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  • La folle histoire de la nomination de François Bayrou

    « La politique ne peut pas se réduire à un champ de manœuvres, dans une sorte d’entre-soi d’où les citoyens sont exclus. » (Michel Barnier, le 13 décembre 2024 à Matignon).




     

     
     


    Folle et éprouvant histoire. Après le montagnard Michel Barnier, voici le montagnard François Bayrou installé à Matignon ce vendredi 13 décembre 2024. La mission du nouveau Premier Ministre reste toujours impossible depuis le 7 juillet 2024, dès lors qu'aucune majorité constructive n'est capable de se former pour gouverner la France. Impossible ou, du moins, périlleuse, car François Bayrou croit aux miracles. Il doit avoir au moins un regret, celui que son indispensable Marielle de Sarnez ne fût plus là pour vivre ces moments mémorables.

    Il a reçu dès le soir de son installation le Ministre de l'Intérieur démissionnaire, l'influent Bruno Retailleau, ancien président du groupe LR au Sénat, puis, ce samedi 14 décembre 2024, il a reçu, l'un après l'autre, le Premier Président de la Cour des Comptes Pierre Moscovici (ancien ministre socialiste), le gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau, la Présidente de l'Assemblée Nationale Yaël Braun-Pivet, enfin le Président du Sénat Gérard Larcher. D'autres consultions sont prévues dans son agenda, avec les chefs de groupes parlementaires et de partis.

    La composition du gouvernement Barnier a été très longue à venir, seize jours en septembre. François Bayrou espère que la composition du sien ira plus vite car il y a des échéances. La première échéance est le début des vacances de Noël, et après le vendredi 20 décembre 2024, les Français ne seront plus réceptifs aux événements politiques avant le Nouvel An. Et puis, il y a cette loi spéciale, adoptée en commission le 12 décembre 2024, qui est examinée le lundi 16 décembre 2024 en séance publique. Ce sera étonnant qu'une telle loi, urgente pour percevoir les impôts et faire des emprunts, soit discutée avec des ministres démissionnaires et un Premier Ministre nouvellement désigné.

    Il faut revenir sur les conditions de la nomination de François Bayrou à Matignon. Tout indique que la matinée du 13 décembre 2024 fut rude. Elle le fut pour le principal intéressé, François Bayrou, ce qui a été une première épreuve du feu qui vaut mille diplômes de forte personnalité. Mais elle le fut aussi pour les journalistes, tous mobilisés depuis la veille pour pronostiquer puis commenter la nomination du nouveau Premier Ministre. Au cours de la matinée, beaucoup se sont discrédités par leurs contacts "bien informés" et leurs "sources propres" en distillant des confidences qu'ils croyaient définitives, au point qu'on ne peut que penser au fameux sketch de Coluche sur les personnes bien informées.

    François Bayrou est véritablement un miraculé ! Les Pyrénées ont remplacé les Alpes à Matignon, mais dans tous les cas, le locataire des lieux est un dur à cuire. En fait de chaîne de montagnes, c'est plutôt l'Himalaya au pied duquel il se trouverait, un « Himalaya de difficultés ». "Le Monde" est revenu sur les conditions de nomination de François Bayrou, alors qu'il avait malencontreusement annoncé avec assurance la non-nomination de François Bayrou. Dans un article publié le samedi 14 décembre 2024, les journalistes Claire Gatinois et Nathalie Segaunes ont précisé la chronologie de cette folle matinée.

     

     
     


    Selon elles, le Président de la République avait fixé son choix : cela devait être Sébastien Lecornu. Pourquoi ? Pour justement ce que l'opposition de gauche reproche à Emmanuel Macron : pour que le Président puisse reprendre la main après avoir été éloigné des affaires pendant le gouvernement Barnier. À l'évidence, cette idée était complètement absurde dans le cadre d'une Assemblée comme celle qu'on a aujourd'hui. Cela aurait été une provocation frontale inutile qui pouvait avoir de fâcheuses conséquences pour les institutions et même pour lui-même. Comment peut-on avoir aussi peu le sens politique que lui ?

    Vers 9 heures du matin, ce vendredi, Michel Barnier a fait installer dans la cour de Matignon tapis rouge et micros, mais sans savoir à qui il ferait la passation des pouvoirs. Le tapis rouge est donc resté toute la journée puisque la passation a eu lieu à 17 heures.


    Entre-temps, c'était très éprouvant pour certains acteurs politiques. Un coup de téléphone à 5 heures du matin d'Emmanuel Macron à François Bayrou pour dire qu'il ne serait pas nommé Premier Ministre, puis, une rencontre à l'Élysée à 8 heures du matin, qui a duré près de deux heures. En ce début de matinée, pour les éditorialistes matinaux, c'était clair : François Bayrou allait être nommé Premier Ministre. Logique d'être reçu par le Président de la République, et longuement, pour envisager la composition du gouvernement et ses orientations politiques.

    Mais des petits détails ont vite choqué les journalistes de la télévision d'information continue : par exemple, François Bayrou n'est pas sorti officiellement de l'Élysée, mais par une porte "dérobée", sans image, sans déclaration, discrètement. Puis, c'était l'attente, une longue attente. Incompréhensible alors que tout était en principe fixé. Le communiqué devait être publié avant midi. Le tapis rouge s'inquiétait et s'ennuyait. Les horloges s'excitaient.

    Puis, des journalistes ont réussi à capter l'image de François Bayrou, rentrant à son bureau de Haut Commissaire au Plan : il faisait froid, François Bayrou, sans sourire mais sans tristesse non plus, a conseillé aux journalistes présents de ne pas rester là « se geler » et il expliquait : « ça ne servirait à rien ». La grande porte s'est refermée. Cette petite phrase était la confirmation de rumeurs qui parcouraient déjà le tout Paris : François Bayrou ne serait finalement pas nommé. On comprendra plus tard qu'il y a eu beaucoup de gens prétendument bien informés qui n'avaient aucune information fiable. Sans compter les manipulateurs.

    D'après l'article du "Monde", François Bayrou aurait expliqué à Emmanuel Macron pourquoi ce serait une erreur de nommer Sébastien Lecornu, considéré comme un courtisan. Cette nomination rendrait le Président très « vulnérable ». Au contraire, pour François Bayrou qui s'est préparé depuis longtemps à la fonction, il s'agit justement de gouverner au centre, afin de construire des compromis dans cette Chambre ingouvernable. Le président du MoDem était très en colère et a tenté surtout de persuader le Président qu'il faisait fausse route : il perdrait certainement dans une confrontation aussi brutale que douteuse, puisqu'il ne bénéficie plus de majorité à l'Assemblée.

    Et le dernier argument a pu faire pencher la balance : « La discussion entre les deux hommes, tendue, dure près de deux heures. Pour la première fois depuis 2017, François Bayrou menace de rompre, assuré que son parti suivra. "Je vous ai rejoint pour faire de grandes choses, pas de petites choses, lance-t-il à l’hôte de l’Élysée. Donc c’est très simple : si vous ne me nommez pas, je retire mes billes". ».

    Le retrait du MoDem, un peu moins d'une quarantaine de députés, serait un sérieux coup porté contre le bloc central et rendrait inopérant l'argument crucial que le "socle commun" (bloc central et LR) est appelé à gouverner car il est numériquement plus fort que la nouvelle farce populaire (NFP).

    La fin du premier entretien n'a donc pas été conclusif : « "Je réfléchis encore, et je vous tiens au courant", lui répond Emmanuel Macron. Le Béarnais s’éclipse par une porte dérobée, rue de l'Élysée, afin d’éviter les caméras postées devant le palais. Il a brûlé ses vaisseaux, se retrouvant dans la rue sans aucune certitude. ». Emmanuel Macron a alors sondé ses proches. Le nom de Roland Lescure est apparu, puis vite abandonné.


    Mais l'incertitude n'a pas duré trop longtemps : « Emmanuel Macron rappelle le centriste quinze minutes après son départ, et lui demande de revenir à l’Élysée à 11 heures 30. Sa décision est prise : François Bayrou occupera Matignon. "C’est un homme qui en impose", ironise-t-on au palais, laissant entendre que l’agrégé de lettres classiques aurait forcé la main du chef de l’État. "François a une force de persuasion et des convictions. Certains disent des 'coups de colère'…", commente Erwan Balanant, député (MoDem) du Finistère. Une lecture de cet incroyable retournement qui plaît aux amis du désormais Premier Ministre. En s’imposant au chef de l’État, François Bayrou a "affirmé d’emblée son autonomie, car il est désormais de notoriété publique que le Président n’en voulait pas", affirme un intime du maire de Pau. De quoi permettre au Premier Ministre de ne pas être seulement perçu comme l’homme du Président, dans l’opinion. ».
     

     
     


    Pour aller dans le même sens que cette narration, l'éditorialiste Alain Duhamel avait affirmé dès la veille que si François Bayrou n'était pas nommé cette fois-ci, il ferait un "carnage" ! On voit bien ici la grande différence avec Michel Barnier : ce dernier n'avait aucun contrôle sur le groupe LR à l'Assemblée, tenu d'une main de fer par Laurent Wauquiez. Au contraire, François Bayrou maîtrise totalement les positions du groupe MoDem à l'Assemblée.

    Cette histoire est très étonnante. L'indécision, l'hésitation ont été réelles et récurrentes. Ce flottement a été en fait perçu dès avril 2022 : que faire de son second mandat alors qu'il a été réélu sans véritable campagne électorale en pleine guerre en Ukraine et Présidence française de l'Europe ?

    Un Premier Ministre qui va imposer sa nomination au Président de la République, c'est une attitude peu gaullienne, mais elle n'est pas la première et a déjà été adoptée par ...un supposé gaulliste. En effet, Dominique de Villepin l'a fait aussi après l'échec du référendum sur le TCE en mai 2005, imposant sa nomination au Président Jacques Chirac qui avait pourtant choisi, selon "Le Monde", sa ministre Michèle Alliot-Marie.

    Bien avant sa nomination, François Bayrou avait confié à des journalistes son point de vue sur la formation du gouvernement : « Ces négociations de partis, où chacun a ses lignes rouges, c’est pour moi inimaginable, ça ne peut pas marcher. ». Le principe des lignes rouges, c'est la censure assurée, puisque les uns vont faire d'une mesure leur ligne rouge et les autres, la mesure contraire leur ligne rouge à eux. Cela enferme le gouvernement nécessairement dans une impossibilité conceptuelle.

    C'est pourquoi l'arrivée de François Bayrou est un signal très différent d'une nomination Lecornu. La gauche tend à tout amalgamer en prétendant que François Bayrou serait un "homme" du Président : comme je l'ai expliqué précédemment, il n'est pas un "bébé Macron" mais un "papa Macron". François Bayrou ne doit rien à Emmanuel Macron ; en revanche, la réciproque est fausse. De plus, François Bayrou a toujours exprimé ses désaccords le cas échéant devant le Président de la République. Librement.

    Parmi les personnes heureuses de la nomination de François Bayrou, l'écologiste Daniel Cohn-Bendit qui, dès le 10 août 2024, avait adressé une lettre ouverte au Président de la République pour cette nomination, en concluant : « Macron n’est plus à la barre et Bayrou sera un Premier Ministre libre. ». On se dit que Dany le Vert n'est pas rancunier quand on se souvient de la campagne des élections européennes de juin 2009 où François Bayrou l'avait particulièrement taclé le 4 juin 2009 dans un débat télévisé. Autre temps, autre mœurs.



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (14 décembre 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    La folle histoire de la nomination de François Bayrou.
    François Bayrou, le papa Macron !
    Le tour de François Bayrou !
    La polémique entre Maurice Druon et François Bayrou en juillet 2004.
    Le paysage politique français postcensure.
    Motion de sangsue : les conséquences économiques désastreuses de la censure.
    Philippe Vigier défend les Français face au renoncement national.
    Laurent Wauquiez met en garde contre l'instabilité institutionnelle.
    Emmanuel Macron face à ses choix.
    Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron le 5 décembre 2024 (texte intégral).
    La motion RNFP : Chassez le naturel, il revient au chaos !
    L'émotion de censure de Michel Barnier.
    La collusion des irresponsables.
    Gouvernement Barnier : les yeux du monde rivés sur la France.
    Risque de censure : Non, le RN n'est pas l'arbitre des élégances !
    Michel Barnier plaide pour la sobriété normative et procédurale !
    Discours du Premier Ministre Michel Barnier le 21 novembre 2024 à la Porte de Versailles (vidéo et texte intégral).
    Michel Barnier sur les pas de Pierre Mendès France.
    Discours du Premier Ministre Michel Barnier le 15 novembre 2024 à Angers (vidéo et texte intégral).
    PLF 2025 : la majorité de rejet !
    Michel Barnier : déjà deux mois !
    François Guizot à Matignon ?
    5 euros pour visiter Notre-Dame de Paris ?
    Achats dans la fonction publique : des économies à faire ?
    Doliprane : l'impéritie politique.
    Proche-Orient : l'incompréhension de Roger Karoutchi.
    Motion de censure : le quart d'heure de gloire d'Olivier Faure.
    Budget 2025 : l'impossible mission de Michel Barnier.
    Claude Malhuret : du vol des élections aux chefs d'escadrille...
    Les 3 lignes rouges de Marine Le Pen pour ne pas censurer le gouvernement Barnier.
    La quadrature du cercle de Michel Barnier.

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20241214-bayrou.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/la-folle-histoire-de-la-nomination-258176

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/12/14/article-sr-20241214-bayrou.html


     

  • François Bayrou, le papa Macron !

    « Je viens de milieux sociaux et de villages qui n’ont pas la chance d’être protégés, favorisés. Je trouve que notre devoir de citoyen, de père de famille, notre devoir de républicain, c’est que nous soyons obsédés pour rendre des chances à ceux qui n’en ont pas. C’est pour moi un devoir sacré. » (François Bayrou, le 13 décembre 2024 à Matignon).





     

     
     


    Ce texte ci-dessus est une formulation assez inattendue pour une allocution de prise de fonction à Matignon. L'origine modeste et paysanne de François Bayrou l'ont marqué au point qu'il voudrait donner sa chance à chaque Français qui le mérite et qui travaille. C'est aussi le dada du Président Emmanuel Macron formulé autrement, et finalement, c'est le rêve américain exprimé, fantasmé aux États-Unis : l'ouverture des possibles, le champ infini des possibles, la fin d'un fatalisme social, versus l'étiquetage, la réduction dans des cases dont on ne sortira pas de toute sa vie.

    Lorsque François Bayrou est arrivé à pied à Matignon, en traversant toute la cour pour atteindre le tapis rouge où l'attendait Michel Barnier, une étrange sérénité accompagnait ses pas. Un sourire, mais pas celui de l'arrivé, pas celui du consacré. C'est vrai, Matignon, il y pensait depuis 2007, et plus encore depuis 2017. Il pensait au sort injuste qui l'avait écarté du pouvoir à cause d'une affaire judiciaire dont il a été totalement blanchi... mais il lui a fallu attendre près de sept années.

    Sur son visage ne figurait pas ce sentiment de revanche, sociale (lorsqu'il a été ministre, c'était un peu difficile pour son entourage politique car, pour parodier Jacques Séguéla, si tu n'es pas ministre à 40 ans, c'est que tu as échoué dans la vie !), ni de revanche politique (Dieu sait comment il a été détesté, moqué, par des personnalités de droite, de gauche, par les journalistes qui, aujourd'hui, le plus sérieusement du monde, lui trouvent mille qualités). La marche d'un homme d'un certain âge, pas de celui qui part la conquête, mais de cette sérénité qui fait dire qu'il faisait déjà partie des meubles (c'est un peu vrai comme Haut Commissaire au plan), comme s'il avait toujours été Premier Ministre, qu'il ne s'en étonnait pas, comme c'était nécessairement inscrit dans l'histoire.

    Ce qui frappait aussi, dans ce même ordre d'idée, c'est qu'on ne sentait pas le vertige devant la fonction, comme beaucoup de ses prédécesseurs le montraient le premier jour dans cette cour. Il n'était pas intimidé par les responsabilités gigantesques qui l'attendent. Lui est trop sûr de son destin, et pourtant, il n'y a aussi qu'humilité, il sait qu'il a tout à perdre, pas grand-chose à gagner, avec peu de chance de réussite. Mais à son âge, c'est le moment ou jamais de donner le plus de lui-même. De montrer à quel point la France a besoin de l'art du compromis, a besoin de la méthode Bayrou. Fini de donner des leçons, le voici à l'œuvre, avec la difficile mission d'agir.


    Et pas question de faire du surplace, comme on le lui a souvent reproché à l'Éducation nationale. Pas question de ne pas s'occuper de tous les sujets importants, malgré l'absence de majorité : « Devant une situation d’une telle gravité, ma ligne de conduite sera de ne rien cacher, de ne rien négliger et de ne rien laisser de côté. (…) Je pense que nous avons le devoir, dans un moment aussi grave pour le pays, pour l’Europe et devant tous les risques de la planète, d’affronter les yeux ouverts, sans timidité, la situation qui est héritée de décennies entières. ».

    François Bayrou a donc trois priorités : la dette avec le budget 2025 à refaire (le thème de la dette est ancien chez François Bayrou ; dès 2002, il en parlait, comme il parlait de la réindustrialisation), l'école qui est essentielle pour structurer une nation, et ce qu'on pourrait dire l'ascension sociale ou l'égalité des chances. "Ceux qui ne sont rien" doivent pouvoir être hissés avec ceux qui ont réussi, les "premiers de cordée".

    Très sagement, François Bayrou ne s'est pas (encore ?) engagé à ne pas recourir à l'article 49 alinéa 3 de la Constitution, alors que les socialistes voudraient faire chanter le gouvernement en monnayant leur non-censure avec l'engagement de ne pas recourir à cet article de la Constitution qui engage la responsabilité du gouvernement sur un texte de loi. C'est sage car justement, cet outil constitutionnel, inspiré par les propositions continues de Jean Jaurès, Léon Blum et Guy Mollet, avait pour but de permettre au gouvernement de gouverner en l'absence de majorité à l'Assemblée, le cas aujourd'hui précisément. Et je ne vois pas comment les lois de finances pourraient être adoptées sans cet outil avec une Assemblée aussi émiettée.

