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  • François Hollande sera-t-il le Premier Ministre de son ancien Ministre de l'Économie ?

    « En politique, je le sais au fond de moi, il est irrationnel de ne pas tenir compte de l'irrationalité. » (François Hollande, 11 avril 2018).



     

     
     


    Cette petite phrase, elle pourrait s'appliquer à son auteur qui l'a publiée au milieu de ses mémoires d'ancien Président de la République le 11 avril 2018 (aux éd. Stock). Justement, François Hollande est à l'honneur ce lundi 12 août 2024 puisqu'il fête son 70e anniversaire. 70 ans, de nos jours, c'est "rien", mais néanmoins, en politique, c'est déjà un âge canonique, pourrait-on dire par un euphémisme mal compris.

    Concrètement, François Hollande a repris un dosette d'eau de Jouvence en juin dernier. Rappelez-vous ! En décembre 2016, lucide sur sa capacité à mobiliser les foules d'électeurs, le Président de la République en exercice avait renoncé à solliciter un nouveau mandat. Son Premier Ministre Manuel Valls l'avait alors abandonné pour se lancer, avec l'insuccès que l'on sait, dans l'aventure de la primaire socialiste. Finalement, son ancien Ministre de l'Économie Emmanuel Macron a gagné l'élection présidentielle en 2017 et pour l'ancien mentor qui l'avait nommé Secrétaire Général adjoint de l'Élysée en 2012, ce fut la traversée du désert (au lieu de la fierté).


    De sa génération, peu ont raccroché : Ségolène Royal cherche toujours à se faire voir et à croire qu'on viendra la chercher ; François Bayrou est toujours une personnalité influente qui reste opérationnelle (chef de parti et maire d'une grande ville) ; Nicolas Sarkozy peut penser, mais de moins en moins, qu'il pourrait devenir un recours. Il n'y a guère que François Fillon qui a lâché prise pour s'investir dans d'autres affaires que la politique.

    François Hollande, comme Nicolas Sarkozy, a bien sûr une position doublement singulière dans la vie politique : d'une part, il a été le chef d'un grand parti gouvernemental réduit à peau de chagrin ; d'autre part (le plus important), il est un ancien Président de la République, et quand on a moins de 80 ans, on se demande toujours ce qu'on peut faire d'utile pour le pays... ou pour soi. Sous la Cinquième République, De Gaulle, François Mitterrand et Jacques Chirac ont quitté l'Élysée et leur vie politique en même temps, terminant leur destinée par quelques mémoires. Seul, Valéry Giscard d'Estaing, battu en 1981 à l'âge de 54 ans, a refait toute une carrière politique, reprenant le plus bas échelon dès 1982 avec un mandat cantonal, puis parlementaire, régional, municipal, etc.


    En raison de l'échec de Nicolas Sarkozy à la primaire LR de novembre 2016, ce qui l'a conduit à renoncer à toute prétention ultérieure, le seul qui pourrait se faire comparer à VGE serait donc François Hollande : les deux se sont fait réélire député après leur mandat présidentiel. En 1986, parmi certaines hypothèses, certes peu plausibles, Valéry Giscard d'Estaing aurait même pu devenu le Premier Ministre de son meilleur adversaire politique, François Mitterrand, mais Jacques Chirac avait veillé sur sa propre influence.

    Aujourd'hui, François Hollande est plongé dans une grande irrationalité. Il s'est présenté sous l'étiquette de la nouvelle farce populaire (NFP) alors que ce mouvement baroque ne correspondait absolument pas à ses options politiques. Fallait-il sacrifier ses convictions pour un plat de lentilles ? C'est un peu le cas pour ceux qui se croyaient sociaux-démocrates, qui ont blâmé Emmanuel Macron pour le petit écart de déficit en 2023 et qui viennent de signer pour au moins 150 milliards d'euros de dépenses publiques supplémentaires, rien que cela ! J'avais parlé d'irresponsabilité, on peut aussi parler d'irrationalité.
     

     
     


    Tous ceux, de ses camarades socialistes, qui ont saboté son socle politique pendant son quinquennat, ceux qu'on a appelés les frondeurs, sont aujourd'hui à la manœuvre au sein du NFP. Les politologues et les historiens se poseront longtemps la question du pourquoi de la dissolution du 9 juin 2024, mais ils se poseront aussi la question sur la motivation qui a amené François Hollande à reprendre du service (à la fin de son mandat de député de cinq ans, il aurait donc près de 75 ans) sous les couleurs d'une gauche ultradicalisée qui n'est certainement pas la sienne mais celle de ceux qui l'ont toujours détesté et détesté ses options, à commencer par un ancien apparatchik socialiste, Jean-Luc Mélenchon.

    On peut toutefois imaginer les motivations de François Hollande qui a été réélu de manière assez laborieuse, avec seulement 43,1% des voix au second tour dans une triangulaire contre le candidat RN et le député LR sortant, ce qui est son plus mauvais score, même lorsqu'il a été battu en mars 1993, il l'a été avec quand même 46,1%.

    La première motivation, très "désintéressée", c'est de tempérer les folles ardeurs dépensières du NFP afin de maintenir la France dans une ligne budgétaire qui reste compatible à son appartenance à l'Europe et à la zone euro. Boulot d'Hercule, pour certains ; mission impossible pour tous les autres. En tout cas, ce n'est pas avec Lucie Castets, déjà à l'œuvre à la ville de Paris, qu'on peut se rassurer.

    La seconde motivation, c'est de reprendre de l'activité politique et on imagine sans mal que la fonction de simple député ne lui suffira pas. Le perchoir aurait pu être un beau lot de consolation et les rumeurs parlaient de lui parmi de nombreux autres candidats potentiels, mais il s'est bien gardé de tenter sa chance dans une élection qui a finalement montré que le NFP n'avait pas la majorité, même relative.

