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  • Ukraine : le retour de la diplomatie européenne

    « Le samedi 10 mai 2025, les dirigeants de la France, de l’Allemagne, de la Pologne, du Royaume-Uni et de l’Ukraine se sont rencontrés à Kyiv. Ils sont convenus qu'à partir du lundi 12 mai, il devrait y avoir un cessez-le-feu complet et inconditionnel pendant au moins 30 jours. Ils sont convenus qu'un cessez-le-feu inconditionnel, par définition, ne peut être soumis à aucune condition. Si la Russie demande de telles conditions, cela ne peut être considéré que comme une tentative de prolonger la guerre et de saper la diplomatie. Ils ont exigé que le cessez-le-feu soit global, dans les airs, en mer et sur terre. Ils ont souligné que ce cessez-le-feu nécessitait un monitoring efficace, qui pourrait être mis en œuvre avec succès en étroite coordination avec les États-Unis. (…) Ils sont convenus que si la Russie refusait un cessez-le-feu total et inconditionnel, des sanctions plus sévères devraient être adoptées contre les secteurs bancaire et énergétique, ciblant les combustibles fossiles, le pétrole et la flotte fantôme. Ils sont convenus d'adopter un 17e paquet de sanctions fortes de l'UE et de le coordonner avec les sanctions imposées par le Royaume-Uni et la Norvège, ainsi que par les États-Unis. » (Communiqué commun du 10 mai 2025 à Kiev).



     

     
     


    On se demande pourquoi Emmanuel Macron irait chercher dans un référendum aux résultats très aléatoires (on verra son intervention télévisée de ce mardi 13 mai 2025) ce qu'il a trouvé déjà en politique étrangère, à savoir le crédit qu'on peut porter à un homme d'État exceptionnel. Car avec la guerre en Ukraine, il s'agit bien de cela. Dès 2017, le Président Emmanuel Macron avait prôné une véritable souveraineté européenne et une défense européenne, faisant le constat que l'OTAN était en mort cérébrale. Et c'est Vladimir Poutine, en tentant d'envahir l'Ukraine, qui a réveillé et l'OTAN et l'Europe ! L'objectif d'Emmanuel Macron et de tous ses homologues européens, c'est d'éviter de nouveaux Accords de Munich avec l'Ukraine. Et donc, d'éviter une nouvelle guerre générale.

    L'Europe et la France peuvent être fières d'Emmanuel Macron. Heureusement qu'il est là, car il manquait un leader à l'Europe pour réaffirmer tout simplement nos valeurs, et la première de celles-ci, c'est la paix, mais la paix durable, la paix juste, pas la paix du plus fort contre le plus faible, pas la paix de Vladimir Poutine qui ne s'apaiserait qu'en écrasant l'Ukraine, qu'en écrasant la Pologne, les Pays baltes, la Moldavie, la Géorgie, qu'en faisant renaître une Grande Russie (idéalisée) comme Hitler voulait une Grande Allemagne.

    Le vent tourne pour Vladimir Poutine. À force d'envoyer ses missiles tuer des civils, le Président de la Fédération de Russie a déçu, pire, a lassé Donald Trump prêt à abandonner tous ses efforts sur ce conflit. Le Président russe a raté une opportunité historique. Le résultat, c'est un revirement total (dont le Président américain est coutumier). Volodymyr Zelensky a accepté le principe d'un cessez-le-feu inconditionnel de 30 jours proposé par les États-Unis, les Européens aussi et ils l'ont dit avec une grande force. La diplomatie européenne revient sur le devant de la scène ukrainienne, et avec elle, la diplomatie française.

    Deux images fortes pour le pont du 8 mai 2025. Parallèlement aux défilés caricaturaux à Moscou devant les hôtes de Vladimir Poutine, notamment Xi Jinping, Sissi, Maduro, etc. où les canons faisaient figures de valeurs, le Président Emmanuel Macron et le Premier Ministre polonais Donald Tusk ont signé le vendredi 9 mai 2025 dans la belle ville de Nancy, sur la Place Stanislas (à l'Hôtel de Ville), le Traité pour une coopération et une amitié renforcées entre la République de Pologne et la République française.

     

     
     


    Ce n'est pas nouveau que Nancy, la capitale des ducs de Lorraine, s'est retrouvée au centre d'une diplomatie intense. Il y a vingt ans, le 19 mai 2005, la Place Stanislas a accueilli également un mini-sommet entre le Président français Jacques Chirac, le Chancelier allemand Gerhard Schröder et le Président polonais Aleksander Kwasnieski. Dans sa conférence de presse à cette occasion, Jacques Chirac a déclaré : « Je voudrais remercier la ville de Nancy, ses habitants, son maire pour l'accueil qu'ils nous ont réservé et aussi les féliciter, féliciter tous les Nancéiens très chaleureusement pour la superbe restauration de la place Stanislas réalisée à l'occasion de son 250e anniversaire. C'est une belle image donnée par Nancy au monde de la France, de son art et de son histoire. Cette rencontre à trois se tient à un moment particulièrement important puisque nous sommes tous les trois, parmi les vingt-cinq, engagés dans un processus de ratification du Traité constitutionnel. ». C'était dix jours avant le référendum sur le TCE.

    Et Jacques Chirac d'expliquer : « Depuis cinquante ans, l'Europe s'est considérablement développée. Elle a d'abord apporté l'essentiel, c'est-à-dire la paix, la démocratie, la liberté, un certain modèle social et le développement économique aux six pays fondateurs. Puis, petit à petit, elle s'est élargie comme il était à la fois nécessaire et utile pour tous. Nous avons aujourd'hui un ensemble qui est déterminé à enraciner définitivement, sur l'ensemble de notre continent, la paix, la démocratie, la liberté, déterminé à conforter le modèle de développement économique et de progrès social, le modèle social européen, particulièrement incarné par la position notamment allemande et française et à renforcer le poids de l'Europe dans le monde. C'est le sens de l'ambition du traité constitutionnel qui est en voie de ratification chez les vingt-cinq Européens. ».


    Mais revenons au Nancy de 2025, vingt ans plus tard. Le traité signé entre la France et la Pologne fait partie des traités bilatéraux que la France a voulu conclure avec chacun des pays européens depuis quelques années. Elle l'avait déjà fait avec l'Ukraine le 16 février 2024.
     

     
     


    Les deux nations (française et polonaise) sont « convaincues que le moment est venu de porter leurs relations bilatérales à un niveau plus élevé et de se préparer conjointement à faire face aux défis auxquels les deux États et les deux peuples ainsi que l’Europe dans son ensemble sont confrontés au XXIe siècle ». Elles « œuvrent activement à une UE plus forte, sûre, souveraine, démocratique, prospère, compétitive et unie. Elles entendent protéger leurs citoyens, défendre leurs valeurs et leurs intérêts et renforcer la sécurité européenne, notamment celle de la frontière extérieure de l’UE, et la sécurité économique. ».

    L'alinéa 2 de l'article 4 de ce traité proclame très clairement la mutuelle assistance en matière de défense : « Conformément aux dispositions de l’article 51 de la Charte des Nations Unies, en cas d’agression armée sur leurs territoires, les Parties s’assistent mutuellement, y compris par des moyens militaires. Cette aide et cette assistance seront mises en œuvre conformément aux engagements découlant de l’article 5 du Traité de l’Atlantique Nord et du paragraphe 7 de l’article 42 du Traité sur l’Union Européenne. ».