    Dès les premiers mots de son allocution, François Bayrou a rappelé combien il connaissait Michel Barnier, il avait travaillé avec lui à la rénovation de la vie politique sous l'appellation des Douze Rénovateurs, au printemps 1989, avec François Fillon, Philippe Séguin, Dominique Baudis, Bernard Bosson, Michel Noir, Philippe de Villiers, Charles Millon, etc.


     

     
     


    Sur le plan historique, il a rappelé une coïncidence. Ce vendredi 13 est un jour de chance pour François Bayrou. C'est l'anniversaire de la naissance du roi Henri IV, "son" roi, celui qu'il a étudié, sur qui il a écrit des ouvrages, celui qui a voulu réconcilier les Français, celui qui a « fondé sa rencontre avec la France dans des temps aussi difficiles, plus difficiles que ceux que nous vivons aujourd’hui. (…) Si je peux, à mon tour, j’essaierai de servir cette réconciliation nécessaire et je pense que c’est là le seul chemin possible vers le succès. ». Henri IV, pour qui Paris vaut bien une messe (et qui a démarré la branche des Bourbons), est en effet né le 13 décembre 1553, pas un vendredi mais un dimanche, mais à Pau, dont François Bayrou est le maire depuis avril 2014. Du reste, à propos de messe, il était présent à la cérémonie de réouverture de Notre-Dame de Paris, le 7 décembre 2024, et il était joyeux, tout excité à l'idée de devenir Premier Ministre.

    Il aurait pu aussi rappeler une autre date, le trentième anniversaire de la mort de l'illustre Antoine Pinay, le 13 décembre 1994 à presque 103 ans. Antoine Pinay est devenu Président du Conseil assez âgé (mais plus jeune que François Bayrou : à 60 ans). Antoine Pinay a la particularité d'avoir sauvé le franc et les finances publiques. Raymond Poincaré, Antoine Pinay, Raymond Barre, Pierre Bérégovoy... voudrait-il, François Bayrou, compléter la liste avec son nom ?

    Restons en histoire. On a parlé de la situation historique, catastrophique, d'avoir en France quatre Premiers Ministres dans la seule année civile 2024 : Élisabeth Borne, Gabriel Attal, Michel Barnier et François Bayrou. Si Gabriel Attal a été installé par Emmanuel Macron et que la responsabilité de la démission du même provient aussi du Président de la République qui a décidé la dissolution de l'Assemblée, le renversement du gouvernement Barnier n'est pas du fait d'Emmanuel Macron mais de la censure votée par la collusion d'irresponsables, de l'extrême droite, de l'extrême gauche et de la gauche prétendument gouvernementale.

    En prenant sur une seule année civile, c'est évidemment biaiser, car Élisabeth Borne a supervisé le gouvernement sur trois années civiles (de 2022 à 2024) et finalement, la plupart des Premiers Ministres entre 2017 et 2024 ont eu une longévité tout à fait ordinaire d'un Premier Ministre sous la Cinquième République. Édouard Philippe est même classé au septième rang des Premiers Ministres les plus longs, bien au-delà de Michel Rocard, Jacques Chaban-Delmas, Édouard Balladur, etc.

    Si on veut regarder en arrière les exemples où quatre chefs de gouvernement (différents) se sont succédé dans la même année civile, eh bien, on dira que c'était rare sous la Quatrième République. Il n'y a eu que l'année 1946 qui a connu cela, une année de crise politique majeure qui a commencé par la démission de De Gaulle. En 1946, De Gaulle, donc, jusqu'au 20 janvier 1946, puis Félix Gouin du 26 janvier au 24 juin 1946, puis Georges Bidault du 24 juin au 28 novembre 1946, enfin Léon Blum à partir du 16 décembre 1946. On remonterait moins loin, en 1948, si on prenait quatre gouvernements qui s'y sont succédé, mais avec seulement trois Présidents du Conseil différents.

    Ensuite, il faut remonter à avant la guerre, sous la Troisième République, où c'était très courant. Il y a quatre-vingt-dix ans. En 1934 (année particulière de crises et d'émeutes) : Camille Chautemps, Édouard Daladier, Gaston Doumergue et Pierre-Étienne Flandin. En 1933 : Joseph Paul-Boncour, Édouard Daladier, Albert Sarraut et Camille Chautemps. En 1932 : Pierre Laval, André Tardieu, Édouard Herriot et Joseph Paul-Boncour. En 1930, on est dans la même situation qu'en 1948 : quatre gouvernements et trois chefs de gouvernement.


    Donc, oui, depuis quatre-vingt-dix ans, il ne s'est passé que deux années civiles avec autant d'instabilité gouvernementale. À qui la faute ? D'abord bien sûr au Président de la République qui aurait dû garder Élisabeth Borne jusqu'aux élections européennes de juin 2024, ce qui, après un échec désastreux, l'aurait amené à nommer Gabriel Attal juste après, au lieu de dissoudre. Mais la responsabilité est partagée car il y a aussi le peuple qui a offert à la France une Assemblée composée de trois blocs incompatibles de même force, sans majorité, et enfin, pour la censure du 4 décembre 2024, la responsabilité est entièrement portée par les députés censeurs. Notons d'ailleurs que l'adoption de la motion de censure a créé un choc psychologique et un malaise de sidération dans les groupes d'opposition comme la dissolution avait créé un malaise dans les groupes du socle commun.

     

     
     


    J'en viens à Michel Houellebecq. Dans son roman "Soumission", sorti chez Flammarion le 7 janvier 2015, le jour des attentats de "Charlie Hebdo" (il y a presque dix ans), l'auteur a proposé une anticipation politique originale : en 2022, un candidat énarque issu d'un parti musulman est élu Président de la République au second tour dans un duel face à l'extrême droite. François Bayrou est alors choisi pour Matignon à la tête d'un gouvernement rassemblant droite, centre et gauche gouvernementale. Le livre n'est pas très flatteur pour François Bayrou mais ce dernier peut se vanter de devenir un personnage de roman, qui plus est, pas très éloigné de la réalité, à deux ans près.

    Au fait, pourquoi mon titre ? Jean-Louis Bourlanges, ancien président de la commission des affaires étrangères de l'Assemblée et membre du MoDem, était l'invité de LCI le soir du 13 décembre 2024. Il a expliqué que jusqu'à maintenant, jusqu'à l'été 2024, tous les Premiers Ministres nommés par Emmanuel Macron étaient des "bébés Macron", c'est-à-dire qui n'avaient pas d'existence politique propre sans Emmanuel Macron. Or, avec la configuration impossible de l'Assemblée d'aujourd'hui, Emmanuel Macron a beaucoup hésité, il aurait pu nommer encore un "bébé Macron", comme Roland Lescure ou Sébastien Lecornu.

    Finalement, avec François Bayrou, il a nommé un "papa Macron", et c'est une grande différence : François Bayrou ne doit rien à Emmanuel Macron alors qu'Emmanuel Macron doit tout à François Bayrou, à commencer par son soutien décisif à l'élection présidentielle de 2017. Ceux qui, à gauche, pensent qu'avec François Bayrou, c'est continuer la politique d'Emmanuel Macron, sont dans le procès d'intention et dans l'erreur de discernement, c'est mal connaître François Bayrou dont la grande expérience d'élu local (député, président de conseil général, maire de grande ville) lui permet de "sentir" le pouls des Français, de les écouter, au contraire du Président de la République enfermé dans sa tour d'ivoire avec ses collaborateurs technocrates et ses idées originales.

    Les prochaines étapes, ce sont la désignation de son gouvernement qu'il voudrait surtout composé de grands politiques, et la déclaration de politique générale. Ce sera à ce moment-là, probablement après le Nouvel An, que les députés pourront être fixés sur les intentions du nouveau Premier Ministre et de sa volonté d'aborder les réformes avec un large consensus.



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (13 décembre 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    François Bayrou, le papa Macron !
    Le tour de François Bayrou !
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    Motion de sangsue : les conséquences économiques désastreuses de la censure.
    Philippe Vigier défend les Français face au renoncement national.
    Laurent Wauquiez met en garde contre l'instabilité institutionnelle.
    Emmanuel Macron face à ses choix.
    Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron le 5 décembre 2024 (texte intégral).
    La motion RNFP : Chassez le naturel, il revient au chaos !
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    Discours du Premier Ministre Michel Barnier le 21 novembre 2024 à la Porte de Versailles (vidéo et texte intégral).
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    Achats dans la fonction publique : des économies à faire ?
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    Motion de censure : le quart d'heure de gloire d'Olivier Faure.
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    Claude Malhuret : du vol des élections aux chefs d'escadrille...
    Les 3 lignes rouges de Marine Le Pen pour ne pas censurer le gouvernement Barnier.
    La quadrature du cercle de Michel Barnier.







    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20241213-bayrou-matignon.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/francois-bayrou-le-papa-macron-258148

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/12/13/article-sr-20241213-bayrou-matignon.html


     

  • Laurent Wauquiez met en garde contre l'instabilité institutionnelle

    « Je dis aux Français qui nous regardent ou qui nous écoutent que la censure aurait de lourdes conséquences. (…) Chers collègues du nouveau front populaire et du Rassemblement national, si vous votez la censure, vous aurez fait entre vous un trait d’union qui s’appelle le renoncement national. Vous êtes le renoncement national ! Pour nous, les députés démocrates, lorsque l’essentiel est en jeu, peu importe les manœuvres politiciennes, peu importe les marchés financiers : seul compte l’avenir du pays. » (Philippe Vigier, le 4 décembre 2024 dans l'hémicycle).



     

     
     


    On l'oublie un peu trop vite car les médias se penchent surtout sur les personnes et le "jeu", qui revient un peu trop souvent, de qui sera Premier Ministre, quel sera le nouveau gouvernement. Mais à la différence du 5 octobre 1962, la motion de censure qui a été adoptée le mercredi 4 décembre 2024 par la collusion de l'extrême droite et de l'extrême gauche n'a pas eu seulement pour effet de renverser le gouvernement : c'est la première fois dans l'histoire politique de la France que cette motion de censure faisait suite à l'application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution, ce qui signifie aussi le rejet du texte associé, qui, ici, était le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 et, par voie aussi de conséquence, en l'absence de gouvernement, le projet de loi de finances pour 2025. Or, le rejet de ces textes budgétaires est une catastrophe économique et sociale pour les Français.

    Ce qui est rigoureusement stupide, c'est que, aux yeux du RN comme de cette gauche irresponsable et cynique, la loi de finances pour 2024, adoptée l'an dernier sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était beaucoup plus antisociale etc. et pourtant, avec la censure, c'est bien ce budget 2024 qui sera reconduit automatiquement pour l'année 2025 (si la loi spéciale est adoptée avant le 19 décembre 2024). C'est cela qui est absolument grotesque et paradoxal et montre que le RN ainsi que la nouvelle farce populaire (NFP) ne se soucient pas du tout du bien-être des Français, car, je le répète, beaucoup de mesures en faveur des Français étaient consignées dans les projets de lois de finances rejetés.

    Ce rappel préventif, avant le vote de la motion de censure, par certains députés et certains ministres, n'aura pas suffi à faire renoncer à ce chaos voulu par les extrémismes auquel le parti socialiste a accepté en toute conscience (et inconscience de leur rôle de parti gouvernemental) de s'associer.

    D'ailleurs, les premiers concernés par cet impact économique, ce sont les agriculteurs. Ceux-ci ont muré les permanences de certains députés, notamment François Hollande, qui avaient voté ou allaient voter la censure. Bien que fréquemment protestataires, les agriculteurs ont bien compris que l'instabilité gouvernementale ne les aidait pas. Ils ont compris que les mesures dûment négociées avec le gouvernement ne se retrouveraient pas rapidement dans leur concrétisation avec cette motion de censure et que la France serait en situation politiquement si faible qu'elle ne pourrait pas efficacement s'opposer à l'accord commercial entre l'Union Européenne et le Mercosur. Protestataires, mais favorables au maintien du gouvernement, quel qu'il soit ! Car sans gouvernement, aucune avancée possible. Plus généralement, les Français ne sont pas dupes des postures politiciennes motivées par les seuls intérêts partisans, sans s'occuper de la réalité quotidienne des Français.

    Trois interventions en séance publique à l'Assemblée Nationale, entre autres, ont bien énuméré les catastrophes à venir à la suite de l'adoption de la motion de censure. Elles proviennent de la séance du mercredi 4 décembre 2024, l'une est une "question" d'un député du MoDem, la seconde la réponse d'un ministre à cette "question", et enfin, la troisième est l'intervention remarquée d'un chef de groupe au cours de l'examen des motions de censure. Rappelons que cette séance publique est la dernière de l'Assemblée Nationale puisque les travaux en séances publiques dans les deux chambres du Parlement sont interrompus tant qu'un nouveau gouvernement n'est pas nommé. En revanche, les missions et commissions parlementaires continuent leurs travaux.


    Le premier intervenant que je veux évoquer est Philippe Vigier (66 ans), député MoDem, ancien Ministre délégué chargé des Outre-mer du 20 juillet 2023 au 11 janvier 2024 dans le gouvernement d'Élisabeth Borne. Biologiste et docteur en pharmacie, toujours bien réélu député d'Eure-et-Loir (la quatrième circonscription, celle de Châteaudun) depuis juin 2007, il a été président du groupe UDI d'avril 2014 à juin 2017 puis du groupe Libertés et Territoires d'octobre 2018 à septembre 2020, et il a tenté de conquérir la présidence du conseil régional du Centre-Val de Loire en décembre 2015, sans succès à cause d'une triangulaire avec la liste FN.

     
     


    Son intervention dans la petite séance de questions au gouvernement, l'ultime pour Michel Barnier, n'était pas vraiment une question (comme souvent quand les députés font de la politique). Elle avait surtout pour but de lister les conséquences désastreuses d'une censure à court terme sur la vie concrète des Français, et de montrer que la collusion des irresponsables et des cyniques ne se préoccupait pas de leur vie quotidienne.

    Ainsi, Philippe Vigier y est allé clairement : « Voter la censure, c’est renoncer à 7 milliards d’euros supplémentaires pour les hôpitaux et à un meilleur accès aux soins partout. Voter la censure, c’est renoncer à 2 milliards d’euros pour les EHPAD et à la revalorisation des soignants. Voter la censure, c’est renoncer à de nouveaux moyens de lutte contre la fraude sociale. Vous prétendez y être attachés, mais c’est faux. Voter la censure, c’est renoncer à l’accès direct et sans ordonnance au dispositif Mon soutien psy alors que la santé mentale est une priorité. Voter la censure, c’est renoncer à la réforme de la taxe soda, le meilleur outil de prévention du diabète et des maladies cardiovasculaires chez les jeunes. Voter la censure, c’est renoncer au cumul emploi-retraite pour les médecins dont on a tant besoin dans les déserts médicaux. Voter la censure, c’est renoncer à la revalorisation des petites retraites agricoles. Voter la censure, c’est renoncer au déploiement des soins palliatifs dans les départements où il n’y en a pas. ». Évidemment, les députés populistes ont réagi avec leur mauvaise humeur à cette intervention certes polémique mais qui dit pourtant la vérité.

     

     
     


    Pour la forme, il a formulé quand même sa question au Premier Ministre : « Monsieur le Premier Ministre, comment convaincre nos collègues de renoncer à l’irresponsabilité tant qu’il est encore temps ? ».

    Refusant d'intervenir à ce moment des questions, préférant se réserver pour l'examen des motions de censure, Michel Barnier a laissé son Ministre du Budget et des Comptes publics Laurent Saint-Martin répondre, avec la même tonalité : « Merci pour cette intervention qui liste nombre d’éléments dont nos concitoyens seraient privés si la censure était adoptée dans quelques heures. ».

    Et d'embrayer sur les agriculteurs, puis d'autres catégories de travailleurs actifs : « Qui a dit : "Pour que le monde agricole obtienne les promesses qui lui ont été faites, il a besoin d’un budget" ? Non, c’est le président de la FNSEA ! Qui a dit : "Ce qu’on attend du politique est qu’il réduise l’incertitude. Avec la censure, c’est le noir complet" ? Un représentant de la Confédération des petites et moyennes entreprises. Qui a alerté : "Attention ! 40 000 emplois vont être supprimés avant la fin de l’année" ? Le président de la Fédération française du bâtiment. ».

     
     


    Par ailleurs, en raison de l'inflation et de l'effet des seuils, le projet de loi de finances pour 2025 proposait de relever ceux de 2024 en les indexant à l'inflation. Avec le rejet du texte, ce sont les seuils de 2024 qui sont gardés : « Je vous épargne, mesdames et messieurs les députés du Rassemblement national, le langage fleuri tenu ce matin par un de vos électeurs qui serait pénalisé par votre action. Les impôts augmenteraient si la censure était votée. Cessez de dire que c’est un mensonge ! En cas de censure, vous le savez, 400 000 Français deviendront imposables et 18 millions verront leurs impôts augmenter. Mesdames et messieurs les députés, réfléchissez bien ! Si vous ne le faites pas pour le gouvernement, faites-le pour ceux dont je viens de parler, faites-le pour les représentants des PME, faites-le pour les agriculteurs, faites-le pour les Français ! ». D'après les estimations, ce seraient 3 milliards d'euros supplémentaires qui s'imposeraient aux Français sur leurs revenus.

    Un peu plus tard dans l'après-midi de ce mercredi 4 décembre 2024, pour expliquer pourquoi il ne voterait pas la censure du gouvernement Barnier, le président du groupe LR à l'Assemblée Laurent Wauquiez a rappelé, à sa manière, les conséquences économiques et sociales désastreuses que provoquerait la censure : « Est-ce que notre pays peut encore se payer le luxe de semaines d’instabilité gouvernementale, alors que tout est à rebâtir ? Sûrement pas ! Vous avez beau éructer, nous voilà tous face à nos responsabilités. Évidemment, chacun fera son choix en son âme et conscience et ce choix, il faudra le défendre face aux Français. Il y a une chose qu’on ne peut pas accepter ici. On ne peut pas accepter que vous expliquiez, comme vous l’avez fait ces derniers jours, que la motion de censure ce n’est pas grave. On ne peut pas expliquer avec la légèreté qui est la vôtre que la censure n’aura pas de conséquences. On ne peut pas mentir aux Français, en disant qu’il n’y aura pas de conséquences. Il y aura des conséquences, qui seront payées par les Français et ceux qui se livrent au jeu minable d’aujourd’hui devront leur rendre des comptes. ».
     