    Mais d'autres hypothèses peuvent se présenter à lui, en particulier dans la recherche d'un Premier Ministre introuvable. Cheval de Troie au NFP, il reprendrait alors le dessus sur les dirigeants du NFP inféodés au mélenchonisme : car la seule majorité possible est une majorité qui irait des socialistes aux LR et l'idée d'un chef du gouvernement macroniste est peu crédible pour rassembler d'autres composantes de cette majorité impossible, et des LR et des socialistes, les socialistes sont les plus nombreux. La logique voudrait donc que Matignon revienne plus à un socialiste de type social-démocrate qu'à une personnalité d'origine LR comme Xavier Bertrand, même si la désignation de ce dernier semble une option sérieusement étudiée à l'Élysée.

    De plus, François Hollande a une seule spécialité pour laquelle il est reconnu, c'est la capacité à faire des synthèses. Il l'a pratiquée en tant que premier secrétaire du PS de 1997 à 2008, notamment lors du référendum sur le TCE en 2005 où il a réussi le tour de force de garder uni un PS archi-divisé entre les pro-TCE et les anti-TCE. Le Premier Ministre de l'été 2024 devra à l'évidence être capable de construire des compromis sur des bases à l'origine très divergentes.
     

     
     


    Dans son bouquin déjà cité, François Hollande se reconnaît un défaut ou une qualité, selon la perspective que l'on donne à ce trait de caractère marquant : « Au prétexte que j'avais longtemps comme dirigeant politique cherché la synthèse pour rassembler, on m'imputa l'habitude de préférer l'équilibre à l'audace, le dialogue à l'autorité, la prudence à la surprise ; alors que l'air du temps, nous disait-on, exigeait intrépidité, rapidité et fermeté. ».

    Il expliquait également la raison pour laquelle il n'avait pas réformé le mode de scrutin pour les élections législatives : « La stabilité que nous confèrent nos institutions tient au fait majoritaire. Le scrutin proportionnel, en éclatant la représentation, priverait le chef de l'État d'un appui solide pour mener ses réformes. Il élargirait la place réservée aux extrêmes et donc obligerait à une coalition des partis de gouvernement comme on le voit en Allemagne, ce qui engendrerait à mes yeux confusion partisane et radicalisation politique. ».

    Cette analyse est pertinente et reste pertinente malgré la situation issue des élections anticipées du 30 juin et 7 juillet 2024. En effet, le scrutin proportionnel ferait de la situation actuelle la seule représentation possible, et on voit bien à quel point la classe politique est incapable, aujourd'hui, de l'assumer. En d'autres termes, le scrutin majoritaire à deux tours ne donne pas obligatoirement une majorité absolue (exemples de 1958, 1988, 2022 et 2024), alors que le scrutin proportionnel donnerait obligatoirement une situation chaotique.

    Premier Ministre "normal" ? Premier Ministre d'Emmanuel Macron ? Après tout, c'est lui qui l'avait promu à l'Élysée puis à Bercy. Il racontait sa relation avec Emmanuel Macron ainsi : « Je pressens chez lui un talent rare pour réunir des gens de sensibilités différentes. (…) Emmanuel Macron se révèle un conseiller hyperactif, dormant peu et recevant beaucoup, s'intéressant à tout, sans œillères, formulant des vues originales, détonnant par sa liberté d'esprit au sein de l'administration. (…) Il croit volontiers (…) que tout risque de conflit peut être surmonté par un dialogue direct entre personnes de bonne foi, que toute difficulté peut être dépassée par une forme d'impétuosité. Il est sûr que le réel se pliera de bonne grâce à sa volonté dès lors qu'elle s'exprime. ».

    Le réel se pliera-t-il à la volonté du peuple du 7 juillet 2024 ? Le chantre de la synthèse et le dieu du en-même-temps auront au moins un langage commun. Reste pour eux à convaincre leurs troupes que gouverner dès maintenant, sans attendre 2027, est un impératif de responsabilité ...et de raison !


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (10 août 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    François Hollande sera-t-il le Premier Ministre de son ancien Ministre de l'Économie ?
    François Hollande dans l'irresponsabilité totale !
    François Hollande : si j’étais Président…
    Julie Gayet.
    Ségolène Royal.
    Élysée 2022 : François Hollande candidat ?
    François Hollande veut américaniser les institutions françaises.

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240812-hollande.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/francois-hollande-sera-t-il-le-256016

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/08/11/article-sr-20240812-hollande.html



     

  • Législatives 2024 (22) : qui au perchoir ?

    « Plaçons notre espérance dans la capacité de nos responsables politiques à faire preuve de sens de la concorde et de l’apaisement dans votre intérêt et dans celui du pays. Notre pays doit pouvoir faire vivre, comme le font tant de nos voisins européens, cet esprit de coalition et de dépassement que j’ai toujours appelé de mes vœux. » (Emmanuel Macron, le 10 juillet 2024).



     

     
     


    La situation politique est particulièrement désordonnée : les électeurs ont refusé de donner une majorité à l'un des trois grands pôles de la vite politique, mais la plupart des partis politiques refusent de l'admettre. Ainsi, les uns pensent qu'ils ont gagné alors qu'ils ne représentent que 32% de la représentation nationale, les autres se croient confortés dans l'objectif de ne pas se mettre au travail et d'attendre tranquillement les mains dans les poches un an de désordre et de blocage dans l'optique d'une élection présidentielle qui, pourtant, les sanctionnerait sévèrement pour leur manque d'esprit de responsabilité.

