat à l'huile de ricin ? Lui donner le bain ? Kiki sait réagir avec efficacité : « Je l'ai si bien griffée et mordue qu'Elle n'a pas recommencé. Elle a cru, une minute, tenir le démon sur ses genoux. Je me suis roulé en spirale, j'ai soufflé du feu, j'ai multiplié mes vingt griffes par cent, mes dents par mille, et j'ai fui, comme par magie. ».

    Kiki parlant d'une chatonne : « De quel cœur elle me fuit, confondant sa pudeur avec l'effroi ! ».

    Toby parlant d'amour de chat : « Ne détourne pas la tête ! Ta pudeur singulière s'emploie à cacher ce que tu nommes faiblesse, ce que je nomme amour. ».

    Le cri monstrueux du chat avant de vomir : « Les yeux dilatés, j'avale précipitamment une salive abondante et salée, tandis que m'échappent d'involontaires cris de ventriloque... Et puis voici que mes flancs houlent, autant et mieux que ceux de la chatte en gésine, et puis... ».

    Dialogue barbare au menu. Toby : « Ah ?... Dis-moi, les oiseaux, est-ce que ça a le goût du poulet ? ». Kiki (dont les yeux brillent bleu soudain) : « Non... C'est mieux... c'est vivant. On sent tout craquer sous les dents, et l'oiseau qui tressaille, et la plume chaude, et la petite cervelle exquise... ».

    User et abuser de l'amour des humains, une signature de chat : « Si je voulais, Chien, troubler le silence de cette chambre, je saurais habilement choisir, pour m'y laver, une chaise mal calée, dont les pieds martèleraient régulièrement : "Tic-toc, tic-toc, tic-toc" au rythme de ma langue. C'est un moyen que j'ai inventé pour me faire donner la liberté. "Tic-toc, tic-toc" dit la chaise. Elle, qui lit ou écrit, s'agace vite et crie : "Tais-toi, Kiki". Fort de mon bon droit, je me lave innocemment. "Tic-toc, tic-toc". Elle bondit affolée et m'ouvre grande la porte, que je tarde à franchir, d'un pas d'exilé... Dehors, je ris de me sentir supérieur à tous. ».

    Philosophie hautement féline : « Mon Dieu, on peut aimer les gens et soigner son estomac. ».

    Philosophie médicale : « La fièvre, c'est le commencement de ce qu'on ne nomme pas. ».

    Nourriture sauvage : « Je ne puis manger que des oiseaux vivants, ou des souris très petites dont j'avale le cri... ».

    Dialogue cano-félin. Toby : « Pourquoi t'amuses-tu à me faire peur ? Je n'ai jamais bien compris chez toi cette vanité qui consiste à exagérer une cruauté très réelle... Tu me nommes le dernier des romantiques, ne serais-tu pas le premier des sadiques ? ». Kiki : « (…) À mon tour, laisse-moi te dire : "Je suis un Chat". Ce nom seul me dispense... Une haine est en moi contre la souffrance, la laideur, une détestation impérieuse de ce qui choque à ma vue ou simplement mon bon sens. ».

    Explication psychanalytique de la cruauté du chat : « Si le récit affaibli de ce que j'ai fait te bouleverse, comprends donc que j'ai voulu supprimer du monde, anéantir, en cette bête ensanglantée, l'image même, l'image menaçante de mon inévitable mort... ».

    Rideau !


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (28 janvier 2023)
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    Pour aller plus loin :
    Colette.
    Benoît XVI.
    André Breton.
    Louis Aragon.
    Annie Ernaux.
    Svetlana Aleksievitch.
    Mylène Demongeot.
    Jean Teulé.
    José Saramago.
    Annick de Souzenelle.
    Philippe Alexandre.
    Yves Coppens.
    Charlotte Valandrey.
    Sempé.
    Fred Vargas.
    Jacques Prévert.
    Ivan Levaï.
    Jacqueline Baudrier.
    Philippe Alexandre.
    René de Obaldia.
    Michel Houellebecq.
    Richard Bohringer.
    Paul Valéry.
    Georges Dumézil.
    Paul Déroulède.
    Pierre Mazeaud.
    Philippe Labro.
    Pierre Vidal-Naquet.
    Amélie Nothomb.
    Jean de La Fontaine.
    Edgar Morin.
    Frédéric Dard.
    Alfred Sauvy.
    George Steiner.
    Françoise Sagan.
    Jean d’Ormesson.
    Les 90 ans de Jean d’O.

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    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240803-colette.html

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/08/03/article-sr-20240803-colette.html






  • Législatives 2024 (35) : Vers une cohabitation du troisième type ?