    En tout, le Traité de Nancy compte 19 articles qui précisent les coopérations dans de nombreux domaines, en particulier dans l'industrie, la recherche scientifique, les transports, l'immigration, le numérique, la protection de l'environnement, l'énergie, l'agriculture, la culture, le sport, etc. Il remplace le Traité de Paris signé le 9 avril 1991.






    L'autre initiative est également très importante puisque, venus par un train de nuit qui est parti la veille, le Président français Emmanuel Macron, le nouveau Chancelier allemand Friedrich Merz, le Premier Ministre britannique Keir Starmer et le Premier Ministre polonais Donald Tusk ont rejoint le Président ukrainien Volodymye Zelensky à Kiev, la capitale de l'Ukraine assiégée par Vladimir Poutine. Leur présence a une signification à la fois forte et courageuse. Courageuse car c'est toujours risqué de se rendre à Kiev sous d'éventuels bombardements russes. D'où d'ailleurs le train car l'avion serait beaucoup trop dangereux.
     

     
     


    À ce titre, le Président Macron a diffusé une petite vidéo dans le train qui l'a conduit à Kiev, se mettant en scène en train d'appeler Donald Trump. C'est important car il a montré qu'il était à l'initiative pour construire la paix en Ukraine. Certains lui reprocheront de trop faire dans les réseaux sociaux, mais il faut vivre avec son temps et Donald Trump a gagné sa dernière élection en s'adaptant à ces nouvelles mœurs technologiques.





    Reprenons le contenu du voyage à Kiev et ses conséquences diplomatiques. Le samedi 10 mai 2025 à 14 heures 30, les "alliés" de l'Ukraine (Europe mais aussi Canada, Nouvelle-Zélande, etc.) ont mis Vladimir Poutine dos au mur : ils ont fermement demandé un cessez-le-feu de 30 jours, inconditionnel, à partir du lundi 12 mai 2025, sous forme d'un ultimatum, avec l'accord des États-Unis. C'est ce dernier point qui est nouveau. J'ai placé les extraits les plus importants du communiqué commun en tête de cet article.








    Vladimir Poutine a répondu aux Européens à minuit 40, c'est-à-dire, heure de Moscou, à 2 heures 40 du matin ! Il a proposé des négociations directes à Istanbul entre la Russie et l'Ukraine, sans cessez-le-feu préalable.
     

     
     


    Le dimanche 11 mai 2025 à 18 heures 15 (heure de Paris), Donald Trump a vivement encouragé l'Ukraine à accepter la rencontre proposée par Vladimir Poutine à Istanbul.

    Le dimanche, à 19 heures, Volodymyr Zelensky a déclaré sur Twitter : « J'attendrai Poutine en Turquie, jeudi. Personnellement. J'espère que cette fois, les Russes ne chercheront pas d'excuses. ».





    Dans le même temps, Donald Trump a semblé désabusé de la mauvaise foi de Vladimir Poutine en confiant ce même dimanche : « Je commence à douter que l'Ukraine parvienne à un accord avec Poutine, trop occupé à célébrer la victoire de la Seconde Guerre mondiale, qui n'aurait pas pu être gagnée (même de justesse !) sans les États-Unis. ORGANISEZ UNE RENCONTRE MAINTENANT ! ». Ce point historique est réel (quoi qu'en pensent les trolls poutinolâtres qui pullulent sur le Web) : si les États-Unis n'avaient pas massivement aidé l'URSS pour son armement, cette dernière n'aurait pas pu prendre en tenaille l'Allemagne nazie sur son front est.

    Lundi 12 mai 2025, le Ministre français des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot, qui a rencontré son homologue américain, a confirmé la nécessité d'un cessez-le-feu préalables aux négociations avec cette phrase souvent répétée dans les conflits : « On ne va pas négocier sous les bombes ! ». Il a notamment déclaré la nature de l'ultimatum que les Européens et surtout les Américains ont lancé à Vladimir Poutine.

     

     
     


    En cas de refus du cessez-le-feu, les États-Unis fixeraient les droits de douane sur l'importation du pétrole russe à 500%... mais ce n'est pas cette mesure qui aurait le plus de conséquence, c'est la suivante : ils mettraient aussi les droits de douane à 500% sur tous les produits importés de pays qui achèteraient encore du pétrole russe. Là, ce serait probablement la sanction commerciale la plus efficace. En outre, les Européens aideraient les Ukrainiens à contrôler à nouveau leur espace aérien.

    Le lundi 12 mai 2025 à 16 heures 30, Donald Trump, qui allait partir au Proche-Orient à partir du lendemain (le 13 mai 2025, il sera en Arabie Saoudite), a lâché : « Je pensais y aller. Il y a une possibilité. ». Aller à Istanbul jeudi 15 mai 2025 pour une rencontre entre Volodymyr Zelensky et Vladimir Poutine sous le patronage de Recep Tayyip Erdogan.
     

     
     


    Comme on le voit, cette semaine est cruciale pour l'avenir de l'Ukraine. Vladimir Poutine a baladé Donald Trump pendant trois mois et, chose nouvelle, ce dernier commence enfin à s'en apercevoir ! Ce qui l'a rendu furieux, c'est la présence de Xi Jinping le 9 mai 2025 à Moscou. Car Donald Trump acceptait d'abandonner l'Ukraine à la Russie à la seule condition que la Russie s'éloignât de la Chine. Pourtant, Vladimir Poutine a toujours été prévisible : seul le rapport de force est efficace avec lui. La diplomatie européenne, et plus précisément la diplomatie française ont fait beaucoup avancer les choses en Ukraine. Mais, même si c'est en bonne voie, rien n'assure que cela sera efficace à court terme. Le peuple ukrainien, pendant ce temps, continue à souffrir.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (12 mai 2025)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Ukraine : le retour de la diplomatie européenne.
    Soumy : grâce musicale versus vulgarité brutale.
    Moonraker.
    Olena Kohut.
    François Bayrou et l'heure de vérité de l'Europe.
    Gabriel Attal attaque Marine Le Pen sur l'Ukraine.

    Manuel Valls pour la paix, mais pas au prix de la fin de l'Ukraine !
    Claude Malhuret s'en prend à Néron et à son bouffon !
    Emmanuel Macron : la patrie a besoin de vous !
    Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron le 5 mars 2025 (texte intégral et vidéo).
    François Bayrou : la France avait raison !
    Ukraine : Trump, porte-parole de Poutine !
    3 ans de guerre en Ukraine.
    Zelensky : Poutine, c'est l'anti-Europe !
    L'aide de la France à l'Ukraine le 6 juin 2024.
    Emmanuel Macron très gaullien à la télévision pour expliquer la gravité de la situation en Ukraine.
    Débat parlementaire sur l'Ukraine : les masques tombent en France !
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    L'Europe face à Poutine.
    Ukraine : Emmanuel Macron est-il un va-t-en-guerre ?
    Rapport de la commission d'enquête n°1311 de l'Assemblée Nationale relative aux ingérences politiques, économiques et financières de puissances étrangères (enregistré le 1er juin 2023).
    Jean-Pierre Chevènement et ses relations avec la Russie.
    François Fillon et ses relations avec la Russie.
    Ukraine : Gabriel Attal attaque durement le RN et Marine Le Pen !
    Soutien à l'Ukraine : la conférence de l'Élysée pour une défense européenne.
    Conférence de presse du Président Emmanuel Macron lors de la Conférence de soutien à l'Ukraine le 26 février 2024 à l'Élysée (vidéos).
    2 ans de guerre en Ukraine : Poutine zéro en histoire !
    Amitié franco-ukrainienne : fake news et accord de coopération.
    Lee Marvin, les Douze Salopards et la Russie.
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    Condoléances cyniques.
    Mort d'Evgueni Prigojine.