    Heureusement que le Président Emmanuel Macron a recadré un peu les choses. On ne peut pas dire qu'il a voulu influencer les parlementaires, vu qu'il a attendu quatre jours avant de rappeler que, d'une part, la volonté populaire s'est exprimée pour s'opposer très clairement à un gouvernement d'extrême droite, et d'autre part, qu'on le veuille ou pas, qu'on le déplore ou pas, aucun bloc actuel (ni le NFP ni le bloc macroniste) n'est en mesure, aujourd'hui, de diriger le gouvernement de la France.

    Le Président de la République a donc choisi de prendre son temps, ce qu'a également souhaité le Président du Sénat Gérard Larcher qui, en passant, a confirmé qu'il n'était absolument pas candidat à Matignon, passer les Jeux olympiques et paralympiques, se donner un horizon de quelques semaines, avec une obligation de résultat pour la rentrée parlementaire du début octobre 2024 (ouverture de la prochaine session ordinaire).

    En fait, il n'a pas choisi de prendre son temps, mais il a laissé aux groupes parlementaires le temps nécessaire pour trouver une solution viable pour gouverner le pays. Après tout, sans évoquer l'expérience des pays voisins dont certains mettent six mois voire quinze mois à trouver une introuvable coalition, c'est bien normal que cette situation inédite demande un peu de temps de maturation auprès des acteur politiques.


    Certes, Emmanuel Macron aurait pu jouer au plus stupide avec la nouvelle farce populaire (NFP) : nommer un membre du NFP pour faire le programme du NFP. Déjà, le premier problème : qui ? Peut-être que nous aurons un nom ce vendredi 12 juillet 2024, ou à la fin du week-end ? Les cardinaux sont plus efficaces : enfermez-les jusqu'à ce qu'ils trouvent une solution ! Mais même uni, même avec un nom de chef, le NFP est voué, dans sa tentative de déni démocratique particulièrement criant, à l'échec : seuls 32% des députés le soutiendraient et une motion de censure serait immédiatement votée. Un gouvernement exclusivement NFP ne tiendrait pas plus de deux jours. La question est donc : faut-il qu'Emmanuel Macron nomme un gouvernement qui n'aurait aucune chance ou préfère-t-il attendre, dans l'intérêt des Français, qu'un vrai gouvernement, appuyé sur une vraie majorité, même relative, puisse gouverner ?

    Ce jeudi, le site Atlantico a titré ainsi sa une : « La France atteinte de la maladie de la gauche folle ». Avec ce chapeau : « Irréalisme économique, déni de réalité régalienne, complaisance pour les décoloniaux et l’islamisme, radicalité préférée à la culture de gouvernement… la gauche française donne sans doute dans le romantisme mais elle accumule les contre performances électorales tout en parvenant à le nier grâce à sa domination médiatique. » (article politique de Jean Petaux et Virginie Martin). Même Jean Quatremer a trouvé, sur LCI, que les journalistes en faisaient un peu trop dans le récit mélenchonesque d'une supposée victoire électorale du NFP.


    Après la lettre aux Français, les dirigeants du NFP, en particulier Olivier Faure, n'ont pas bougé d'un iota leur position indéfendable : il faudrait proposer aux députés des cours d'arithmétique. On sait très bien que plus on attend, plus l'extrême droite en fera ses choux gras. Le déni est une phase du deuil, le deuil de n'avoir pas gagné, et même pire, que personne n'a gagné : après viendra le temps de l'action. C'est, je l'espère, par une maturation rapide pour que les dirigeants du NFP mais aussi de LR puissent prendre pleinement conscience qu'aucun bloc ne peut gouverner seul. Les faits sont têtus.

    Toutefois, les choses peuvent aller plus vite par nécessité. D'une part, d'ici au 20 juillet 2024, nous aurons la répartition exacte des députés dans leur groupe politique repectif. À partir de là, les rapports de force seront actés. Mais d'autre part, les nouveaux députés vont devoir s'installer, installer le bureau, les commissions, etc. Généralement, cela se fait à la proportionnelle, la majorité (quand elle est vraiment majorité) prend le perchoir (la Présidence de l'Assemblée Nationale), les présidences des commissions sauf la présidence de la commission des finance laissée à l'opposition. En 2022, il était déjà difficile de définir l'opposition : était-ce la gauche ou le RN ? Le RN considérait qu'il était le groupe d'opposition le plus important mais les insoumis considéraient que la Nupes était plus nombreuse. Résultat, Éric Coquerel a été élu président de la commission des finances.

    Certains à gauche, notamment parmi les élus écologistes, voudraient faire un barrage à l'extrême droite dans les postes au sein de l'Assemblée. Ce n'est pas très responsable. En 2022, il y a eu une vice-présidente FI et deux vice-présidents RN de l'Assemblée. Avec un groupe plus imposant, le RN devrait au moins retrouver le même nombre de postes à responsabilité (qui n'ont pas grand-chose à être politisés, sauf le perchoir, puisqu'il s'agit de faire fonctionner l'Assemblée).


    Bien sûr, le premier acte des nouveaux députés, à l'ouverture de la nouvelle législature, le jeudi 18 juillet 2024 dans l'après-midi, ce sera l'élection du Président de l'Assemblée Nationale. La séance sera présidée par le doyen d'âge, José Gonzalez, député RN réélu de 81 ans dans la dixième circonscription des Bouches-du-Rhône, qui était déjà le doyen en 2022.

    Au contraire des autres postes, le perchoir est d'une responsabilité extrêmement politique et cruciale, surtout dans une Assemblée aussi confuse que celle-ci : d'une part, le futur Président (ou la future Présidente) reste maître, avec le gouvernement, de l'ordre du jour, d'autre part, la manière de mener les débats sera très importante dans la nouvelle Assemblée, et aussi la capacité ou non à sanctionner des députés qui promettent, pour certains d'entre eux, de dépasser largement le respect qu'on pourrait être en droit d'attendre pour leurs collègues (c'était déjà assez irrespectueux dans la précédente législature et cela risque d'être pire aujourd'hui).