    « Le Président de la République est malgré tout supposé se cantonner à n’appliquer "rien que la Constitution", c’est-à-dire à n’assumer qu’une mission d’arbitre, non de capitaine. Il peut endosser un tel rôle lorsque le peuple le lui a clairement confié, après une élection présidentielle, mais non lorsque ce même peuple le lui a clairement retiré, après des élections législatives que le Président a perdues. Il ne lui appartient donc pas de définir "l’arc" dans lequel doit s’inscrire le futur gouvernement. » (Jean-Philippe Derosier, le 15 juillet 2024 dans "Le Monde").



     

     
     


    Comme Benjamin Morel, Jean-Philippe Derosier, dont j'apprécie les billets précis et rigoureux sur son blog, fait partie de ces constitutionnalistes qui ont pris soudain la lumière à l'issue des élections législatives anticipées avec leur résultat, l'absence totale de majorité par une division tripartite de l'Assemblée Nationale.

    Jean-Philippe Derosier considère que le Président de la République n'a pas à indiquer l'architecture de la nouvelle majorité, mais il oublie que lui seul peut prendre l'initiative pour contribuer à la formation de celle-ci, puisque la nomination du Premier Ministre est exclusivement de sa prérogative constitutionnelle, comme l'a oublié la nouvelle farce populaire (NFP) avec la "désignation" de l'inconnue Lucie Castets venant de nulle part (véritable arnaque politique et électorale pour les électeurs du NFP, soit dit en passant).

    Le professeur de droit constitutionnel de Lille rappelait au début de son billet du 15 juillet 2024 les mots de François Mitterrand avant le 16 mars 1986, avec la perspective de la première cohabitation : « La Constitution, toute la Constitution, rien que la Constitution ! ». Mais avec cela, on n'est pas vraiment avancés...

     

     
     


    À l'époque, la situation inquiétait d'un point de vue institutionnel, car aucune cohabitation n'avait encore eu lieu, et surtout, aucune condition ne s'était produite pour donner lieu à une cohabitation. La droite républicaine allait revenir au pouvoir, dans les hypothèses les plus probables, tandis qu'un Président de gauche avait annoncé qu'il resterait coûte que coûte à l'Élysée, quel qu'en soit le résultat. Comment cela allait-il se passer ? C'était une inquiétude, mais aussi une belle curiosité pour les constitutionnalistes de l'époque qui allaient prouver une fois de plus à quel point la Constitution était souple, flexible et adaptée aux imprévus institutionnels. En ce sens, la situation inédite d'aujourd'hui est, elle aussi, très intéressante en pratique comme en théorie.

    Lors de sa conférence de presse du 16 mai 1967, le Général De Gaulle a commenté le résultat des élections législatives de mars 1967 (courte majorité absolue à un siège près). Il expliquait à quel point les partis d'opposition voulaient remettre en cause les institutions, un commentaire qui pourrait tellement bien s'appliquer à la France politique du 7 juillet 2024 : « Les institutions de la République étaient en cause. Elles étaient en cause parce que, pour les dirigeants de toutes les oppositions, le but à atteindre, c’était grâce à ces élections, de remettre le pouvoir à la discrétion des partis comme il l’était autrefois, et comme tout justement l’exclut notre Constitution. Ils comptaient y parvenir en faisant élire à l’Assemblée Nationale une majorité négative. Qui, ils espéraient tout au moins, en censurant tous les gouvernements qu’aurait nommés le chef de l’État, auraient, je répète, ils l’espéraient, amené celui-ci à se soumettre ou à se démettre, et contrairement aux obligations du mandat, qu’il tient, lui, du peuple tout entier, à abandonner la responsabilité suprême de notre République et de la France. S’ils y étaient d’aventure parvenus, il va de soi qu’ils n‘auraient rien pu mettre que la confusion en lieu et place du régime qu’ils auraient ainsi détruit. ».

    À l'instar de Maurice Duverger, les constitutionnalistes se sont mis d'accord pour décrire la Cinquième République comme un régime semi-présidentiel à parlementarisme rationalisé. C'est-à-dire avec cette bivalence à la fois présidentiel (élection du Président de la République au suffrage universel direct) et parlementaire (responsabilité du Premier Ministre et de son gouvernement devant le Parlement avec possibilité réciproque de censure et de dissolution). Cette description ne départage cependant pas les différentes interprétations du texte fond.

    Il y avait, en effet, en 1986, deux lectures possibles de la Constitution, au-delà de l'interprétation (celle de Raymond Barre) selon laquelle la défaite aux élections législatives du parti présidentiel entraînerait une délégitimation du Président de la République et la remise en jeu de son mandat (démission et nouvelle candidature). Cette dernière interprétation est d'ailleurs plus compliquée à accomplir avec la limitation à deux mandats successifs, car, dans le cas du Président Emmanuel Macron en 2024, comment remettre en jeu son mandat puisqu'il ne pourrait plus se représenter en même temps ?