     
     


    Lui aussi avait sa liste des conséquences néfastes, en commençant par les contribuables les plus précaires : « La censure, ce que vous appelez "bullshit", ce sera l’augmentation de l’impôt sur le revenu pour 18 millions de Français. Ils paieront ce prétendu "bullshit" que les députés du RN balaient d’un revers de main ! Ce sont 400 000 travailleurs qui deviendront imposables, mais qui sont le cadet des soucis des députés du groupe Rassemblement national ! Voilà la manière dont ils défendent la France qui travaille ! Une fois encore, madame Le Pen, ce sont les Français qui paieront les conséquences de votre légèreté et de votre irresponsabilité ! ».

    Et de poursuivre : « La censure, c’est la fin des aides d’urgence aux agriculteurs, la fin de tout ce que vous avez cherché à construire ces dernières semaines, madame Genevard, c’est la fin des allègements de charges, la fin des exonérations de taxes et la fin de la revalorisation de leurs retraites, eux qui travaillent dur mais touchent des pensions misérables. Il est facile d’aller sur les ronds-points pour prétendre flatter les agriculteurs, puis de les abandonner une fois dans l’hémicycle ! La censure, c’est la fin du plan d’urgence pour sauver les maisons de retraite de la faillite. La censure, c’est l’abandon du cumul emploi-retraite, qui permettrait de lutter contre la désertification médicale. La censure, et je vois bien que cela vous gêne, c’est renoncer à l’augmentation des effectifs de gendarmes, de policiers et de magistrats, si indispensable quand la sécurité doit être notre priorité. La censure, c’est porter un coup d’arrêt à la loi de programmation militaire, alors même que l’Europe est menacée à ses frontières. La censure, c’est la dette qui va continuer à filer, alors même que la France, avec le désordre que vous avez conjointement créé, est désormais moins crédible que la Grèce sur les marchés financiers. On lui impose 1 point de taux d’intérêt supplémentaire et ce sont les Français qui paieront l’addition. C’est 30 milliards d’euros de dette supplémentaire et d’intérêts dans les années qui viennent, c’est trois fois le budget de la justice ! ».

    Sa liste s'allongeait : « La censure, visiblement ça vous gêne encore, c’est l’aggravation de la crise immobilière. C’est la fin du prêt à taux zéro, au moment même où le marché de l’immobilier s’effondre, ce qui met en péril nos artisans et nos entreprises. La censure, c’est l’incertitude économique pour tous ceux qui prennent des risques. C’est l’incertitude pour les entreprises, c’est l’incertitude pour les PME, c’est l’incertitude pour les commerçants, c’est l’incertitude pour les artisans, c’est l’incertitude pour les professions libérales. Vous n’en avez même pas dit un mot, madame Le Pen ! Cette incertitude, c’est celle des Français qui vont hésiter à consommer demain. Je prends d’ailleurs date aujourd’hui : par votre irresponsabilité, vous enfoncerez la France dans une crise économique et financière et vous en porterez la responsabilité aux yeux des Français, qui se souviendront de ceux qui ont allumé la mèche. Un pays a besoin de stabilité. Il a besoin de stabilité, il a besoin d’un budget, il a besoin d’un gouvernement. ».

    L'intervention de Laurent Wauquiez était d'une certaine hauteur de vue, car il a voulu ramener l'enjeu sur l'intérêt général de la France. Il s'est notamment beaucoup inquiété de la perte de stabilité institutionnelle avec la censure : « Rien n’est pire, pour une économie, que l’incertitude. La censure, et c’est sans doute le plus grave, c’est faire perdre à notre pays son dernier atout. La France pouvait au moins compter sur la stabilité de ses institutions, mais vous vous délectez d’une plongée dans l’instabilité. Voilà l’image que vous donnez. La stabilité de nos institutions, c’est ce qui nous a toujours protégés, si bien que même dans les crises les plus graves, notre pays demeurait gouvernable. Alors que nous dansons au-dessus d’un volcan, vous nous proposez de faire un pas de plus en direction de l’instabilité institutionnelle qui a accéléré l’agonie de la IVe République. Vous vous apprêtez à ouvrir la boîte de Pandore de l’instabilité gouvernementale. Vous réveillez les vieux démons qui viennent de l’extrême gauche de la politique française, ceux de l’impuissance, de l’instabilité ministérielle et de l’incertitude économique. Si encore vous aviez des solutions ! Vous proposez le blocage sans solutions. ».

    Pris au vif par les piques de Marine Le Pen, Laurent Wauquiez n'a pas manqué de condamner la posture de celle-ci : « Que vous le vouliez ou non, il ne peut pas y avoir de nouvelles élections législatives avant l’été : c’est ça, la vérité. Pendant que se jouait cette comédie d’une insoutenable légèreté, qu’avons-nous entendu ? "Vous ne nous avez pas traités avec suffisamment d’égards", voilà ce que nous avons entendu. Qu’est-ce que cela veut dire ? Que vous vous apprêtez à jouer avec le destin de la France, que vous vous apprêtez à faire tomber un gouvernement parce qu’on ne vous aurait pas traités avec suffisamment d’égards ? Est-ce vraiment cela, être à la hauteur des enjeux ? Est-ce bien l’image que vous voulez offrir ? ».

    Et de tacler tous les démagogues : « Je n’oublie rien de la responsabilité de la France insoumise. Je n’oublie rien du danger que représentent ceux qui veulent autoriser l’apologie du terrorisme. Je n’oublie rien du danger que représentent ceux qui entretiennent une complaisance détestable avec l’antisémitisme et je n’oublie rien du danger de ceux qui ont trahi Jaurès et Clemenceau. ».

    La responsabilité du RN a été fermement pointée du doigt (même si, à mon sens, Laurent Wauquiez a oublié la responsabilité du PS dans cette affaire) : « Toutefois, la réalité c’est que sans vos voix, madame Le Pen, la France insoumise ne pourrait rien. La réalité, madame Le Pen, c’est que vous vous apprêtez à voter pour ceux qui traitent les policiers d’assassins. La réalité, madame Le Pen, c’est que vous vous apprêtez à voter pour ceux qui traitent les terroristes de résistants. Honnêtement, la dignité devrait vous imposer un autre comportement. Quand on lit le texte de la motion de censure, on comprend toute l’hypocrisie de son soutien : il dénonce les plus viles obsessions de l’extrême droite et vous le voteriez ? Voteriez-vous un texte qui explique qu’il ne faut pas revenir sur l’aide médicale d’État ? Voteriez-vous un texte qui explique qu’il ne faut pas de loi plus ferme au sujet de l’immigration ? Voilà, madame Le Pen, ce que vous allez faire, voilà à quelles incohérences en sont réduits, dans cet hémicycle, les semeurs de chaos. ».

     

     
     


    Il faut vraiment noter que toute l'intervention de Laurent Wauquiez relevait d'une certaine déception à l'égard du RN, comme s'il avait pu compter sur ce parti extrémiste pour servir l'intérêt national (à l'instar d'un autre qui s'est complètement fourvoyé, Éric Ciotti) : « Dans un parcours politique, il y a toujours un moment de vérité. Il y a des moments où on ne peut pas duper, esquiver ou feindre. Des moments où il faut choisir entre un intérêt personnel, madame Le Pen, et l’intérêt du pays. Des moments où il faut choisir entre son intérêt partisan et le sens de l’État. Madame Le Pen, je n’ai jamais été de ceux qui vous diabolisaient. Je n’ai jamais été de ceux qui vous donnaient des leçons de morale. Je vous le dis donc avec d’autant plus de force aujourd’hui : les Français jugeront sévèrement le choix que vous vous apprêtez à faire. Les Français jugeront sévèrement ceux qui prétendent redresser le pays et choisissent le désordre. Les Français jugeront sévèrement ceux qui voulaient se montrer responsables, mais font finalement le choix de l’irresponsabilité. Les Français jugeront sévèrement ceux qui prétendaient incarner l’ordre et choisissent aujourd’hui le chaos. Emmanuel Macron porte peut-être seul la responsabilité de la dissolution mais vous porterez, avec la France insoumise, la responsabilité de la censure qui plongera le pays dans l’instabilité. Je vous le dis donc une dernière fois : ressaisissez-vous ! Ressaisissez-vous, il en est encore temps ! Ressaisissez-vous et changez votre choix ! Ressaisissez-vous, parce que sinon, nous nous souviendrons longtemps de ce jour désolant. Nous nous souviendrons longtemps, madame Le Pen, qu’une alliance des contraires, portée par le cynisme, a plongé notre pays dans l’instabilité. Ressaisissez-vous, parce qu’il est toujours temps de faire le choix de la France ! ».

    Au final, malgré l'avertissement toutes ces conséquences connues par les censeurs irresponsables et cyniques, sourds à l'intérêt populaire et aux arguments rationnels de leurs collègues, la motion de censure contre le gouvernement de Michel Barnier a été adoptée par une majorité de l'Assemblée, entraînant le rejet des textes budgétaires, la démission du gouvernement, une nouvelle période d'incertitude à la fois institutionnelle, politique, sociale, économique et financière. Les Français, dans leur bon sens, seront très sévères envers ces oiseaux de malheur qui ne cherchent qu'à détruire la France, diviser le peuple et semer la haine et la désolation dans tout le pays.



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (07 décembre 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Motion de sangsue : les conséquences économiques désastreuses de la censure.
    Philippe Vigier.
    Laurent Wauquiez.
    Emmanuel Macron face à ses choix.
    Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron le 5 décembre 2024 (texte intégral).
    La motion RNFP : Chassez le naturel, il revient au chaos !
    L'émotion de censure de Michel Barnier.
    La collusion des irresponsables.
    Gouvernement Barnier : les yeux du monde rivés sur la France.
    Risque de censure : Non, le RN n'est pas l'arbitre des élégances !
    Michel Barnier plaide pour la sobriété normative et procédurale !
    Discours du Premier Ministre Michel Barnier le 21 novembre 2024 à la Porte de Versailles (vidéo et texte intégral).
    Michel Barnier sur les pas de Pierre Mendès France.
    Discours du Premier Ministre Michel Barnier le 15 novembre 2024 à Angers (vidéo et texte intégral).
    PLF 2025 : la majorité de rejet !
    Michel Barnier : déjà deux mois !
    François Guizot à Matignon ?
    5 euros pour visiter Notre-Dame de Paris ?
    Achats dans la fonction publique : des économies à faire ?
    Doliprane : l'impéritie politique.
    Proche-Orient : l'incompréhension de Roger Karoutchi.
    Motion de censure : le quart d'heure de gloire d'Olivier Faure.
    Budget 2025 : l'impossible mission de Michel Barnier.
    Claude Malhuret : du vol des élections aux chefs d'escadrille...
    Les 3 lignes rouges de Marine Le Pen pour ne pas censurer le gouvernement Barnier.
    La quadrature du cercle de Michel Barnier.
     

     
     


    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20241204-wauquiez.html

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/12/09/article-sr-20241204-wauquiez.html



     

  • Philippe Vigier défend les Français face au renoncement national

    « Je dis aux Français qui nous regardent ou qui nous écoutent que la censure aurait de lourdes conséquences. (…) Chers collègues du nouveau front populaire et du Rassemblement national, si vous votez la censure, vous aurez fait entre vous un trait d’union qui s’appelle le renoncement national. Vous êtes le renoncement national ! Pour nous, les députés démocrates, lorsque l’essentiel est en jeu, peu importe les manœuvres politiciennes, peu importe les marchés financiers : seul compte l’avenir du pays. » (Philippe Vigier, le 4 décembre 2024 dans l'hémicycle).



     

     
     


    On l'oublie un peu trop vite car les médias se penchent surtout sur les personnes et le "jeu", qui revient un peu trop souvent, de qui sera Premier Ministre, quel sera le nouveau gouvernement. Mais à la différence du 5 octobre 1962, la motion de censure qui a été adoptée le mercredi 4 décembre 2024 par la collusion de l'extrême droite et de l'extrême gauche n'a pas eu seulement pour effet de renverser le gouvernement : c'est la première fois dans l'histoire politique de la France que cette motion de censure faisait suite à l'application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution, ce qui signifie aussi le rejet du texte associé, qui, ici, était le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 et, par voie aussi de conséquence, en l'absence de gouvernement, le projet de loi de finances pour 2025. Or, le rejet de ces textes budgétaires est une catastrophe économique et sociale pour les Français.

    Ce qui est rigoureusement stupide, c'est que, aux yeux du RN comme de cette gauche irresponsable et cynique, la loi de finances pour 2024, adoptée l'an dernier sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était beaucoup plus antisociale etc. et pourtant, avec la censure, c'est bien ce budget 2024 qui sera reconduit automatiquement pour l'année 2025 (si la loi spéciale est adoptée avant le 19 décembre 2024). C'est cela qui est absolument grotesque et paradoxal et montre que le RN ainsi que la nouvelle farce populaire (NFP) ne se soucient pas du tout du bien-être des Français, car, je le répète, beaucoup de mesures en faveur des Français étaient consignées dans les projets de lois de finances rejetés.

    Ce rappel préventif, avant le vote de la motion de censure, par certains députés et certains ministres, n'aura pas suffi à faire renoncer à ce chaos voulu par les extrémismes auquel le parti socialiste a accepté en toute conscience (et inconscience de leur rôle de parti gouvernemental) de s'associer.

    D'ailleurs, les premiers concernés par cet impact économique, ce sont les agriculteurs. Ceux-ci ont muré les permanences de certains députés, notamment François Hollande, qui avaient voté ou allaient voter la censure. Bien que fréquemment protestataires, les agriculteurs ont bien compris que l'instabilité gouvernementale ne les aidait pas. Ils ont compris que les mesures dûment négociées avec le gouvernement ne se retrouveraient pas rapidement dans leur concrétisation avec cette motion de censure et que la France serait en situation politiquement si faible qu'elle ne pourrait pas efficacement s'opposer à l'accord commercial entre l'Union Européenne et le Mercosur. Protestataires, mais favorables au maintien du gouvernement, quel qu'il soit ! Car sans gouvernement, aucune avancée possible. Plus généralement, les Français ne sont pas dupes des postures politiciennes motivées par les seuls intérêts partisans, sans s'occuper de la réalité quotidienne des Français.

    Trois interventions en séance publique à l'Assemblée Nationale, entre autres, ont bien énuméré les catastrophes à venir à la suite de l'adoption de la motion de censure. Elles proviennent de la séance du mercredi 4 décembre 2024, l'une est une "question" d'un député du MoDem, la seconde la réponse d'un ministre à cette "question", et enfin, la troisième est l'intervention remarquée d'un chef de groupe au cours de l'examen des motions de censure. Rappelons que cette séance publique est la dernière de l'Assemblée Nationale puisque les travaux en séances publiques dans les deux chambres du Parlement sont interrompus tant qu'un nouveau gouvernement n'est pas nommé. En revanche, les missions et commissions parlementaires continuent leurs travaux.


    Le premier intervenant que je veux évoquer est Philippe Vigier (66 ans), député MoDem, ancien Ministre délégué chargé des Outre-mer du 20 juillet 2023 au 11 janvier 2024 dans le gouvernement d'Élisabeth Borne. Biologiste et docteur en pharmacie, toujours bien réélu député d'Eure-et-Loir (la quatrième circonscription, celle de Châteaudun) depuis juin 2007, il a été président du groupe UDI d'avril 2014 à juin 2017 puis du groupe Libertés et Territoires d'octobre 2018 à septembre 2020, et il a tenté de conquérir la présidence du conseil régional du Centre-Val de Loire en décembre 2015, sans succès à cause d'une triangulaire avec la liste FN.
     

     
     


    Son intervention dans la petite séance de questions au gouvernement, l'ultime pour Michel Barnier, n'était pas vraiment une question (comme souvent quand les députés font de la politique). Elle avait surtout pour but de lister les conséquences désastreuses d'une censure à court terme sur la vie concrète des Français, et de montrer que la collusion des irresponsables et des cyniques ne se préoccupait pas de leur vie quotidienne.

    Ainsi, Philippe Vigier y est allé clairement : « Voter la censure, c’est renoncer à 7 milliards d’euros supplémentaires pour les hôpitaux et à un meilleur accès aux soins partout. Voter la censure, c’est renoncer à 2 milliards d’euros pour les EHPAD et à la revalorisation des soignants. Voter la censure, c’est renoncer à de nouveaux moyens de lutte contre la fraude sociale. Vous prétendez y être attachés, mais c’est faux. Voter la censure, c’est renoncer à l’accès direct et sans ordonnance au dispositif Mon soutien psy alors que la santé mentale est une priorité. Voter la censure, c’est renoncer à la réforme de la taxe soda, le meilleur outil de prévention du diabète et des maladies cardiovasculaires chez les jeunes. Voter la censure, c’est renoncer au cumul emploi-retraite pour les médecins dont on a tant besoin dans les déserts médicaux. Voter la censure, c’est renoncer à la revalorisation des petites retraites agricoles. Voter la censure, c’est renoncer au déploiement des soins palliatifs dans les départements où il n’y en a pas. ». Évidemment, les députés populistes ont réagi avec leur mauvaise humeur à cette intervention certes polémique mais qui dit pourtant la vérité.


    Pour la forme, il a formulé quand même sa question au Premier Ministre : « Monsieur le Premier Ministre, comment convaincre nos collègues de renoncer à l’irresponsabilité tant qu’il est encore temps ? ».

    Refusant d'intervenir à ce moment des questions, préférant se réserver pour l'examen des motions de censure, Michel Barnier a laissé son Ministre du Budget et des Comptes publics Laurent Saint-Martin répondre, avec la même tonalité : « Merci pour cette intervention qui liste nombre d’éléments dont nos concitoyens seraient privés si la censure était adoptée dans quelques heures. ».

    Et d'embrayer sur les agriculteurs, puis d'autres catégories de travailleurs actifs : « Qui a dit : "Pour que le monde agricole obtienne les promesses qui lui ont été faites, il a besoin d’un budget" ? Non, c’est le président de la FNSEA ! Qui a dit : "Ce qu’on attend du politique est qu’il réduise l’incertitude. Avec la censure, c’est le noir complet" ? Un représentant de la Confédération des petites et moyennes entreprises. Qui a alerté : "Attention ! 40 000 emplois vont être supprimés avant la fin de l’année" ? Le président de la Fédération française du bâtiment. ».
     