    Sergueï Kirienko.
    Victoria Amelina.

    L'effondrement du pouvoir de Poutine.
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    L'Ukraine à l'Europe : donnez-nous des ailes !
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    6 mois de guerre en Ukraine en 7 dates.
    Les massacres de Boutcha.
    Le naufrage du croiseur russe Moskva.
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    Kiev le 16 juin 2022 : une journée d’unité européenne historique !
    L'avis de François Hollande.
    Les valeurs valent mieux que les bénéfices !
    Poutine paiera pour les morts et la destruction de l’Ukraine.
    Ukraine en guerre : coming out de la Grande Russie.
    Robert Ménard, l’immigration et l’émotion humanitaire.
    Ukraine en guerre : Emmanuel Macron sur tous les fronts.
    Nous Européens, nous sommes tous des Ukrainiens !

     

     
     




    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250510-ukraine.html

    https://www.agoravox.fr/actualites/europe/article/ukraine-le-retour-de-la-diplomatie-260907

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/05/10/article-sr-20250510-ukraine.html



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  • Auschwitz aujourd'hui

    « J’apportai immédiatement une amélioration notable au système de Treblinka. Je fis inscrire sur les deux bâtiments : "Salle de désinfection", et je fis installer, à l’intérieur, des pommes de douche et des tuyauteries en trompe-l’œil, pour donner l’impression aux détenus qu’on les amenait là pour se laver. Toujours dans le même esprit, je donnai à l’Untersturmführer de service les instructions suivantes : il devait annoncer aux détenus qu’après la douche, du café chaud leur serait servi. Il devait, en outre, entrer avec eux dans la "salle de désinfection" et circuler de groupe en groupe en plaisantant (et en s’excusant de ne pouvoir distribuer du savon) jusqu’à ce que tout le monde fût entré. » (Robert Merle, "La Mort est mon métier", éd. Gallimard, 1952).



     

     
     


    Le fondateur d'un parti populiste a eu beau insister, par provocation, sur le fait que ce n'était qu'un détail de l'histoire, celui-ci désormais disparu à l'âge de 96 ans, je persiste à croire que l'extermination des Juifs (et d'autres "parias") par les nazis dans des camps d'extermination industriellement pensés est l'une des tragédies majeures et singulières de l'histoire universelle du monde.

    Quatre-vingts ans après la libération du camp d'Auschwitz-Birkenau, en Pologne, le 27 janvier 1945, en relisant les témoignages, en écoutant les dernières victimes et les derniers témoins qui disparaissent petit à petit, bientôt il n'en restera plus, on reste toujours en état de sidération : comment des êtres humains ont-ils pu commettre ces assassinats en si grande masse ?

    Pour Auschwitz-Birkenau, si l'on en croit le commandant nazi de ce camp, il y a eu 2,5 millions de morts en quelques années, mais son objectif était 3,5. Et ce n'était pas le seul camp. Selon les historiens d'aujourd'hui, le nombre a été revu à la baisse et atteindrait 1,1 million de victimes. En tout, la Solution finale a coûté la vie à quelque 6 millions de personnes. Qu'importe vraiment le nombre, à partir d'un seuil, cela devient inimaginable.

    C'est vrai, les humains n'ont pas commencé à se massacrer entre eux au XXe siècle. Il y a toujours eu, malheureusement, des massacres, des horreurs au fil des époques, des contrées, des peuples, et ce n'est la caractéristique d'aucun peuple, d'aucune catégorie de l'humanité, d'en massacrer d'autres. C'est sans doute aussi intrinsèque à l'homme que la bonté ou la générosité. La part sombre et la part claire.

    Mais ce qui a changé, avec la Shoah, c'est l'industrialisation très méthodique de la mort. C'est l'utilisation du talent d'organiseurs qu'auraient les Allemands non pas au service d'une industrie quelconque, d'un objectif commercial et pécuniaire quelconque, mais simplement au service de la mort, un service coûteux, c'est cela aussi qui est incompréhensible : certes, les nazis récupéraient tout (vêtements, bijoux, jusqu'aux dents en or, jusqu'aux cheveux, jusqu'aux cendres) mais cela mobilisait de la ressource humaine, du temps, de l'argent, des armes, et cela en pleine guerre. L'idéologie malsaine, nauséabonde, plus forte que l'intérêt vénal.

    Concrètement, c'est sans doute Robert Merle qui a le mieux décrit le point de vue des bourreaux. En mettant en scène le commandant du camp d'Auschwitz, à partir des "confessions" de Rudolf Höss, le vrai commandant en question (condamné à mort et pendu le 16 avril 1947 à Auschwitz), l'écrivain a donné une compréhension glaçante de la Shoah. Il y avait toujours des "améliorations" possibles pour optimiser l'horreur. Ainsi : « Au début, on ouvrait les portes du camion, on croyait recevoir des cadavres, mais les gens étaient seulement évanouis, et quand on les jetait dans les flammes, ils poussaient des cris. ».

    Et la confession d'une absence totale de scrupules : « Au début, j’éprouvais une impression pénible. Puis, peu à peu, j’ai perdu toute sensibilité. Je crois que c’était nécessaire : sans cela, je n’aurais pas pu continuer. Vous comprenez, je pensais aux Juifs en termes d’unités, jamais en termes d’êtres humains. Je me concentrais sur le côté technique de ma tâche. ». Sa motivation, la fidélité (à l'instar d'une secte) et le devoir d'obéissance : « On n’avait plus de cas de conscience à se poser. Il suffisait seulement d’être fidèle, c’est-à-dire d’obéir. Notre devoir, notre unique devoir était d’obéir. Et grâce à cette obéissance absolue (…), nous étions sûrs de ne plus jamais nous tromper, d’être toujours dans le droit chemin. ». Dans une préface publiée le 27 avril 1972 de son livre "La Mort est mon métier", Robert Merle précisait d'ailleurs : « Tout ce que Rudolf fit, il le fit non par méchanceté, mais au nom de l’impératif catégorique, par fidélité au chef, par soumission à l’ordre, par respect pour l’État. Bref, en homme de devoir : et c’est en cela justement qu’il est monstrueux. ».