    Il y avait une lecture parlementaire qu'a adoptée immédiatement François Mitterrand, qui n'a pas tergiversé et a nommé le seul Premier Ministre accepté de l'alliance UDF-RPR ayant la majorité absolue, Jacques Chirac. Dans cette lecture, François Mitterrand aurait pu aussi nommer d'autres personnalités UDF-RPR à Matignon, comme Valéry Giscard d'Estaing (son adversaire récurrent, cela aurait fait bizarre), Jacques Chaban-Delmas (son ami de la Résistance et de la Quatrième République), Simone Veil (très populaire), Édouard Balladur (le théoricien de la cohabitation), Alain Peyrefitte (un autre théoricien de la cohabitation), René Monory (au bon sens sénatorial), etc. Le président du RPR avait de toute façon tout verrouillé de manière à ce que la majorité parlementaire refusât toute autre personnalité que lui-même (à l'époque, il y avait de vrais chefs dans les partis politiques).

    Mais il y avait une autre lecture, une lecture présidentialiste, en considérant que le régime est plus présidentiel que parlementaire. Et cette lecture voudrait que le Président de la République, élu par le peuple français, reste légitime pour nommer le pouvoir exécutif, si bien que, comme aux États-Unis, il pourrait nommer un gouvernement de sa couleur politique, à charge pour ce dernier de convaincre l'Assemblée à la majorité contraire de ne pas le censurer (mais aux États-Unis, il n'y a ni censure ni dissolution). Cette option n'a pas été choisie ni par François Mitterrand ni par Jacques Chirac parce qu'un tel gouvernement aurait une durée de vite très limitée, de l'ordre du jour et au plus long, du mois. En effet, on peut imaginer que la majorité parlementaire élue souhaiterait un gouvernement de sa couleur politique et censurerait tout gouvernement qui n'irait pas dans ce sens, ce qui est logique et démocratique. C'est pour cette raison que la lecture parlementaire a été définitivement adoptée par la pratique, pour une simple question de bon sens.

     

     
     


    La configuration d'un Président socialiste et d'une majorité absolue UDF-RPR à l'Assemblée s'est produite deux fois, en mars 1986 et en mars 1993, et a abouti à la nomination respectivement de Jacques Chirac et Édouard Balladur à Matignon. Une configuration inverse, de deuxième type, s'est produite en juin 1997 avec un Président gaulliste, Jacques Chirac, et une majorité absolue de gauche à l'Assemblée, ce qui a abouti à la nomination d'un gouvernement dit de la gauche plurielle dirigé par Lionel Jospin. Chacun de ces trois Premiers Ministres, d'ailleurs, s'est présenté à l'élection présidentielle à l'issue de cette période de cohabitation, mais aucun n'a été élu, deux ont même été battus dès le premier tour !

    Ces trois cohabitations étaient finalement faciles. Il n'y a pas eu beaucoup de changements dans la pratique institutionnelle, si ce n'est que le centre des décisions était transféré de l'Élysée à Matignon. Il s'agit là de la traduction de la légitimité populaire la plus récente. J'ajoute, pour évoquer l'hypothèse d'une cohabitation avec un gouvernement RN dirigé par Jordan Bardella, que les trois premières cohabitations ont fait intervenir des acteurs politiques soucieux de l'intérêt national et qui avaient le sens de l'État, si bien qu'ils pouvaient se mettre d'accord sur des visions d'intérêt national comme la politique étrangère, la défense, la construction européenne et quelques autres visions stratégiques (ce qui n'aurait pas été le cas avec un RN quasiment acheté par Vladimir Poutine).

    Mais l'hypothèse d'un gouvernement RN car d'une majorité absolue RN a été battue en brèche par le front républicain plébiscité par une grande partie des électeurs (sinon, cette tactique n'aurait pas réussi), et on se retrouve ainsi avec une absence totale de majorité. Comme sous la Quatrième République.


    Parlons alors histoire politique. Contrairement à ce qu'on dit habituellement, le Président de la Quatrième République avait un pouvoir non négligeable, et c'était justement le choix du Président du Conseil (chef du gouvernement).

    Ainsi, le choix de Guy Mollet en janvier 1956 est provenu exclusivement de René Coty et pas de l'alliance qui avait gagné les élections législatives anticipées du 2 janvier 1956 après la dissolution décidée par Edgar Faure le 1er décembre 1955 (Président du Conseil qui a été mis en minorité le 29 novembre 1955). Pourtant, la victoire du front républicain qui rassemblait les socialistes (SFIO) et les radicaux, ainsi que quelques partis annexes, a été menée par Pierre Mendès France. Logiquement, à la fois politiquement et électoralement, René Coty aurait dû nommer Pierre Mendès France à Matignon. Mais René Coty a eu une autre interprétation, il s'est basé sur le groupe politique le plus important, et a nommé Guy Mollet, le chef du parti ayant eu le plus de députés (secrétaire général de la SFIO). Du reste, Guy Mollet a dirigé le gouvernement le plus long de la Quatrième République (quinze mois et demi !).
     

