Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

  • Elon Musk inspire au futur antérieur

    « Washington est devenue la cour de Néron : un empereur incendiaire, des courtisans soumis et un bouffon sous kétamine chargé de l’épuration de la fonction publique. » (Claude Malhuret, le 4 mars 2025 au Sénat français).



     

     
     


    Il y a soixante-dix ans, le 7 avril 1955, est paru dans son édition britannique le roman d'Ian Fleming, "Moonraker", le troisième roman d'espionnage mettant en scène James Bond, le fameux agent 007. Son édition française est parue en 1958 d'abord sous le titre (étrange) "Entourloupe dans l'azimut" avant de reprendre le titre original en 2002 en raison du succès de son adaptation cinématographique éponyme réalisée par Lewis Gilbert et sortie le 28 juin 1979. Le film met en scène notamment Roger Moore pour le rôle de James Bond et le succulent Michael Lonsdale pour celui de Hugo Drax.

    Un internaute proposait sur Twitter le mois dernier une analogie amusante. Hugo Drax est la figure du méchant qui veut être le maître du monde, il est à la fois fort riche et à la tête d'une grande puissance technologique, un savant fou et mégalomaniaque (qui n'avait donc pas la caractéristique de faire apprécier les scientifiques par le grand public). C'est l'époque des années 1950 qui voulait cela et on le retrouvait dans beaucoup de fictions, notamment des bandes dessinées pour la jeunesse, dont le meilleur pastiche reste le fameux Zorglub dans "Spirou et Fantasio", personnage créé par Franquin et Greg. Certes, le mythe du savant fou est bien plus ancien, on le retrouve dans de nombreuses fictions depuis le XIXe siècle (en particulier chez Jules Verne), mais les années 1950 l'ont utilisé jusqu'à plus soif, en ont fait un sujet cliché classique, ce qu'on appellerait un poncif, voire, un souverain poncif (pour un maître du monde !).

    Incarné par Michael Lonsdale, Hugo Drax était considéré par le twitternaute en question comme « un méchant qui est à la fois un industriel ultra-riche et un constructeur de fusées cherchant à semer le chaos parce qu'il est en réalité un nazi secret ». Et de commenter l'idée de ce scénario avec un brin d'humour britannique : « Les romans originaux de James Bond écrits par Ian Fleming ont mal vieilli. (…) Quelle idée absurde ! ».

     
     


    C'est vrai que ça me barbe, en général, les vieux films d'espionnage qui ont repris le cadre général de la guerre froide. Comment c'est ennuyeux, les gentils espions américains et les méchants espions soviétiques ! Mais il n'est pas inintéressant de nous pencher ainsi sur "Moonraker" car les États-Unis d'aujourd'hui tentent, dans un élan désespéré d'orgueil, de retourner en arrière dans le passé plus ou moins lointain depuis la réélection de Donald Trump. Certains internautes ont réagi à cette comparaison, certains lâchant : « Qui aurait cru que Moonraker soit un film prémonitoire !! ». Une autre : « La réalité dépasse la fiction. ».

     
     


    Toujours avec humour, un quatrième internaute constatait que ce n'était pas tout à fait analogue en raison du chapeau. Hugo Drax porte en effet un beau chapeau de chasse, ce qui n'est pas le cas de... de qui au fait ?

    Un autre internaute a répondu en effet en y glissant une photographie de l'industriel milliardaire pris en comparaison : Elon Musk ne porte pas de chapeau mais une casquette, la fameuse casquette Make America Great Again (MAGA), qu'il a arboré dans le bureau ovale de la Maison-Blanche, en compagnie d'un de ses nombreux enfants (celui qui met ses doigts dans le nez), et d'un vieil homme fâché et fatigué assis derrière une table (passablement agacé).
     

     
     


    On peut aussi le voir aux côtés du Président argentin Javier Milei dans leur objectif commun de faire des coupes tranchantes dans les dépenses publiques (bonjour les dizaines de milliers de fonctionnaires qui vont devenir chômeurs), et autant le faire dans la délicatesse avec une belle tronçonneuse (est-elle électrique ?).
     

     
     


    Ou encore, sans casquette mais avec un étrange chapeau en forme de fromage (ne me demandez pas pourquoi) !

    Étonnante comparaison mais pas forcément si inappropriée que ça. Elon Musk est aujourd'hui l'homme le plus riche du monde (au 11 février 2025, sa fortune s'élèverait à 380 milliards de dollars, selon "Forbes"), même s'il a perdu depuis l'arrivée au pouvoir de son ami Donald Trump déjà plus de 150 milliards de dollars (ce n'est rien !). Il a une vision très planétaire voire universelle de sa vocation, de sa mission ici-bas, il est, dans sa tête, une sorte de maître du monde à pensée messianique.

