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Jean-Marie Le Pen, retour aux sources du Rassemblement national...

« En me présentant à vos suffrages, je mesure toute la gravité du débat national majeur qui s'ouvre devant vous. Je suis convaincu qu'il doit permettre de créer le grand courant national et populaire capable de faire face à une crise nationale et internationale qui motive l'inquiétude grandissante de notre peuple. » (Jean-Marie Le Pen, avril 1974).



 

 
 


Le fondateur du Front national devenu le Rassemblement national Jean-Marie Le Pen fête son 96e anniversaire ce jeudi 20 juin 2024. J'allais écrire l'âge de la reine d'Angleterre, comme on dirait l'âge du Christ. L'âge à la mort de la reine d'Angleterre. Un anniversaire particulier pour une raison bien simple.

Pas parce que le vieux Menhir a été placé « sous régime de protection juridique » au milieu du mois de février 2024 (confirmé par Louis Aliot le 3 avril 2024), une disposition civile apparentée à la tutelle, sur demande de la famille (de ses trois filles dont Marine Le Pen) auprès du tribunal de Puteaux en raison de l'inaptitude de Jean-Marie Le Pen. Il devait pourtant être jugé, avec sa fille Marine Le Pen, du 30 septembre 2024 au 27 novembre 2024 par le tribunal correctionnel de Paris pour détournement de fonds européens dans l'affaire des assistants parlementaires des députés européens du FN, mais la justice devrait annoncer son inaptitude à comparaître au tribunal dans quelques jours (le 3 juillet 2024). Louis Aliot a précisé le 3 avril 2024 sur RMC : « C’est un homme qui a son âge, qui est fatigué. Il est maintenant sous un régime de protection juridique et ce sont ses enfants qui participent à la gestion de ses affaires. ».

Particulier parce que le mouvement d'extrême droite qu'il a contribué à fonder en 1972 avec d'autres militants extrémistes d'Ordre nouveau pourrait bien conquérir le pouvoir national dans quelques jours. Le Rassemblement national est en tout cas le favori des sondages des élections législatives des 30 juin et 7 juillet 2024 à la suite de la dissolution du 9 juin 2024.

Jean-Marie Le Pen en est-il encore conscient ou pas ? Je ne connais pas son état de santé, mais après soixante-dix ans de batailles électorales, au soir de sa vie, il pourrait trouver un nouveau sens à son combat. Quand il s'était lancé en se présentant à l'élection présidentielle de 1974, elle aussi soudaine provoquée par le décès du Président Georges Pompidou il y a cinquante ans, il n'avait obtenu que 0,7% des suffrages exprimés, mais il avait déjà placé les jalons qui allaient lui être favorables. Dans sa profession de foi, dont l'introduction est indiquée en tête d'article, on constate qu'on pourrait encore la dire aujourd'hui. C'est commun à tous les discours populistes, ils sont invariablement balancés à toutes les époques, ça marche à tous les coups. Il y a toujours une crise et des peurs dans une société imparfaite mais libre.

Quand il évoquait en 1974 « un grand courant national et populaire », il a toujours affiché le « national » (avec le Front national, le Rassemblement national dont l'appellation n'est pas nouvelle et ne date pas de 2018 mais bien de 1986 à l'époque où il avait fait élire 36 députés FN), rarement le « populaire » alors que les deux grands courants de droite et du gauche se sont targués d'être populaires, à droite avec l'UMP (Union pour un mouvement populaire) et à gauche, avec la Nupes (Nouvelle union populaire écologiste et socialiste) ou la nouvelle farce populaire (NFP). Il faut bien reconnaître que depuis au moins une dizaine d'années, le mouvement le plus populaire dans le sens le plus proche des petites gens, c'est bien le FN/RN et c'est pour cela qu'il serait au seuil du pouvoir.

 

 
 


Parti à incarnation très personnelle, il y avait les limites de l'âge. La dynastie Le Pen est là pour y suppléer : la fille Marine Le Pen, la petit-fille Marion Maréchal (élue députée à 22 ans), et maintenant, le gendre (ex-gendre) Jordan Bardella venu soudain dans la vie politique en dirigeant la liste RN aux élections européennes de 2019 à seulement 23 ans. Jean-Marie Le Pen n'aurait pas été surpris, lui qui a été élu député à 27 ans. Sa fille a tenté de délepéniser le parti en excluant son père en 2015 après une énième provocation à caractère ressenti antisémite. Depuis 2022, le parti est présidé par Jordan Bardella qui a poursuivi l'œuvre d'aseptisation de ce parti afin de lever les dernières plafonds de verre dans l'esprit des électeurs.