     
     


    Entre parenthèses, notons que dans cette logique de tradition républicaine, Lucie Castets, dont on dit qu'elle émanerait plus du PS que des insoumis (c'est en tout cas ce qu'a prétendu Olivier Faure, premier secrétaire du PS, le 25 juillet 2024 au conseil national du PS : « La candidature de Lucie Castets, c'est nous qui l'avons voulue. (…) C'est nous qui l'avons proposée. (…) Et il faudrait maintenant que nous soyons les premiers à dire que, finalement, on ne sait pas très bien si nous la soutenons ou pas ? »), n'a rien à faire dans cette galère, puisque le groupe le plus important du NFP est les insoumis : la logique de la tradition républicaine, ce serait plutôt de désigner Jean-Luc Mélenchon, chef des insoumis, et personne d'autre du NFP... ou même, si on prenait l'ensemble des groupes politiques, de nommer Jordan Bardella, président du RN, puisque le RN est aujourd'hui le groupe le plus important de l'Assemblée (suivi... du groupe macroniste Ensemble pour la République). Je referme ma parenthèse.
     

     
     


    De même, la désignation de De Gaulle pour former un nouveau gouvernement, a été une initiative historique mais personnelle de René Coty. Il aurait pu, au contraire, la refuser et on ne sait pas où l'on en serait aujourd'hui. On voit bien que la désignation de De Gaulle n'était pas évidente politiquement, même si la plupart des partis politiques lui ont finalement accordé les plein pouvoirs le 1er juin 1958. Le rôle du Président de la République était donc crucial dans une crise politique parce que le Président de la République était justement un pôle de stabilité institutionnel, ce qu'il reste encore aujourd'hui.

    Ainsi, il n'est pas anormal, d'un point de vue institutionnel et même constitutionnel, dans la grande tradition républicaine plus que séculaire (depuis 1870), qu'aujourd'hui, Emmanuel Macron soit à l'initiative pour rechercher cette impossible majorité au sein de l'Assemblée. Il a au moins la légitimité pour la rechercher ou pour l'encourager, et il en a la compétence constitutionnelle.
     

     
     


    Cela écrit, il s'agit bien aujourd'hui d'une impossible majorité puisque, autour du bloc central, seuls des députés du bloc de gauche pourraient le compléter pour former une majorité. Or, pour l'instant, alors que d'un point de vue intellectuel, beaucoup de députés socialistes ne seraient pas opposés à faire cette grande coalition, ils meurent de trouille de se faire accuser par les mélenchonistes d'être des traîtres à la gauche, et surtout, de laisser à Jean-Luc Mélenchon l'exclusivité du terrain à gauche dans la perspective de l'élection présidentielle de 2027 (leur problème, c'est que ni les socialistes ni les écologistes n'ont de candidat solide et sérieux à l'élection présidentielle, donc, dans tous les cas, Jean-Luc Mélenchon préemptera le terrain à gauche).

    Pour l'instant, les Français s'en moquent. Après un mois particulièrement stressant et fatigants, ils décompressent, se détendent, prennent des vacances, se réjouissent des nombreuses médailles olympiques de nos champions. Mais à la rentrée, bien évidemment, exigeants, ils vont attendre la nomination d'un gouvernement et des mesures concrètes. Dans les sondages, le principe de la "grande coalition" est plébiscité, probablement plus par raison que par passion. En d'autres termes, les Français disent à leurs députés : mettez-vous d'accord pour un gouvernement !
     

     
     


    On verra bien, dans l'indicible "opinion" politique, qui aura la sympathie des sondés, les doctrinaires qui refusent de gouverner par refus obstiné du compromis au point de créer une absence de gouvernement ou les bonnes volontés qui, par esprit de responsabilité et pour l'intérêt national, vont chercher des compromis pour pondre le futur budget de l'État (projet de loi de finances 2025).

    C'est cette bataille de "l'opinion publique" qu'Emmanuel Macron cherche à gagner. Et gare aux inconséquents, il se pourrait qu'il puisse la gagner !