     
     


    Par ailleurs, en raison de l'inflation et de l'effet des seuils, le projet de loi de finances pour 2025 proposait de relever ceux de 2024 en les indexant à l'inflation. Avec le rejet du texte, ce sont les seuils de 2024 qui sont gardés : « Je vous épargne, mesdames et messieurs les députés du Rassemblement national, le langage fleuri tenu ce matin par un de vos électeurs qui serait pénalisé par votre action. Les impôts augmenteraient si la censure était votée. Cessez de dire que c’est un mensonge ! En cas de censure, vous le savez, 400 000 Français deviendront imposables et 18 millions verront leurs impôts augmenter. Mesdames et messieurs les députés, réfléchissez bien ! Si vous ne le faites pas pour le gouvernement, faites-le pour ceux dont je viens de parler, faites-le pour les représentants des PME, faites-le pour les agriculteurs, faites-le pour les Français ! ». D'après les estimations, ce seraient 3 milliards d'euros supplémentaires qui s'imposeraient aux Français sur leurs revenus.

    Un peu plus tard dans l'après-midi de ce mercredi 4 décembre 2024, pour expliquer pourquoi il ne voterait pas la censure du gouvernement Barnier, le président du groupe LR à l'Assemblée Laurent Wauquiez a rappelé, à sa manière, les conséquences économiques et sociales désastreuses que provoquerait la censure : « Est-ce que notre pays peut encore se payer le luxe de semaines d’instabilité gouvernementale, alors que tout est à rebâtir ? Sûrement pas ! Vous avez beau éructer, nous voilà tous face à nos responsabilités. Évidemment, chacun fera son choix en son âme et conscience et ce choix, il faudra le défendre face aux Français. Il y a une chose qu’on ne peut pas accepter ici. On ne peut pas accepter que vous expliquiez, comme vous l’avez fait ces derniers jours, que la motion de censure ce n’est pas grave. On ne peut pas expliquer avec la légèreté qui est la vôtre que la censure n’aura pas de conséquences. On ne peut pas mentir aux Français, en disant qu’il n’y aura pas de conséquences. Il y aura des conséquences, qui seront payées par les Français et ceux qui se livrent au jeu minable d’aujourd’hui devront leur rendre des comptes. ».

     

     
     


    Lui aussi avait sa liste des conséquences néfastes, en commençant par les contribuables les plus précaires : « La censure, ce que vous appelez "bullshit", ce sera l’augmentation de l’impôt sur le revenu pour 18 millions de Français. Ils paieront ce prétendu "bullshit" que les députés du RN balaient d’un revers de main ! Ce sont 400 000 travailleurs qui deviendront imposables, mais qui sont le cadet des soucis des députés du groupe Rassemblement national ! Voilà la manière dont ils défendent la France qui travaille ! Une fois encore, madame Le Pen, ce sont les Français qui paieront les conséquences de votre légèreté et de votre irresponsabilité ! ».

    Et de poursuivre : « La censure, c’est la fin des aides d’urgence aux agriculteurs, la fin de tout ce que vous avez cherché à construire ces dernières semaines, madame Genevard, c’est la fin des allègements de charges, la fin des exonérations de taxes et la fin de la revalorisation de leurs retraites, eux qui travaillent dur mais touchent des pensions misérables. Il est facile d’aller sur les ronds-points pour prétendre flatter les agriculteurs, puis de les abandonner une fois dans l’hémicycle ! La censure, c’est la fin du plan d’urgence pour sauver les maisons de retraite de la faillite. La censure, c’est l’abandon du cumul emploi-retraite, qui permettrait de lutter contre la désertification médicale. La censure, et je vois bien que cela vous gêne, c’est renoncer à l’augmentation des effectifs de gendarmes, de policiers et de magistrats, si indispensable quand la sécurité doit être notre priorité. La censure, c’est porter un coup d’arrêt à la loi de programmation militaire, alors même que l’Europe est menacée à ses frontières. La censure, c’est la dette qui va continuer à filer, alors même que la France, avec le désordre que vous avez conjointement créé, est désormais moins crédible que la Grèce sur les marchés financiers. On lui impose 1 point de taux d’intérêt supplémentaire et ce sont les Français qui paieront l’addition. C’est 30 milliards d’euros de dette supplémentaire et d’intérêts dans les années qui viennent, c’est trois fois le budget de la justice ! ».

    Sa liste s'allongeait : « La censure, visiblement ça vous gêne encore, c’est l’aggravation de la crise immobilière. C’est la fin du prêt à taux zéro, au moment même où le marché de l’immobilier s’effondre, ce qui met en péril nos artisans et nos entreprises. La censure, c’est l’incertitude économique pour tous ceux qui prennent des risques. C’est l’incertitude pour les entreprises, c’est l’incertitude pour les PME, c’est l’incertitude pour les commerçants, c’est l’incertitude pour les artisans, c’est l’incertitude pour les professions libérales. Vous n’en avez même pas dit un mot, madame Le Pen ! Cette incertitude, c’est celle des Français qui vont hésiter à consommer demain. Je prends d’ailleurs date aujourd’hui : par votre irresponsabilité, vous enfoncerez la France dans une crise économique et financière et vous en porterez la responsabilité aux yeux des Français, qui se souviendront de ceux qui ont allumé la mèche. Un pays a besoin de stabilité. Il a besoin de stabilité, il a besoin d’un budget, il a besoin d’un gouvernement. ».
     

     
     


    L'intervention de Laurent Wauquiez était d'une certaine hauteur de vue, car il a voulu ramener l'enjeu sur l'intérêt général de la France. Il s'est notamment beaucoup inquiété de la perte de stabilité institutionnelle avec la censure : « Rien n’est pire, pour une économie, que l’incertitude. La censure, et c’est sans doute le plus grave, c’est faire perdre à notre pays son dernier atout. La France pouvait au moins compter sur la stabilité de ses institutions, mais vous vous délectez d’une plongée dans l’instabilité. Voilà l’image que vous donnez. La stabilité de nos institutions, c’est ce qui nous a toujours protégés, si bien que même dans les crises les plus graves, notre pays demeurait gouvernable. Alors que nous dansons au-dessus d’un volcan, vous nous proposez de faire un pas de plus en direction de l’instabilité institutionnelle qui a accéléré l’agonie de la IVe République. Vous vous apprêtez à ouvrir la boîte de Pandore de l’instabilité gouvernementale. Vous réveillez les vieux démons qui viennent de l’extrême gauche de la politique française, ceux de l’impuissance, de l’instabilité ministérielle et de l’incertitude économique. Si encore vous aviez des solutions ! Vous proposez le blocage sans solutions. ».

    Pris au vif par les piques de Marine Le Pen, Laurent Wauquiez n'a pas manqué de condamner la posture de celle-ci : « Que vous le vouliez ou non, il ne peut pas y avoir de nouvelles élections législatives avant l’été : c’est ça, la vérité. Pendant que se jouait cette comédie d’une insoutenable légèreté, qu’avons-nous entendu ? "Vous ne nous avez pas traités avec suffisamment d’égards", voilà ce que nous avons entendu. Qu’est-ce que cela veut dire ? Que vous vous apprêtez à jouer avec le destin de la France, que vous vous apprêtez à faire tomber un gouvernement parce qu’on ne vous aurait pas traités avec suffisamment d’égards ? Est-ce vraiment cela, être à la hauteur des enjeux ? Est-ce bien l’image que vous voulez offrir ? ».

    Et de tacler tous les démagogues : « Je n’oublie rien de la responsabilité de la France insoumise. Je n’oublie rien du danger que représentent ceux qui veulent autoriser l’apologie du terrorisme. Je n’oublie rien du danger que représentent ceux qui entretiennent une complaisance détestable avec l’antisémitisme et je n’oublie rien du danger de ceux qui ont trahi Jaurès et Clemenceau. ».

    La responsabilité du RN a été fermement pointée du doigt (même si, à mon sens, Laurent Wauquiez a oublié la responsabilité du PS dans cette affaire) : « Toutefois, la réalité c’est que sans vos voix, madame Le Pen, la France insoumise ne pourrait rien. La réalité, madame Le Pen, c’est que vous vous apprêtez à voter pour ceux qui traitent les policiers d’assassins. La réalité, madame Le Pen, c’est que vous vous apprêtez à voter pour ceux qui traitent les terroristes de résistants. Honnêtement, la dignité devrait vous imposer un autre comportement. Quand on lit le texte de la motion de censure, on comprend toute l’hypocrisie de son soutien : il dénonce les plus viles obsessions de l’extrême droite et vous le voteriez ? Voteriez-vous un texte qui explique qu’il ne faut pas revenir sur l’aide médicale d’État ? Voteriez-vous un texte qui explique qu’il ne faut pas de loi plus ferme au sujet de l’immigration ? Voilà, madame Le Pen, ce que vous allez faire, voilà à quelles incohérences en sont réduits, dans cet hémicycle, les semeurs de chaos. ».

     

     
     


    Il faut vraiment noter que toute l'intervention de Laurent Wauquiez relevait d'une certaine déception à l'égard du RN, comme s'il avait pu compter sur ce parti extrémiste pour servir l'intérêt national (à l'instar d'un autre qui s'est complètement fourvoyé, Éric Ciotti) : « Dans un parcours politique, il y a toujours un moment de vérité. Il y a des moments où on ne peut pas duper, esquiver ou feindre. Des moments où il faut choisir entre un intérêt personnel, madame Le Pen, et l’intérêt du pays. Des moments où il faut choisir entre son intérêt partisan et le sens de l’État. Madame Le Pen, je n’ai jamais été de ceux qui vous diabolisaient. Je n’ai jamais été de ceux qui vous donnaient des leçons de morale. Je vous le dis donc avec d’autant plus de force aujourd’hui : les Français jugeront sévèrement le choix que vous vous apprêtez à faire. Les Français jugeront sévèrement ceux qui prétendent redresser le pays et choisissent le désordre. Les Français jugeront sévèrement ceux qui voulaient se montrer responsables, mais font finalement le choix de l’irresponsabilité. Les Français jugeront sévèrement ceux qui prétendaient incarner l’ordre et choisissent aujourd’hui le chaos. Emmanuel Macron porte peut-être seul la responsabilité de la dissolution mais vous porterez, avec la France insoumise, la responsabilité de la censure qui plongera le pays dans l’instabilité. Je vous le dis donc une dernière fois : ressaisissez-vous ! Ressaisissez-vous, il en est encore temps ! Ressaisissez-vous et changez votre choix ! Ressaisissez-vous, parce que sinon, nous nous souviendrons longtemps de ce jour désolant. Nous nous souviendrons longtemps, madame Le Pen, qu’une alliance des contraires, portée par le cynisme, a plongé notre pays dans l’instabilité. Ressaisissez-vous, parce qu’il est toujours temps de faire le choix de la France ! ».

    Au final, malgré l'avertissement toutes ces conséquences connues par les censeurs irresponsables et cyniques, sourds à l'intérêt populaire et aux arguments rationnels de leurs collègues, la motion de censure contre le gouvernement de Michel Barnier a été adoptée par une majorité de l'Assemblée, entraînant le rejet des textes budgétaires, la démission du gouvernement, une nouvelle période d'incertitude à la fois institutionnelle, politique, sociale, économique et financière. Les Français, dans leur bon sens, seront très sévères envers ces oiseaux de malheur qui ne cherchent qu'à détruire la France, diviser le peuple et semer la haine et la désolation dans tout le pays.



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (07 décembre 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Motion de sangsue : les conséquences économiques désastreuses de la censure.
    Philippe Vigier.
    Laurent Wauquiez.
    Emmanuel Macron face à ses choix.
    Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron le 5 décembre 2024 (texte intégral).
    La motion RNFP : Chassez le naturel, il revient au chaos !
    L'émotion de censure de Michel Barnier.
    La collusion des irresponsables.
    Gouvernement Barnier : les yeux du monde rivés sur la France.
    Risque de censure : Non, le RN n'est pas l'arbitre des élégances !
    Michel Barnier plaide pour la sobriété normative et procédurale !
    Discours du Premier Ministre Michel Barnier le 21 novembre 2024 à la Porte de Versailles (vidéo et texte intégral).
    Michel Barnier sur les pas de Pierre Mendès France.
    Discours du Premier Ministre Michel Barnier le 15 novembre 2024 à Angers (vidéo et texte intégral).
    PLF 2025 : la majorité de rejet !
    Michel Barnier : déjà deux mois !
    François Guizot à Matignon ?
    5 euros pour visiter Notre-Dame de Paris ?
    Achats dans la fonction publique : des économies à faire ?
    Doliprane : l'impéritie politique.
    Proche-Orient : l'incompréhension de Roger Karoutchi.
    Motion de censure : le quart d'heure de gloire d'Olivier Faure.
    Budget 2025 : l'impossible mission de Michel Barnier.
    Claude Malhuret : du vol des élections aux chefs d'escadrille...
    Les 3 lignes rouges de Marine Le Pen pour ne pas censurer le gouvernement Barnier.
    La quadrature du cercle de Michel Barnier.
     

     
     





    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20241204-philippe-vigier.html

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/12/04/article-sr-20241204-philippe-vigier.html



     

  • La démocratie chrétienne de Jean-Marie Daillet

    « On a rarement vu, dans l'histoire de France, une Chambre aussi médiocre, aussi passive, aussi absente. La télévision nous montre des bancs vides dans l'hémicycle même lors de débats d'une importance considérable pour nous, puisqu'il s'agit de l'utilisation de nos impôts. » (Jean-Marie Daillet, février 1973).



     

     
     


    Comme on le lit ci-dessus, les arguments de campagne qui ont servi à sa première élection de député auraient pu se dire encore en 2024, cinquante ans plus tard, mais dans tous les cas, ont un arrière-goût passablement populiste voire démagogique. Ils n'étaient pourtant pas d'un extrémiste de droite ni de gauche... mais d'un centriste ! Ils émanaient de Jean-Marie Daillet, figure du centrisme normand, qui fête son 95e anniversaire ce vendredi 29 novembre 2024.

    J'ai rencontré plusieurs fois Jean-Marie Daillet à la fin des années 1980, à l'occasion de congrès politiques mais aussi, surtout, d'universités d'été. Il participait alors très assidûment aux manifestations du CDS (Centre des démocrates sociaux), la composante démocrate chrétienne de l'UDF. Dans les universités d'été, ce sexagénaire à la silhouette impressionnante n'intimidait en fait pas car il était en tenue décontractée, portant le tee-shirt. Sourire et valeurs.

    Journaliste catholique, Jean-Marie Daillet s'est engagé en politique en adhérant au MRP en 1953 sous l'influence de Jacques Mallet (1924-2016), futur député européen (1984-1989). Le MRP était le mouvement des résistants démocrates chrétiens. Ce mouvement, sous différentes appellations, a toujours été centriste. Deux points essentiels dans son programme : la construction européenne (même en 1953) et la décentralisation. Dans les années 1960, Jean-Marie Daillet est devenu un fonctionnaire européen, porte-parole d'Euratom de 1960 à 1965 à Bruxelles, puis directeur adjoint du Bureau d'information des Communautés européennes à Paris jusqu'en 1973. Il a dû à l'ancien ministre André Colin, qui fut le chef du MRP, d'être en relation avec les démocrates chrétiens européens.


    Dès 1962, Jean-Marie Daillet s'est présenté aux élections législatives, mais les trois premières tentatives furent vaines. D'abord dans l'Orne, en 1962, puis dans la Manche, à Saint-Lô, en 1967 (13% des voix) et en 1968 (20,6% au premier tour et 40,2% au second tour). Lorsqu'il s'est présenté à nouveau en mars 1973 sur la même première circonscription de la Manche, il a gagné au second tour avec 58,8% des voix avec un discours très populiste : « "Un député, à quoi ça sert ?". Ces questions, je les ai entendues bien souvent. Elles m'ont apporté la preuve de votre indifférence ou de votre écœurement, devant le spectacle hélas trop répandu depuis cinq ans de députés singulièrement inefficaces. (…) Je suis le premier à comprendre votre découragement. Moi aussi, je pense que bon nombre de députés sortants ne méritent pas d'être réélus. ».
     

     
     


    Et pourtant, comme je l'indiquais plus haut, Jean-Marie Daillet n'était pas extrémiste mais centriste. Il s'est présenté et a été élu avec l'étiquette du Centre démocrate présidé par Jean Lecanuet. À l'époque, les centristes étaient divisés en deux : le CDP (Centre démocratie et progrès) qui avait soutenu Georges Pompidou en 1969 et participait donc au gouvernement depuis lors, et le CD (Centre démocrate), en quelque sorte, le centre canal historique, qui avait soutenu la candidature d'Alain Poher en 1969, et qui siégeait dans l'opposition (l'élection de Valéry Giscard d'Estaing a eu pour conséquence de réunifier les centristes avec l'étiquette du CDS, fondé en 1976).

    Il a été réélu cinq fois (avec 67,2% en mars 1978, au premier tour avec 58,5% en juin 1981, élu deuxième de la liste UDF-RPR avec 45,2% en mars 1986, et 55,9% en juin 1988), si bien qu'en tout, il a exercé le mandat de parlementaire de la Manche pendant vingt ans, de mars 1973 à mars 1993. Il s'occupait des habitants de sa circonscription comme il réfléchissait sur les grandes enjeux politique de la Franc et du monde à Paris : « Ma porte a toujours été ouverte à tous mes concitoyens, sans aucune distinction d'opinion politique, mon seul souci étant de les aider à obtenir leur droit et à faire face à leurs difficultés. » (février 1978).


    Aux élections municipales de mars 1977, il a tenté de conquérir la mairie de Saint-Lô avec une liste entièrement centriste. Il n'a pas été très bon au premier tour et, refusant l'alliance avec la liste de droite sortante, qui lui réservait peu de places, il a laissé élire un maire socialiste.