    Bien plus tard, Jonathan Littel a écrit "Les Bienveillantes" sorti en août 2006 (chez Gallimard) avec le même point de vue que "La Mort est mon métier" de Robert Merle, celui du bourreau nazi. Diamétralement opposé, côté victime ou plutôt, pré-victime, "Le Journal" d'Anne Frank (publié après sa mort) est un document essentiel pour comprendre comment les nazis traquaient leurs victimes. Ainsi, le 9 octobre 1942, l'adolescente décrivait le camp Westerbork : « On ne donne presque rien à manger aux gens, et encore moins à boire. (…) Ils dorment tous ensemble, hommes, femmes et enfants ; les femmes et les enfants ont souvent la tête rasée. Il est presque impossible de fuir. Les gens du camp sont tous marqués par leurs têtes rasées (…). S’il se passe déjà des choses aussi affreuses en Hollande, qu’est-ce qui les attend dans les régions lointaines et barbares où on les envoie ? Nous supposons que la plupart se font massacrer. La radio anglaise parle d’asphyxie par le gaz ; c’est peut-être la méthode d’élimination la plus rapide. Je suis complètement bouleversée. ». Dès octobre 1942, les chambres à gaz étaient connues du grand public.

    Fictions, docu-fictions, témoignages, essais... les livres ont commencé dès la fin de la guerre avec cette peur de ne pas être écouté, de ne pas être entendu. Les auteurs sont de plus en plus nombreux, avec cette préoccupation mémorielle amorcée dans les années 1970-1980 et maintenant très développée depuis les années 2000. Primo Levi, Robert Merle, Elie Wiesel, Simone Veil... je n'en cite que quelques-uns sur les nombreux qui ont sorti des livres sur le sujet.

    Primo Levi est sans doute novateur car, à ma connaissance, il a écrit l'un des premiers témoignages, une narration teintée d'une forme de culpabilité : comment et pourquoi ai-je survécu à cette horreur ? Ceux qui n'ont pas été déportés dans un camp voulaient tourner la page, oublier la guerre, penser à l'avenir, à la reconstruction. Ceux qui sont revenus de camps, les rares qui en sont revenus, probablement aussi, leur expérience était incommunicable, incompréhensible pour ceux qui n'ont pas vécu la même chose.


    Elie Wiesel, il était journaliste après un prestigieux doctorat de philosophie soutenu à la Sorbonne, et c'est grâce à François Mauriac, qu'il interviewait en mai 1955, qu'il a commencé à témoigner, après avoir été en colère contre l'écrivain croyant. Il l'a raconté le 29 juin 1996 : « "Il y a de cela dix ans à peu près, j’ai vu des enfants, des centaines d’enfants juifs, qui ont souffert plus que Jésus sur sa croix, et nous n’en parlons pas". Je me suis senti soudain gêné. J’ai refermé mon bloc-notes et me suis dirigé vers l’ascenseur. Il me rattrapa. Il me retint. Il s’est assis sur sa chaise, moi sur la mienne, et il s’est mis à gémir. J’avais rarement vu un homme âgé pleurer de la sorte, et je me suis senti si bête. Je me suis senti comme un criminel. (…) Il était un homme pur, un membre de la Résistance. Je ne savais pas cela. (…) Et puis, à la fin, sans rien d’autre, il me dit simplement : "Vous savez, vous devriez peut-être en parler". ».

     

     
     


    Le principal livre de témoignage d'Elie Wiesel est "La Nuit" sorti en 1958, vendu à plus de 6 millions d'exemplaires, l'un des livres majeurs sur la Shoah : « Jamais je n’oublierai cette nuit, la première nuit de camp, qui a fait de ma vie une nuit longue et sept fois verrouillée. Jamais je n’oublierai cette fumée. Jamais je n’oublierai les petits visages des enfants dont j’avais vu les corps se transformer en volutes sous un azur muet. Jamais je n’oublierai ces flammes qui consumèrent pour toujours ma foi. Jamais je n’oublierai ce silence nocturne qui m’a privé pour l’éternité du désir de vivre. Jamais je n’oublierai ces instants qui assassinèrent mon Dieu et mon âme, et mes rêves qui prirent le visage du désert. Jamais je n’oublierai cela, même si j’étais condamné à vivre aussi longtemps que Dieu lui-même. Jamais. ».

    L'expérience terrible de Simone Veil, déportée à l'âge de 16 ans, a été éprouvante pour elle, tellement éprouvante qu'elle n'a vraiment témoigné qu'à partir du début des années 2000, après son retrait de la vie politique, prenant même des responsabilités sur la transmission mémorielle au fil des générations (elle a présidé la Fondation pour la mémoire de la Shoah de 2001 à 2007).

    On connaît l'anecdote grinçante, lors de l'examen de la loi sur l'IVG, l'altercation entre Jean-Marie Daillet (député centriste anti-IVG) et Simone Veil, avec ce mot de trop de Jean-Marie Daillet le 27 novembre 1974 dans l'hémicycle : « On est allé, quelle audace incroyable, jusqu'à déclarer tout bonnement qu'un embryon humain était un agresseur. Eh bien ! ces agresseurs, vous accepterez, madame, de les voir, comme cela se passe ailleurs, jetés au four crématoire ou remplir des poubelles ! ». Propos d'une grande violence, mais à sa décharge, même si cela ne l'a pas excusé, le député ne connaissait pas le calvaire que la ministre avait vécu (il lui a envoyé un bouquet de fleurs pour se faire pardonner).

    À New York, le 29 janvier 2007, l'ancienne déportée racontait : « Plus encore que les coups, les chiens qui nous harcelaient, l’épuisement, la faim, le froid et le sommeil, ce sont les humiliations destinées à nous priver de toute dignité humaine qui, aujourd’hui encore, demeurent le pire dans nos mémoires. Nous n’avions plus de nom, mais seulement un numéro tatoué sur le bras, servant à nous identifier, et nous étions vêtus de haillons. Ce qui nous hante avant tout, c’est le souvenir de ceux dont nous avons été brutalement séparés dès notre arrivée au camp et dont nous avons appris par les kapos, dans les heures suivantes, qu’ils avaient été directement conduits à la chambre à gaz. ».


    Deux ans auparavant, le 27 janvier 2005, à l'occasion du 60e anniversaire de la libération du camp, Simone Veil a rappelé à Auschwitz l'atteinte à l'humanité tout entière : « Que serait devenu ce million d’enfants juifs assassinés, encore bébés ou déjà adolescents, ici ou dans les ghettos, ou dans d’autres camps d’extermination ? Des philosophes, des artistes, de grands savants ou plus simplement d’habiles artisans ou des mères de famille ? Ce que je sais, c’est que je pleure encore chaque fois que je pense à tous ces enfants et que je ne pourrai jamais les oublier. Certains, dont les rares survivants, sont, il est vrai, entrés dans le camp, mais pour y servir d’esclaves. La plupart d’entre eux sont ensuite morts d’épuisement, de faim, de froid, d’épidémies ou, eux aussi, sélectionnés à leur tour pour la chambre à gaz, parce qu’ils ne pouvaient plus travailler. Il ne suffisait plus de détruire notre corps. Il fallait aussi nous faire perdre notre âme, notre conscience, notre humanité. Privés de notre identité, dès notre arrivée, à travers le numéro encore tatoué sur nos bras, nous n’étions plus que des stücke, des morceaux. Le tribunal de Nuremberg, en jugeant pour crimes contre l’humanité les plus hauts responsables, reconnaissait l’atteinte portée non seulement aux victimes mais à l’humanité tout entière. ».