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (01er août 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Élysée 2022 (49) : vers une quatrième cohabitation ?
    La première cohabitation (1986-1988).
    Législatives 2024 (35) : Vers une cohabitation du troisième type ?
    Législatives 2024 (34) : Lucie Castets noyée dans une réalité alternative !
    Législatives 2024 (33) : Le grain de sel du Sénat !
    Législatives 2024 (32) : Le casse-tête de Lucie Castets.
    Législatives 2024 (31) : Emmanuel Macron et les joyeux JO.
    Interview du Président Emmanuel Macron le 23 juillet 2024 sur France 2 (vidéo intégrale).
    Claude Malhuret au Sénat : le spectacle continue !
    Législatives 2024 (30) : coalition ou pacte ?
    Législatives 2024 (29) : le staff de l'Assemblée Nationale.
    Législatives 2024 (28) : la stratégie du chaos institutionnel de Jean-Luc Mélenchon.
    Législatives 2024 (27) : l'émotion de Yaël Braun-Pivet.
    Législatives 2024 (26) : les larmes de Marine Tondelier.
    Législatives 2024 (25) : faut-il ostraciser le RN à l'Assemblée Nationale ?
    Législatives 2024 (24) : Huguette Bello, mélenchonette en peau de lapin.
    Législatives 2024 (23) : grand pays recherche son gouvernement.
    Législatives 2024 (22) : qui au perchoir ?
    Législatives 2024 (21) : marche sur Matignon ?
    Lettre aux Français par Emmanuel Macron le 10 juillet 2024 (texte intégral).
    Législatives 2024 (20) : le poison du scrutin proportionnel.
    Législatives 2024 (19) : quel possible Premier Ministre pour une impossible majorité ?
    Législatives 2024 (18) : la fin du cauchemar Bardella (pour le moment).
    Résultats du second tour des élections législatives du 7 juillet 2024.
    Fake news : la scandaleuse manipulation politique du RN.
    Législatives 2024 (17) : rien n'est joué dimanche prochain !
    Législatives 2024 (16) : la question de dimanche prochain.
    Législatives 2024 (15) : les promesses n'engagent que ceux qui y croient !
    Législatives 2024 (14) : la revanche des gilets jaunes ?
    Législatives 2024 (13) : fortes mobilisations au premier tour.
    Résultats du premier tour des élections législatives du 30 juin 2024.
    Appel aux sociaux-démocrates.
    Éric Le Boucher : la France va plutôt bien (27 juin 2024).
    Législatives 2024 (12) : un isoloir, ce n'est pas un cabine d'essayage !
    Législatives 2024 (11) : front, rassemblement, union nationale, barrage, consignes de vote...
    Législatives 2024 (10) : il était une fois Jordan Bardella, Gabriel Attal et Manuel Bompard.
    Législatives 2024 (9) : Emmanuel Macron et son n'ayez-pas-peur !
    Interview d'Emmanuel Macron à Génération Do It Yourself le 24 juin 2024 (podcast intégral).
    Lettre aux Français d'Emmanuel Macron le 23 juin 2024 (texte intégral).
    Législatives 2024 (8) : la bataille de Matignon.
    Le programme aux élections législatives du 30 juin 2024 d'Ensemble pour la République (document à télécharger).
    Législatives 2024 (7) : Ensemble pour la République.
    Législatives 2024 (6) : Nicolas Sarkozy et François Fillon bougent encore !
    Législatives 2024 (5) : le trouble de Lionel Jospin.
    Législatives 2024 (4) : l'angoisse de Manuel Valls.
    Législatives 2024 (3) : François Hollande dans l'irresponsabilité totale !
    Législatives 2024 (2) : clarification ou chaos ?
    Législatives 2024 (1) : vaudeville chez Les Républicains.
    Sidération institutionnelle.
    Élections européennes 2024 (4) : la surprise du chef !
    Résultats des élections européennes du dimanche 9 juin 2024.

     

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240801-cohabitation.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/legislatives-2024-35-vers-une-256075

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/08/02/article-sr-20240801-cohabitation.html







     

  • Législatives 2024 (34) : Lucie Castets noyée dans une réalité alternative !

    « Je demande au Président de prendre ses responsabilités et de me nommer Première Ministre ! » (Lucie Castets, le 24 juillet 2024 sur France Inter).



     

     
     


    Si, quand vous faites votre marché au village, près de votre plage ou de vos montagnes, vous voyez passer une jeune femme à l'allure avenante, plutôt déterminée, le visage un peu fermé et le sourire un peu trop carnassier, c'est que vous avez la chance de séjourner pendant vos vacances dans un des lieux où Lucie Castets fait campagne.

    Lucie Castets, mais si ! Rappelez-vous ! C'est le plan C ou D... ou Z plutôt, de la nouvelle farce populaire. Inconnue de tous les Français, au point de ne même pas être répertoriés sur Wikipédia (j'insiste beaucoup sur ce sujet : beaucoup de notice bibliographique concerne de grands inconnus), inconnue par 99,9999% des électeurs d'un candidat du NFP et probablement inconnue de 95% des députés du NFP (seuls, les élus parisiens pouvaient éventuellement, s'ils s'intéressaient à leur mandat, la connaître), parce qu'elle a été choisie par des prélats de la gauche ultradicalisée, obscurs apparatchiks sous influence du gourou des insoumis, après de nombreuses et vaines autres tentatives (initialement, ces confinés du conclave avaient proposé quelques mamies aux Français), choisie pour devenir la Première Ministre de la France !