    Par son mandat parlementaire, Jean-Marie Daillet a été délégué de la France à l'Assemblée du Conseil de l'Europe et membre de la délégation française à l'Assemblée Générale de l'ONU. Dès son premier mandat, il a vice-présidé le groupe centriste RCDS (réformateurs centristes et démocrates sociaux). Vice-président du CDS, il a siégé ensuite au groupe UDF à la création de l'UDF, de 1978 à 1988, puis au groupe UDC (Union du centre), un groupe spécifiquement du CDS afin d'apporter éventuellement un complément à la majorité relative de Michel Rocard. D'ailleurs, à la fin de la législature en 1993, Jean-Marie Daillet était non-inscrit parce qu'exclu en 1990 du groupe UDC car il était trop proche des socialistes.

    Ce député ouvert et direct, proche des gens, père de huit enfants, qu'était Jean-Marie Daillet, j'ai su bien plus tard qu'il était aussi un homme rigide avec des valeurs intangibles, en particulier pour ses convictions catholiques et la valeur précieuse de la vie (que je partage aussi). C'est pourquoi, alors qu'il n'avait que dix-huit mois d'expérience parlementaire, il s'est investi très passionnément dans la bataille parlementaire pour s'opposer au projet de loi de dépénalisation de l'IVG porté par Simone Veil.

    Dans sa défense passionnée de l'enfant à naître, Jean-Marie Daillet a commis l'irréparable à la tribune, peut-être sera-ce d'ailleurs sa seule postérité d'homme politique, ce qui serait très injuste mais cela dénote aussi que les humains sont faillibles, on peut être à la fois ouvert et fermé. Car ce qu'il a dit pour s'opposer à la loi Veil le 27 novembre 1974 était franchement dégueulasse : « On est allé, quelle audace incroyable, jusqu'à déclarer tout bonnement qu'un embryon humain était un agresseur. Eh bien ! ces agresseurs, vous accepterez, madame, de les voir, comme cela se passe ailleurs, jetés au four crématoire ou remplir des poubelles ! ». Dire une telle horreur à une ancienne déportée d'Auschwitz relevait au minimum d'un manque de tact, d'un manque de galanterie et d'une très grande bêtise. Il a prétendu qu'il ne connaissait pas l'histoire personnelle de Simone Veil (ce qui est possible, elle n'a communiqué sur ce sinistre passé vraiment qu'à partir des années 2000), et dès qu'il a compris la blessure folle de sa tirade, dès la nuit suivante, il a présenté ses excuses à la grande dame très éprouvée par ce débat parlementaire.

    Simone Veil l'a redit trente ans plus tard dans un livre entretien avec Annick Cojean en 2004, en considérant les propos de Jean-Marie Daillet comme le pire qu'elle ait entendu : « Je crois qu’il ne connaissait pas mon histoire, mais le seul fait d’oser faire référence à l’extermination des Juifs à propos de l’IVG était scandaleux. (…) Il n’était pas question de perdre confiance et de se laisser aller. Tout cela me dopait, au contraire, confortait mon envie de gagner. Et je pense qu’en définitive, ces excès m’ont servie. Car certains indécis ou opposants modérés ont été horrifiés par l’outrance de plusieurs interventions, odieuses, déplacées, donc totalement contre-productives. ». Dans un autre entretien publié dans "L'Humanité" le 26 novembre 2004, elle expliquait qu'elle n'était pas blindée par un tel déchaînement de haine : « Ce qui m’énervait alors, c’était de retrouver des croix gammées dans le hall de mon immeuble. C’était difficile pour mes enfants et certains de mes petits-enfants, qui ont eu des réflexions en classe. J’ai également pensé être agressée dans la rue. Or je n’ai eu que quatre ou cinq fois des réflexions très désagréables. Rien par rapport aux milliers de personnes qui m’ont manifesté leur sympathie et qui continuent à le faire. Je ne me suis, en fait, jamais vraiment sentie menacée. Il s’agissait essentiellement d’intimidation. ».

     

     
     


    Jean-Marie Daillet ne s'est pas représenté en 1993, laissant son suppléant Georges de La Loyère, ingénieur, se présenter au titre de l'UDF, qui a été battu par le candidat RPR Jean-Claude Lemoine en mars 1993. Depuis juin 2007, le député de cette première circonscription de la Manche est Philippe Gosselin (LR), suppléant de Jean-Claude Lemoine depuis juin 2002. La raison de son abandon de la circonscription, c'est que Jean-Marie Daillet a été nommé ambassadeur de France à Sofia, en Bulgarie, de 1993 à 1995.

    À partir 1979, Jean-Marie Daillet était président d'honneur de l'Association française des Amis des Afghans et de l'Afghanistan, et a ce titre, il a apporté son soutien à Rome au roi d'Afghanistan, a rencontré les partis politiques de la résistance afghane à Islamabad, a fait venir au Parlement Européen un résistant afghane en 1981, est intervenu auprès des chancelleries de nombreux pays pour aider les résistants afghans et leur apporter de l'aide humanitaire et sanitaire. Il a aussi reçu à l'Assemblée Nationale le fameux commandant Massoud en avril 2001, quelques mois seulement avant son assassinat, et a été reçu à Kaboul en 2015 par la princesse India d'Afghanistan.

    J'ai précisé que Jean-Marie Daillet avait eu huit enfants. L'un d'eux était Étienne Daillet, cardiologue, qui, en août 2005, appelé d'urgence par un patient, a voulu le rejoindre le plus vite possible en prenant sa moto dans la nuit, il a heurté de front un camion et y a trouvé la mort.

    Un autre de ses fils est Rémy Daillet-Wiedemann, qui a été président de la fédération du MoDem de Haute-Garonne en octobre 2008 mais en a été rapidement exclu en mars 2010 (le MoDem est un des partis héritiers du CDS). Il est depuis 2009 un activiste sur Internet, d'expression d'extrême droite avec des dérives complotistes et antivax, impliqué en avril 2021 dans trois affaires d'enlèvement d'enfant puis, en octobre 2021, dans un projet de coup d'État et de projets d'attentats terroristes (appelant à un renversement armé du gouvernement et à la prise du Palais de l'Élysée, menaçant directement Emmanuel Macron). À cause d'un mandat international par un juge de Nancy, il a été interpellé par les autorités malaisiennes en mai 2021, expulsé de Malaisie en juin 2021, placé en détention provisoire jusqu'en juin 2023 (voulait se présenter à l'élection présidentielle de 2022).

    Rémy Daillet-Wiedemann a menacé le 12 avril 2021 par messagerie électronique un ancien camarade de collège, le député LR Philippe Gosselin : « Où serez-vous quand nous viendrons arrêter les traîtres et les collaborateurs ? Voici la dernière chance que nous vous donnons. Vous dont la mission était de servir le peuple français, levez-vous et parlez contre la tyrannie. Si vous vous dérobez à ce devoir, ce sera trahir. (…) Nous attendons votre réponse dans le mois. Nonobstant cette réponse, monsieur Gosselin, nous vous considérerons comme forfait, complice de crime contre l'humanité, et donc par avance condamné. ».


    Philippe Gosselin a confié à la journaliste Émilie Flahaut le 22 avril 2021 pour France 3 : « Vous savez, des mails de complotistes, j'en reçois tous les mois et ils vont directement à la poubelle, sans passer par la case lecture. Mais là, quand j'ai vu le nom de Rémy Daillet, ça m'a intrigué et je me suis souvenu que c'était un copain de classe. (…) On était dans la même classe, en quatrième il me semble. On était copains, on se fréquentait mais il ne faisait pas partie de ma bande de potes, celle avec qui c'était "à la vie à la mort" et avec qui je suis toujours en contact. J'ai le souvenir qu'il s'est fait virer à la fin de la terminale pour indiscipline, juste avant son bac, ce qui n'était quand même pas courant. Et puis, plus rien... (…) Il est quand même sacrément dérangé ! Et quand j'ai découvert quelques jours plus tard qu'il était lié à l'enlèvement de la petite Mia et qu'il était sous le coup d'un mandat d'arrêt international, cela fait froid dans le dos. (…) Franchement je suis un peu remué par tout ça. Je ne tire aucune conclusion, ça n'aurait aucun sens. C'est juste qu'en l'espace de quelques jours, j'ai replongé quarante ans en arrière. Je me demande comment Rémy a pu devenir le gourou qu'il est aujourd'hui. ».

    Et le député de la première circonscription de la Manche a gardé un souvenir très marquant du père de ce camarade, également son prédécesseur à l'Assemblée Nationale : « Je me souviens très bien de ses dernières années en tant qu'élu. J'étais jeune conseiller municipal à Rémilly-sur-Lozon et Jean-Marie Daillet, député de centre droit, a agité le landerneau politique manchois en se rapprochant des mitterrandiens, ça a fait jazzer ! C'est sans doute pour cela qu'il a obtenu un poste d'ambassadeur en Bulgarie. ».

    Jean-Marie Daillet, qui a été président de l'amicale des anciens du MRP et vice-président de l'Internationale démocrate-chrétienne, ne vit plus en Normandie pour sa retraite. Lors d'une des réunions des anciens du MRP au début des années 2010 (précisément le 23 février 2012 consacrée à André Colin), Jean-Marie Daillet a explicité l'expression démocratie chrétienne : « Il y a là une sorte de pléonasme. Qui dit chrétien devrait dire normalement démocrate. Le "Aimez-vous les uns les autres" est sans aucun doute, je ne dirai pas le slogan, mais l’idéal qu’après tout, non seulement le Christ mais un certain nombre de personnes qui ne sont pas chrétiennes peuvent tout à fait considérer comme étant le nec plus ultra d’une société digne de ce nom, une société véritablement humaine. ».

    Il racontait aussi une discussion avec un gendre à propos de Robert Schuman : « La béatification de Robert Schuman, c’est d’ailleurs un sujet de discussion entre un de mes beaux-fils et moi. Il est en train de finir son droit canon à Rome et je luis dis : "Alors ?". Il me dit : "Eh bien, on attend le miracle". - "Comment ? La réconciliation de l’Europe, ce n’est pas un miracle ?" - "Ah, mais ce n’est pas un miracle physique, il faut une guérison d’une maladie inguérissable". - Ah bon, très bien". Je suis allé très loin en lui disant que je considérais que ce genre de raisonnement, c’était du matérialisme spirituel. ».

    Il ajoutait un peu plus tard : « L’exemple d’Ozanam est très bon parce qu’en effet (et celui de Robert Schuman, et celui d’André Colin), c’est que finalement, quand on a la foi, le christianisme chevillé au corps, la politique est un chemin de sainteté. Et c’est pourquoi il serait si important que Robert Schuman, à son tour, soit reconnu dans sa sainteté personnelle, mais dans sa sainteté d’homme politique. L’opinion publique est trop souvent, et parfois à juste titre, hélas, persuadée que le monde politique est pourri. C’est très commode que le monde politique soit pourri, pour certains qui veulent profiter de cette pourriture. Ça excuse tellement de choses. (…) Nous avons plus que jamais besoin d’hommes et de femmes exemplaires. Quand nous nous sommes engagés au MRP, c’était bien parce que ce mouvement nous attirait. Non pas pour des places à prendre, mais parce qu’il y avait des choses à faire qui demandaient un certain nombre de sacrifices, et pourquoi pas ? On les a faits. Je pense bien sûr à André Colin et ses co-fondateurs, les Bidault, Teitgen, Simonnet, Pflimlin, Buron… ».



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (23 novembre 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Jean-Marie Daillet.
    La loi Veil.
    Claude Malhuret.
    Jacques Duhamel.
    Didier Borotra.
    La convergence des centres aux européennes.
    Raymond Barre.
    Gilberte Beaux.
    Christine Boutin.
    Dominique Baudis.
    Valérie Hayer.
    François Bayrou.
    Henri Grouès.
    Jean-Jacques Servan-Schreiber.
    Jean-Marie Rausch.
    René Monory.
    René Pleven.
    Simone Veil.
    Bruno Millienne.
    Jean-Louis Bourlanges.
    Jean Faure.
    Joseph Fontanet.
    Marc Sangnier.
    Bernard Stasi.
    Jean-Louis Borloo.
    Sylvie Goulard.
    André Rossinot.
    Laurent Hénart.
    Hervé Morin.
    Olivier Stirn.
    Marielle de Sarnez.

     

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20241129-jean-marie-daillet.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/la-democratie-chretienne-de-jean-257114

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/11/28/article-sr-20241129-jean-marie-daillet.html




     

  • IVG : l'adoption de la loi Veil il y a 50 ans

    « C'est aussi avec la plus grande conviction que je défendrai un projet longuement réfléchi et délibéré par l'ensemble du gouvernement, un projet qui, selon les termes mêmes du Président de la République, a pour objet de "mettre fin à une situation de désordre et d'injustice et d'apporter une solution mesurée et humaine à un des problèmes les plus difficiles de notre temps". » (Simone Veil, le 26 novembre 1974 dans l'hémicycle de l'Assemblée Nationale).


     

     
     


    C'est il y a cinquante ans, le 26 novembre 1974, que l'examen du projet de loi relatif à l'interruption volontaire de grossesse (dite loi Veil) a commencé en séance publique à l'Assemblée Nationale, dans un climat particulièrement houleux et difficile. Le projet de loi a été déposé le 15 novembre 1974 et il a fallu trois jours très intensifs de débat pour aboutir à son adoption en première lecture par les députés.

    Il faut rappeler deux contextes : le contexte politique et le contexte social.

    Le contexte politique, d'abord. La mort soudaine du Président Georges Pompidou le 2 avril 1974 a traumatisé les responsables UDR (gaullistes), traumatisme renforcé par la division au sein de leur parti pour l'élection présidentielle et la perte de l'Élysée après quinze années. Valéry Giscard d'Estaing, jeune fringant et moderne, a été élu et a promis une libéralisation de la société. Parmi ses engagements, la dépénalisation de l'avortement. Soit dit en passant : VGE a toujours été meurtri, jusqu'à la fin de sa vie, qu'on ne parle pas de loi VGE pour la loi sur l'IVG car il a pris seul l'initiative politique de ce texte.

    Comme pour la majorité à 18 ans, Valéry Giscard d'Estaing entendait aller très vite avec l'IVG, considérant que les grandes réformes, surtout si elles sont très sensibles (comme l'IVG), doivent être réalisées au début d'un mandat présidentiel, en bénéficiant politiquement encore de l'état de grâce de l'élection. En principe, un sujet comme l'IVG, principalement juridique, devait être défendu par le Ministre de la Justice. En l'occurrence, Jean Lecanuet, président du Centre démocrate (CD), le parti des démocrates chrétiens, ne souhaitait pas défendre une telle loi en raison de ses convictions religieuses, même s'il en voyait la nécessité. C'est donc Simone Veil, magistrate peu politisée (c'était son mari Antoine Veil le politique !) bombardée Ministre de la Santé par la volonté de donner plus de responsabilité aux femmes, choisie par le nouveau Premier Ministre Jacques Chirac, par l'entremise d'une grande amie commune, Marie-France Garaud. Lorsqu'elle a accepté sa mission d'entrer au gouvernement, d'une part, elle ne connaissait pas beaucoup de choses dans le domaine de la santé (elle était juge et pas médecin), et d'autre part, on ne lui avait pas dit à sa nomination qu'elle serait sur le front de l'IVG. Peut-être que ses bonnes connaissances juridiques ont aidé, mais je crois avant tout que c'était la femme et c'était la santé publique à assurer qui ont été ses deux moteurs.

    Le contexte social ensuite. S'il y avait un responsable politique qui était très conscient de l'importance vitale de faire une loi sur l'IVG, c'était le nouveau Ministre de l'Intérieur, prince des giscardiens, à savoir Michel Poniatowski qui était, juste avant l'élection présidentielle, Ministre de la Santé (le prédécesseur direct de Simone Veil) et qui a bien compris l'horreur sanitaire en cours mais aussi judiciaire. Trop de femmes avortaient clandestinement pour que l'État puisse concrètement toutes less sanctionner pénalement comme le voulait la loi encore en vigueur. La loi d'amnistie du 10 juillet 1974 portait très explicitement sur les faits d'avortement et, dans sa conférence de presse du 25 juillet 1974, VGE a annoncé l'absence de poursuite pour avortement jusqu'à l'adoption d'une loi sur l'IVG. Mais surtout, trop de femmes mouraient au cours d'un avortement clandestin. Il y avait environ 1 000 avortements clandestins par jour en France et un de ces mille entraînait la mort de la femme (en raison des conditions précaires, manque de stérilisation, absence de médecin, etc.).
     

     
     


    Cette considération sanitaire avait déjà conduit le Premier Ministre précédent Pierre Messmer à déposer un projet de loi sur l'IVG dès le 7 juin 1973, mais lors du début de son examen en séance publique à l'Assemblée, le 14 décembre 1973, le projet a été renvoyé en commission pour pouvoir créer un consensus parlementaire sur le sujet. La mort de Président de la République a fait abandonner ce texte.

    Un nouveau texte a donc été adopté au conseil des ministres et déposé à l'Assemblée le 15 novembre 1974. L'examen à l'Assemblée en première lecture a eu lieu au cours de huit séances publiques du 26 novembre 1974 à la nuit du 28 au 29 novembre 1974. Le discours introductif de Simone Veil le 26 novembre 1974 est resté dans les annales de l'histoire. Elle a commencé ainsi : « Si j'interviens aujourd'hui à cette tribune, ministre de la santé, femme et non-parlementaire, pour proposer aux élus de la nation une profonde modification de la législation sur l'avortement, croyez bien que c'est avec un profond sentiment d'humilité devant la difficulté du problème, comme devant l'ampleur des résonances qu'il suscite au plus intime de chacun des Français et des Françaises, et en pleine conscience de la gravité des responsabilités que nous allons assumer ensemble. ».

    Reprenant tous les raisons de ne pas légiférer, la ministre a ensuite posé les termes de l'enjeu : « Nous sommes arrivés à un point où, en ce domaine, les pouvoirs publics ne peuvent plus éluder leurs responsabilités. Tout le démontre : les études et les travaux menés depuis plusieurs années, les auditions de votre commission, l'expérience des autres pays européens. Et la plupart d'entre vous le sentent, qui savent qu'on ne peut empêcher les avortements clandestins et qu'on ne peut non plus appliquer la loi pénale à toutes les femmes qui seraient passibles de ses rigueurs. Pourquoi donc ne pas continuer à fermer les yeux ? Parce que la situation actuelle est mauvaise. Je dirai même qu'elle est déplorable et dramatique. ».