    Dans son livre "Une Vie" sorti le 31 octobre 2007 (chez Stock), Simone Veil écrivait, à propos de ses recherches d'archives sur la Shoah : « Je n’oublierai jamais l’intense émotion qui m’a étreinte lorsqu’un employé m’a montré un petit carnet semblable à ceux qu’utilisaient jadis les commerçants, avec souches et reçus, et sur lequel était consignée la somme de sept cents francs prise à ma mère lors de notre arrivée à Drancy. Papier dérisoire, preuve accablante, s’il en était encore besoin, du mélange de rigueur paperassière et d’aveuglement moral de l’administration. Alors que semaine après semaine, des convois de déportés partaient pour Auschwitz, de zélés fonctionnaires remplissaient des carnets à souche et remettaient des reçus aux Juifs. ».

    Pour "populariser" l'existence même de la Shoah, il a fallu attendre quelques films comme "Nuit et brouillard" d'Alain Resnais (sorti le 22 mai 1956), "Le Chagrin et la Pitié" de Marcel Ophüls (sorti en Allemagne le 18 septembre 1969 et en France le 14 avril 1971), "Shoah" de Claude Lanzmann (sorti le 30 avril 1985), et la mini-série télévisée américaine "Holocauste" de Marvin Chomsky en quatre épisodes (diffusés du 16 au 19 avril 1978 aux États-Unis et tous les mardis du 13 février au 6 mars 1979 en France sur Antenne 2).

    On peut aussi évoquer d'autres films comme "Lacombe Lucien" de Louis Malle (sorti le 30 janvier 1974), "Le Choix de Sophie" d'Alan J. Pakula (sorti le 8 décembre 1982) avec Meryl Streep, et "La Liste de Schindler" de Steven Spielberg (sorti le 15 décembre 1993). Également un film qui se voulait amèrement comique, "La vie est belle" de Roberto Benigni (sorti le 31 décembre 1997), où un déporté emballe de fantaisie auprès de son enfant leur vie dans un camp d'extermination (je n'ai pas trouvé cette idée très enthousiasmante et pertinente). Pour Simone Veil, tous les films cités, sauf "Holocauste", étaient mauvais en ce sens qu'ils étaient beaucoup trop caricaturaux (et "Le Chagrin et la Pitié" décrit une France collaborationniste alors que Simone Veil insistait sur l'importance des résistants et aussi des Justes, qui ont sauvé de nombreux Juifs en France).

     

     
     


    D'autres œuvres ont aussi raconté la Shoah comme l'excellente bande dessinée (en deux tomes) "Maus" du dessinateur américain Art Spiegelman, sorti en septembre 1986 et en 1991 chez Flammarion. Art Spiegelman a mis en scène les protagonistes de la Solution finale de manière assez imagée : les nazis sont des chats (ce qui est un scandale pour le syndicat des défenseurs des chats !) et les Juifs, bien sûr, des souris (les cibles des chats), relativement naïves (« On pensait que Hitler voulait seulement les régions de Pologne, comme Bielsko, qui avaient été allemandes avant la Première Guerre mondiale. »). Hitler est représenté par une tête de chat avec une mèche de cheveux et une petite moustache, au centre d'une croix gammée, un peu comme une tête de mort est placées au croisement de deux tibias. Les Polonais sont représentés par des cochons (les Polonais ont protesté contre cette image), les Américains des chiens, les Français des grenouilles, les Britanniques des poissons, les Suédois des élans, etc. Un peu à la manière d'une bande dessinée de Walt Disney qui inventait des histoires avec des animaux humanisés.

    Parmi les plus rares artistes qui ont décrit dans leur art l'expérience de la Shoah, le peintre David Olère (1902-1985) est particulier : ce Français d'origine polonaise a survécu au camp d'Auschwitz-Birkenau (pendant une période très longue, du 2 mars 1943 au 19 janvier 1945, soit deux hivers), mais il a été aussi un rescapé de là où il était, à savoir des zones ultra-isolées des fours crématoires, puisqu'il était chargé d'incinérer les corps venant des chambres à gaz, et il a réussi à échapper aux purges dans ces lieux critiques, prévues pour éliminer tout témoin. Lui a su soudoyer ses gardiens avec ses dessins pour survivre et réussir à sortir du camp.

     

     
     


    David Olère était donc le seul témoin direct au cœur de cette horreur qu'il a documentée par ses peintures, dessins et sculptures. Une soixantaine de dessins de scènes effroyables ont ainsi été réalisés entre 1945 et 1949, et sont conservés en France, à Auschwitz et en Israël. Dans une courte biographie publiée le 27 janvier 2024 sur Internet, Ilaria Baratta expliquait : « Il est l’un des rares déportés à avoir vu de ses propres yeux toutes les étapes du processus d’extermination et à en être sorti vivant, même si la plupart du temps, il était employé à réaliser des œuvres d’art pour les SS et à traduire des émissions radiophoniques , car il connaissait plusieurs langues. (…) Pour les chercheurs, les œuvres d’Olère ont une valeur unique en tant que documents illustrant les atrocités de l’extermination ; elles représentent des détails que seuls les membres du Sonderkommando connaissaient. ». Il ne pouvait pas refuser.

    Je termine par cette impression de Simone Veil : « Rien ne s’efface (…). Deux mille cinq cents survivants sur soixante-dix-huit mille Juifs français déportés. Il n’y a que la Shoah. L’atmosphère de crématoire, de fumée et de puanteur de Birkenau, je ne l’oublierai jamais. Là-bas, dans les plaines allemandes et polonaises, s’étendent désormais des espaces dénudés sur lesquels règne le silence ; c’est le poids effrayant du vide que l’oubli n’a pas le droit de combler, et que la mémoire des vivants habitera toujours. ».

    Si on parle de mémoire, ce n'est pas un vain mot. Il faut veiller à transmettre ce que les humains sont capables de faire de plus horrible dans l'histoire de l'humanité pour garder toujours sa vigilance. Cela peut toujours recommencer un jour. C'est pour cela qu'il faut proscrire les discours de haine, de racisme et d'antisémitisme, qui sont des délits selon la loi française. Et c'est pour cela qu'il vaut veiller à la préservation de la mémoire.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (25 janvier 2025)
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    Pour aller plus loin :
    Auschwitz aujourd'hui.
    La Nuit de la Shoah.
    Mauschwitz.
    Le 8 mai, l'émotion et la politique.
    Elie Wiesel.
    Robert Merle.
    Le calvaire de Simone Veil.
    Anne Frank.
    Le nazisme.
    Mélinée et Missak Manouchian au Panthéon : pluie et émotion !
    Hommage du Président Emmanuel Macron à Missak Manouchian au Panthéon le 21 février 2024 (texte intégral et vidéo).
    Les Manouchian mercredi au Panthéon.
    Loi sur les génocides invalidée : faut-il s'en réjouir ?
    Michel Cherrier.
    Léon Gautier.
    Claude Bloch, passeur de mémoire.

     

     
     




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    https://www.agoravox.fr/actualites/citoyennete/article/auschwitz-aujourd-hui-258782

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  • Le génie de Benoît Mandelbrot

    « C’est l’essentiel des phénomènes de la nature qui obéissent à cet autre type de hasard où l’on ne peut appliquer la loi des grands nombres. (…) Le modèle standard nous fait passer à côté de la plus grande partie de la réalité, et va jusqu’à nous empêcher même de la voir. » (Benoît Mandelbrot, 1973).