    Le mode de scrutin est assez simple : pour les deux premiers tours, il faut être élu à la majorité absolue, au troisième tour, la majorité relative est suffisante. Ce signifie qu'il faudra sans doute trois tours pour élire le successeur de Yaël Braun-Pivet. Si chaque bloc, y compris le quatrième, plus petit, celui des députés LR (appelé Droite républicaine), présentait un candidat à chaque tour, le NFP pourrait remporter le perchoir au troisième tour. Mais je doute que, justement, les députés LR puissent accepter, par passivité, de laisser un député NFP présider l'Assemblée. On pourrait alors imaginer, du moins au troisième tour, un accord implicite bloc central et LR pour faire passer un député qui serait équilibré et modéré dans l'animation de l'Assemblée. On peut aussi imaginer (cela s'est fait) que le groupe RN, dès le deuxième tour, se retire du scrutin, sachant qu'il ne gagnerait pas, et laisse la situation se décanter avec les autres groupes politiques. Auquel cas un accord bloc central et LR (autour de 220-230 députés) pourrait faire obtenir la majorité absolue des voix dès le deuxième tour.

    On voit bien sur un vote très concret l'intérêt qu'auraient les députés LR de se mettre d'accord avec le pôle central. Il y a d'ailleurs une forte probabilité pour que la Présidente sortante, Yaël Braun-Pivet, se présente pour sa succession et comme elle n'a pas démérité, ce qui n'était pas évident dans la situation de 2022 (et sera encore moins évident en 2024), il serait judicieux de profiter de son expérience. Probablement d'ailleurs qu'elle aura le soutien de Gérard Larcher, qui l'avait déjà soutenue dès le premier tour dans la cinquième circonscription des Yvelines (aucun candidat LR ne s'était présenté, mais il y avait eu un ex-LR soutenu par le RN, Jacques Myard qui a été qualifié pour le second tour dans une triangulaire).


    Beaucoup de candidatures se sont plus ou moins déclarées. La difficulté des potentiels candidats, c'est de se présenter assez tôt pour s'imposer et convaincre leurs collègues que leur candidature est naturelle et évidente, mais pas trop tôt pour ne pas être carbonisés trop vite. Dans les starting-blocks, on peut citer l'écologiste doctrinaire Sandrine Rousseau (a priori, il vaudrait quand même mieux une personnalité moins clivante et acceptée de tous), le journal "L'Opinion" citait aussi la présidente du groupe EELV Cyrielle Chatelain, mais je suppose que les deux ne seraient pas candidates à la fois. À gauche, on peut aussi citer Éric Coquerel (la présidence de commission incite à une candidature au perchoir, c'était le cas de Yaël Braun-Pivet qui a été présidente de la commission des lois de 2017 à 2022), et l'ancien Président de la République François Hollande. Si ce dernier était élu, ce serait un retour éclatant dans la vie politique et en même temps, une situation très étrange, un peu Troisième République. Même Valéry Giscard d'Estaing n'aurait pas réussi un tel retour sur la scène nationale.

    Si on peut imaginer Sébastien Chenu briguer le perchoir pour le compte du RN, chez les LR, Annie Genevard, vice-présidente sortante de l'Assemblée, serait apparemment intéressée, et Charles de Courson, le doyen d'ancienneté des députés (élu depuis 1993, il y a trente et un ans), malgré son élection très serrée cette fois-ci (je dirais même miraculeuse), aurait des raisons de prétendre au perchoir, lui qui a su agréger une convergence des oppositions à l'occasion d'une motion de censure contre la réforme des retraites.

    L'enjeu de cette désignation est important. Le Président de l'Assemblée Nationale est élu pour cinq ans, ou plutôt, pour la durée de la législature, c'est-à-dire jusqu'aux prochaines élections législatives, dissolution ou pas dissolution. Cela signifie qu'il sera un acteur stable de la vie politique dans une période où l'instabilité risque de pointer son nez. Par ailleurs, c'est une fonction qui a beaucoup de responsabilités (par exemple, la nomination d'un prochain membre du Conseil Constitutionnel en février 2025, là encore instance cruciale avec une Assemblée si morcelée), et qui a beaucoup aussi d'avantages matériels et honorifiques : siégeant à l'hôtel de Lassay, le Président de l'Assemblée peut multiplier les conciliabules pour arriver à la construction d'une majorité d'action.