    Peu après, le passage le plus important : « Je le dis avec toute ma conviction : l'avortement doit rester l'exception, l'ultime recours pour des situations sans issue. Mais comment le tolérer sans qu'il perde ce caractère d'exception, sans que la société paraisse l'encourager ? Je voudrais tout d'abord vous faire partager une conviction de femme, je m'excuse de le faire devant cette Assemblée presque exclusivement composée d'hommes : aucune femme ne recourt de gaieté de cœur à l'avortement. Il suffit d'écouter les femmes. C'est toujours un drame et cela restera toujours un drame. C'est pourquoi, si le projet qui vous est présenté tient compte de la situation de fait existante, s'il admet la possibilité d'une interruption de grossesse, c'est pour la contrôler et, autant que possible, en dissuader la femme. Nous pensons ainsi répondre au désir conscient ou inconscient de toutes les femmes qui se trouvent dans cette situation d'angoisse (…). Actuellement, celles qui se trouvent dans cette situation de détresse, qui s'en préoccupe ? La loi les rejette non seulement dans l'opprobre, la honte et la solitude, mais aussi dans l'anonymat et l'angoisse des poursuites. Contraintes de cacher leur état, trop souvent elles ne trouvent personnes pour les écouter, les éclairer et leur apporter un appui et une protection. Parmi ceux qui combattent aujourd'hui une éventuelle modification de la loi répressive, combien sont-ils ceux qui se sont préoccupés d'aider ces femmes dans leur détresse ? Combien sont-ils ceux qui, au-delà de ce qu'ils jugent comme une faute, ont su manifester aux jeunes mères célibataires la compréhension et l'appui moral dont elles avaient grand besoin ? ».
     

     
     


    Rien n'était acquis et Simone Veil a plus tard raconté qu'elle n'imaginait pas le flot de haine de la part de certains parlementaires. La palme du plus odieux doit être sans doute attribuer au député centriste Jean-Marie Daillet, élu de la Manche, qui a comparé le 27 novembre 1974 l'avortement aux assassinats de bébés dans les fours crématoires à Auschwitz : « On est allé, quelle audace incroyable, jusqu'à déclarer tout bonnement qu'un embryon humain était un agresseur. Eh bien ! ces agresseurs, vous accepterez, madame, de les voir, comme cela se passe ailleurs, jetés au four crématoire ou remplir des poubelles ! ». Adressé à une ancien déportée qui a perdu une partie de sa famille dans les camps de la mort, c'était particulièrement maladroit et malvenu, et disons-le, totalement dégueulasse. Jean-Marie Daillet s'est d'ailleurs rendu compte de ce qu'il avait dit dans la colère de sa passion et est venu présenter ses excuses à Simone Veil. Un soir, à la demande de l'Élysée, Jacques Chirac est venu en renfort dans la discussion pour aider sa ministre, mais elle se sentait particulièrement seule avec son texte.

    La situation parlementaire était compliquée parce que, menés par l'ancien Premier Ministre Michel Debré, nataliste réputé, les députés gaullistes étaient prêts à voter contre ou à s'abstenir. C'était sûr que Simone Veil ne pouvait pas ne compter que sur les députés de la majorité. Elle devait aussi négocier avec les socialistes, qui étaient favorables, menés par le président de leur groupe Gaston Defferre (maire de Marseille). Le point crucial était la position des centristes du Centre démocrate, dont les convictions religieuses mettaient en porte-à-faux la morale et la nécessité publique.

    Le mari de Simone Veil, Antoine Veil, très introduit dans les cercles centristes, avaient l'habitude de rencontrer les responsables centristes chez lui, à son domicile, au sein du Club Vauban (nom du lieu où les Veil habitaient). Son entremise a été capitale pour convaincre notamment l'ancien résistant et ancien ministre Eugène Claudius-Petit qui avait un grand pouvoir d'influence sur ses collègues centristes. Pour obtenir finalement son soutien, Simone Veil a modifié le texte en retirant l'obligation des médecins à faire une IVG avec une clause de conscience et en supprimant le remboursement de l'IVG par la sécurité sociale, mettant la gauche dans l'embarras mais permettant aux députés centristes de ne pas voter une loi qui encouragerait l'avortement. L'article 1er du texte réaffirme par ailleurs le respect du droit à la vie comme principe intangible.

    La conclusion a été souriante pour Simone Veil puisque dans la nuit du 28 au 29 novembre 1974, à 3 heures 40 du matin, le projet de loi a été adopté en première lecture par 284 voix pour et 189 contre, sur 479 votants avec 6 abstentions (scrutin n°120).

    Parmi les pour : Paul Alduy, Pierre Bernard-Reymond, André Bettencourt, Jean-Jacques Beucler, Jean de Broglie, Aimé Césaire, Jacques Chaban-Delmas, André Chandernagor, Jean-Pierre Chevènement, Roger Chinaud, Eugène Claudius-Petit, Jean-Pierre Cot, Michel Crépeau, Gaston Defferre, André Delelis, Hubert Dubedout, Jacques Duhamel, André Duroméa, Robert Fabre, André Fanton, Maurice Faure, Georges Fillioud, Henri Fiszbin, Raymond Forni, Joseph Franceschi, Jean-Claude Gaudin, Yves Guéna, Robert Hersant, Pierre Joxe, Didier Julia, Pierre Juquin, André Labarrère, Paul Laurent, Jacques Legendre, Max Lejeune, Louis Le Pensec, Roland Leroy, Charles-Émile Loo, Philippe Madrelle, Georges Marchais, Jacques Marette, Pierre Mauroy, Louis Mermaz, Georges Mesmin, Louis Mexandeau, Hélène Missoffe, François Mitterrand, Guy Mollet, Lucien Neuwirth, Arthur Notebart, Bernard Pons, Jean Poperen, Jack Ralite, Marcel Rigout, Alain Savary, Jean-Jacques Servan-Schreiber, Jacques Soustelle, Pierre Sudreau, Alain Terrenoire, Alain Vivien, Robert-André Vivien et Adrien Zeller.
     

     
     


    Parmi les contre : Pierre Bas, Pierre Baudis, Jacques Baumel, Pierre de Bénouville, Jacques Blanc, Robert Boulin, Loïc Bouvard, Claude Coulais, Jean-Marie Daillet, Marcel Dassault, Michel Debré, Jean Foyer, Emmanuel Hamel, Louis Joxe, Jean Kiffer, Claude Labbé, Joël Le Theule, Maurice Ligot, Christian de La Malène, Alain Mayoud, Jacques Médecin, Pierre Méhaignerie, Pierre Messmer, Maurice Papon, Jean Seitlinger et Jean Tiberi, etc. Se sont abstenus notamment Roland Nungesser et Gabriel Kaspereit.

    Le Sénat a examiné alors le projet de loi en première lecture les 13 et 14 décembre 1974, l'a adopté le 14 décembre 1974 avec des modifications, ce qui a rendu nécessaire une seconde lecture, puis une commission mixte paritaire le 19 décembre 1974 (portant sur le remboursement de l'IVG). L'Assemblée et le Sénat ont adopté le texte définitif le 20 décembre 1974 (pour l'Assemblée, par 277 voix pour et 192 voix contre sur 480 votants avec 11 abstentions). Valéry Giscard d'Estaing a ensuite, le 17 janvier 1975, promulgué la loi n°75-18 du 17 janvier 1975, qui, à l'origine, prévoyait une dépénalisation expérimentale pendant cinq ans. Une deuxième loi a été ultérieurement votée pour rendre permanente la dépénalisation (loi n°79-1204 du 31 décembre 1979).

     
     


    Après plusieurs autres modifications du texte, le droit à l'IVG est entré dans la Constitution le 8 mars 2024 au cours d'une cérémonie Place Vendôme, devant le Ministère de la Justice, présidée par Emmanuel Macron. Les études montrent que la loi Veil n'a pas fait augmenter le nombre d'avortements en France qui reste stable, autour de 200 000 par an.
     

     
     


    Ce vendredi 29 novembre 2024 à 22 heures, la chaîne parlementaire LCP fête ce cinquantenaire en rediffusant le téléfilm de Christian Faure intitulé "La Loi, le combat d'une femme pour toutes les femmes" diffusé pour la première fois le 26 novembre 2014 sur France 2 (pour le quarantième anniversaire). Autant le dire tout de suite, faire un film avec des personnages de la classe politique contemporaine est toujours casse-cou car toujours très différent de la réalité et la fiction peut aussi n'être qu'une pâle imitation des personnages réels.

    Néanmoins, on saluera quand même la prestation de l'actrice Emmanuelle Devos dans le rôle principal, celui de Simone Veil, et on regardera avec curiosité Antoine Veil (joué par Lionel Abelanski, dont le rôle dans le scénario est toutefois très insuffisant par rapport à la réalité), Dominique Le Vert, le dircab de Simone Veil (joué par Lorant Deutsch), et j'avoue que j'ai eu du mal à croire aux autres personnages : Gaston Defferre (joué par Michel Jonasz), Michel Debré (Éric Naggar), Jean Lecanuet (Olivier Pagès), Jacques Chirac (Michaël Cohen), Eugène Claudius-Petit (Bernard Menez), et je ne croyais pas du tout en Charles Pasqua (Philippe Uchan), Jean-Marie Daillet (Patrick Haudecœur), Edgar Faure (Laurent Claret) qui présidait ces séances historiques... avec juste une exception, Marie-France Garaud (jouée par Émilie Caen).


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (23 novembre 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    IVG : l'adoption de la loi Veil il y a 50 ans.
    Le droit de vote à 18 ans, c'était il y a 50 ans grâce à Giscard !
    Lucien Neuwirth  et la contraception.
    Le vote des femmes en France.
    Femmes, je vous aime !
    Ni claque ni fessée aux enfants, ni violences conjugales !
    Violences conjugales : le massacre des femmes continue.
    L'IVG dans la Constitution (3) : Emmanuel Macron en fait-il trop ?
    Discours du Président Emmanuel Macron le 8 mars 2024, place Vendôme à Paris, sur l'IVG (texte intégral et vidéo).
    L'IVG dans la Constitution (2) : haute tenue !
    L'IVG dans la Constitution (1) : l'émotion en Congrès.
    La convocation du Parlement en Congrès pour l'IVG.
    L'inscription de l'IVG dans la Constitution ?
    Simone Veil, l’avortement, hier et aujourd’hui…
    L’avortement et Simone Veil.
    Le fœtus est-il une personne à part entière ?
    Le mariage pour tous, 10 ans plus tard.
    Rapport 2023 de SOS Homophobie (à télécharger).
    Six ans plus tard.
    Mariage lesbien à Nancy.
    Mariage posthume, mariage "nécrophile" ? et pourquoi pas entre homosexuels ?
    Mariage annulé : le scandaleux jugement en faveur de la virginité des jeunes mariées.
    Ciel gris sur les mariages.

    Les 20 ans du PACS.
    Ces gens-là.
    L’homosexualité, une maladie occidentale ?
    Le coming out d’une star de la culture.
    Transgenres adolescentes en Suède : la génération sacrifiée.
    PMA : la levée de l’anonymat du donneur.
    La PMA pour toutes les femmes.
     

     
     




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  • Claude Malhuret : du vol des élections aux chefs d'escadrille...

    « Les Français sont fatigués de la révolution permanente ; ils sont fatigués de la ZAD qui s’est reconstituée hier à l’Assemblée dès l’ouverture de la session ; ils sont fatigués des démagogues qui promettent la lune et sèment la ruine partout où ils sont au pouvoir. Votre programme, avec humilité et responsabilité, en est l’exact contraire. C’est une raison supplémentaire pour que nous le soutenions. » (Claude Malhuret, le 2 octobre 2024 au Sénat).



     

     
     


    ZAD, comprendre zone à délirer ! Voici une petite démonstration de près de dix minutes sur le mythe des élections volées. Comme depuis quelques années c'est la tradition, chaque intervention en séance publique du sénateur Claude Malhuret est un condensé d'humour et de lucidité sur la vie politique. À un moment pressenti par le nouveau Premier Ministre pour faire partie de son gouvernement (il était déjà membre du gouvernement entre 1986 et 1988), le président du groupe Les Indépendants, République et Territoires au Sénat (regroupant les sénateurs Horizons) n'a pas déçu ses collègues lorsqu'il a fallu participer au débat qui a suivi la déclaration de politique générale de Michel Barnier au Sénat le mercredi 2 octobre 2024. Il réagissait surtout aux propos tenus quelques minutes auparavant par son collègue Patrice Kanner, président du groupe socialiste, qui s'enferrait dans la légende urbaine d'une victoire de la nouvelle farce populaire (NFP) aux dernières élections législatives.

    Alors, le sénateur a commencé comme
    Martin Luther King (mais en négatif : ce n'est pas un rêve qu'il a fait) : « Mes chers collègues, en écoutant il y a quelques instants l’analyse de la situation politique par le président du groupe socialiste, j’ai brusquement fait une sorte de cauchemar éveillé. ». Et il a découvert un nouveau gouvernement : « Je me tenais ici, à cette tribune, et en face de moi, à la place où vous vous trouvez, monsieur le Premier Ministre, ce n’était pas vous : c’était Lucie Castets. À ses côtés se tenaient Sandrine Rousseau, ministre des finances et de la décroissance ; Sophia Chikirou, garde des sceaux ; Aymeric Caron, ministre de l’écologie et des insectes ; Sébastien Delogu, ministre de la mémoire et des anciens combattants ; Louis Boyard, ministre du développement durable du cannabis et Jean-Luc Mélenchon, ministre des affaires étrangères et de l’amitié avec la Russie, le Hezbollah et l’Alliance bolivarienne ! ».

    Retour à la réalité et à l'imposture du NFP : « Lorsque j’ai rouvert les yeux, je me suis aperçu que j’étais en train de tomber de mon siège. Les propos du président du groupe socialiste montrent que l’on ne peut aborder ce débat sans faire d’abord table rase de l’invraisemblable campagne qui est menée depuis des semaines par le nouveau front populaire pour convaincre les Français que l’élection leur a été volée, que votre gouvernement est illégitime et que vous êtes l’otage du Rassemblement national. Cette campagne va se poursuivre, plus virulente que jamais, comme le prouve le discours de fureur et de haine que
    Mme Panot a prononcé hier à l’Assemblée Nationale. Le soir des élections, le 7 juillet dernier, à vingt heures zéro une, à la télévision, tous les chefs de partis ont été priés de passer leur tour pour permettre à celui de LFI de prononcer cette phrase : "Nous sommes arrivés les premiers, nous devons former le gouvernement". L’échec huit jours plus tard du candidat du NFP à l’élection pour la Présidence de l’Assemblée Nationale a démontré de manière évidente que cette intox constitutionnelle était une imposture. Mais la vague médiatique et les ragots sociaux se sont transformés en tsunami et le mensonge s’est changé en vérité. Il faut donc le répéter : l’élection n’a été volée à personne ! Et si elle a été volée, c’est aux électeurs de gauche par les dirigeants de l’extrême gauche, qui ont joué une invraisemblable partie de poker menteur avec leurs partenaires. ».
     

     
     


    D'où la recherche laborieuse d'un Premier Ministre qui oscillait entre le vaudeville et la tragédie (je ne sais pas trop s'il a été le plus féroce contre Lucie Castets ou contre Ségolène Royal !) : « Pendant les quinze jours qui ont suivi le 7 juillet, le mot d’ordre fut : "Macron doit nommer immédiatement un Premier Ministre du NFP". Question des journalistes : "Qui est votre candidat ?". Réponse : "On ne sait pas, on n’arrive pas à se mettre d’accord". Après deux semaines de bras de fer et de crises de nerfs, une inconnue tombe enfin du ciel : pendant vingt-quatre heures, Huguette Bello devient le nouveau dalaï-lama, jusqu’à ce qu’on découvre qu’elle n’est pas woke, mais alors pas woke du tout : elle est anti-mariage pour tous et tout le tralala. Panique au NFP ; exit Huguette ! Quelqu’un propose alors Laurence Tubiana, organisatrice de la COP21. Horreur, on s’aperçoit que Macron l’a nommée à l’UNESCO. Une macroniste Première Ministre du NFP ? La "fisha" absolue… Exit Laurence ! Au bord du gouffre, alors qu’il n’allait plus rester que Ségolène Royal, on finit par débusquer dans les combles de la mairie de Paris une sémillante fonctionnaire jamais élue nulle part et coanimatrice de l’incroyable dette de 10 milliards d’euros de la capitale. Par miracle, cet Annapurna de la pensée politique, auprès de qui les Bertrand, Cazeneuve ou Barnier ne sont que des billes, accepte de faire bénéficier les Français de son inexpérience. Le NFP tient sa Première Ministre. Du moins, c’est ce que croient les socialistes, les écolos et les communistes. Ce qu’ils n’ont pas compris, et l’on s’étonne d’une telle naïveté, c’est que jamais Mélenchon n’a envisagé un Premier Ministre de gauche. Jamais ! Au moment même où le nom de Lucie Castets est prononcé, une fatwa vient la faucher en quelques mots : "Le programme, rien que le programme, mais tout le programme !". En bon français, cela veut dire que Mme Castets disposerait de 193 voix à l’Assemblée, et pas une de plus ! Exit donc Lucie… En un mot, si vous avez compris le NFP, c’est qu’on vous a mal expliqué ! ». Cette dernière phrase restera sans doute "culte" ! On est en plein dans un film comique avec le regretté Michel Blanc.

    Claude Malhuret a ainsi expliqué l'échec de
    Bernard Cazeneuve : « La gauche responsable, celle qui est largement représentée dans cet hémicycle, du moins c’est ce que je pensais jusqu’à il y a quelques minutes, fait une tentative désespérée en proposant le nom de Bernard Cazeneuve. Cette fois, Mélenchon n’a même pas besoin de lever le petit doigt, Faure le socialiste se charge lui-même du sale boulot en déclarant que nommer un Premier Ministre socialiste serait une "anomalie". Cazeneuve est des nôtres, il sera censuré comme les autres ! Exit Bernard ! Un jour, dans les manuels de sciences politiques, on expliquera dans un long chapitre comment, en 2024, la gauche s’est vendue pour un plat de lentilles à une secte gauchiste en pleine dérive islamiste et antisémite, dirigée par un ancien du lambertisme, que les communistes eux-mêmes qualifiaient il y a quelques années encore d’hitléro-trotskisme ! ».