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    Le mathématicien Benoît Mandelbrot est né il y a juste 100 ans, le 20 novembre 1924, à Varsovie. Il est mort d'un cancer peu avant ses 86 ans le 14 octobre 2010 à Cambridge, dans le Massachusetts. J'ai déjà évoqué ce scientifique atypique et prolifique dans un article précédent, en particulier sur les fractales dont il est l'un des initiateurs.

    Benoît Mandelbrot a eu à la fois de la chance et de la malchance dans ses origines juives polonaises (sa famille était lituanienne). La "malchance", car ce n'était pas du tout facile d'être Juif pendant cette partie du siècle sur cette terre européenne. En 1936, la famille a d'ailleurs émigré en France, rejoignant une autre partie de la famille déjà installée. Sous l'Occupation, le jeune homme a dû se cacher et changer souvent d'adresses pour éviter d'être déporté voire assassiné dans les camps de la mort. Le fait qu'il ait été épargné a été sa chance, mais plus encore, la chance d'être né dans une famille qui l'a encouragé et qui a encouragé le travail et la curiosité, notamment avec son oncle Szolem Mandelbrojt, scientifique aussi, membre du Collège de France depuis 1938, qui lui a permis, entre autres, de rencontrer de nombreux autres scientifiques (cet oncle était l'un des fondateurs du fameux groupe Bourbaki).

    Polytechnicien, Benoît Mandelbrot se destinait à la recherche mathématique, mais loin de rester dans les cases de cette science dure, il voulait au contraire la relier avec des réalités quotidiennes. Il a été ainsi économiste ou linguiste autant que mathématicien. Faisant ses études en France, il est finalement parti aux États-Unis pour soutenir sa thèse de doctorat et toute sa vie, il a oscillé entre la France (et la Suisse) et les États-Unis, cumulant certains postes comme chercheur au CNRS, puis professeur d'université à Lille, en France, et professeur au Massachusetts Institute of Technology (MIT) puis à Harvard, puis à Yale, ou encore chercheur à IBM à partir de 1958, aux USA (il a refusé le Collègue de France en 1973).


    Il a quitté certains postes d'enseignement qui lui prenaient trop de temps afin de se consacrer à ses travaux de recherche, et probablement que son poste à IBM était le meilleur, puisque la compagnie informatique lui a laissé une liberté absolue dans ses activités. En effet, en tant que research fellow, ce qui est un grade privilégié dans une grande entreprise américaine, il n'avait pas vraiment d'impératif de management (projet ou hiérarchique) et pouvait se consacrer très librement à ses objectifs de recherche et même, bénéficier de temps de disponibilité pour pouvoir nouer des collaborations avec d'autres centres de recherche et rencontrer d'autres scientifiques.

    Sur ce point, il faut m'arrêter pour comparer le système de recherche des États-Unis et celui de la France. En France, la recherche est particulièrement fournie dans le public, dans les universités et dans des instituts de recherche dont le plus prestigieux est sans doute le CNRS en raison de son interdisciplinarité. Une fois que le chercheur a un poste, soit d'enseignant-chercheur, soit de chercheur, il est libre de pouvoir orienter ses recherches comme bon lui semble et évoluer dans sa carrière avec l'idée que les promotions et les choix se font par cooptation. Le problème de ce système, c'est que l'argent public sert surtout à payer les salaires (relativement faibles pour le chercheur mais très lourds pour l'État) et les gros équipements (de type synchrotron, etc.), mais manque pour financer des équipements parfois coûteux des laboratoires.

    D'où l'importance du privé en France. Ce n'est pas nouveau, mais la loi Pécresse de 2007 a considérablement aidé les laboratoires publics notamment en permettant aux universités de se doter d'argent privé. Même si c'était en contradiction idéologique avec la plupart des enseignants-chercheurs, cette loi a été largement acceptée par la communauté scientifique car elle a permis de poursuivre un financement que l'État (surendetté, et pas seulement de maintenant !) ne pouvait plus assurer. Non seulement les laboratoires publics ont gagné en autonomie, mais aussi en financement, sans pour autant être "vendus" aux entreprises.

    Mais là, je ne parle que de recherche publique. La France a bien sûr aussi de la recherche privée, mais elle est de moins en moins importante. Depuis une vingtaine d'années, l'État d'ailleurs encourage fortement l'investissement dans le recherche au moyen du crédit impôt recherche qui est l'un des mécanismes non seulement pour encourager cet investissement mais aussi pour inciter les grands groupes internationaux à installer leurs centres de recherche en France. Il reste que la recherche privée est directement tributaire des marchés et à court terme, ce qui peut inquiéter sérieusement pour l'avenir du pays.

    Autre point faible de la France, directement en rapport avec la conception de l'argent que se font beaucoup de Français (complexés par l'argent), il y a un réel chaînon manquant entre la découverte scientifique et sa valorisation industrielle. Il y a encore peu de dépôts de brevet au CNRS malgré la qualité excellente de la recherche de très nombreux scientifiques.

    Aux États-Unis, comme il y a très peu d'État (et je devine que très prochainement, avec le retour de Donald Trump, il y en aura encore moins), tout fonctionne depuis toujours avec l'argent privé : universités, laboratoires de recherche, etc. Mais cela n'empêche pas l'autonomie des chercheurs. Dans les universités, un chercheur est à la fois chercheur et entrepreneur, car il est capable financièrement d'investir pour valoriser les fruits de sa recherche (on appelle cela essaimage, ou start-up). Inversement, et c'est ce qui s'est passé pour IBM (qui ont eu des chercheurs qui ont reçu le Prix Nobel de Physique, les plus connus furent en 1986 à Zurich), c'est que les grandes entreprises privées jouent le rôle de la recherche publique en France. Notamment avec ce type de poste de research fellow. D'ailleurs, Benoît Mandelbrot devait prendre sa retraite d'IBM en 1993 mais il a eu la possibilité de garder un bureau et de continuer à y travailler avec le titre de fellow emeritus jusqu'en 2006, date à laquelle il a vraiment pris sa retraite (et a arrêté de donner des cours à Yale).

    Je termine cette grande parenthèse sur les chercheurs avec cette idée qu'un chercheur, qui est une personne très pointue dans un domaine très technique, dotée d'une forte intelligence couplée à une forte intuition, le tout avec un travail de longue haleine, persévérant et parfois infructueux, ne court pas, en général, après l'argent. Il existe des métiers (de type commercial) qui permettent de devenir riche beaucoup plus rapidement et avec beaucoup moins de labeur que de faire des mathématiques ou de la physique de très haut niveau. La passion et la curiosité sont des moteurs bien plus efficaces que l'argent pour les scientifiques. De plus, ils ont un autre moteur (commun également aux autres) qui est la reconnaissance. Et c'est aussi cette raison qui a conduit Benoît Mandelbrot à travailler plus aux États-Unis qu'en France où on s'intéressait peu à ses travaux.