L'élection de 88 députés RN en juin 2022 a montré que ce parti avait la capacité d'arriver au pouvoir avec une majorité à l'Assemblée Nationale. Jamais, à ces 96 ans du patriarche revenu en grâce, son parti d'extrême droite n'a été aussi proche du pouvoir. Jordan Bardella serait-il la Giorgia Meloni française ? En tout cas, depuis quelque temps, Jean-Marie Le Pen n'a plus la capacité de casser cette dynamique électorale par un jeu de mots vaseux et autres provocations dont je présente les principales et qui ont systématiquement soulevé des polémiques et parfois des décisions de justice. J'en avais déjà relevé quelques-unes il y a déjà dix ans.

 

 
 


Le 14 mars 1984, au meeting du FN à la Mutualité de Paris, il a harangué ses militants en provoquant la haine et même, de véritables appels au meurtre. Quand il a dit : « Badinter ? », la salle a répondu : « Juif ! ». Le Pen : « Lustiger ? », la salle : « À morts les Juifs ! ». Le Pen : « Madame Veil ? », la salle : « Au four crématoire ! ».

Le 26 octobre 1985 à la fête bleu blanc rouge au Bourget : « Je dédie votre accueil à Jean-François Kahn, à Jean Daniel, à Ivan Levaï, à Elkabbach, à tous les menteurs de la presse de ce pays. Ces gens-là sont la honte de leur profession. Monsieur Lustiger me pardonnera ce moment de colère, puisque même Jésus le connut lorsqu’il chassa les marchands du temple, ce que nous allons faire pour notre pays. ».

Le 6 mai 1987 dans "L'Heure de Vérité" sur Antenne 2 : « Les sidaïques, en respirant du virus par tous les pores, mettent en cause l’équilibre de la Nation. (…) En revanche, je crois que le "sidaïque", c'est un néologisme, il n'est pas très beau, mais je n'en connais pas d'autres, celui-là, il faut bien le dire, est contagieux par sa transpiration, ses larmes, sa salive, son contact. C'est une espèce de lépreux, si vous voulez. » (on rapprochera l'expression d'hébraïque).


Le 2 juin 1987 dans l'hémicycle de l'Assemblée Nationale : « Madame Barzach ramasse les plumes et se les plante où je pense. » (grand "respect" pour les femmes, en particulier pour la jeune ministre).

Le 13 septembre 1987 au "Grand Jury" de RTL et "Le Monde" : « Je me pose un certain nombre de questions. Je ne dis pas que les chambres à gaz n’ont pas existé. Je n'ai pas étudié spécialement la question, mais je crois que c'est un point de détail de l'histoire de la Deuxième Guerre mondiale. ».

Le 18 septembre 1987 sur l'explosion de la bombe nucléaire sur Hiroshima : « Un détail de l'histoire aérienne de la guerre. ».

Le 20 janvier 1988 dans le Journal du FN du Var, calomniant une victime innocente de la police : « Des Français comme les Oussekine, on peut s’en passer (…). On se souvient de la mort du petit casseur gauchiste nommé Malik Oussekine. Malgré son état de santé lamentable, il n’avait pas hésité à attaquer en pleine nuit les forces de police chargées du maintien de l’ordre. ».


Le 1er juin 1988 dans un meeting à Marseille : « Voter socialiste, cela signifie que d’ici dix à quinze ans, la mairie de Marseille sera dirigée par un Maghrébin. » (remarquons que Jean-Claude Gaudin n'était pas maghrébin).

Le 2 septembre 1988 à l'université d'été du FN au Cap d'Agde : « Monsieur Durafour et Dumoulin, obscur ministre de l'ouverture dans laquelle il a d'ailleurs immédiatement disparu, a déclaré : "Nous devons nous allier aux élections municipales, y compris avec le Parti communiste, car le Parti communiste, lui, perd des voix tandis que l'extrême droite ne cesse d'en gagner"… M. Durafour-crématoire, merci de cet aveu ! ».