    Il n'y a pas eu que la gauche islamo-gauchiste à avoir crié au vol des élections,
    l'extrême droite a hurlé pareil : « Quant à l’extrême droite, qui prétend elle aussi qu’on a volé l’élection à ses 11 millions d’électeurs, elle oublie de dire que 20 millions d’autres ont décidé d’associer leurs voix au second tour pour lui faire barrage devant la radicalité de ses positions, un programme économique qui nous mènerait droit vers l’abîme et une flopée de candidats imprésentables, entre les casquettes nazies et les propos antisémites sur les réseaux asociaux. Elle n’est pas plus légitime à gouverner et elle le sait très bien. Elle attend son heure, et si cette heure vient un jour, elle aura été soigneusement préparée par la folie de l’extrême gauche et la capitulation du premier secrétaire du parti socialiste, l’homme-caoutchouc. ».

    Quant à la
    motion de censure, voici pourquoi ses chances de succès sont faibles : « Vient enfin le dernier mensonge, monsieur le Premier Ministre : vous seriez l’otage du Rassemblement national. L’extrême droite compte 142 députés. Ils ne peuvent faire tomber votre gouvernement qu’en bande organisée avec le NFP. J’attends avec impatience qu’ils expliquent cela à leurs électeurs, et surtout qu’ils expliquent comment ils comptent composer, pour vous succéder, un gouvernement lepéno-mélenchoniste. Mélenchon ne veut pas de Premier Ministre de gauche et Le Pen sait que son parti est incapable pour l’heure de gouverner. Ce n’est pas une assurance-vie, mais votre gouvernement est loin d’être condamné d’avance. ».

    D'où le soutien fort du groupe présidé par Claude Malhuret au gouvernement de Michel Barnier : « Vous êtes légitime. Vous n’avez pas de majorité absolue, mais vous rassemblez tous ceux, de la droite républicaine au centre et à la gauche modérée, qui ont fait le choix de la responsabilité. Ils sont le camp de la raison que notre groupe Les Indépendants appelle de ses vœux depuis des mois. Et vous êtes, après deux ans d’Assemblée Nationale transformée en zone à délirer, le Premier Ministre de l’apaisement. Quelles sont les priorités ? Mais il n’y a que des priorités : le budget, le déficit, la dette, la
    Nouvelle-Calédonie, le logement, l’agriculture, l’immigration, la transition écologique, sans oublier l’Ukraine, le Moyen-Orient et toutes les crises dans le monde que la France ne peut ignorer. Ces priorités étaient au cœur de votre discours et de ceux de tous mes collègues ; je n’y reviendrai pas à mon tour. Qu’il me soit seulement permis de dire que nous soutenons votre engagement dans cette démarche difficile et courageuse. Vous disposerez d’une large majorité au Sénat, qui tentera de compenser l’absence de majorité absolue à l’Assemblée Nationale et de combattre les tentatives des populistes pour saper notre démocratie. ».
     

     
     


    Les savoureuses envolées lyriques du sénateur Malhuret apportent toujours un peu de fraîcheur, de légèreté, mais aussi de lucidité à une classe politique tendue et rageuse. Il a le mérite de faire mal car il cible juste. Depuis 2022, il s'inquiète régulièrement de la perspective de l'élection présidentielle de 2027 et de la nécessité de rassembler toutes les forces non-populistes, ce qu'il a appelé ce 2 octobre 2024 les forces raisonnables, le "camp de la raison", du centre droit au centre gauche, "qui ont fait le choix de la responsabilité". Les deux anciens grands partis gouvernementaux, LR et le PS, n'ont pas voulu jouer le jeu en 2022, chacun pris par une surenchère populiste. LR s'est finalement résolu à faire le choix de la raison et de la responsabilité, au contraire du PS qui s'enferme toujours dans un mélencho-islamisme qui l'asphyxiera à court terme. Surtout, Claude Malhuret, continuez à nous délecter ainsi !


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (05 octobre 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Claude Malhuret : du vol des élections aux chefs d'escadrille...
    Claude Malhuret au Sénat : le spectacle continue !
    Ukraine : Claude Malhuret se gausse de Jordan Selfie !
    Claude Malhuret sur l'inscription de l'IVG dans la Constitution le 4 mars 2024 à Versailles.
    Claude Malhuret s'en prend à "la pression permanente et déprimante des extrêmes" !
    Claude Malhuret dénonce la "mauvaise république" du guide suprême !
    L'Iran et les femmes : Claude Malhuret contre la mollarchie.
    Passe vaccinal : Claude Malhuret charge lourdement les antivax.
    Covid-19 : les trois inepties du docteur Claude Malhuret.







    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20241002-malhuret.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/claude-malhuret-du-vol-des-257033

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/10/02/article-sr-20241002-malhuret.html



     

  • Claude Malhuret au Sénat : le spectacle continue !

    « Qui aurait pu imaginer une campagne électorale aussi rocambolesque ? Une majorité présidentielle suppliant le Président de se tenir à l’écart, un Nouveau front populaire terrifié à chaque prise de parole de son dirigeant le plus médiatique, des Républicains en guerre contre leur chef barricadé dans ses locaux après les avoir enfermés dehors… Le spectacle continue. » (Claude Malhuret, le 18 juillet 2024 au Sénat).




     

     
     


    Avec les élections législatives anticipées des 30 juin et 7 juillet 2024, une session parlementaire extraordinaire devait se tenir du 18 juillet 2024 au 1er août 2024 pour l'installation des députés, l'élection de leurs responsables internes, etc. Petite incongruité : pour cette raison, le Sénat aussi est en session, mais comme l'ordre du jour était vide, notamment en raison de l'absence du gouvernement, qui est démissionnaire et sans nouveau gouvernement, le Président du Sénat Gérard Larcher a décidé de ne pas tenir d'autre séance publique avant la fin de l'été que celle de ce jeudi 18 juillet 2024 sauf en cas de nécessité.

    Pour ne pas réunir les sénateurs pour rien, la conférence des présidents a décidé de tenir un débat contradictoire sur la situation politique du moment, c'est-à-dire, sur l'après-législatives et le vide politique et gouvernemental qui en résulte. Parmi les orateurs, il y en a un dont ont attend toujours avec impatience les formules chocs, toujours croustillantes, sur la vie nationale. Il s'agit de Claude Malhuret qui, bien évidemment, n'a pas hésité à balancer clairement les choses.

    Le bon docteur Malhuret a brossé une situation politique qui est complètement surréaliste à bien des égards. La gauche irresponsable : « Depuis dix jours, la gauche en principe unie somme le Président de la République de lui livrer séance tenante les clefs de Matignon, sans parvenir à s’accorder pour lui proposer un seul nom. ».

    Et la position de la CGT et de FI, qui fait penser à des épisodes très sombres de notre histoire : « Tout aussi ahurissants, mais plus inquiétants (…), sont les appels de l’extrême gauche à marcher sur Matignon et ceux d’une CGT "LFIsée" à se rassembler devant l’Assemblée Nationale pour "la mettre sous surveillance". Je pose la question avec gravité : que signifie dans une démocratie la mise sous surveillance de l’Assemblée Nationale par une foule attroupée devant ses murs ? La dernière fois que c’est arrivé, en France, c’était le 6 février 1934, et aux États-Unis, le 6 janvier 2021. On connaît le résultat. ».

    La situation institutionnelle n'a cependant pas de quoi rassurer Claude Malhuret qui a décrit une situation inédite sous la Cinquième République : « La Ve République nous a habitués à nommer ses gouvernements en un instant, si bien qu’une situation banale chez nos voisins apparaît chez nous comme angoissante. Ensuite (…), comme ailleurs, cette situation peut durer. Il faut du temps pour se parler et faire des compromis. ». L'angoisse du gouvernement fantôme, ou zombie. Retour à une vieille république.

    Et le président du groupe indépendants au Sénat a mis l'accent sur la difficulté politique des compromis à négocier : « Ces derniers seront qualifiés de compromissions par tous les extrémistes et autres virtuoses des réseaux antisociaux, qui ne manqueront pas de confirmer leur rôle de plaie démocratique auprès d’une population qu’ils ont déjà largement contribué à rendre antiparlementaire et défiante. ».

    Enfin, troisième difficulté : « La perspective de l’élection présidentielle n’incite personne, une fois n’est pas coutume, à rejoindre un gouvernement qui sera fragile à l’Assemblée Nationale et impopulaire du fait des contraintes de la dette et des décisions difficiles que celle-ci impose. ».


    L'état des lieux des forces politiques n'est pas plus réjouissant. À l'extrême droite : « Le Rassemblement national, en forte progression, ne peut gouverner faute d’alliés. De toute façon, il ne le souhaite pas : il attend son heure. ». À gauche : « La gauche est piégée par le Nouveau front populaire, qui lui a permis de sauver ses sièges, mais qui l’a livrée à sa frange la plus radicale, dont le but est non pas de gouverner, mais de rendre le pays ingouvernable. La stratégie du chaos à l’Assemblée Nationale comme dans la rue se poursuivra, pour permettre au sous-commandant Marcos de la Canebière, de plus en plus suffisant, mais de moins en moins nécessaire, de figurer au second tour de l’élection présidentielle de 2027. Son objectif immédiat est d’étouffer dans l’œuf toute hypothèse d’un Premier Ministre issu des rangs de ses alliés. Si je puis me permettre un conseil à ces derniers : dans l’intérêt de la France comme dans le vôtre, chers collègues, échappez-vous du syndrome de Stockholm qu’est devenu le NFP ! Vous méritez mieux que d’être traités de "punaises de lit" ! ».
     

     
     


    Pour Claude Malhuret, la seule réponse aux électeurs à l'issue de ces élections législatives, c'est le front républicain : « Pas de front national, pas de front populaire : la seule hypothèse possible est celle du front républicain. Elle suppose, comme chez nos voisins, mais à rebours des traditions françaises, l’alliance de tous les démocrates, depuis la droite républicaine jusqu’à la gauche de gouvernement. ».

    Une telle configuration, qui demanderait de mettre d'accord socialistes, macronistes et républicains, serait difficile à mettre en place, et pourtant, d'un point de vue arithmétique, c'est la seule viable pour l'année sans dissolution qui vient : « Elle sera difficile, lente, incertaine et provisoire. Elle suppose que des gens qui ont l’habitude de se combattre apprennent à se parler, qu’ils résistent dans chaque camp aux extrêmes quand ces derniers crieront à la trahison et qu’ils aient le courage de s’en séparer. Elle suppose, enfin, qu’ils acceptent la tâche ingrate de se contenter de stabiliser un pays pour l’heure sans boussole, autour de mesures qui peuvent rassembler. Contrairement à ce que nous pouvions redouter, l’annonce d’un pacte d’action législative (…) montre que le pire n’est jamais certain et que la sagesse a quelques chances de l’emporter. Cette perspective n’est pour le moment qu’un espoir ténu, une éventualité qui peut s’effondrer à la moindre bourrasque politique. Cependant, c’est la seule qui ait aujourd’hui une chance de se réaliser. Je ne doute pas qu’une majorité de notre assemblée défende le choix de la sagesse dans ce moment difficile. Notre groupe ne ménagera pas ses efforts pour y parvenir. ».

    Pour une fois, Claude Malhuret ne s'est pas contenté que de beaux mots et de tirer comme dans un chamboule-tout, mais aussi d'un espoir, celui de trouver cette majorité impossible, introuvable dans l'état actuel des forces politiques. Cela nécessiterait donc l'éclatement assumé de cette nouvelle farce populaire (NFP) et la reprise de liberté des socialistes actuellement vassalisés par leur seigneur insoumis. Pas sûr que le PS ait ce courage politique et possible qu'ils préfèrent se morfondre à la remarque de groupes plus radicalisés qu'eux. Avant leur patriotisme de gauche qui, dans ces conditions, les mènerait tout droit vers l'inexistence politique à l'élection présidentielle, ils devraient prendre en compte l'intérêt national, c'est le seul qui vaille.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (18 juillet 2024)
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    Pour aller plus loin :
    Claude Malhuret au Sénat : le spectacle continue !
    Ukraine : Claude Malhuret se gausse de Jordan Selfie !
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    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240718-malhuret.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/claude-malhuret-au-senat-le-255916

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  • Le droit de vote à 18 ans, c'était il y a 50 ans grâce à Giscard !

    « De ce jour date une ère nouvelle de la politique française, celle du rajeunissement, et du changement de la France. » (VGE, le 27 mai 1974).

     

     
     


    L'affiche est connue, c'était le début de l'ère moderne de la communication politique. Valéry Giscard d'Estaing avait fait contribuer sa plus jeune fille Jacinte, elle venait alors d'avoir 14 ans (elle est morte avant son père en janvier 2018), pour sa campagne présidentielle de 1974. Dans ses bagages, avec son élection très serrée face au candidat socialiste François Mitterrand, le droit de vote à 18 ans. Plus exactement, la majorité à 18 ans qui a été adoptée définitivement par le Parlement français il y a cinquante ans, le 28 juin 1974.

    Le droit de vote est toute une histoire. La majorité civile était fixée par décret le 20 septembre 1792 à l'âge de 21 ans pour les hommes et les femmes (au lieu de 25 ans), ce décret complétait le décret du 28 août 1792 qui avait aboli les droits des pères sur leurs enfants majeurs. Le Code Napoléon l'a ensuite modifiée en 1804 en la fixant à 21 ans pour les femmes et 25 ans pour les hommes. Puis, la majorité a été fixée à 21 ans pour tous par la loi du 21 juin 1907.

    Mais le droit de vote n'était pas vraiment couplé avec la majorité civile. D'abord, les femmes n'ont eu le droit de vote que le 21 avril 1944. Quant aux hommes, après la Révolution, le suffrage était souvent censitaire : sous la Restauration, en 1815, ils pouvaient voter seulement à partir de 30 ans et seulement s'ils payaient beaucoup d'impôts. Avec la Monarchie de Juillet, en 1830, les conditions se sont assouplies : l'âge à partir duquel un homme pouvait voter a été abaissé à 25 ans et le seuil des impôts payés réduit du tiers. En 1848, l'âge a encore baissé et le suffrage est devenu universel au lieu de censitaire, c'est-à-dire que tous les hommes de plus de 21 ans, quel qu'ils fussent devant l'impôt, pouvaient voter.

    Valéry Giscard d'Estaing a été élu le 19 mai 1974 et a pris ses fonctions le 27 mai 1974. Son objectif : faire de la France (qui était en retard pour l'âge du droit de vote par rapport à ses voisins) une « société libérale avancée ».Il n'a donc pas perdu de temps et a fait très rapidement adopter sa première réforme de société, très attendue par les jeunes : l'Assemblée Nationale a adopté en procédure d'urgence (sur le rapport d'Alain Terrenoire) à main levée et à la quasi-unanimité le projet de loi fixant la majorité civile à 18 ans (au lieu de 21 ans) le 25 juin 1974 et le Sénat l'a adopté dans la lancée le 28 juin 1974 (sur le rapport de Jacques Genton). Cette adoption définitive a entraîné logiquement la promulgation de la loi le 5 juillet 1974 (loi n°74-631 du 5 juillet 1974 fixant à 18 ans l'âge de la majorité) par le nouveau Président de la République, élu à 48 ans, ce qui était le record de jeunesse depuis 1870 (en 2017, Emmanuel Macron l'a battu à 39 ans). Ont signé aussi ce texte le Premier Ministre Jacques Chirac et les ministres Michel Poniatowski (Intérieur), Jean Lecanuet (Justice), Jacques Soufflet (Défense) et Olivier Stirn (DOM-TOM).
     

     
     


    À l'origine, le garde des sceaux Jean Lecanuet avait voulu proposer le droit de vote à 18 ans tout en maintenant la majorité civile à 21 ans. Ce furent les députés, au cours de l'examen en séance publique, qui ont voulu carrément abaisser l'âge de la majorité civile à 18 ans. C'était une révolution puisque cela modifiait l'âge adopté en 1848 ! Cela signifiait par exemple qu'au-delà du droit de vote, les jeunes de 18 à 21 ans pouvaient aussi se marier et ouvrir un compte bancaire sans obtenir l'accord de leurs parents.

    Beaucoup ont dit que cette réforme était une conséquence de la révolte étudiante de mai 1968. Valéry Giscard d'Estaing était arrivé à l'Élysée sous le signe de la jeunesse et c'est pourquoi il a voulu faire cette réforme la premier signe emblématique du renouveau sociétal. Son concurrent du second tour François Mitterrand y était également favorable puisque cette mesure faisait partie du programme commun de la gauche. Du reste, le Premier Ministre Pierre Messmer, avant VGE, avait proposé un même texte dès 1972 mais son processus législatif n'a pas pu aboutir à cause de la mort de Georges Pompidou (et aussi parce que ce dernier y était plutôt opposé).

    C'étaient 2,4 millions de jeunes entre 18 et 21 ans qui étaient concernés mais ceux-ci se sont finalement sentis un peu floués car il n'y a pas eu d'élections importantes avant les élections municipales de mars 1977, c'est-à-dire que les jeunes de 18 ans en 1974 allaient avoir de toute façon 21 ans en 1977 (il y avait cependant des élections cantonales en mars 1976 mais seulement pour la moitié des cantons).
     

     
     


    Cette réforme a fait donc partie d'une série de réformes faites dans les premières années du septennat de VGE visant à moderniser la France, à adapter la loi aux mœurs, et après la majorité à 18 ans, il y a eu le remboursement de la pilule le 4 décembre 1974 (la contraception est devenue un "droit individuel"), la dépénalisation de l'IVG le 17 janvier 1975, portée par Simone Veil, la libéralisation de l'audiovisuel par l'éclatement de l'ORTF le 6 janvier 1975, le divorce par consentement mutuelle le 11 juillet 1975, etc. À cela, il faut ajouter une révolution constitutionnelle avec la révision du 29 octobre 1974 permettant à 60 parlementaires de saisir le Conseil Constitutionnel sur la conformité d'un projet de loi adopté définitivement au Parlement (ce qui a donné un grand pouvoir à l'opposition pour s'opposer juridiquement aux textes de la majorité ; auparavant la saisine du Conseil Constitutionnel était réservée aux seuls Président de la République et Présidents des deux assemblées).