    Pas de chance pour elle, ses cardinaux idéologisés n'ont pas lu la Constitution de la Cinquième République pourtant applicable depuis le 4 octobre 1958 (soit presque 66 ans). L'article 8 de la Constitution est assez clair et n'a pas besoin d'exégètes intellectuels : « Le Président de la République nomme le Premier Ministre. Il met fin à ses fonctions sur la présentation par celui-ci de la démission du gouvernement. Sur la proposition du Premier Ministre, il nomme les autres membres du gouvernement et met fin à leurs fonctions. ». Les apparatchiks du NFP se croit sous la Quatrième République, ce qui correspond bien à leur mode de pensée en voulant la Sixième, car ils haïssent la Cinquième, celle que nous a léguée le Général De Gaulle pour notre grande chance et grand intérêt. Ce n'est donc pas aux chefs de partis minoritaires de désigner le futur Premier Ministre de la France, mais à Emmanuel Macron, et uniquement à lui, Président de la République, et ce dernier a déjà donné les clefs : il faut que ce Premier Ministre puisse gouverner, c'est-à-dire, il faut qu'il ne succombe pas à la première tentative de motion de censure. Une évidence que ne semble pas avoir comprise le NFP qui, par un autisme politique qui sera un sérieux sujet d'étude pour les politologues pendant de longues années, s'est fourvoyée dès le soir du 7 juillet 2024 dans une réalité alternative, nous-avons-gagné.

    En réclamant de manière très cavalière à la matinale de France Inter, dès le lendemain de sa... comment dirais-je ? de sa "désignation interne", le 24 juillet 2024, de la nommer à la tête du gouvernement, Lucie Castets méconnaît la Constitution, et pire, elle crée un précédent institutionnellement dangereux sinon honteux qui pourrait s'apparenter à une prise de pouvoir par la force (on appelle cela un coup d'État, même si, en l'occurrence, il s'agit ici plutôt d'un coup d'éclat, formulation facile et peu originale, j'en conviens).


    Alors que les partis qui la soutiennent ne disposent du soutien que de 174 députés voire 192 en élargissant à des divers gauche, il manque environ une centaine de députés pour constituer une majorité (289 députés), ce qui est loin d'être possible, surtout quand Lucie Castets a confirmé le 24 juillet 2024, qu'il « n'y a pas de coalition possible » entre le NFP et le bloc macroniste (pas plus qu'avec le RN). Et elle l'a redit un peu plus tard : « Une coalition avec le camp présidentiel est impossible, du fait de nos désaccords profonds, et ce n'est pas ce qu'attendent nos électeurs. ».

    Son problème, c'est qu'elle ne parle que de ses électeurs-à-elle, c'est-à-dire du NFP (car je peux affirmer de manière certaine qu'aucun des 50 millions d'électeurs français, pas un, n'a voté pour madame Lucie Castets !), alors qu'elle devrait parler de tous les électeurs, de ceux aussi qui ont voté à 34% pour le RN ou de ceux qui, à 22% ont voté pour les macronistes. Lorsqu'on prétend vouloir diriger le gouvernement de la France, on doit le faire au nom de l'intérêt de tous les Français et pas seulement d'un camp, d'une faction, de ses seuls partisans, de toute façon pas assez nombreux pour dégager une majorité à l'Assemblée.
     

     
     


    Sa copine écolo Marine Tondelier, super heureuse d'avoir enfin un nom à défendre (faute d'elle-même mais dans la perspective d'un futur improbable maroquin), avait d'ailleurs fait un contre-sens la veille, le 23 juillet au soir, sur BFMTV. On lui demandait si, pour élargir sa majorité de gauche vers le centre pour avoir une majorité, il faudrait exclure les insoumis dont la présence empêche tout élargissement. Mais elle a répondu à l'envers, en disant que si on excluait les insoumis, la majorité-très-minoritaire perdrait les 74 députés insoumis... en oubliant d'ajouter qu'elle pourrait alors gagner les 200 députés du bloc central...

    Ni Marine Tondelier, ni Lucie Castets, ni leurs affiliés insoumis n'ont compris l'enjeu politique actuel : pour gouverner dans la situation actuelle, il faut faire des compromis autour d'une table avec des programmes différents, se mettre d'accord sur des projets communs, ou au moins, des objectifs communs, mais pas rester psychorigide comme le gourou à ne vouloir appliquer que le programme d'une très petite part des Français (28%). En ce sens, Lucie Castets se présente aux Français comme la fille improbable de Jean-Luc Mélenchon et Anne Hidalgo !

    Et c'est unique dans l'histoire politique de la France : c'est la première fois qu'une personnalité politique, complètement inconnue et anonyme, fait campagne après et pas avant les élections ! C'est un peu tard ! Ainsi, la voici donc qui, de manière totalement inaudible, est allée à Lille le 27 juillet ou alors qui va rencontrer les employés de la société Duralex le 31 juillet à La Chapelle-Saint-Mesmin, près d'Orléans, dans le Loiret. Les petits apparatchiks de la NFP sont bien entendu à ses côtés, mais elle n'a pas rencontré beaucoup de succès, ce qui peut se comprendre avec les vacances estivales, la canicule et la joie des Jeux olympiques dans les exploits des sportifs français.