    Personne, aujourd'hui, ne peut raisonnablement dire quelles sont les chances des uns et des autres. On peut imaginer que le RN, et LR, par exemple, n'ont aucune chance pour le perchoir, et que cela va se décider entre le NFP et le pôle central (dont ferait partie Charles de Courson, bien qu'anti-macroniste). Mais il y a encore une chance et de multiples occasions pour que cela évolue, surtout du côté de la gauche selon les personnalités vaguement pressenties dans un gouvernement hypothétique du NFP. Ce sera la première épreuve de nos amis députés élus ces 30 juin et 7 juillet 2024.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (11 juillet 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Législatives 2024 (22) : qui au perchoir ?
    Législatives 2024 (21) : marche sur Matignon ?
    Lettre aux Français par Emmanuel Macron le 10 juillet 2024 (texte intégral).
    Législatives 2024 (20) : le poison du scrutin proportionnel.
    Législatives 2024 (19) : quel possible Premier Ministre pour une impossible majorité ?
    Législatives 2024 (18) : la fin du cauchemar Bardella (pour le moment).
    Résultats du second tour des élections législatives du 7 juillet 2024.
    Fake news : la scandaleuse manipulation politique du RN.
    Législatives 2024 (17) : rien n'est joué dimanche prochain !
    Législatives 2024 (16) : la question de dimanche prochain.
    Législatives 2024 (15) : les promesses n'engagent que ceux qui y croient !
    Législatives 2024 (14) : la revanche des gilets jaunes ?
    Législatives 2024 (13) : fortes mobilisations au premier tour.
    Résultats du premier tour des élections législatives du 30 juin 2024.
    Appel aux sociaux-démocrates.
    Éric Le Boucher : la France va plutôt bien (27 juin 2024).
    Législatives 2024 (12) : un isoloir, ce n'est pas un cabine d'essayage !
    Législatives 2024 (11) : front, rassemblement, union nationale, barrage, consignes de vote...
    Législatives 2024 (10) : il était une fois Jordan Bardella, Gabriel Attal et Manuel Bompard.
    Législatives 2024 (9) : Emmanuel Macron et son n'ayez-pas-peur !
    Interview d'Emmanuel Macron à Génération Do It Yourself le 24 juin 2024 (podcast intégral).
    Lettre aux Français d'Emmanuel Macron le 23 juin 2024 (texte intégral).
    Législatives 2024 (8) : la bataille de Matignon.
    Le programme aux élections législatives du 30 juin 2024 d'Ensemble pour la République (document à télécharger).
    Législatives 2024 (7) : Ensemble pour la République.
    Législatives 2024 (6) : Nicolas Sarkozy et François Fillon bougent encore !
    Législatives 2024 (5) : le trouble de Lionel Jospin.
    Législatives 2024 (4) : l'angoisse de Manuel Valls.
    Législatives 2024 (3) : François Hollande dans l'irresponsabilité totale !
    Législatives 2024 (2) : clarification ou chaos ?
    Législatives 2024 (1) : vaudeville chez Les Républicains.
    Sidération institutionnelle.
    Élections européennes 2024 (4) : la surprise du chef !
    Résultats des élections européennes du dimanche 9 juin 2024.

     
     


     



    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240711-perchoir.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/legislatives-2024-22-qui-au-255756

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/07/11/article-sr-20240711-perchoir.html



     

  • Législatives 2024 (5) : le trouble de Lionel Jospin

    « Le Président, par cette décision imprévue, improvisée, non réfléchie, a plongé le pays dans un moment troublé, et peut-être même dans un moment trouble. » (Lionel Jospin, le 17 juin 2024 sur France Inter).




     

     
     


    La dissolution soudaine et brutale du 9 juin 2024 a fait ressortir de nombreux retraités de la vie politique. Par exemple, l'ancien Premier Ministre socialiste Lionel Jospin qui était l'invité de la matinale de France Inter ce lundi 17 juin 2024. À bientôt 87 ans (dans quelques jours), Lionel Jospin, s'il montre qu'il a son âge, s'exprimant très lentement, ce qui est commode pour éviter d'être interrompu par les journalistes, semble avoir gardé toute sa tête, toutes ses facultés mentales, peut-être même sont-elles encore trop intactes pour oublier son arrogance, son orgueil et sa propension à donner des leçons de morale à tout le monde, lui qui fut à l'origine du choc de la qualification de Jean-Marie Le Pen au second tour de l'élection présidentielle.

    Reprochant la supposée impréparation de la décision de dissoudre (c'est son point de vue, il semblerait que la décision était dans les projets de l'Élysée depuis plusieurs mois), l'ancien Premier Ministre a ajouté : « Pour la première fois dans l'histoire de la République, un parti d'extrême droite pourrait diriger la France. (…) Donc, c'est un moment extrêmement sérieux, et imprévisible. ».

    Reprenant une narration plutôt personnelle, il n'a pas compris le pourquoi de la dissolution : « Et puis soudain, le Président, je ne sais pourquoi, décide que ce scrutin qui concernait l'Europe, il allait le projeter dans la vie politique nationale française. ». Une critique qui n'est pas si éloignée de celle, d'ailleurs, de l'ancien Président Nicolas Sarkozy (j'y reviendrai). Ce qui est notable, c'est que Lionel Jospin aurait pu dire la même chose de la dissolution prononcée le 21 avril 1997 par le Président Jacques Chirac qui, finalement, lui a permis de gouverner la France pendant cinq ans dans un gouvernement de cohabitation, sous les couleurs multiples de la gauche dite plurielle (PS, PCF, EELV). À l'époque, Jean-Luc Mélenchon était un sage sénateur du parti socialiste, nommé d'ailleurs sous-ministre par Lionel Jospin pendant quelque temps.

    L'ancien premier secrétaire du PS sous François Mitterrand conçoit ainsi l'exercice démocratique, le retour aux urnes, comme un trouble : « S'il est garant des institutions, je constate qu'il les trouble [en parlant d'Emmanuel Macron]. La prochaine élection nationale était dans trois ans, c'était l'élection présidentielle. Les élections législatives (…) devaient être dans trois ans aussi, dans la foulée. Qu'est-ce qui justifie tout d'un coup... (…) Il ne se comporte pas comme un garant des institutions, mais comme quelqu'un qui les trouble, si vous voulez. ». Cet avis est complètement contre-constitutionnel : la dissolution est l'une des prérogatives constitutionnelles du Président de la République, la décider n'est pas un trouble mais une simple application de la Constitution. Lionel Jospin serait-il gâteux, au contraire de ce que j'ai écrit au-dessus, ou est-il tellement politisé contre Emmanuel Macron qu'il dit n'importe quoi ?