    Il est le dirigeant du constructeur Tesla de véhicules électriques (même si son marché en Europe est en train de s'écrouler). Il est le propriétaire de SpaceX qui devient aussi indispensable voire plus indispensable que la NASA, et souhaite que l'homme aille sur Mars, un objectif aussi fantaisiste que l'homme sur la Lune, ce qui, justement, est un défi à la hauteur du milliardaire. Il est aussi à la tête de Starlink qui permet de se connecter à ses 6 300 satellites dans le monde entier (bientôt 12 000 satellites et en prévision, 42 000 satellites !) pour bénéficier d'une liaison Internet partout sur Terre (Volodymyr Zelensky utilise ce réseau pour la conduite de ses drones). Enfin, en 2022, il a racheté le site Twitter de réparties politico-littéraires, qu'il a rebaptisé X (mais que je continuerai d'appeler Twitter parce que je suis un vieux schnoque !).

     
     


    Son acquisition de Twitter a fait partie d'un plan très important pour influer sur les démocraties dite "occidentales" ; d'abord, bien sûr, sur les États-Unis en soutenant massivement la candidature de Donald Trump en 2024, mais ensuite en Europe où il soutient systématiquement tous les mouvements politiques d'extrême droite, populistes et anti-européens, en particulier l'AfD en Allemagne, l'UKIP au Royaume-Uni (Nigel Farage) et le RN en France (Marine Le Pen). Passant un temps fou sur Twitter, ce qui semble étonnant pour un dirigeant d'entreprises, Elon Musk en profite pour distiller de nombreux propos ouvertement complotistes et des fake-news.
     

     
     


    Depuis janvier 2025, Elon Musk est au pouvoir, il est le responsable du Département de l'efficacité gouvernementale (DOGE), autrement dit, il est chargé de faire des coupes franches dans la dépense publique. Son idéologie est totalement anti-État en ce sens qu'il ne croit qu'au libre exercice d'entreprendre et considère les États comme des empêcheurs d'entreprendre par leurs normes, leurs réglementations et leurs fiscalités.

    Au-delà de l'objectif d'aller sur Mars, Elon Musk a investi dans des projets basés sur l'intelligence artificielle et croit à l'idée d'un homme transhumaniste capable de faire progresser la société. En ce sens, au-delà des objectifs financiers et industriels, Elon Musk nourrit des ambitions idéologiques et messianiques d'ordre mégalomaniaque.

    Très présent aux côtés de Donald Trump, s'invitant à la Maison-Blanche, dans les conférences de presse, dans les meetings de Donald Trump, Elon Musk a pris ses aises avec la démocratie américaine et les institutions américaines depuis trois mois. Né à Pretoria, en Afrique du Sud, il ne pourrait pas se présenter à une élection présidentielle américaine (le Président des États-Unis doit être né sur territoire américain), mais il a déjà pris une très grande influence.
     

     
     


    Enfin, une influence jusqu'au 2 avril 2025, car l'annonce par Donald Trump de taxes douanières généralisées qui provoque actuellement un début de krach boursier et probablement une récession à court et moyen termes a été incompréhensible pour Elon Musk, partisan de l'ouverture des échanges économiques dans la mesure où un produit industriel est désormais le résultat de la globalisation économique. Pour seule réponse, outre son silence récent, Elon Musk s'est contenté de diffuser sur Twitter, le 6 avril 2025, une déclaration de l'économiste du libéralisme, Milton Friedman, disparu il y a un peu moins d'une vingtaine d'années, qui expliquait qu'un simple crayon de papier était le résultat d'un processus industriel complexe faisant intervenir plusieurs pays et que seule l'ouverture des frontières commerciales permettait à la fois la prospérité économique et le progrès technologique, mais aussi le renforcement de la paix dans la mesure où les économies nationales deviennent imbriquées (c'était l'objectif du Plan Schuman et du Traité de Rome).

    Le divorce déjà annoncé dès le début est donc envisagé prochainement : les projets messianiques d'Elon Musk ne se satisferaient pas de l'enterrement en première classe de l'économie américaine en raison de la marotte idéologique de l'homme aux cheveux de feu. Le sourire du clown vire au jaune. L'époque est passionnante à observer, mais beaucoup moins à vivre.



    Aussi sur le blog.

    Sylvain Rakotoarison (06 avril 2025)
    http://www.rakotoarison.eu

    Pour aller plus loin :
    Elon Musk.
    Moonraker.
    Gene Hackman.
    Pierre Dac.
    Pierre Arditi.
    Pierre Palmade.
    Carla Bruni.
    Valeria Bruni Tedeschi.
    Teddy Vrignault.
    Pierre Richard.
    François Truffaut.
    Roger Hanin.
    Daniel Prévost.
    Michel Blanc.
    Brigitte Bardot.
    Marcello Mastroianni.
    Jean Piat.
    Sophia Loren.
    Lauren Bacall.
    Micheline Presle.
    Sarah Bernhardt.
    Jacques Tati.
    Sandrine Bonnaire.
    Shailene Woodley.
    Gérard Jugnot.
    Marlène Jobert.
    Alfred Hitchcock.
    Les jeunes stars ont-elles le droit de vieillir ?
    Charlie Chaplin.


     

     
     






    https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20250407-musk.html

    http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2025/04/05/article-sr-20250407-musk.html


    .