Le ministre Lionel Stoléru fut interpellé par Jean-Marie Le Pen le 5 décembre 1989 au cours d’un duel télévisé sur la Cinq animé par Jean-Claude Bourret. Le leader du FN lui a demandé s’il avait la « double nationalité ». Lionel Stoléru lui a alors répondu : « Laquelle ? » et Jean-Marie Le Pen de répondre : « Je ne sais pas, je vous demande. ». Stoléru : « Non, je suis Français. » en précisant : « Être Juif, ce n’est pas une nationalité. Jusqu’à présent, c’est une religion. ». Le Pen : « Parfait, sinon j’aurais été un peu gêné. ». Peu avant, Lionel Stoléru lui avait expliqué que pour réprimer le travail clandestin, il avait organisé des descentes de police : « Sur ce problème du travail au noir, j’ai moi-même organisé des descentes dans le Sentier, des opérations coup de poing. », et Jean-Marie Le Pen lui a répondu : « Vraiment ? Vous pourriez faire une rafle, c’est le cas de le dire ! ».

En janvier 1990 dans le mensuel "Identité" : « L’établissement, qu’il s’agit de renverser par une révolution de salut public, désigne la classe politique qui impose aujourd’hui son pouvoir. Les droits de l’Homme sont les tables de la Loi. Il a ses évangiles selon saint Freud et saint Marx. Il a son clergé, ses architectes et ses maçons. Son lieu de culte, le Panthéon républicain, ses rites, il prêche la morale. Le Front national a pour devoir d’assurer le retour des vraies élites, après avoir dépouillé la société française des corps parasitaires qui l’enserrent et l’asphyxient. (…) Ainsi advient-il, dans l’histoire des sociétés, des élites décadentes, des oligarchies coupées du peuple qu’elles avaient pour mission de servir et qu’elles ont trahi au bénéfice de leurs privilèges. (…) Nous nous proposons de dépouiller la société française des corps parasitaires qui l’enserrent et l’asphyxient. Il est logique que, de ce fait, les mass media du système veuillent étouffer le cri du peuple que nous exprimons contre l’établissement. La claque est au service de qui la paie. ».

Le 2 décembre 1990 dans une conférence de presse pour lancer une nouvelle campagne d’affichage du FN (qui fut interdite par la justice le 22 janvier 1991) : « D’ardentes campagnes basées sur le sigle SIDA vont être menées partout. Ce sigle veut dire : S comme socialistes, gaspilleurs et destructeurs ; I comme immigration tiers-mondiste ; D comme délinquance, désordre, décadence ; A comme affaires, car les scandales politico-financiers sont devenus le pain quotidien honteux du système. ».


Le 26 février 1995, il a commenté la mort du lycéen Ali Ibrahim, assassiné dans le dos quatre jours auparavant par des colleurs d’affiches du FN, ainsi : « Il s’agit d’un drame de l’autodéfense (…). Je le considère comme une victime ainsi que ceux qui se trouvent impliqués dans cette affaire, victimes de l’atmosphère qui règne dans ces banlieues (…). Ce genre d’événement arrive toujours trois ou quatre jours avant que je ne sois appelé à m’exprimer sur un grand média. ». Le 18 avril 1995, il a récidivé sur la mort d’Imed Bouhoud, assassiné par des skinheads au Havre : « Un simple dérapage ! ».

Le 21 juin 1995, il s’en est pris à Patrick Bruel alors que le FN venait de gagner les municipales à Toulon : « Toulon devra se passer des vocalises du chanteur Benguigui, qui a décidé de ne pas honorer ses contrats. Je ne crois pas qu’on en mourra à Toulon (…). Ces jappements de chiots mal lavés n’empêcheront pas le FN de continuer son action politique en faveur des Françaises et des Français, traités comme des parias dans leur propre pays. ».

Le 20 avril 1997, il a voulu montrer sa (supposée) bonne foi en jouant faussement le candide : « Que faut-il que je fasse pour ne pas être raciste ? Épouser une Noire ? Avec le sida, si possible ? » (cité dans "Le Monde").


Le 5 décembre 1997 à une conférence de presse à Munich aux côtés de l’ancien Waffen SS Franz Schonhüber : « Dans un livre de mille pages sur la Seconde Guerre mondiale, les camps de concentration occupent deux pages et les chambres à gaz dix à quinze lignes, ce qui s’appelle un détail. ».