     

     
     


    Directrice des finances et des achats de la Ville de Paris, c'est un poste très important pour une commune de 2 millions d'habitants, et on peut se poser des questions sur la trajectoire professionnelle. Ainsi, sa venue à Lille a provoqué une foule d'interrogations parmi les internautes sur Twitter, comme celle-ci, de la journaliste Caroline Jaeger, le 27 juillet 2024 lorsqu'elle a vu l'affiche : « Oui, venez rencontrer une fonctionnaire de la ville de Paris si vous voulez, mais faites-le à Paris. Aucune question politique et uniquement sur son champ de compétences qui sont les finances et les achats de la ville de Paris svp. Devoir de réserve oblige dans la fonction publique, sauf si elle s’est mise en disponibilité pendant sa campagne "électorale" au poste de Première Ministre ».

    Même son de cloche ici : « Obligation du fonctionnaire même en congés de respecter le droit de réserve et tout ce qui va avec ! Étonnant de faire de la politique sans être mise en disponibilité ! Bonjour le respect de la fonction publique territoriale ou d'État ! Cela promet ».

    Renseignements pris, "Le Canard enchaîné" a annoncé le 30 juillet 2024 que Lucie Castets n'avait effectivement pas demandé à être mise en disponibilité et est donc toujours directrice des finances et des achats de la Ville de Paris, mais elle a simplement posé des congés payés : « Lucie Castets, la candidate du NFP qui mène campagne pour Matignon, a omis de se mettre en disponibilité auprès de la Ville de Paris, où elle officie comme directrice financière. Elle a juste posé des congés jusqu’au 30 août. C'est peut-être plus prudent... ».

    La réaction à cette information a été sans pitié pour la pauvre candidate autoproclamée à Matignon : « ? C'est une blague ! Elle-même sait donc que tout cela est une vaste plaisanterie ». Un plus pondéré : « Elle a eu raison car cela reste une intermittence de spectacle pendant quelques semaines. Elle sait bien qu'elle ne sera jamais PM mais accepte de jouer ce rôle de cache-sexe des failles béantes à gauche; en tentant de convaincre la base militante, que tout est de la faute du PR ».

    Ou encore : « "a omis de se mettre en disponibilité auprès de la Ville de Paris" : Preuve que c'est du bluff, qu'elle-même n'y croit pas ». D'autres étaient plus originaux : « "Castets on Tour" avec son nouveau single : I want to be Prime Minister, déjà disponible en téléchargement ». À quoi a été répondu ceci : « Juste une reprise du "live" de juin de Jordan Bardella ! ». Un autre internaute plus visionnaire : « Oui c’est une mythomane qui est là pour faire un peu d’animation dans la presse pendant les JO. Avant l’arrivée de Xavier Bertrand à Matignon en septembre. Elle retournera dans l’anonymat creuser le déficit de la ville de Paris. La chef des castors retournera parmi les rats ».

    Bien entendu, en dehors du fait que la campagne de Lucie Castets se terminera le 30 août 2024, donc, qu'elle reprendra son travail à partir de cette date, d'autres internautes toujours aussi malveillants mais humoristiques ont souligné l'absence de la haut fonctionnaire à son poste pourtant crucial, rappelant l'état désastreux des finances de Paris : « Les finances de la mairie de Paris bénéficient d'un peu de répit ! ». Ou : « Devinez qui est tellement indispensable dans son poste, que personne ne fait la différence quand elle est absente pour plusieurs semaines ? ».


    Et en parlant de poser ses congés, certains ont été étonnés de cette facilité déconcertante à les poser : n'importe quel responsable dans une collectivité ou une entreprise a du mal à prendre déjà seulement trois semaines successives de congés, alors six semaines, à l'improviste, du jour au lendemain ! Ainsi : « Une directrice financière qui prend plus d’un mois de congés tandis que les comptes de sa "boîte" sont en perdition. Elle fait quoi là-dedans ? ». Un raisonneur : « Donc elle avait 5 semaines de congés disponibles. C’est bien une presque ministre économe ». Un Parisien mécontent : « À la mairie de Paris on peut prendre 6 semaines de congés d'affilée ? Trop cool, la mairie de Paris ! Qu'Anne Hidalgo la renferme d'office dans son bureau. Avec le déficit actuel de la ville, elle a du boulot la haut-fonctionnaire qui sait tout sur Tout. ».

    En somme, une haut fonctionnaire payée à faire campagne pour des intérêts partisans, où est donc sa neutralité ? Imagine-t-on d'autres fonctionnaires toujours en fonction faire campagne dans d'autre camp ? (Oui, ça a existé !). Le dernier internaute que je cite ici a rappelé : « C’est une des responsables du naufrage économique de Paris et le NFP veut en faire notre Première Ministre, c’est dire a quel point ils sont motivés pour remettre le pays sur les rails ».