     

     
     


    Ainsi, au lieu de dire que le risque d'une majorité RN vient d'abord du peuple (et des sondages qui essaient tant bien que mal de capter ce que pense le peuple à un instant t), Lionel Jospin considère ...qu'il vient d'Emmanuel Macron lui-même par la dissolution : « C'est lui qui vient d'exposer les Français par cette décision à ce danger lui-même, et donc, la résistance ne va pas venir de ce côté-là. (…) Il y a quelque chose d'incompréhensible, il y a un jeu avec les institutions. ». Bref, il oublie simplement de prendre l'avis des Français qui, aujourd'hui, semblent séduits (bien malgré moi) par la figure médiatico-creuse de Jordan Bardella comme ils l'avaient rejeté il y a vingt-deux ans de manière ferme et définitive, ce qu'il n'a jamais compris.

    Je pense que Lionel Jospin s'est arrêté de réfléchir politiquement au 21 avril 2002. L'arrivée de la génération née dans les années 1950 (François Hollande, Ségolène Royal, Jean-Luc Mélenchon, François Bayrou, François Fillon et Nicolas Sarkozy) est déjà, pour lui, difficile à comprendre mais depuis 2017, c'est la génération des responsables nés dans les années 1970 voire 1980 qui est maintenant aux responsabilités (sans compter que Jordan Bardella est né... en 1995 !). Il est complètement dépassé par le jeu politique actuel qui est, il faut l'admettre, parfois assez déconcertant par sa violence (et pas seulement verbale).

    L'une des preuves de ce que j'avance, c'est qu'il n'a toujours pas digéré sa défaite, et ce n'est jamais à cause de lui, c'est toujours à cause des autres ! Lionel Jospin a dédramatisé la candidature de "Félix Poutou" (il voulait dire Philippe Poutou) en bon trotskiste partisan de l'entrisme ! Pourtant, son intégration dans cette nouvelle farce populaire (NFP) est une véritable incompréhension, un accord de gouvernement avec le NPA ! Mais doctrinaire, il s'en moque. Écoutons-le maintenant parler de François Hollande qui fut son dauphin au PS entre 1997 et 2002 : « François Hollande est, je le rappelle quand même, le seul socialiste qui a été en mesure de devenir Président de la République après François Mitterrand. », ce qui est vrai (toutefois, comme il s'agissait d'une cohabitation et qu'il avait réellement le pouvoir, il aurait pu s'ajouter lui-même comme étant l'un des trois socialistes qui a réussi à conquérir le pouvoir sous la Cinquième République). Et puis, Lionel Jospin a ajouté cette petite phrase qui traduit toute son amertume et sa colère (contre les Français, contre la classe politique) vingt-deux ans plus tard : « Moi, ça a été refusé en raison de la division, et donc, je sais ce qu'est la division. ».

    C'est cette petite phrase qui dévoile tout l'homme politique : non, ce n'est pas lui qui a été battu, ce n'est pas lui qui a fait une mauvaise campagne ou qui a été rejeté par les Français ! C'est juste qu'il a raté l'épreuve du concours national. La faute à pas d'chance : on m'a interdit l'Élysée, les vilains à l'administration. Ah si, il y a bien des coupables : la division ! Or, la division avait bon dos : les électeurs de gauche qui ont voté pour Jean-Pierre Chevènement, Noël Mamère, Robert Hue ou Christiane Taubira, de toute façon, au premier tour, si leur candidat ne s'était pas présenté, ils se seraient abstenus, car Lionel Jospin a été incapable de mobiliser tout son électorat traditionnel. Donc, il a échoué, lui personnellement, mais pour lui, ce ne serait pas à cause de lui, toujours la faute des autres !

    François Hollande a été élu par défaut sur les décombres de l'antisarkozysme primaire poussé par un François Bayrou complètement déboussolé. Mais la gauche, depuis 2002, est victime de cette absence d'analyse sur les causes réelles et profondes de l'échec de Lionel Jospin. Car la division n'est pas la cause de l'échec mais une conséquence, un signe avant-coureur de cause bien plus profonde : l'incapacité de la gauche à écouter le peuple dans ses inquiétudes, notamment sur la sécurité, en lui disant qu'il se trompait, qu'il n'y avait pas de problème, et le FN/RN a beaucoup fleuri sur cette incompréhension de la gauche. Lionel Jospin est tenté de réduire toutes ses analyses politiques à de la cuisine politicienne, mais une campagne présidentielle, ce n'est pas les autres candidats, c'est avant tout un dialogue entre le candidat et le peuple. Et le courant, c'est le moins qu'on puisse dire, n'a pas eu lieu.

    Cette cuisine politicienne, Lionel Jospin l'adore encore malgré son âge. En effet, il prétend se rassurer sur l'hégémonie de FI en regardant les investitures négociées avec le NFP dont il est un ferme partisan : « Alors que LFI avait 328 candidats en 2022, il en a maintenant 229. Alors que le parti socialiste en avait 70 en 2022, il en a 175. Et les écologistes baissant un peu et les communistes gardant le même score. Et donc, je vous rappelle que l'ensemble PC, PS, écologistes, Place publique... euh, qui sont assez proches au fond, qui étaient dans une évolution que le Président de la République a brisée par cette dissolution, représenteront 297 candidats dans ces élections contre 229 pour la France insoumise. ».

     

     
     


    Là encore, on voit bien que Lionel Jospin a dit que toute la gauche sauf FI a été stoppée dans leur unification (ah bon ? Pas si l'on regarde les listes multiples aux élections européennes !), c'est à cause d'Emmanuel Macron, bien sûr, ce n'est jamais à cause de lui, c'est toujours à cause des autres. De plus, le décompte de marchand de tapis des investitures ne vaut pas grand-chose. Évidemment, ce ne sont pas les investitures qu'il faut appréhender, mais celles sur des circonscriptions gagnables par le NFP, et ce n'est certainement pas proportionnel. Et en faisant les décomptes, 297/229, cela signifie que FI a de grandes chances de dominer la future gauche car beaucoup de circonscriptions imprenables ont été abandonnées par FI.