Le 12 janvier 2005 dans l'hebdomadaire "Rivarol" : « L'Occupation allemande n'a pas été particulièrement inhumaine, même s'il y eut des bavures, inévitables dans un pays de 550 000 km2. ». Le 13 janvier 2005 sur RTL : « C’est vrai (…). Si on compare l’Occupation allemande de la France avec l’occupation d’un certain nombre d’autres pays européens, proportionnellement, c’est en France que celle-ci a été la moins douloureuse. ».

Le 20 février 2007, au congrès de la Fédération nationale de la chasse (qui s'est présentée aux élections européennes de 2024 avec la liste menée par Jean Lassalle) : « Dans le Marais de Paris, on peut chasser le chapon sans date d’ouverture ou de fermeture, mais dans le marais de Picardie, on ne peut chasser le canard en février. ».

Le 24 avril 2008 dans le mensuel "Bretons" n°32 : « Je ne me sens pas obligé d’adhérer à cette vision-là. Je constate qu’à Auschwitz, il y avait l’usine IG Farben, qu’il y avait 80 000 ouvriers qui y travaillaient. À ma connaissance, ceux-là n’ont pas été gazés en tout cas. Ni brûlés. ».

Le 21 février 2012 sur iTélé à propos de ses fréquentations douteuses : « Oui, je ne suis pas chargé de traquer les criminels de guerre désignés par l’opinion publique, moi. Quand je vais quelque part, j’essaie de m’informer et j’essaie de m’informer le plus directement possible. Et en effet, rencontrer Karadzic, c’était une manière de se renseigner. ».


Le 22 septembre 2012 à l'université d'été du FN à La Baule : « Les "Roms" volent naturellement, comme les oiseaux. ». Le 4 juillet 2013 dans un meeting à Nice : « Vous avez quelques soucis, paraît-il, avec quelques centaines de "Roms" qui ont dans la ville une présence urticante et disons …odorante. ».

Le 20 mai 2014 au cours d'un meeting à Marseille, à propos de la démographie en Afrique : « Monseigneur Ebola peut régler ça en trois mois. ».

Le 6 juin 2014 dans sa vidéo hebdomadaire au FN, évoquant Patrick Bruel : « On fera une fournée la prochaine fois ! ».

Le 2 avril 2015 sur BFMTV, interrogé par Jean-Jacques Bourdin : « Ce que j'ai dit correspondait à ma pensée, que les chambres à gaz étaient un détail de la guerre, à moins d'admettre que c'est la guerre qui était un détail des chambres à gaz. ». Bourdin : « Vous maintenez ces propos ? ». Le Pen : « Oui absolument, je les maintiens, parce que je crois que c'est la vérité et que ça ne devrait choquer personne. ».

Le 9 avril 2015 à l'AFP, confirmant ses propos dans l'hebdomadaire "Rivarol" : « J'ai toujours œuvré à la réconciliation des Français (…). Comme je l'ai déjà dit, je n'ai jamais considéré le maréchal Pétain comme un traître. L'on a été très sévère avec lui à la Libération. (…) Et je n'ai jamais considéré comme de mauvais Français ou des gens infréquentables ceux qui ont conservé de l'estime pour le maréchal. Ils ont leur place au FN comme l'ont les défenseurs de l'Algérie française, mais aussi les gaullistes, les anciens communistes et tous les patriotes qui ont la France à cœur. ».

Le 8 avril 2015 dans l'hebdomadaire "Rivarol", il soutenait qu'il fallait « impérativement nous entendre avec la Russie pour sauver l'Europe boréale et le monde blanc ». C'est cette interview qui a valu l'exclusion de Jean-Marie Le Pen du Front national le 20 août 2015 (après une suspension le 4 mai 2015).


Même si ces dérapages verbaux ne sont pas exhaustifs, ils restent symptomatiques du FN et de Jean-Marie Le Pen. Il était important de rappeler d'où vient le RN...


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Sylvain Rakotoarison (16 juin 2024)
http://www.rakotoarison.eu

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_yartiLePen2022062003






https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20240620-jean-marie-le-pen.html

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http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2024/06/20/article-sr-20240620-jean-marie-le-pen.html



 

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