    L'un des traits de génie de Benoît Mandelbrot a été d'avoir été capable, à partir de travaux antérieurs, comme la loi de George Kingsley Zipf d'observation empirique de la fréquence d'un mot dans un texte en fonction de son rang et la théorie de l'information de Claude Shannon, d'en faire une loi plus générale, ce qui a été l'objet de sa thèse soutenue le 19 décembre 1952 ("Contribution à la théorie des jeux de communication") qui lui a apporté une grande notoriété outre-atlantique.

    C'est à la fin des années 1960 que Benoît Mandelbrot s'est intéressé à ce qu'il a appelé les fractales, en voulant déterminer la longueur des côtes de la Grande-Bretagne, et en montrant que leur dimension de Hausdorff n'était ni 1 ni 2 mais entre 1 et 2 (non entière). Dans ce cadre, il s'est investi dans l'étude des fluctuations instantanées, essentielles pour mieux prévoir l'économie et les modèles financiers, trop souvent décrits par des moyennes qui ne rendent compte de rien. Au-delà de l'économie, les applications de ses travaux sont très nombreuses, de la forme des nuages aux crues du Nil en passant par la transmission du signal.

    Dans sa leçon au Collège de France le 13 janvier 1973 sur les "Formes nouvelles du hasard dans les sciences", Benoît Mandelbrot a dit en introduction : « La variété des phénomène naturels est infinie, mais les techniques mathématiques susceptibles de les dompter sont fort peu nombreuses. Il arrive donc souvent que des phénomènes qui par ailleurs n'ont rien de commun se trouvent partager la même structure mathématique. C'est un tel cousinage conceptuel qui semble aujourd'hui porter l'une vers l'autre les fluctuations qui à la fois sont "très erratiques" et possèdent une "homothétie statistique interne". Leur matière va de l'économique à la biologie, à la géophysique, à diverses branches de la physique et au-delà, mais de deux points de vue ces fluctuations se ressemblent : l'échec d'une technique mathématique et le succès d'une autre. Le premier les définit comme "non laplaciennes" ou "très erratiques", par contraste avec les fluctuations familières qui peuvent être dites "laplaciennes" ou "bénignes". Le deuxième les définit comme "statistiquement homothétiques". (…) Je voudrais faire sentir aussi bien le degré d'unité que l'homothétie apporte, que la variété des problèmes spécifiques auxquels elle contribue à répondre. ».
     

     
     


    L'Ensemble de Mandelbrot (inspiré par les travaux du mathématicien Gaston Julia) est la famille des fractales qui répondent à cette équation : z(0) = 0 et z(n+1) = z(n) puissance 2 + c (où c est un nombre complexe quelconque). Cela donne cette harmonieuse géométrie qui se répète de la plus grande à la plus petite échelle (cliquer ici).
     

     
     


    Benoît Mandelbrot a publié en 1982 un livre complet de six cents pages sur le sujet "The Fractal Geometry of Nature" : « Au fur et à mesure que la technologie s'est améliorée, les fractales tracées par ordinateur, mathématiquement précises, sont devenues plus détaillées. Les premiers dessins étaient en noir et blanc à basse résolution ; les dessins ultérieurs étaient en haute résolution et en couleur. De nombreux exemples ont été créés par des programmeurs qui ont travaillé avec Mandelbrot, principalement au centre de recherche d'IBM. Ces visualisations ont renforcé la force de persuasion des livres et leur impact sur la communauté scientifique. ». Pour plus de précision, on peut relire ici.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (16 novembre 2024)
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    Pour aller plus loin :
    Benoît Mandelbrot.
    Publication : Tan, Lei. "Similarity between the Mandelbrot set and Julia sets". Comm. Math. Phys. 134 (1990), no 3, 587-617.
    Fractales explosives.
    Hubert Curien.
    Alain Bombard.
    Hubert Reeves.
    L'intelligence artificielle récompensée par les Nobel 2024 de Physique et de Chimie.
    Didier Raoult interdit d'exercer !
    2e rentrée scolaire contre les papillomavirus humains.
    Variole du singe (mpox) : "ils" nous refont le coup ?
    Covid : attention au flirt !
    Papillomavirus humains, cancers et prévention.
    Publications sur le papillomavirus, le cancer du col de l'utérus et l'effet de la vaccination anti-HPV (à télécharger).
    Émission "Le Téléphone Sonne" sur la vaccination contre les papillomavirus, sur France Inter le 3 mars 2023 (à télécharger).
    Le cancer sans tabou.
    Qu'est-ce qu'un AVC ?
    Lulu la Pilule.
    La victoire des impressionnistes.
    Science et beauté : des aurores boréales en France !
    Le Tunnel sous la Manche.
    Peter Higgs.
    Georges Charpak.
    Gustave Eiffel.
    Prix Nobel de Chimie 2023 : la boîte quantique ...et encore la France !
    Katalin Kariko et Drew Weissman Prix Nobel de Médecine 2023 : le vaccin à ARN messager récompensé !
    Covid : la contre-offensive du variant Eris.
    Hubert Reeves.
    Prix Nobel de Physique 2023 : les lasers ultrarapides, la physique attoseconde... et la France récompensée !
    John Wheeler.
    La Science, la Recherche et le Doute.
    L'espoir nouveau de guérir du sida...
    Louis Pasteur.
    Howard Carter.
    Alain Aspect.
    Svante Pääbo.
    Frank Drake.
    Roland Omnès.
    Marie Curie.

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    https://www.agoravox.fr/actualites/technologies/article/le-genie-de-benoit-mandelbrot-257450

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  • Pourquoi a-t-on assassiné le père Popieluszko ?

    « Je voudrais rappeler une autre figure : celle du père Jerzy Popieluszko, prêtre et martyr, qui a été proclamé bienheureux dimanche dernier précisément, à Varsovie. Il a exercé son ministère généreux et courageux aux côtés de ceux qui s'engageaient pour la liberté, pour la défense de la vie et sa dignité. Son œuvre au service du bien et de la vérité était un signe de contradiction pour le régime qui gouvernait alors en Pologne. (…) Si nous considérons l'histoire, nous voyons combien de pages d'authentique renouveau spirituel et social ont été écrites avec l'apport décisif de prêtres catholiques, animés uniquement par la passion pour l'Évangile et pour l'homme, pour sa véritable liberté, religieuse et civile. Combien d'initiatives de promotion humaine intégrale sont parties de l'intuition d'un cœur sacerdotal ! » (Benoît XVI, le 13 juin 2010 à Saint-Pierre de Rome).




     

     
     


    Il y a quarante ans, le 19 octobre 1984, il a été enlevé et assassiné. Quelques jours plus tard, le peuple polonais découvrait avec horreur le corps torturé et assassiné du père Jerzy Popieluszko à Wloclawek. Il venait d'avoir 37 ans (il est né le 14 septembre 1947 à Okopy d'une modeste famille de paysans).

    Après des études au grand séminaire de Varsovie et un service militaire très difficile à cause des persécutions contre les prêtres, Jerzy Popieluszko a été ordonné prêtre le 28 mai 1972 par le cardinal Stefan Wyszynski, archevêque de Varsovie qu'il admirait beaucoup (et qui a failli être élu pape en 1978 à la place de l'archevêque de Cracovie, finalement préféré parce que beaucoup plus jeune).