    En revanche, à la question : on n'a pas encore essayé l'extrême droite, que dites-vous de cela ? Lionel Jospin a un réponse assez pertinente : « L'extrême droite, si elle n'a pas encore été essayée en France, et c'est quand même caractéristique, si vous voulez, que ça n'appartiennent pas à l'identité de la République, ça a été essayé ailleurs. Et quand ça a été essayé ailleurs, ça a nourri souvent de terribles drames. (…) Les Français jamais n'ont porté l'extrême droite au pouvoir pendant toute l'histoire de la République. ».


    Il a également remis à sa place Nicolas Sarkozy : « Pour être un républicain, il faut partager les valeurs de la République, et notamment dire liberté, égalité, fraternité, et non pas identité, sécurité et... autorité ! ».

    Quant au programme du NFP, Lionel Jospin ne s'en est pas caché : il est absolument déraisonnable, mais pour lui, ça ne compte pas, l'idée est d'avoir le plus d'élus possible et puis après, on verra bien. Quelle piètre conception de l'engagement politique et du respect des électeurs : « Ce qui est important pour moi, c'est que les partis de ce regroupement, nouveau front populaire, aient une place importante au Parlement demain. Seront-ils en mesure, les Français leur feront-ils confiance pour remporter une victoire ? Je ne sais pas (…). Mais en tout état de cause, compte tenu de la situation du pays, il est clair que, dans cette hypothèse où ce rassemblement de gauche serait au pouvoir ou proche du pouvoir, eh bien, il faudrait que soient aux postes principaux choisies des personnalités capables de maîtriser et d'opérer une synthèse ! ». Une synthèse ! Comme si le Parlement était un comité directeur du parti socialiste des années 1970 !

    Dans cette dernière réflexion, il y a à la fois de la rêverie utopique (Jean-Luc Mélenchon laissant la gauche de gouvernement tranquillement gouverner en cas de majorité) et du mépris des Français (le programme, on s'en moque, il est pour une « inflexion »).


    De cette interview, il en ressort que Lionel Jospin, décidément, n'a pas encore compris son échec personnel du 21 avril 2002. Et s'il critique la dissolution de l'Assemblée Nationale, lui serait bien d'avis qu'il faudrait plutôt dissoudre le peuple, en tout cas, celui qui n'a pas voté pour lui. Celui de 2002. Et peut-être aussi celui de 2024, tant qu'on y est.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (17 juin 2024)
    http://www.rakotoarison.eu

    Pour aller plus loin :
    Législatives 2024 (5) : le trouble de Lionel Jospin.
    Législatives 2024 (4) : l'angoisse de Manuel Valls.
    Législatives 2024 (3) : François Hollande dans l'irresponsabilité totale !
    Législatives 2024 (2) : clarification ou chaos ?
    Législatives 2024 (1) : vaudeville chez Les Républicains.
    Sidération institutionnelle.
    Élections européennes 2024 (4) : la surprise du chef !
    Résultats des élections européennes du dimanche 9 juin 2024.







    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240617-jospin.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/legislatives-2024-5-le-trouble-de-255287

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/06/17/article-sr-20240617-jospin.html




     

  • Législatives 2024 (3) : François Hollande dans l'irresponsabilité totale !

    « Je ne comprendrai jamais pourquoi ceux prêts à s'allier avec l'extrême gauche sont jugés moins sévèrement que ceux qui seraient prêts à le faire avec l'extrême droite. S'allier avec un parti considéré par 92% des Français juifs comme le principal responsable de l'augmentation de l'antisémitisme, qui a trahi la gauche républicaine et qui souhaite le chaos pour favoriser l'extrême droite, devrait être inacceptable pour tout républicain. » (Simone Rodan-Benzaquen, directrice générale de l'American Jewish Committee Europe depuis 2015 et fondatrice de SOS Darfour).




     

     
     


    L'ancien Président de la République François Hollande, qui fut premier secrétaire du PS de 1997 à 2008, était l'invité du journal de 20 heures sur TF1 ce jeudi 13 juin 2024. Et ses propos étaient d'une irresponsabilité totale : « Ce qui est essentiel, c’est que l’union ait pu se faire. (…) Il y a un moment où il faut aller au-delà de nos divergences. ».

    Comme Carole Delga, il a annoncé en effet qu'il soutenait le Nouveau front populaire (NFP), en signant un chèque en blanc puisqu'il ne connaissait pas encore le programme de gouvernement qui accroîtrait de 250 milliards d'euros par an le déficit public en France. Il y a une véritable contradiction alors qu'il venait de critiquer Emmanuel Macron pour avoir laissé filer le déficit ! Autre contradiction, François Hollande s'était opposé à la Nupes en 2022, alors que le NFP a inclus beaucoup plus de gauchistes avec le NPA, etc. et que les discours de haine de FI sont particulièrement graves pour la cohésion nationale.

    Je ne suis pas psychologue de bazar, mais on peut sans doute chercher du côté du fils-qui-tue-le-père pour imaginer que lorsque le père bouge encore, son esprit de revanche est viscéral. Il reste que l'actuel Président de la République est avant tout une de ses créatures, parmi les meilleures de ses castings d'ailleurs, et que le reniement paternel a toujours un effet étrange. Jalousie ? Jalousie d'un si jeune âge, jalousie car unique Président à quinquennat qui a été réélu par le peuple français ? Le seul Président qui a fait réellement baisser le chômage en France et redémarrer le secteur industriel ?