    Car l'important, effectivement, c'est le fond, et là, au moins, c'est clair : Lucie Castets a annoncé qu'elle ferait 150 milliards d'euros d'augmentation d'impôts et de taxes supplémentaires ! Rien que cela pour financer le très lourd programme dépensier du NFP. François Hollande avait secoué la France avec un choc d'augmentation des impôts de 30 milliards d'euros en 2012 et elle a été plombée pendant cinq ans, avec un chômage de masse alors que nos voisins redémarraient leurs activités économiques. Il a fallu l'arrivée d'Emmanuel Macron au pouvoir pour retrouver un peu de raison dans la conduite de la politique économique de notre pays. Ce n'est pas le moment pour refaire du déficit et des dépenses publiques à outrance dans un pays déjà archi-imposé et archi-taxé. Il est temps au contraire de libérer le pays, ce qu'ont tenté de dire tous les électeurs qui n'ont pas voté pour le NFP, soit environ les trois quarts du pays. Le mieux, pour Lucie Castets, c'est de finir son tour des plages le 30 août, de se remettre au boulot pour assainir les finances de Paris, et de replonger dans l'anonymat. Merci. Au suivant !


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (31 juillet 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Législatives 2024 (34) : Lucie Castets noyée dans une réalité alternative !
    Législatives 2024 (33) : Le grain de sel du Sénat !
    Législatives 2024 (32) : Le casse-tête de Lucie Castets.
    Législatives 2024 (31) : Emmanuel Macron et les joyeux JO.
    Interview du Président Emmanuel Macron le 23 juillet 2024 sur France 2 (vidéo intégrale).
    Claude Malhuret au Sénat : le spectacle continue !
    Législatives 2024 (30) : coalition ou pacte ?
    Législatives 2024 (29) : le staff de l'Assemblée Nationale.
    Législatives 2024 (28) : la stratégie du chaos institutionnel de Jean-Luc Mélenchon.
    Législatives 2024 (27) : l'émotion de Yaël Braun-Pivet.
    Législatives 2024 (26) : les larmes de Marine Tondelier.
    Législatives 2024 (25) : faut-il ostraciser le RN à l'Assemblée Nationale ?
    Législatives 2024 (24) : Huguette Bello, mélenchonette en peau de lapin.
    Législatives 2024 (23) : grand pays recherche son gouvernement.
    Législatives 2024 (22) : qui au perchoir ?
    Législatives 2024 (21) : marche sur Matignon ?
    Lettre aux Français par Emmanuel Macron le 10 juillet 2024 (texte intégral).
    Législatives 2024 (20) : le poison du scrutin proportionnel.
    Législatives 2024 (19) : quel possible Premier Ministre pour une impossible majorité ?
    Législatives 2024 (18) : la fin du cauchemar Bardella (pour le moment).
    Résultats du second tour des élections législatives du 7 juillet 2024.
    Fake news : la scandaleuse manipulation politique du RN.
    Législatives 2024 (17) : rien n'est joué dimanche prochain !
    Législatives 2024 (16) : la question de dimanche prochain.
    Législatives 2024 (15) : les promesses n'engagent que ceux qui y croient !
    Législatives 2024 (14) : la revanche des gilets jaunes ?
    Législatives 2024 (13) : fortes mobilisations au premier tour.
    Résultats du premier tour des élections législatives du 30 juin 2024.
    Appel aux sociaux-démocrates.
    Éric Le Boucher : la France va plutôt bien (27 juin 2024).
    Législatives 2024 (12) : un isoloir, ce n'est pas un cabine d'essayage !
    Législatives 2024 (11) : front, rassemblement, union nationale, barrage, consignes de vote...
    Législatives 2024 (10) : il était une fois Jordan Bardella, Gabriel Attal et Manuel Bompard.
    Législatives 2024 (9) : Emmanuel Macron et son n'ayez-pas-peur !
    Interview d'Emmanuel Macron à Génération Do It Yourself le 24 juin 2024 (podcast intégral).
    Lettre aux Français d'Emmanuel Macron le 23 juin 2024 (texte intégral).
    Législatives 2024 (8) : la bataille de Matignon.
    Le programme aux élections législatives du 30 juin 2024 d'Ensemble pour la République (document à télécharger).
    Législatives 2024 (7) : Ensemble pour la République.
    Législatives 2024 (6) : Nicolas Sarkozy et François Fillon bougent encore !
    Législatives 2024 (5) : le trouble de Lionel Jospin.
    Législatives 2024 (4) : l'angoisse de Manuel Valls.
    Législatives 2024 (3) : François Hollande dans l'irresponsabilité totale !
    Législatives 2024 (2) : clarification ou chaos ?
    Législatives 2024 (1) : vaudeville chez Les Républicains.
    Sidération institutionnelle.
    Élections européennes 2024 (4) : la surprise du chef !
    Résultats des élections européennes du dimanche 9 juin 2024.

     
     




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    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/legislatives-2024-34-lucie-castets-256074

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