    Après avoir eu beaucoup d'activités comme prêtre, notamment aumônier dans le secteur des personnels médicaux, le père Popieluszko, à sa demande (acceptée par Mgr Wyszynski), est parti le 31 août 1980 auprès d'ouvriers en grève et a dit la messe pour les contestataires de Solidarnosc. Après
    l'état de siège décrété le 13 décembre 1981 par le général Jaruzelski, le père Popieluszko est venu en aide auprès des personnes emprisonnées membre de Solidarnosc. Il est devenu très rapidement l'une des personnalités qui défiaient le pouvoir communiste en place. Il a organisé tout un réseau de financement d'aides qui permettaient de soigner les opposants internés.
     

     
     


    Ses homélies, ses messes entre 1981 et 1984 ont été des façons de s'opposer à la dictature. Il faisait en sorte que ses homélies puissent être comprises de tout le monde et, avant de les prononcer, les faisait relire par des ouvriers pour savoir si elles étaient compréhensibles. Avec sa notoriété nationale, il a participé au renouveau de la foi en Pologne (beaucoup de conversions et de nouvelles vocations sacerdotales). Beaucoup de gens voyaient dans l'Église catholique la seule institution capable de résister à la dictature communiste. Le 19 mai 1983, il a dit la messe très suivie de l'enterrement de l'étudiant Grzegorz Przemyk, assassiné par la milice.

    À partir de 1982, le père Popieluszko était surveillé, et aussi diffamé, persécuté, sa famille également. On demandait à sa hiérarchie catholique de le faire taire, qu'il arrêtât ses activités de soutien à l'opposition, il a été plusieurs fois interrogé par la police pour abus de la liberté du culte en période de loi martiale. Il y a eu parfois des événements graves contre lui, comme l'envoi d'engins explosifs dans son appartement, etc.

    Jerzy Popieluszko était soutenu discrètement par le pape
    Jean-Paul II par l'intermédiaire de Mgr Zbigniew Kraszewski, évêque auxiliaire de Varsovie et confesseur de Lech Walesa. Mais cela devenait de plus en plus dangereux pour lui. Ses amis ont demandé en juillet 1984 au cardinal Jozef Glemp, nouvel archevêque de Varsovie, de l'envoyer faire des études à Rome afin de l'écarter de la Pologne, mais Jerzy Popieluszko ne voulait pas quitter la Pologne et les Polonaiss et Mgr Jozef Glemp a expliqué a posteriori qu'il ne voulait pas le forcer à aller à Rome.
     

     
     


    Suivi dès le 7 octobre 1984, le père Popieluszko a failli être assassiné le 14 octobre 1984. Ce fut lors de la seconde tentative le 19 octobre 1984 qu'il a perdu la vie : sa voiture a été arrêtée par la police, son chauffeur (ancien parachutiste) a réussi à s'enfuir mais le prêtre résistant a été enlevé, placé de force dans un coffre, et amené à Wloclamek. Torturé jusqu'à la mort, Jerzy Popieluszko a été jeté dans la Vistule.

    Son corps a été retrouvé un peu plus tard, le 30 octobre 1984, grâce aux indications des trois officiers de la police politique qui ont avoué l'assassinat. L'annonce de son assassinat a provoqué une forte émotion bien au-delà des frontières polonaises. Jerzy Popieluszko a été enterré le 3 novembre 1984 à l'église Saint-Stanislas de Varsovie en présence de plus de 500 000 personnes, renforçant ainsi l'audience de Solidarnosc. Depuis lors, plus de 18 millions de Polonais ont prié devant sa tombe installé dans la même église, y compris le pape Jean-Paul II qui s'est recueilli le 14 juin 1987 lors d'une visite pastorale.
     

     
     


    L'enquête judiciaire sur l'assassinat du prêtre a été bâclée. N'ont été mis en cause que les trois officiers des services secrets qui ont participé à l'opération et leur chef, mais pas les véritables commanditaires, dont probablement Czeslaw Kiszczak, le Ministre de l'Intérieur en fonction du 31 juillet 1981 au 6 juillet 1990. Le procès s'est déroulé du 27 décembre 1984 au 7 février 1985 et a été l'occasion surtout de faire le procès politique de la victime. Le procès a quand même abouti à la condamnation des quatre agents des services secrets (à vingt-cinq, quinze et quatorze années de réclusion criminelle) qui ont toutefois été libérés très tôt, entre 1990 et 2001. On a évoqué également la responsabilité du général Jaruzelski, qui souhaitait peut-être seulement faire de l'intimidation contre le prêtre. On ne saura probablement jamais qui a eu l'idée de cet assassinat.

    Le père Popieluszko n'a pas été le seul prêtre victime de la barbarie communiste. Un autre prêtre, de 39 ans, Sylvestre Zych, lui aussi sympathisant de Solidarnosc, a été retrouvé assassiné près de Gdansk le 12 juillet 1989 (peu avant
    l'arrivée au pouvoir d'un gouvernement libre). On aurait retrouvé de l'alcool dans son sang comme ce fut le cas pour Jerzy Popieluszko, ainsi que des traces de piqûres par seringue. En 1982, il avait été condamné à six ans de prison pour complicité supposée dans le meurtre d'un policier et avait été libéré en 1986 au titre d'une mesure de clémence qui avait aussi réduit la peine de trois des quatre assassins du père Popieluszko.
     

     
     


    Faisant suite au procès en béatification ouvert en 1997 par Jean-Paul II, son successeur Benoît XVI a donné son accord le 19 décembre 2009 à la béatification de Jerzy Popieluszko, considéré comme un martyr de la foi, qui a été célébrée le 6 juin 2010 à Varsovie par l'archevêque Angelo Amato au cours d'une grand-messe concélébrée par cent vingt évêques et plus de mille prêtres, en présence de 150 000 fidèles dont la mère du prêtre (90 ans), ses frères et sœur, et l'ancien Président de la République Lech Walesa.

    Au fait, pourquoi a-t-il été assassiné ? Simplement parce qu'il refusait de se soumettre à la dictature communiste. Mais on ne saura probablement jamais les conditions exactes de son assassinat. Le père Popieluszko aura été l'un des rares "héros" emblématiques qui ont soutenu activement la résistance pacifique qui a permis la libéralisation de la Pologne du joug communiste (et par là même, la libéralisation de l'Europe centrale et orientale), avec le leader du syndicat Solidarnosc Lech Walesa, le pape Jean-Paul II, le premier Premier Ministre non communiste de la Pologne d'après-guerre
    Tadeusz Masowiecki et l'intellectuel Bronislaw Geremek. Les dernières paroles publiques du père Popieluszko furent : « Prions pour être libérés de la peur, de l’intimidation, mais surtout de la soif de vengeance et de violence. ». Cette prière reste encore valable de nos jours dans beaucoup d'endroits du monde.


    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (12 octobre 2024)
    http://www.rakotoarison.eu


    Pour aller plus loin :
    Pourquoi a-t-on assassiné le père Popieluszko ?
    Le proeuropéen Donald Tusk redevient chef du gouvernement polonais.
    Législatives en Pologne du 15 octobre 2023 : grande victoire de l'Europe !
    Législatives en Pologne du 18 juin 1989.
    Lech Walesa.
    Donald Tusk.
    Tragique accident d’avion près de Katyn.
    Wojciech Jaruzelski.

     
     




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