    François Hollande, qui avait rencontré le chef de l'État le 10 juin 2024 à Tulle par les hasards du calendrier, n'a pas le sens de l'honneur ni de la dignité puisque le voilà en train de se déculotter devant le gourou de l'extrême gauche qui considère le Hamas comme un mouvement de résistance, j'ai nommé Jean-Luc Mélenchon, prochain futur ex-Premier Ministre autoproclamé (petit astérisque : sous réserve de gagner les élections). La moindre des choses qu'on peut dire, c'est que Flanby n'est pas ingrat car Méluche n'a jamais cessé de le harceler depuis mai 2012, lui-même regrettant amèrement son vote inconditionnel au second tour de 2012 en faveur du pire Président de toutes les Républiques confondues.

    Ce qui est certain, c'est que ses deux derniers Premiers Ministres, Manuel Valls et Bernard Cazeneuve, sont absolument contre cette union de dupes à la sauce mélenchonienne appelée Nouveau front populaire (NFP), on n'a peur de rien, mais ils sont terriblement seuls au sein des socialistes. Même Raphaël Glucksmann a viré sa cuti pour rejoindre les troupes d'extrême gauche dans lesquelles se trouvent le NPA, et même le Parti ouvrier indépendant (POI) et le Parti pirate !

    Car il faut le dire haut et fort : non seulement ils ont conclu un accord électoral (un seul candidat dans chaque circonscription), mais aussi un accord de gouvernement où on rase gratis, avec les écologistes, avec le NPA, avec FI, avec le PCF, qui ne sont pourtant d'accord sur rien et d'abord sur le nom d'un éventuel futur Premier Ministre. Mais les rapports de force sont ce qu'ils sont : le Premier Ministre est toujours issu du parti de la majorité le plus nombreux à l'Assemblée Nationale. Or, en investissant 229 candidats FI et seulement 175 candidats PS, le rapport de forces au sein du NFP est déjà plié avant les élections : FI sera dominant, comme en juin 2022.


    C'est même un « programme de rupture », rien que ça, pondu en quarante-huit heures ! François Mitterrand était un blaireau ; lui, il a mis dix ans à sortir son programme commun. Certes, en 2024, on lui a piqué le mot rupture puisque ces caciques de la politique politicienne ne savent que recycler les vieilleries historiques. Ainsi, le nouveau premier secrétaire du PS proclamait à qui voulait l'entendre le 13 juin 1971 (au congrès d'Épinay) : « Violente ou pacifique, la révolution, c’est d’abord une rupture. Celui qui n’accepte pas la rupture, la méthode, cela passe ensuite, celui qui ne consent pas à la rupture de l’ordre établi, politique, cela va de soi, c’est secondaire…, avec la société capitaliste, celui-là, je le dis, il ne peut pas être adhérent du parti socialiste. (…) À compter du moment où nous adoptons une stratégie de rupture, il importe de savoir quelle est la définition hors de laquelle il n’y a pas de marche possible vers le socialisme. Eh bien je dis, aussi clairement que je le pense, après quelques réflexions et quelques temps mis à cette réflexion, que notre terrain est celui-là : il n’y a pas, il n’y aura jamais de société socialiste sans propriété collective des grands moyens de production, d’échange et de recherche. » (déclaration très connue et passée en boucle chez les mitterrandiens historiques malgré cette odeur de naphtaline).
     

     
     


    En campagne dans le Loiret, le président du RN Jordan Bardella, lui aussi candidat autoproclamé à Matignon, a considéré que son principal adversaire était le NFP et plus la majorité présidentielle. On sait que François Hollande aime bien faire du gauchisme en pleine campagne (mon ennemi, c'est la finance !), mais l'énumération des nombreuses mesures très démagogiques fait froid dans le dos : abrogation de la réforme des retraites, de la réforme de l'assurance-chômage, augmentation du SMIC, rétablissement de l'ISF pour faire fuir les investisseurs étrangers, etc. Où est la cohérence quand on critiquait il y a une ou deux semaines le niveau record de la dette publique ?

    Manifestement, François Hollande a désappris à gouverner, et pour lui, l'intérêt de son petit parti socialiste (le parti de Jérôme Cahuzac) passe avant l'intérêt de la France. Quelques sièges supplémentaires (et l'argent qui va avec, du financement public des partis politiques). Un plat de lentilles. Un peu plus copieux en 2024 qu'en 2022 grâce au chef Méluche. Les socialistes républicains sont ulcérés, mais ils se comptent sur les doigts d'une seule main, à peine. Il est temps de se réveiller, messieurs et mesdames les socialistes, les électeurs français ne peuvent se retrouver dans ce cauchemar de ne devoir choisir qu'entre une extrême droite lisse et arrogante et une extrême gauche de boutiquiers. Car un tel clivage, dans la société d'aujourd'hui, ne peut que favoriser l'extrême droite qui arrive masquée et calme, prête même à rassurer les milieux des affaires, un comble !

    Honte à vous, François Hollande d'avoir donné votre accord à de la cuisine d'état-major de parti ! Votre avis n'est pas déterminant dans le cours des événements, mais il salit les institutions républicaines, parce que vous avez été l'arbitre suprême de la cohésion nationale pendant cinq ans. Votre retraite sera aussi misérable que l'a été votre Présidence. Ce n'est pas une surprise.



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    Sylvain Rakotoarison (14 juin 2024)
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    Pour aller plus loin :
    Législatives 2024 (3) : François Hollande dans l'irresponsabilité totale !
    Législatives 2024 (2) : clarification ou chaos ?
    Législatives 2024 (1) : vaudeville chez Les Républicains.
    Sidération institutionnelle.
    Élections européennes 2024 (4) : la surprise du chef !
    Résultats des élections européennes du dimanche 9 juin 2024.

     

     
     



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