    Le politologue Raymond Aron a ainsi commenté cette réforme le 22 novembre 1974 sur France Culture, de manière un peu dubitative : « Il [VGE] a voulu mettre, pour ainsi dire, au défi, les commentateurs, les adversaires, les critiques et être le Président le plus jeune de l'histoire de France qui accordait le droit de vote aux garçons et aux jeunes filles de 18 ans. (…) Il est évident que demander aux garçons et aux jeunes filles de 18 ans de décider de ceux qui nous gouverneront est un pari. ».
     

     
     


    Et effectivement, si le pari pour la capacité des jeunes était gagné d'avance (même si le problème ultérieur serait plutôt que beaucoup de jeunes s'en moqueraient, soit ne s'inscrivant pas sur les listes électorales soit s'abstenant massivement), le pari était plutôt sociologique et politique pour Valéry Giscard d'Estaing puisque les enquêtes d'opinion montraient clairement que les jeunes de 18 à 21 ans lui préféraient le leader de gauche. C'était là le courage politique de Valéry Giscard d'Estaing dont les décisions relevaient de l'intérêt général et pas de son intérêt électoral immédiat. Car en 1981, la jeunesse française a voté massivement pour François Mitterrand, ce qui a contribué à sa défaite sévère (défaite toutefois qui aurait sans doute eu lieu sans cette réforme).

    Depuis quelques années, on parle maintenant du droit de vote dès l'âge de 16 ans (éventuellement seulement pour les élections municipales), à l'image de l'Équateur, du Brésil ou de l'Autriche, mais les propositions de loi allant dans ce sens n'ont pour l'instant jamais abouti. Après tout, depuis le 1er janvier 2024, on peut passer le permis de conduire de série B dès l'âge de 17 ans révolu, selon le décret du 20 décembre 2023.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (28 juin 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Le droit de vote à 18 ans, c'était il y a 50 ans grâce à Giscard !
    Lucien Neuwirth  et la contraception.
    Le vote des femmes en France.
    Femmes, je vous aime !
    Ni claque ni fessée aux enfants, ni violences conjugales !
    Violences conjugales : le massacre des femmes continue.
    L'IVG dans la Constitution (3) : Emmanuel Macron en fait-il trop ?
    Discours du Président Emmanuel Macron le 8 mars 2024, place Vendôme à Paris, sur l'IVG (texte intégral et vidéo).
    L'IVG dans la Constitution (2) : haute tenue !
    L'IVG dans la Constitution (1) : l'émotion en Congrès.
    La convocation du Parlement en Congrès pour l'IVG.
    L'inscription de l'IVG dans la Constitution ?
    Simone Veil, l’avortement, hier et aujourd’hui…
    L’avortement et Simone Veil.
    Le fœtus est-il une personne à part entière ?
    Le mariage pour tous, 10 ans plus tard.
    Rapport 2023 de SOS Homophobie (à télécharger).
    Six ans plus tard.
    Mariage lesbien à Nancy.
    Mariage posthume, mariage "nécrophile" ? et pourquoi pas entre homosexuels ?
    Mariage annulé : le scandaleux jugement en faveur de la virginité des jeunes mariées.
    Ciel gris sur les mariages.

    Les 20 ans du PACS.
    Ces gens-là.
    L’homosexualité, une maladie occidentale ?
    Le coming out d’une star de la culture.
    Transgenres adolescentes en Suède : la génération sacrifiée.
    PMA : la levée de l’anonymat du donneur.
    La PMA pour toutes les femmes.










    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240628-majorite-18-ans.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/le-droit-de-vote-a-18-ans-c-etait-255289

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/06/27/article-sr-20240628-majorite-18-ans.html


     

  • Jean-Claude Gaudin... pas seulement Marseille !

    « Personnellement, vous savez très bien que lorsque j'étais maire en fonction, j'ai toujours permis au bateau l'Aquarius de venir à Marseille. Il y a une question d'humanité. Je suis un démocrate chrétien, par conséquent, je suis sur la même ligne que l'archevêque de Marseille, actuellement cardinal, Monseigneur Aveline. » (Jean-Claude Gaudin, le 20 septembre 2023 sur France Bleu Provence).



     

     
     


    C'est dans sa résidence secondaire de Saint-Zacharie, dans le Var, que l'ancien maire de Marseille Jean-Claude Gaudin est mort à l'âge de 84 ans et demi (né le 8 octobre 1939 à Marseille). Contrairement à l'image qu'il a eue de certains observateurs, une image de droite musclée, Jean-Claude Gaudin était un centriste, un centriste de droite, certes, mais un centriste d'abord.

    D'où sa position pleine d'humanité sur les réfugiés voulant entrer en Europe : il comprenait parfaitement la position du pape François et il s'est félicité de sa venue à Marseille. Il disait d'ailleurs régulièrement à son conseil municipal, lorsqu'il était maire de Marseille : « Je veux rester maire tant que le pape ne vient pas à Marseille ! ». De quoi inquiéter les plus ambitieux ! Il a finalement quitté son bureau en juillet 2020 (à l'âge de 80 ans !) avant l'arrivée du pape, mais il a pu le voir à Marseille, trois ans plus tard, dans le Vélodrome qu'il avait lui-même rénové. Il en était très fier.

    Il n'est pas non plus mort les bottes aux pieds, comme son illustre prédécesseur Gaston Defferre, mort à 75 ans après s'être disputé avec ses amis socialistes, et après trente-trois ans du mandat de maire. Jean-Claude Gaudin n'aura été que vingt-cinq ans maire de Marseille, c'était son bâton de maréchal, le poste qu'il convoitait depuis toujours, et il l'a reçu assez tardivement, à 55 ans (Gaston Defferre, à 42 ans). Il a mis trente ans pour atteindre la mairie. Mais il n'y avait pas que Marseille pour Jean-Claude Gaudin. Son champ d'action était la France.

    Au début des années 1980, Jean-Claude Gaudin était l'un des leaders nationaux les plus importants de l'opposition UDF-RPR. Lui était UDF et, comme président du groupe UDF à l'Assemblée Nationale, il savait tonner de sa voix mélodieuse, l'accent marseillais, avec du coffre, il était en quelque sorte le Charles Pasqua des centristes ; à l'époque, Charles Pasqua était le président du groupe RPR au Sénat.

    Issu d'une famille modeste (son père était un ouvrier démocrate chrétien, membre du MRP), Jean-Claude Gaudin a commencé sa vie professionnelle comme professeur d'histoire géographie dans un collège et lycée à Marseille. Il s'est fait élire conseiller municipal de Marseille pour la première fois en mars 1965 (à l'âge de 25 ans) : il était alors sur la liste du maire sortant Gaston Defferre, rassemblant des élus socialistes et des élus centristes. À l'époque, Gaston Defferre était une personnalité politique de la SFIO très importante sur le plan national, pressentie pour être candidat à l'élection présidentielle. Jean-Claude Gaudin était élu avec l'étiquette du CNIP, le parti d'Antoine Pinay, qui est devenu par la suite Républicains indépendants (RI), Parti républicain (PR) et UDF de Valéry Giscard d'Estaing, Démocratie libérale (DL) d'Alain Madelin, puis UMP de Jacques Chirac et Alain Juppé, et LP, de Nicolas Sarkozy.

     

     
     


    Réélu en 1971 sur la liste du même, celle de Gaston Defferre, Jean-Claude Gaudin fut conseiller délégué chargé de la police administrative et de la protection civile. En 1977, il a "quitté" Gaston Defferre qui a dû intégrer les communistes dans sa majorité municipale, perdant ainsi toute son aile centriste. Gaston Defferre, qui aurait pu être le mentor, le parrain, est devenu l'adversaire irréductible.

    Soutien de Valéry Giscard d'Estaing à l'élection présidentielle de 1974, il s'est fait élire député des Bouches-du-Rhône en mars 1978 (à l'âge de 38 ans) avec 53,7% des voix, en battant le député PS sortant Charles-Émile Loo, et s'est montré très rapidement comme l'un des ténors du giscardisme parlementaire. Il fut élu et réélu de mars 1978 à octobre 1989. Jean-Claude Gaudin est devenu une véritable personnalité nationale lorsqu'il a été élu président du groupe UDF à l'Assemblée Nationale en 1981, c'était désormais un groupe d'opposition, et il y est resté jusqu'en 1989.

    Pendant ces huit années, il a été dans toutes les batailles politiques et parlementaires et était une bonne courroie de transmission de Jacques Chirac afin de sceller l'alliance entre l'UDF et le RPR contre la majorité socialo-communiste voulue par François Mitterrand. Gaston Defferre était alors l'indéboulonnable Ministre de l'Intérieur de 1981 à 1984, puis Ministre de l'Aménagement du Territoire de 1984 à 1986. Élu conseiller général de Marseille de 1982 à 1988, Jean-Claude Gaudin s'est présenté à la mairie de Marseille en mars 1983 dans un contexte très favorable au centre droit, mais avec un mode de scrutin (concocté par Gaston Defferre lui-même !) qui l'a défavorisé. Résultat, il a été balayé par le maire sortant.





    Lors du retour de l'alliance UDF-RPR au pouvoir, en mars 1986, Jacques Chirac, de nouveau Premier Ministre, proposa à Jean-Claude Gaudin le Ministère des Relations avec le Parlement. Poste qu'il a refusé car il pensait que la cohabitation serait de courte durée.

    Et puis, il avait gagné une autre bataille, celle des élections régionales, désormais au suffrage universel direct. Succédant à Michel Pezet, l'ancien dauphin de Gaston Defferre (et nouveau rival interne), Jean-Claude Gaudin a été élu président du conseil régional de Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA) en mars 1986, réélu en mars 1992 jusqu'en mars 1998. En 1986, il y a eu l'entrée massive aux régionales et aux législatives d'élus du Front national. Pour obtenir une majorité au conseil régional de PACA (le scrutin était à la proportionnelle : centre droit 47 sièges, gauche 45 sièges et FN 25 sièges), il a fait alliance tacite avec le FN, ce qui l'a discrédité auprès d'une partie du centre (Plantu le représentait alors avec un cactus). En 1992, Jean-Claude Gaudin avait deux adversaires de taille, Jean-Marie Le Pen et Bernard Tapie.

     

     
     


    Son objectif était de battre la gauche. Il venait ainsi de la déboulonner au conseil régional que le PS détenait depuis sa création en 1974 et il espérait bien la déboulonner à la mairie en 1989. Mais la situation locale était plus difficile pour lui : d'une part, la mort de Gaston Defferre en 1986 a favorisé un socialiste très modéré, Robert Vigouroux qui, loin de vouloir n'être qu'un maire de transition, a été réélu sur des listes indépendantes en 1989, à la fois contre les listes socialistes et contre les listes de Jean-Claude Gaudin. Pour ce dernier, avec seulement 26,1% des voix, l'échec fut cinglant.

    Dans son analyse, c'était son alliance avec le FN à la région en 1986 qui a été la cause de cet échec. Désormais, il fut l'adversaire total de l'extrême droite, allant jusqu'à appeler à voter pour le candidat communiste sortant Guy Hermier dans son duel avec un candidat FN aux élections législatives de 1993. N'oublions pas non plus qu'au début des années 1990, Bernard Tapie a fait son entrée tonitruante dans la vie politique, à la fois nationale mais aussi marseillaise, se faisant élire député, nommé ministre en 1992, menant une liste aux élection régionale de 1992, et aussi aux élections européennes de 1994. La perspective d'une candidature de Bernard Tapie aux municipales de 1995 à Marseille, faute de candidature à l'élection présidentielle, était une hypothèse impossible à exclure. Ses déboires judiciaires eurent raison de ses ambitions-là.

    Auparavant, Jean-Claude Gaudin, toujours parlementaire, a changé d'assemblée : il s'est fait élire sénateur des Bouches-du-Rhône en septembre 1989 et le resta jusqu'en septembre 2017, sauf pendant sa période gouvernementale. Il présida brièvement le groupe des sénateurs indépendants en 1995.

    L'année 1995 fut son année majeure. Encore sénateur et président du conseil régional de PACA, il s'est enfin fait élire maire de Marseille en juin 1995 (son premier adjoint était le gaulliste Renaud Muselier). Il aurait dû démissionner d'un de ces mandats, mais en étant nommé Ministre de l'Aménagement du Territoire, de la Ville et de l'Intégration du 7 novembre 1995 au 2 juin 1997 dans le second gouvernement d'Alain Juppé, il pouvait garder les deux mandats de chef d'exécutif (région et mairie) qu'il a pu prolonger jusqu'en mars 1998. Le centre droit perdit les élections régionales de 1998 à cause des nombreux élus FN, ce qui profita à la gauche et au socialiste Michel Vauzelle.
     

     
     


    Jean-Claude Gaudin n'a repris un mandat de sénateur qu'en septembre 1998 où il occupa la vice-présidence du Sénat d'octobre 1998 à mars 2011 et d'octobre 2014 à septembre 2017. Entre mars 2011 et octobre 2014, il fut le président de l'imposant groupe UMP au Sénat, dans une période (à partir d'octobre 2011) où l'UMP était dans l'opposition sénatoriale (succédant à Gérard Longuet nommé Ministre de la Défense dans le gouvernement de François Fillon).

    Il faut aussi rappeler que lors de la création de l'UMP en 2002, il fut partie prenante et même l'un des dirigeants les plus importants, comme vice-président délégué de l'UMP de 2002 à 2004 puis vice-président de 2004 à 2007 et de 2013 à 2014 (il fut même président par intérim de l'UMP du 16 juillet 2004 au 28 novembre 2004 après la mise en examen et la démission d'Alain Juppé). Il fut surtout le très influent président de la commission nationale d'investiture de l'UMP de 2002 à 2013 et le président du comité de liaison de la majorité présidentielle de 2009 à 2012, sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy. Au sein de l'UMP et de LR, il a soutenu Jean-François Copé en novembre 2012, Nicolas Sarkozy en novembre 2016 et Laurent Wauquiez en décembre 2017.

    À partir de 1995, l'attention de Jean-Claude Gaudin se porta principalement sur sa ville de Marseille. Il est resté maire de Marseille pendant quatre mandats, de mars 1995 à juin 2020. En 2008, il a battu les listes de Jean-Noêl Guérini (PS) ; en 2014, celles de Patrick Mennucci (PS) et celles de Stéphane Ravier (FN).


    Il fut élu également président de la communauté urbaine de Marseille de 1995 à 2008 (en 2008, Renaud Muselier échoua à lui succéder au profit d'un socialiste), puis président de la métropole d'Aix-Marseille-Provence de 2015 à 2018. Il fut par ailleurs président de l'Association des communautés urbaines de France de 2002 à 2003. À la fin de l'été 2015, un membre du Conseil Constitutionnel, Hubert Haenel est mort. Le Président du Sénat, Gérard Larcher, chargé de nommer son remplaçant, proposa alors à Jean-Claude Gaudin ce mandat. Ce dernier refusa car il voulait mettre en place la métropole Aix-Marseille après sa réélection en mars 2014 (son installation a eu lieu le 9 novembre 2015). Jean-Jacques Hyest succéda finalement à Hubert Haenel au Conseil Constitutionnel.
     

     
     


    Jean-Claude Gaudin a démissionné de la présidence de la métropole le 6 septembre 2018 pour protester contre les intentions du gouvernement de fusionner la métropole avec le département. Martine Vassal lui a succédé, également présidente du conseil départemental des Bouches-du-Rhône depuis mars 2015. Pour les élections municipales de 2020, Jean-Claude Gaudin a soutenu la candidature de Martine Vassal contre son ancien dauphin Bruno Gilles, mais ce fut la gauche qui gagna (l'écologiste Michèle Rubirola, puis le socialiste Benoît Payan).

    S'il a réussi à s'épanouir politiquement à Marseille, Jean-Claude Gaudin n'a sans doute pas eu ce qu'il méritait sur la scène nationale, à savoir un grand ministère comme l'Intérieur ou la Défense. Il faisait partie de ces responsables politiques qui n'avaient pas besoin de titre pour avoir l'écho espéré des médias ; lui seul suffisait, sa propre identité suffisait à faire entendre sa voix, sans forcément avoir eu besoin de ses nombreux titres et autres dont les deux principaux furent d'être à la tête de la région PACA de pendant douze ans et d'être maire de Marseille pendant vingt-cinq ans.

    Lors de sa retraite, Jean-Claude Gaudin est intervenu pour dire sa grande fierté que le pape François ait choisi Marseille pour seul voyage en France depuis le début de son pontificat. Son amour de Marseille a sans doute influencé son analyse sur le possible prochain pape : pourquoi pas le cardinal Jean-Marc Aveline (65 ans), archevêque de Marseille depuis le 8 août 2019 ? Réponse le 20 septembre 2023 sur France Bleu Provence : « Ce dont je suis sûr, c'est que c'est un excellent archevêque, il est très estimé. Ensuite, depuis qu'il est cardinal, je regarde son agenda. Je suis stupéfait de tous les engagements qu'il prend. Il est un symbole et un grand défenseur de l'Église catholique et de l'Église qui est à Marseille. ».

    Dans cette même interview, Jean-Claude Gaudin concluait en affirmant qu'il était en assez bonne santé malgré son grand âge : « Je vais plutôt bien. Je vais avoir 84 ans dans quelques jours, alors je commence à avoir les problèmes de cet âge-là ! Voyez-vous, j'ai les chevilles qui gonflent... Généralement, pour les hommes politiques, c'est la tête qui gonfle ! Néanmoins, mon cœur va bien et ma tête aussi. (…) Au fur et à mesure qu'on avance dans l'âge et que l'on commence à avoir quelques petits problèmes de santé, Dieu merci, ils ne sont pas trop graves, on pense à ce que sera l'au-delà... Moi, j'espère que je n'irai pas au purgatoire et que j'irai au ciel directement. ».


    Ce mardi 21 mai 2024 à 17 heures, à la mairie de Marseille, Benoît Payan présidera une cérémonie d'hommage en l'honneur de son prédécesseur, quelques jours avant son enterrement. RIP.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (20 mai 2024)
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    La France est-elle un pays libéral ?
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    Antoine Pinay.
    Joseph Laniel.
     

     
     




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